& le d é p ô t d e s effets p e u n om b re u x q u e le ro i
fourniront au x invalides ; fo n ja r d in , aufli grand
q u e ce lu i* d e l'in f irm e r ie , offriroit u n m a i l , des
je u x d e lo n g u e & d e c o u r te p au lm e , d e s qu ille s ,
* d e s b atto irs , d e s ra q u e tte s , des v o la n ts , & to u t
c e q u i eft néc effaire aux au tre s je u x du. mêm e
g e n re . L e tro ifièm e b â tim en t fe ra it co n fa c ré au x
offic iers fu p é rieu rs fixés dan s le v illa g e , & au x
ca p ita in e s des diffé rente s com p a g n ie s ; fon ja rd in
fe ro it divifé p a r d e larg e s allée s , b o rd é e s d ’arb res
fr u itie r s , o u re c o u v e rts p a r des treillis o ù p e n d e -
ro ie n t d e s raifins d e la m e ille u re efp èce ; ch a cu n
d e s h ab itan ts d e c e tte m a ifo n a u r o it , d an s ce ja rd
in , u n p e tit c a rré q u 'il p o u rro it c u ltiv e r d e fes
m a in s , o u fa ire c u ltiv e r à io n g ré ; l'a g ric u ltu re a
ta n t d e cha rmes p o u r la p lu p a rt d e s v ieu x milita
ir e s , q u e ceu x à q u i la fo rtu n e a re fufé d e v afle s
c am p a g n e s , v e u le n t au moins c u ltiv e r , d an s u n
p e tit ja rd in , des fleurs , des lég um es & des arb res
f r u itie r s ; p o u rq u o i le u r re fu fe r u n p la ifir-fi peu
d if p e n d ie u x , u n p laifir q u i , c o n trib u a n t à le u r
f a n té , les a tta c h e ro it e n c o re à leu r h ab ita tio n ; le
q u a trièm e édific e , b â ti fu r la g ra n d e p la c e , fe ro it
o c c u p é par l’é ta t-m a jo r d e la b o u rg a d e ; le g o u v e rn
e u r , le m a jo r , le ju g e c i v i l l e commiffa ire d e
g u e r r e & le tr é f o r ie r , y a u ro ie n t "'chacun le u r a p p
a r tem e n t ; c e fe ro it à c e p e tit n om b re d e p e rso
n n e s q u e fe b o rn e ro it le g ra n d é ta t-m a jo r ; o n
v e r r a it dan s c e b â tim e n t q u e lq u e s g ra n d e s pièces
d a n s le fq u e lle s to u ts les officiers d e la c o lo n ie
p o u r r a ie n t fe ra ffemb le r ; ils c h a rm e ra ie n t là les
lo n g s a p rè s-m id i d e l'é té & les foiré es d e l ’h iv e r
e n c o re p lu s lo n g u e s , p a r u n e co n v e rfa tio n inré-
r e fla n te , o u p a r des jeu x d o n t le h a fa rd n e fe ro it
p a s le fe u l a rb itre . Ic i fe ra ie n t q u e lq u e s tab le s d e
b illa rd , là des é c h e c s , a illeu rs d e s d am e s , d e s
d om in o & des tric tra c s ; u n e fa lle trè s v a fie r e n f
e rm e ra it u n e b ib lio th è q u e p u b liq u e b ie n choifie.
O n y tro u v e r a it to u te s les h ifto ires a n c ien n e s &
m o d e r n e s , & fu r-to u t b ea u co u p d e m ém o ires milita
ire s. L e s papiers p u b lics q u e les p ro v in c e s & la
ca p ita le e n f a n te n t , y a r riv e ra ie n t ch a q u e jo u r ;
to u ts les h ab itan ts d u h am e au tro u v e r a ie n t là u n e
refTource p u iffa n te c o n tre l'e n n u i , & u n plaifir
d e to u ts les âges,.
L e s m ilitaire s q u i fe ra ie n t fixés dan s la n o u v e lle
c o lo n ie fe ra ie n t divifés en tr ç n te compagnies.
C h a c u n e au ro it fes officiers & fes bas- officiers , 8c
fo n lo g em e n t, d an s u n e e n c e in te pa rtic u liè re . C h a cu
n des cô té s d e c e tte e n c e in te a u ro it 3 2 toifes de
lo n g u e u r. A ch a cu n d e fes angle s o n v e r ra it u n p
maifon d o n t ch a cu n e d e s faces a u ro it 8 toifes ; elles
fe ra ie n t to u te s Amples-, to u te s u n ifo rm e s & to u te s
d ifirib u ée s d e la m an iè re fu iv a n te : le re z -d e -
chauflee , divifé e n d e u x p a rtie s égales p a r u n
la rg e c o r r id o r , o ffrira it à d ro ite u n e fa lle com m
u n e , u n e cuifine & u n b o u g e p o u r deux d om e fi
tiq u e s ; la falle com m u n e fe roit échauffée p a r la
p la q u e d e fe u dp la c u ifin e , & p a r des tu y a u x q u i |
y ré p a n d ra ie n t u n e d o u c e ch a leu r. I l y a u ro it d a n s J
la cuifine une fécondé cheminée pour l’été ; k
gauche du corridor on trouverait la cage de l’efca-
lier & deux chambres qui contiendraient chacune
quatre lits. Le premier étage , partagé aufli par un
lârge corridor, feroit divifé en quatre chambres :
une à deux lits pour deux lieutenants , & trois à
quatre pour douze bas-officiers ou foldats. Le fécond
étage offriroit feize lits diftribués en quatre
chambres. Chaque maifon contiendrait donc 36
bas-officiers ou foldats & deux lieutenants ; 8c
chaque enceinte une compagnie entière. On fent
bien que touts les lits ne feraient point conftam-
ment occupés ; le fort que nous en avons fait au*
foldats penfionnés, nous en eft un fur garant ;
mais chez une nation qui, par fa pofition & fon
génie, prend part à touts les événements militaires
de l’Europe, & qui efl obligée , par conféquent,
d’avoir toujours fur pied des armées de terre & de
mer très nombreufes , il faut prévoir ces temps
défaftreux où une guerre longue & cruelle aura
mis un grand nombre d’officiers , de foldats ou de
matelots hors d’état de fe paffer des foins paternels
de leur roi. Dans le rez-de-chauffée feraient
logés les invalides les plus vieux , & ceux à qui
l’efpèce de leurs bleffures rendraient les étages fupérieurs
incommodes ; les invalides caducs ou très
infirmes ne feroient jamais touts relégués dans la
même chambre ; les officiers veilleraient à ce que
chaque chambrée fût compofée d’hommes qui
puiflent fe donner mutuellement quelques fecours.
L’aveugle fort & vigoureux prêterait fes bras à
l’homme qui en feroit privé, & celui-ci les guiderait.
Le fécond étage feroit dans chaque maifon le
dernier occupé, & toujours par les moins vieux
& les plus ingambes des invalides. Le terrein compris
dans chacune des 30 enceintes feroit ou une
cour plantée d'arbres , ou un jardin partagé en
petites plattes-bandes, divifées par portions égales
entre les différents membres de chaque compagnie.
Ces différentes enceintes feroient féparées
par des rues très larges, plantées de deux rangs de
hauts ormeaux.
Le roi donnerait à chaque invalide une paye
aflez forte pour qu’ils puffent fe procurer une nourriture
faine & abondante , un habillement fimple,
mais chaud & commode, & un entretien honnête
& facile : 15 f. par jour fuffiroient aux foldats pour
ces différents objets; 12 f. les nourriraient avec
facilité ; avec cette fomme ils auraient fans peine
une livre de viande, une bouteille de v in , le pain %
le bois & les légumes qui leur feroient néceffaires j
un fol fuffiroit à leur entretien , un fol à leur habillement
, & ils auroient un fol pour fatisfaire à leurs
petites fantaifies. Les caporaux auroient, pour ce
dernier objet, un fol ‘de plus que les foldats , les
fergents 2 { .,8 c les fergents-majors 3 f. ; les lieutenants
& les autres officiers n'auroient que le logement
au-deffus de la retraite qu’ils auroient obtenue
en quittant le ferviçe. yn.dçs bas-officiers
ou des foldats nommés par le capitaine ou par fes
camarades, feroit chargé du foin de l’ordinaire ; il
tiendrait, comme dans nos corps, un livre de
prêt ouvert à quiconque voudroit le vérifier ; ce
livre feroit vifé chaque femaine par un des officiers
de la compagnie. Les deux domeftiques afleéiés à
chaque maifon , qui feroient payés 8c nourris par
ceux qui Thabiteroient, feroient chargés , l’un de
faire la cuifine, & l’autre de fecourir les invalides
impotents , de les fervir touts à table, & de tenir
la maifon dans un état de propreté convenable. Le
décompte du fol d’entretien feroit fait touts les
quatre mois, celui de l’habillement touts les trois
ans ; le fol de gratification feroit payé chaque jour
de prêt. Les foldats & les bas-officiers vivraient
enfemble ; faifons régner, auflï fouvent qu'il eft
poffible, cette égalité primitive qui adoucit tant de
maux, & cette douce liberté qui confole de tant
de peines. Dans les premiers moments , il feroit
peut-être néceflaire d’accorder une prime légère à
touts les artifans utiles qui viendraient s’établir
dans la nouvelle bourgade ; cette prime pourroit
confifter en un logement propre au genre de travail
auquel chacun d’eux s’adonnerait ; les mai-
fons defiinées à ces artifans feroient hors de l’enceinte
du hameau , petites , mais bien bâties , &
toutes uniformes. Les boulangers, les bouchers,
les cordonniers, les tailleurs, & c ., ne jouiraient du
logement & ne feraient foufferts dans les fauxbourgs
du village, qu'autant qu’ils s’y rendraient utiles.
Les invalides qui auroient embrafle un de ces métiers
néceffaires à la colonie , devraient être encouragés
par quelque petite gratification , & avoir la
préférence fur les autres citoyens ; ces derniers feraient
les feuls d'invalides qui auroient la permif-
fion de fe fixer, avec leur famille, dans les faubourgs
du hameau.
Jamais on ne verrait, aux portes de cette nouvelle
ville , des perfonnes chargées de faire payer
des droits fur les objets de confommation ; tout
entrerait librement dans cet afyle facré & en forti-
roit de même. Deux ou trois compagnies de
troupes réglées tirées d’une des garnifons les plus
voifines, feraient chargées d’y maintenir la tranquillité
publique ; une garde, des patrouilles font
des fatigues réelles pour des vieux militaires ; les
invalides n’auront à fonger qu’à mener une vie
douce & paifible , exempte de foins & de travaux.
Un juge civil veillerait fur la police , & jugerait
les petites difcuffions qui pourraient s’élever entre
les invalides 8c les artifans, entre les acquéreurs
& les vendeurs ; les feuls objets que le roi fournirait
à chaque invalide, feroient un bon lit, des
draps touts les mois , & deux ferviettes par femaine
; il fournirait de plus une nape touts les
quatre jours pour chaque ordinaire. Nous n’avons
pas befoin de nous occuper à procurer aux invalides
le pain, la viande, le vin , le bois, les étoffes,
le linge, &c. ; les entrepreneurs , les régifleurs
font mojns néceffaires qu'on affeâe de le croire ;
par tout où il y a une confommation néceffaire, il
fe t ro u v e to u jo u r s des v e n d e u r s ,d e s p o u r v o y e u r s ,
& i l s ’é tab lit , a v an t p e u , u n e c o n cu r r e n c e h eu -
r e u fe p o u r l'é ta t & pour le s c o n fom m a te u rs .
S i j e n’a i p o in t été trom pé pa r le s c a lcu ls q u e j'a i
f a i t s , i l ré fu lte q u e les q u a tre mille invalides q u e
'j'é ta b lis d ans ma n o u v e lle c i t é , n e c o û te ra ie n t pa s
autant q u e le s trois m ille d e M . le B . D. B , 8c tort
p eu au -d e là d e c e q u e c o û te le p e tit n om b re q u 'o n
en tre tien t au jo u rd ’h u i à l ’h ô te l. M a is fi l’o n peut
com p a r e r le s d ép en fe s des d eu x é ta b lif lem e n t s , o n
n e p e u t g u è r e com pare r l ’é tat & le fo r t des hom m e s
à <jui ils fo n t d efiin é s . C ’ e fi c ette c on fid éra tio n qui
m’a e n t r a în é , con fid éra tion to u te p u iffan te fu r le s
âm es fe n f ib le s , & fa ite p o u r m’o b ten ir le p a rdon
d es é ca r ts q u e je puis a v o ir fa i t s , & d es e rreu rs
d ans le fq u e lle s j'a i p u tom b e r . L e plan q u e je v ie n s
de tra c e r fû t - i l , d ans le moment p r é fe n t , d ’u n e
e x é cu tion im p o ffib le , je n e me rep en t ira is p o in t d e
l’a v o ir offe rt ; il pou rra q u e lq u e jo u r ê tre u tile à
ma p a t r ie , fo it pa r les id é es n o u v e lle s q u ’il fe ra
n a î t r e , fo it pa r le s r é fo rm e s d o n t i l fe ra p e u t -
ê t re fe n tir la n é c effité . ( C . )
IN V E R S IO N . L e s m ilita ire s fe fo n t fe r v is ,
c om m e les g ramm airien s , du mo t inverjion, p o u r
r é v e ille r l ’id é e d e ren v e r s em en t d’o r d r e ; i l s d i fe n t ,
c om m e e u x , q u e to u te inverjion fu p p o fe Ain o rd r e
p r im i t i f , fo n d am e n ta l, & qu e n u l a r ran gem en t n e
p e u t ê t re ap p e llé inverjion q u e p a r rap p o rt à c e t
o rd r e primitif.
L o r fq u e la b r igad e la p lu s a n cien n e e ft à la
d ro ite d u co rp s d on t e lle fa it partie , q u e le r é g im
en t le plu s an cien d e c e tte br igad e e f l à la d ro ite
du mo in s an cien ; q u e le p r em ie r ba ta illo n d e
ch a qu e ré g im en t e f l à la d ro ite du fé c o n d , q u e la
p rem iè re d iv ifion d u ré g im en t e ft à la d ro ite d u bata
illo n , q u e la fé c o n d é d iv ifio n a fa d ro ite a p p u y é e
à la g au ch e d e la premiè re , qu e la t ro ifièm e a d e
m êm e fa d roite a p p u y é e à la g au ch e de la f é c
o n d e , & c . , & enfin lo r fq u e dans chaqu e d iv ifio n
le prem ie r p e lo to n e f l à la d ro ite du f é c o n d , le s
trou p es fo n t ran g é e s dans l ’o rd r e p r im it i f , h a b itu e l
& fo n d am en ta l ; mais to ute s les fo is q u e c e t o rd r e
e fl t r o u b lé , la l i g n e , la b r ig a d e , le r é g im e n t , le
ba taillon o u la d iv ifio n o n t é p ro u v é un e inverjion 9
& fo n t c e q u e l ’o n a p p e lle invertis.
I l e f l bo n , fans d o u t e , il e fl m ême n é c e fla ire
qu ’ il y a it p a rm i les trou p es un o rd re p r im itif &
fo n d am en ta l ; mais c e t o rd re d o it-il ê tre in v a r
ia b le ? L ’o rd o n n an c e qu i rè g le l ’e x e r c ic e d e s
trou p es re co n n o ît qu e c e t ordre fo n d am en ta l p e u t
ê tre ch an g é ju fq u ’à un certa in p o in t ; e lle p e r m
e t , quan d la né ceffité l’e x ig e , d’in v e r tir le s b r ig
ades dans la lig n e , le s rég imen ts dans la br igad e »
8c le s ba taillons dans le s régimen ts ; mais e lle v e u t
q u e chaqu e ba ta illo n refte in v a r ia b lem e n t dans fo n
o rd r e d e fo rmation d e la droite à la g a u c h e .P u i fq u e
l’o rd o n n a n c e , d’a cco rd a v e c le s ta c t ic ien s , p e rme t
Yinverjion d es b r ig a d e s , des rég imen ts & des bataill
o n s , i l n e s'a git plus q u e d’e x am in e r s’i l n ’au ro it
p a s é té a v an ta g eu x q u ’e lle eût p o u ffé la to lé ran c e