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toujours que deux rangées. Si on leur donne 12
pieds de largeur, l’efpace en fera beau & grand ;
mais fi ou y met trois rangées, elles occuperont le
milieu , & on pourra engerber de trois , &même à
celle du milieu de quatre, dans le befoin, avec deux
allées attenant des murs , de 2 pieds 3 pouces chacune
de large, ce qui eft un peu étroit. Remarquez
qu’il ne faut pas que les barriques touchent la terre,
mais qu’elles portent fur des chantiers de bois.
On donnera aux voûtes de ceux-ci 2 ou 3 pieds
d’épaiffeur, & on les fera toujours à plein ceintre,
on les cimentera avec foin, <k on les environnera
d’une pierrée. Comme il n’y auroit point de rempart
affez élevé pour les pouvoir recouvrir de 5 à
6 pieds de terre, il en faudra enfouir le fol de 4 ,
5 à 6 pieds au-deffous de fa bafe, fi le front & la
qualité du terrein le permettent ; quand on en
voudra faire de plus grands, il faut les engager
fur les fur-touts des pointes ou des angles flanqués
des baftions & des demi-lunes , car j’en voudrois
auffi quelques-uns dans ces pièces. On en pourra
mettre encore fous les cavaliers, fous les greffes
traverfes , & fous les buttes des moulins à vent,
fous les autres élévations qui fe trouveront dans la
flacc.
Des magafins fouterreins pour les vivres & les autres
munitions,
La conftru&ion d’un ou deux bons fouterreins
touts les ans , n’iroit pas à une dépenfe bien con-
ftdérable , & produiroit un très grand bien au bout
de huit ou dix ans dans uns place, qui par ce
moyen fe trouveroit abondamment pourvue de
bons &. excellents magafins propres à tout; mais il
faut fur toutes chofes les bien précautionner contre
l’humidité, autrement tout s’y corromperoir. Pour
cet effet, il faudra les paver de briques choifies
entre les plus cuites, pofées de champ & debout,
fur ua maflifde maçonnerie, avec pente, du côté
des égouts les plus commodes ; il fera mime bon
de leur en faire exprès.
C ’eft dans les grands fouterreins qu’il faudra faire
des fours , avec toute la fuite & les accompagnements
d ’une boulangerie.
Quand quelque bourgeois fera bâtir, il faudra
l’engager à faire de bonnes caves avec des puits &
des cheminées , & tout ce qu’il faudra pour y
pouvoir habiter en fureté dans le temps d’un
fiège , le tout avec double plancher au-deffus
Sc beaucoup de fumier & de fafeines, en cas de
fiège. C’eft encore un confeil à donner aux cou*-
vents j pour retirer leurs principaux effets en fureté.
Comme les magafins à poudre demeureront
vuides en ce temps-là, le gouverneur en chçifira
mi pour fa demeure, un autre pour mettre les
bleffés de confidération , & un troifième pour
mettre des munitions importantes; pour ce qui eft
des grandes villes où il fe trouve beaucoup de
fouterreins, il y a toujours affez; de lieux propres
3 fe mettre en fureté.
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C ’eft dans les grands vuides qui fe trbuvertt
dans l’enclos de ces places que je voudrois faire
camper les troupes de la garnifon pendant un fiège,
& non les loger dans les cafernes près des attaques,
où il y a apparence que les coups échappés des
ennemis feront de grands ravages.
Le gouverneur ne doit pas fe donner moins d’attention
pour favoir où il mettra les autres munitions
en fureté, telles que les feux d'artifices, les
armes de rechange, les bombes & grenades chargées,
les farines, les chairs falées, les boiffons ,
& c .; & à mefure qu’il fe fixera à quelque chofe,
il fera bon d’en faire un mémoire ,à la charge de le
revoir fouvent, & d’y ajouter ou diminuer ce qu’il
jugera à propos ; c’eft ainfi qu’il doit peu à peu
dîfpofer fes affaires, pour n’en être point embar-
raffé dans le temps dvun fiège.
Je lui confeille de plus de faire le projet de fes
difpofitions pour les emplois fubalternes à différents
officiers de fa place y pendant un fiège. Par
exemple, foit que le roi lui nomme un confeil ou
non, il fera bien de s’en faire un d’avance, com-
pofé du lieutenant de roi, de l’intenclant ou com-
miffaire ordonnateur, du commandant de l’artillerie
, du principal ingénieur, des deux premiers
colonels de la garnifon , & fuppofé qu’il y ait des
brigadiers, les y faire entrer , & ne rien faire
d'important fans prendre l’avis de ces perfonnes-là,
fauf à lui de faire enfuite ce qu’il jugera à propos.
£)* l'emploi & de la deflination des principaux
ofiieiers de la garnifon en temps de fiège.
On donnera ail lieutenant de roi lé commandement
général des dehors, notamment des chemins
couverts, avec des officiers fubalternes, en qualité
d’aides de camp, pour porter les ordres, & un des
aides-majors de la place. Ce fera à lui à garnir Jes
poftes qui lui feront confiés, du monde néceffaire,
& de leur preferire ce qu’ils auront à faire ; à fournir
les munitions néceffaires, bombes, balles ,
poudre, grenades ; à faire touts les matins ra-
maffer les munitions répandues le long des poftes;
il doit faire auffi les détachements des gens commandés
pour les forties, & les diriger ; faire rétablir
les paliffades & les barrières rompues ; faire
remettre des facs à terre & des paniers fur le parapet,
& c . ,& à tout ce qui pourra dépendre de fes
foins, dont il rendra compte au gouverneur.
On chargera le commandant de l’artillerie du
foin général de tout ce qui regardera le fervice &
le mouvement du canon, des batteries nouvelles,
de la réparation des vieilles, du changement de
pièces, des piquets, fafeines, plates-formes, outils
, & du monde néceffaires pour ces opérations.
Il doit fournir les munitions, foit pour le canon,
les mortiers à bombes & à pierres, &c. ; foit pour
les armes des troupes, de quoi il rendra touts les
jours compte au gouverneur. .
L’intendant, ou commilfaire ordonnateur, dirigera
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ïijrtra leurs vivres la police & l’hôpital; ordonne!'
rie tours les payements, tant des troupes que des
«uvraves des revues , de la difiribmion du pain ,
du vin , des chairs falées, le tout avec le confen-
tetnent du gouverneur.
s Comme la défenfe des places aliiègees ett un
métier pénible pour tout le monde, il faut réparer
les forces perdues par une nourriture abondante ;
c’eft pourquoi, au lieu que le pain de munition
n’eft pour l’ordinaire que d’une livre & demie, il
faut qu’il foit pendant tout le fiège de deux livres,
bien cuit & bien conditionné. Si on veut le décharger
de 20 livres de fon par feptier, le pain en fera
Beaucoup meilleur, & les foldats en feront mieux
nourris. Touts ces foins regardent encore le com-
miffaire ordonnateur, ainfi que de faire livrer la
viande, le lard, du fromage, des pois, des fèves ,
6 ic ., du vin, de la bière, de l’eau-de-vie, & les
chofes néceffaires à la vie.
Le direéleur de l’hôpital fera chargé du foin des
malades & des bleffés, fous la direâion d’un com-
miffaire qui aura foin de les vifiter, & de les voir
paafer journellement; il pourvoira à leur nourriture
; le tout fous les ordres de l’intendant, qui en
rendra compte au gouverneur.
Legrand magafin ne fera point de diftribution
dé poudre, déballés, ni autres munitions, que
par les ordres du gouverneur , & en préfence du
major de \zp la c e , ou de l’un des aides-majors ; il
rendra compte touts les foirsdefes confommations,
fans y manquer. Comme il aura beaucoup d’affaires
, il faudra lui donner des aides du ,’corps de
l’artillerie, lefquelles auront foin que les armes
foient réparées promptement par les armuriers &
ferruriers prépofés à cela, &que celles de rechange
foient diftribuéès aux troupes fans aucun délai,
dont le garde magafin tirera des reçus des majors
des régiments, pour prévenir les abus.
Touts les majors des régiments feront chargés
du détail de leur régiment, par rapport aux armes ,
& à tout ce qui concerne la moufqueterie. Comme
.on a changé depuis peu les vieilles armes en nouvelles
, & les moufquets en fufils , les majors
auront foin d’en apprendre le maniement à leurs
foldats,, afin qu’ils fâchent s’en fervir. Il fera du
foin des aides-majors de parcourir touts les matins
& touts les foirs les pofles de leurs régiments , pour
faire ramaffer les munitions répandues, comme les *
mèches, les balles, pierres àfufil, & de châtier
ceux qui les difïïpe’nt mal-à-propos.
L’ ingénieur en chef fera chargé de faire réparer les
brèches faites parle canon ennemi, du répaiffiffe-
ment des parapets, d’en faire faire de nouvelles, des
communications & bouts de tranchées néceffaires
derrière les brèches, pour communiquer d’une tra-
verfe à l’autre ; des ponts à fleur d’eau ; radeaux, bateaux
pour communiquer aux foffés ; de remplacer
les paliffades, & généralement de faire tout ce
qui appartiendra.à la fortification, dont il diftri-
Art militaire. Tome III.
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tuera le foin à fes fubalternes , & aux ouvriers
qui feront fous lui.
Quant aux ouvrages d’artillerie, ils feront dirigés
par les officiers de ce corps, fous l’autorité
de celui qui les commandera ; mais pour la fitua-
tion des batteries , elle fera choifie par le gouverneur
, fur la propofition qu’en fera l’ingénieur, do
concert avec le commandant de l’artillerie.
A l’égard des contre-mines, elles doivent être
préparées de longue-main, avant le fiège, par l’ingénieur
de la place 9 autorifé du direâeur général,’
&. par l’officier des mineurs qui les commandera,
lefquels auront touts leur relation au gouverneur
& à l’ingénieur en chef, quand il fera queftion de
les charger & de les faire jouer.
Le commandant de la cavalerie fera chargé de la
direéliôn de toutes les gardes, tant des dehors que
des dedans; ce fera lui qui, par les ordres du gouverneur
ou du lieutenant de roi en fön abfence
réglera les forties & les courfes de la cavalerie, &
qui la fera agir de jour & de nuit ; il aura foin auffi
des -gardes diftribuéès dans les carrefours de la
v ille , pour empêcher les affemblées tumultueufes,
& défaire toutes les patrouilles à cheval, de l’une
& de l’autre garde.
Le gouverneur choifira entre les bourgeois, les
plus honnêtes gens , pour les faire capitaines de
bourgeois. Ceux-ci feront uniquement employés
à prendre garde au feu, & à l’éteindre quand il
s’allumera quelque part. Pour cet effet, on leur
partagera touis les quartiers de la ville qui peuvent
y. être expofés, afin que chacun d’eux fache de
quoi il fera chargé.
Les magiftrats doivent prefque toujours être af-
femblés pour donner les ordres convenables à la
bourgeoifie, & avoir toujours quelqu’un de leur
corps auprès du gouverneur.
Tout le détail de la défenfe étant ainfi diftribué
aux chefs, chacun, félon fon emploi, fe trouvera à
une heure marquée chez le gouverneur, pour lui
rendre compte des chofes dont il aura été chargé, 8c
recevoir fes ordres fur la continuation de ce qu’il
aura à faire. Touts les majors des corps s’y trouveront
auffi à leur tour, pour prendre l’ordre, &
delà ils fe rendront chez les gardes-magafins pour
y prendre les munitions néceffaires à leurs poftes ,
ce qui fera exécuté de même en préfence du major
de la place , pour les autres corps.
Quant aux majors & aides-majors de la place ,
ils feront uniquement deftinés a faire diftribuer les
munitions; à prendre garde que le garde-magafin
n’excède, & ne foit excède au-dela de ce qui aura
été ordonné ; à vifiter les poftes, les corps-de-garde
du dedans pendant la nuit, Sl. du dehors pendant
le jour; à diriger les gardes ; à faire ouvrir &
fermer les portes, & à faire exécuter par-tout les
ordres du gouverneur ; c’eft pourquoi ils fe feront
toujours accompagner par des gens armés qui ne
les quittent point.