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comme une marque d’une prochaine révolte,
que réellement ces provinces machinoienr.
Lorfque les éiefleurs de Brandbourg 8c de
Saxe s’exemptèrent, fous de mauvais prétextes , de
fe trouver à la diète de Ratisbonne, l empereur
Ferdinand II foupçonna dès lors que ces éleètenrs
étoient d’intelligence avec Guftave Aldoplie, roi
de Suède. , £
En i < 5 3 ou 55 , Marie , reine d angleterre, nt
appeller le duc de Soffôlck pour le remettre a.
la tête de l’armée contre les rébelles. Seffolck,
qui étoit un des conjurés , fans que cela fût encore
connu , s’imagina qu’on le faifoit appeller
pour le punir, & prit la fuite.; ce qui donna à
connoître à la reine que ce fujet qu’elle crbyoït
fidelle, favorifoit le parti des révoltés.
Une autre marque prochaine de révolte, eft
lorfque les payfans fe retirent tout d’un coup de
vos places & de votre armée, où ils alloient vendre
des v ivres, & faire quel qu’autre commeree ;
puifque rien ne fauroit les y obliger , qu’une ré-
folution concertée de s'affembler un certain jour
déterminé pour prendre les armes ; ainfi qu il
arriva en Catalogne fur la fin de lannee 17 13 •
C ’eft encore un indice d’une révolte prochaine,
lorfque les payfans retirent leurs effets, leurs
troupeaux 8c leurs famille du pays voifin de celui
où font vos troupes.
A. cette marque & à celle de ne pas apporter des
vivres au camp,,comme les payfans avoienr coutume
de faire, Cortez découvrit la confpiration
que les Indiens de Cholula tramoient contre lui.
Si l’on trouve un amas confidérable. de munitions
d'armes cachées dans une maifon , une caverne
,,ou quelqu’autre endroit d’un pays fufpect,
c’eft. une preuve évidente d’une révolte qu on
médite , puifque tout cet amas de munition 8c
d’armes, n’eft que pour les diftribuer en fon
temps aux rebelles.
Ce qui contribua beaucoup fous le comultat de
Titus Quintius Capitolinio, & d’Agrippa Mau-
nius, à découvrir a Rome la conjuration de Spa-
reus Mélius, fut qu’on trouva dans fa maifon
une quantité d’armes , 8c le grand nombre de; celles
que le prêteur Caius Sulpitius , acheva de découvrir
la confpiration de Catilina. ^
Les avis que j’ai donnes jufqu ic i, peuvent faire
foupçonner une révolte ; mais ils ne fuffifent pas
pour en convaincre, & .ne fauroient fervir à
découvrir en particulier quels fujets on quels peuples
fe difpofent à l’exécuter : c’eft de quoi il faut
traiter à préfent.^ . , •
J’ai dit précédemment qu une quantité d armes
& de munitions qu’on trouve cachées, eft une
preuve évidente de révolte ; cela fe doit entendre,
d’une quantité\ plus grande que- celle que dans un
pays ou les armes font défendues, les habitants
pourroient cacher pour la chaffe, ou pour leurs
vols. J’ai déjà prouvé qu’il y a du rifque a faire paraître
d’injuftes foupçons fur la fidélité des fujets ,
IV IL V
ainfi , pour éviter que des précautions, qui font
fouvent utiles, ne deviennent dangereufes; lorfque
vous: ferez reconnoître s’il y a des armes 8c
des munitions dans quelques maifons fufpeéles,
prenez le prétexte de faire chercher des déferteurs,
des criminels ou des conrebandiers, donnant à
çntendré que vous avez été averti que les domef-
tiques. de ces maifons les cachent, afin de prévenir
par-là ce qu’un fage miniftre de notre fiècle dit
d’un certain royaume, qu’une méfiance injufte en
avoit fait naître plufieurs légitimes.
Selon l’écriture , la tentation eft l’épreuve de
h fidélité ; ainfi, lorfque vous foupçannerez la
fidélité d’un fujet, cherchez en- un autre qui le
connoiffe ; prévenez ce dernier de ne pas s’of-
fenfer des marques extérieures de dégoût que vous
lui donnerez, puifque vous ne le;ferez que dans
la vue de lui fournir un prétexte de fe plaindre,
& de faire connoître à la perfonne dont vous vous
défiez qu’il a lieu d’être mécontent. Après cela,
; cet officier affidé liera une connoiffance plus particulière
avec cet homme fufpeél ( que je fuppofe
par exemple Ion compatriote ) ; il fera tomber
adroitement la coriverfaûon fur le gouvernement,
dont il paroîtra être, très mécontent. Il lui donnerai
entèndrê qu’il n’eft point départi qu’il n’em-
braffât volontiers, :pour- fe venger des injures
qu’il a reçues ; que fon jufte reffentiment lui
tnfpire ce dêfir ; qu’i l 1 lui ouvre d’autant plus librement
fon coeur , qu’il eft perfuadé que par l’amitié
qui eft entre eux tout demeurera fecret. Sur
une pareille ouverture, de coeur , ce compatriote,
s’il n’eft pas extrêmement avifé & fage, s’expliquera
fur. ile: même fujet. Il eft naturel qu’il ar-,
rive entre , ces deux hommes', ce que quelques-
uns difent de deux inftruments parfaitement d’accord
j dont il fuffit qu’on touche l’un pour que
l’autre réfonne. On applaudit fans -répugnance à
un fentiment étranger, qui eft de notre goût,
Si qui eft une approbation du nôtre. J’ajoute,
que fi ce compatriote penfe que cet officier pourra
lui être utile dans fon deffein , l’empreffement
de l’attirer dans fon parti, lui fera plus aifément
ajouter foi à fes plaintes, parce que rien ne rend
les hommes plus crédules, que le défir & i’ef*
pérance : c’eft la penfée de Strada.
r Le duc de Guife, en 1647, découvrît par ce
sçoyen la conjuration que Tanno Baffo, fauveur
de Génaro, & Pierre Damico tramoient à Naples,
par les fecrètes menées de l’abbé Bafqui.
Latinius Latairis fe feignit ami de Titus Sabinus,'
qui aimoit Agrippine , & étoit mécontent de Tibère*
Latinius , dans un grand nombre de conver-
fations particulières, affeéla de fe plaindre de Tibère
; 8c ayant découvert que Sabinus étoit du
parti d’Agrippine, 8c oppofé à Tibere , il lac-
eufa devant l’empereur. ;
Si celui, dont la fidélité eft fufpeft , aime quelque
femme , choififfez un homme habile, qui, a
force de politeffe & de préfens, gagne fecret^
R Ê V
inent l’affeSion de cette femme, afin qü’felle tire
adroitement de fon véritable amant le fecret qu’il
vous importe de favoir. Cet homme affidé feindra
d’entrer dans touts les fenriments de cette femme ,
pour que rien ne foit capable d’infpirer de la ré-
ferve dans la converfation de ces.amants.
Demandez confeil à la perfonne dont vous vous
défiez, fur quelque expédition, à laquelle vous ne
vous attendez pas, mais; qui pourroir peut-être., fi :
elle étoit mife à exécution , maintenir ou troubler:
la. tranquillité d’un pays fufpe#. Obférvez etifuite
fi l’on parle de cette expédition , 8c fi ceux que !
vous croyez portés à la révolte, changent quelques-
unes de leurs mefures ; car. alors.. vous, aurez un
plus grand motif de foupçonner que la perfonne
dont vous avez pris confeil , eft dans leur parti ,
puifqu’elle a découvert le projet que vous lui avez
propofé, 8c que je fuppofe que vous n’avez communiqué
a nul autre. On peut voir fur ce point
l’exemple d’Alcibiade.
Une fécondé utilité qu’on peut tirer de l’expédient
que je viens d.e propofer , eft que cette per-
fonne vous croira déterminé à exécuter le projet
fur lequel vous l’avez confulté ; Sc fi elle en fait
part à ceux de fon parti. , ils feront trompés dans les
mefures qu’ils prendront, puifque , félon toutes
les apparences , ils fe précautionneront contre ce
faux projet, fans prendre les mefures néceffaires
contre celui que vous avez réellement en idée.
Je l’ai déjà prouvé par l’exemple de Ventidius.
On pourra encore , par l’expédient propofé ,
obferver fi cet homme fufpeél vous donne un confeil
malin ,• qui tende infiniment à donner un plus
grand mécontentement aux 'peuples , 8c à troubler
davantage la tranquillité du pays , parce que
ce feroit une nouvelle preuve qu’il eft mal intentionné.
On ne comprend pas comment fe fait un changement
de théâtre, fi l’on n’obferve pas l’artifice
des machiniftes. Il eft difficile auffi de s’apperce-
voir des préparatifs pour un foulèvement, fi l’on
ne fait pas attention à la main qui le dirige ; ainfi
lorfqu’on foupçonne un prince voifin de fomenter
la révolte de vos peuples , faites adroitement épier
les démarches de l’ambaffadeur , du réfutent ou
de cjuelqne autre miniftre que ce prince a parmi
vous ; 8c fi c’eft une perfonne capable de fe laif-
fer fuborner ou de fe rendre à quelque autre forte
d’attaque, tâchez de le gagner par le côté le plus
foible , afin d’en tirer le fecret qu’il vous importe
de faVoir.
Commines ,qui me fournit cette réflexion , rapporte
que Louis X I , roi de France , avoit coutume
d’envoyer des.ambaffadeurs, afin , par leur
•moÿen,, de fe; faire des intelligences 8c un parti
dans les états du fouverain où ils alloient.
-. Marcus' Cr^fl'us découvrit les deffeins de Del-
don_, roi des Baftarnes, en fe prévalant des excès
de vin clans lefquels les Ambaffadeurs de Deldon
fe plongeoient.
R É V su
Pendant qu’on obferve les démarches de l’am-
baffadeur d’un prince fufpeél, il eft bon qu’un
miniftre de votre fouverain foit attentif aux préparatifs
dé guerre que ce prince, qui veut tirer avantage
de la. révolte qu’il excite dans votre pays ,
fera fans doute de fes états.
C ’eft' ainfi que le pratiqua Louis XI , à qui
Charles , duc de Bourgogne, étoit fufpeét.
L’ambaffadeur de votre fouverain d oit, pour
ainfi. dire , pêcher 8c prendre comme dans un
fécond filet tout ce qui a échappé à vos foins fur
. les négociations de vos rebelles inconnus;8c quoi-
( qu’il paroiffe inutile de cherchera trouver dans un
I état étranger ce que fur des affaires de votre pays
vous n’avez pu découvrir dans votre pays même ,
il arrive pourtant fouvent qu’on parvient plutôt
par les.détours que par le droit chemin. Quelque
attention que l’on ait, on ne peut appercevoir une
baie qui vient droite., 8c on la voit clairement après
le premier bond. Dans les intelligences: , on eft
plus ou moins réfervé à en parler, qu.’il y a plus
ou moins de danger à les découvrir 8c comme le
.grand éloignement diminue le rifque, on a aufli
moins de .circonfpeélion à cacher les projets, à
mefure qu’on eft plus éloigné du pays où ils doivent
s'exécuter.
, Les miniftres du roi d’Efpagneà Rome furent,
avant nos. généraux de Catalogne, que le maréchal
de Staremberg fe difpofoit à furpréndre un
des châteaux de Lérida.
Des déclarations que font les criminels qu’on arrête.
Choififfez quelques hommes adroits 8c fecrets
qui, comme s’ils étoient des voleurs, furprennent
les couriers , 8c leur enlèvent les lettres qu’ils
portent pour ces lieux qui vous font fufpe&s , afin
de voir fi vous n’y trouverez pas la confirmation
cfe vos foupçons oc quelque nouvel indice ; car il
eft certain que fi toutes affetnbléés leur ont été
défendues , ils ne fauroienr concerter leurs mefures
qpe par écrit. Il n’eft pas poffible de pouvoir
trouver à toute heure des perfonnes d’affez de con-.
fiance 8c de capacité pour pouvoir, par des commit
. fion verbales, 'remédier aux continuelles difficultés,
qui fe préfentent dans la difpofition périlleufe d’une
confpiration qu’on ne peut exécuter fans que des
milliers d’hommeS , différents entre eux en intérêt
8c en génie , ayent convenu d’y entrer. Vous
ferez auffi de temps en temps furprendre les voya-
! gèurs qui pourroient porter des lettres , 8c fur-
tout les domeftiqVtes 8c les amis des perfonnes
î que vous- foupçonnez le plus ; afin de ne pas donner
à connoître que cela s’exécute par votre ordre ,
ceux dont vous vous fervirez prendront quelque
: argent , des armes 8c des chevaux à ceux qui
portent ces lettres, dont on leur fera dans la fuite
reftituer la valeur par main tierce , lorfqu’en bon
politique .on croira le pouvoir faire fans, rifque.
La conjuration qu’en 1523 François I.er, roi de