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qu’ils auront fur & au-delà des coupures des retranchements
fur les pointes de la demi-lune &
des deux contre gardes, garniront les fouterreins
de la demi-lune & du réduit de toutes les munitions
de guerre & de bouche néceffaires , parce que
l’on peut bien y être deux ou trois jours'fans pourvoir
communiquer à l’ouvrage , à caufe de la fréquente
rupture des ponts , fi ce font des foliés
pleins d’eau.
Il faudra aufli apprêter des batteries fur les bâfrions
de la place, dans les endroits qui peuvent défendre
la demi-lune 6c les longs côtés de l’ouvrage
à corne , 6c fur les extrémités de la courtine & des
batteries biaifes fur les endroits éloignés du rempart
qui auront vue fur ies attaques , notamment
dur les batteries ennemies. Il ne faudra ouvrir les
•embrafures des nôtres, que lorfque l’ennemi fe
fera arrangé, 6c qu’il aura ouvert les fiennes.
On ne doit pas'douter qu’il ne commence par
battre vivement la demi-lune par la pointe , 6c les
deux contre-gardes par les faces , 6c qu’il n’en
•mette en peu de temps les défenfes en défordre ;
mais fi les revêtements de ces pièces ne font élevés
qu’à mi-hauteur, avec une berme de bonne
largeur , il ne fera pas fitôt brèche, parce que la
plus grande partie des ruines du haut tombant fur
la berme . feront arrêtés , 6c augmenteront la ré-
jfiftance du parapet, dont le bas fe trouvera mieux
garni par la chute d£ ces ruines. Cependant l’en-
aiemi, qui vraifemblablement ne s’en fera pas tenu
il l’établiffement Ample de ces batteries , quoique
d’une manoeuvre dure 8c pénible, qui lui doit occuper
beaucoup de monde, aura ponfl'é en avant
ce qu’il aura pu à la demi-fape , 8c qu’il aura perfectionné
peu à peu ; d’où il arrivera que fi fes batteries
font bien fervies , en moins de deux fois
.vingt-quatre heures , il deviendra maître du feu ,
ce qui fe perfectionnera les jours fuivants. Pour
lo rs , il lui fera facile de fe porter fur le bord du
foffé de ces pièces , d’y prendre établiffement, 8c
de travailler à faire les defcentes en nombre fuffi-
fan t, ce qui fera bientôt fuivi d’un comblement 6c
du paffage des foffés, au moyen de quoi il fe portera
au pied des brèches, tefq'uellès vraifemblablement
feront fort avancées. Au furplus, à mefure
que le feu des àffiégeants prendra accroiffemenr -,
celui des affiégés s’afibiblira, de manière qu’il n’y
aura pas moyen d’empêcher le progrès de l’ennemi
à force ouverte c ’eft pourquoi il faudra
avoir recours, aux fouterreins , c’eft-à-dire , aux
mines & aux traverfés, en un mot à la défenfe des
brèches, de la manière qu’elle a été ci-devant expliquée
, n’en connoiffant point de meilleure. S’il y a
une galerie majeure qui règne le long de la bafe
de ces pièces, en la gardant bien, on aura fou-
vent moyen de jouer de fort mauvais tours à l’ennemi
par l ’effet des mines.
S’i l’ennemi, après avoir bien ouvert les brèches,
mis toutes les defcentes 8c les paffages du foffé en
état, attaque les trois pièces en même temps, fou-
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tenu qu’il fera de tout fon canon bien dilpolé Sc
de fa moufqueterie, il eft fans difficulté qu’il en
gagnera le haut avec a fiez de facilité ; mais fi on fe
lert bien des mines 6c des fougaffes, & que Fafîiégé
foit aflez heureux pour que l’ennemi ne les ait
point éventées , elles pourront l’incommoder cch-
«derablement ; le furplus de cette défenfe doit fe
conduire comme celle qui a été propofée pour la
première demi-lune de l’ouvrage à corne.
Mais fuppofons que l’ennemi fe foit logé fur
l’angle flanqué de la demi-lune 8c fur les deux
contre-gardes d’à côté’ , dès la fécondé attaque ,
comme je n’en doute pas , files batteries de l’ouvrage
à corne font bien fervies, il doit en établir
d’autres fur les angles flanqués de ces trois pièces,
oc après qu’il fera introduit dans les gorges 8c qu’il
s’y fera établi, il travaillera aux defcentes du foffé
de la demi-lune, pour delà, en perçant toute l’é-
paiffeur de fon rempart, fe porter furie bord du
foffé du réduit ; tandis qu’à la faveur des fapes qui
feront leur chemin par le haut, il fe plongera vers
les gorges, tant de la demi-lune que des deux
contre-gardes, fi fes batteries font bien leur devoir.
A tout cela ,‘il n’y a point d’autre défenfe à faire
que de difputër le terrein de travèrfe en rraverfe,
d’employer l’effet des mines fuivies de quelques
petites forties faites à propos, 8c de ne l’abandonner
qu’à la force. L’ufage de ces trois batteries fera
; pour celle de la pointe de la demi-lune, de rompre
8ç ouvrir celle du réduit ; 8c pour celles des .contre-
gardes , d’ouvrir' 8c faire brèche à la demi-lune,
pour achever de s’en rendre maître , 8c pour fe
procurer des vues fur le milieu des faces du réduit
; ce qui ne fe pourra qu’en ouvrant 8c appla-
niffant les brèches du milieu des faces de cette
demi-lune, 8c en abaiffanrfort bas fon terre-plein,
afin de donner de la découverte à fes batteries.
Cette manoeuvre employera bien du temps , mais
l’effet en eft fûr; car dès que les brèches de la
demi-lune donneront affez de jour aux batteries de
la pointe des contre-gardes , elles pourront battre
le réduit parle milieu de fes faces 8c y faire brèche ;
de forte que ce réduit, petit de foi-même, fe trouvant
ouvert en trois endroits, 8c fa communication
étant peut-être coupée, il n’y aura plus d’autre
parti à prendre que de charger fes mines, retirer
peu à peu le monde 8c les effets qui feront dedans ,
8c le faire fauter , afin de le rendre moins utile 8c
le plus dommageable à l’ennemi qu’il fera poffible.
Défenfe d' 'un ouvrage à corne dirigé fur la capitale
d'un bajlion.
L’ouvrage à corne fait en queue d’hironde, $c
placé fur la capitale prolongée d’un baflion , nsa
pas le même avantage pour la défenfe du dedans.,
attendu que ce dernier préfente de la demi-lune à
l’ennemi, an lieu que l’ouvrage à corne lui pré-
fente le baflion même ,,ce qui femble le conduire
par uq chemin bien plus court au corps de la
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.la« à l'ouverture duquel l’ennemi peut travailler
dès au’il aura mis fes batteries fnr la courtine de
l’ouvrage à corne. Cependant on peut dire, en ta- ,
venr de cette fituadon, qu’elle ne donne d accès à l’ennemi que par un feul baflion , auquel toute
la garnifon fe réunilTant, On aura plus de facilite
& davantage à fe défendre, parce qu il ne fe fera
„oint de diverfion , & qu’elle neceffite 1. ennemi à
la prife des deux demi-lunes collatérales 8t. de
leurs réduits, fans quoi l’affiègeant n’auro.t aucun
accès à la brèche qui put être foutenable , ce qm
répare bien fou unique défaut. C ’eft pourquoi, foit
due ces ouvrages fe trouvent. difpofés fuivant 1 un
ou l’autre de ces defleins , ou de quelque autre ap- '
prochant, la défenfe du dedans de ces pièces bien
entendue occafionnera de longues St penlleules
difeuffions à l’ennemi, & il n’en fera pas moins
obligé de s’étendre dans la campagne, St de marcher
aux grands angles du chemin couvert de droite
8c de gauche, où il pourra bien effuyer quelques
forties, s’il n’en prévient les accidents en étendant ,
les places d’armes qui doivent fouteniï les loge- 3
ments , ou pour mieux dire , en élargiffant toutes
feS attaques; les angles feront une défenfe telle
qu’il a été dit ci-devant,
Défenfe d'un ouvrage a çorne place au-devant, dune
courtine
Après que l’ennemi fe fera rendu maître del’ou-
vra<fe\ & qu’il fe fera bien étendu le long de fon
chemin couvert, il établira fes batteries fur les parapets
de fes angles , contre les flancs oppofes ,
d’une part, 8c pour faire brèche de 1 autre ; ce qui
doit ici s’entendre de la fuite’ des attaques de 1 ouvrage
à corne, fitué fur la courtine. Le premier
effet de ces batteries fera de battre les flancs op-
pofés ; le fécond . de rompre les ponts de communication
du réduit ; le troifième, de déchirer la
tenaille. L’artillerie des flancs ne doit pas durer
bien du temps ; mais le feu du canon , des bombes
& les pierres de la place pourront interrompre fou-
vent les batteries des ennemis., & donner quelques
bons intervalles à celles de la place.
' Il n*y aura que les bateaux à cinquenelle , que
nous appelions paquebot, pour leur donner Un
nom diftingué , qui pourront s’échapper ; car les
ennemis auront bien de la peine a les empêcher
d’aller & venir, tant que le réduit fubfiffera ; & s’il
vient à être pris , il ne fera plus queftion de^ communication.
Jufques-là on pourra fubftituer cl autres
paquebots pour le dedans de la place , pour remplacer
ceux qui feront coulés à fond.
Quand toute la gorge de l’ouvrage à corne de la
demi-lune 8c celle de fon réduit feront^occupés par
l’ennemi, il y trouvera place à faire de* bons logements
pour la moufqueterie ; il ne lui fera pas
même impoflible , après que les affiégés feront
chaffés de ces ouvrages , de faire des defcentes de
foffé par les extrémités • des cornes , tandis qu’ il
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en feroit d’autres par le talut des places d’armes
du chemin couvert ; ee font même les lieux les
plus convenables & où l’on puiffe les mieux placer;
Au débouchement des defcentes, on ne fauroit
oppofer que des batteries biaifes préparées d’avance
dans la courrine, qui incommoderont d’autant
plus les: commencements dé ces paflages ,
. qu’on ne pourra que très difficilement les démonter.
A mefure que les ponts 8tles paflages des foffés
avanceront, ils fe découvriront aux flancs de la
place , qui les incommoderont fort par les batteries
oppofées ; mais l’ennemi ayant occupe touts les
! dehors qui pourroient lui empêcher les accès de la
'■ place , fe trouvant bien établi & maître des bords
du foffé, s’attachera à fon paffage , St fera bientôt
parvenu au pied des brèches.
Ce que l'affiégé peur lui oppofer en ce cas, con-
ftfte dans la canon de fes flancs ; tant qu’il pourra
fubfifter, dans celui des batteries biaifes ; dans la
moufqueterie de la courtine & des tenailles, dans
les pierres , & quelques autres moyens dont nous
avons déjà parlé, fùr-tout dans de fréquentes forT
lies fur le paffage à la faveur des tenailles.
Au furplus , l’ouvrage à corne placé fur la cour-
tine conduit l’ennemi a deux baftions, ce qui fait
l’effet de deux attaques .liées enfemble, qui font
beaucoup plus dangereufes pour la place que celle
de l’ouvrage à corne fur un baflion qm l’oblige à
prendre plus de pièces, & ne le conduit qu’à un
feul baflion. Parlons encore de cet ouvrage fitué au
devant d’un baflion. '
Comme ces.attaques fe réunifient toutes a celles
du baflion , l’ennemi fera obligé ,. après avoir occupé
les gorges entières de l'ouvrage à corné , Se
de fes deux retranchements, d’y établir des batteries
j manoeuvre longue St difficile, biais ces batteries
étant une fois bien établies, battent rudement
les deux flancs oppofés qui défendent le baf-
tion , & le baflion même, le foffé entre deux, par
la pointe, & par fes deux faces, ce qui y produira
une grande brèche , vis-à-vis de laquelle on
pourra faire quatre defcentes, St autant de paflages
de foffé, fans que l’affiégé puiffé y remédier qu en.
y tirant quantité de canons, de bombes, de pierres
St dé grenades, le tout accompagné St foutenu
d'une bonne moufqueterie bien dirigée.
Défenfe dès baftions du. corps de la place , fs de leurs
retranchements.
le s ennemis, félon les apparences , n’ayant
plus perfonne à craindre au dehors de la place,
lorfque l’ouvrage à corne St fa demi-lune feront
entièrement abandonnes par tes affiégés , & que
les afliégeans y auront établis leur logement, ils ne
penferont plus qu’à-combler le grand foffé, s il eft
plein d’eau, St s’il eft fec , ils feront une galerie
fouterreine ou couverte, ou peut-être ils fe contenteront
de s’épauler contre le flanc oppofe pour
paffer le foffé, St c’eft ce paffage qu’il faut retarda;
autant qu’il fera poffible.
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