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L'intendant doit avoir-connolffance du plan de
campagne , afin de régler, de concert avec le général,
l’emplacement des magafins. Celui-ci doit
lui confier Tes projets avec la prudence néceffaire ,
& conforme à la connoiffance qu’il a de fon caractère.
L’intendant à fous lui un nombre fuffifant de
commiflaires de guerre , chargés du détail particulier.
Il arrête toutes les dépenfes ordinaires & extraordinaires.
Il a fon logement de droit au quartier
général. L’infanterie fui fournit une garde de dix
hommes , commandés par un fergent.
L'Intendant , étant chargé des fubfiftances de
l’armée, doit avoir une connoiffance très-étendue
de tout ce qui regarde la manutention & le fervice
des vivres. Dès que les ordres font donnés pour
faire les achats de chevaux, de bleds & de fourrages,
il doit fe tranfporter fur la frontière ; faire
accélérer'le travail, & indiquer les emplacements
demander au général des vivres, les états de fes
magafins’; ordonner la conftruélion du nombre de
fours néeeffaires, régler tour ce qui eft de fou ref-
fo r t, & le faire tenir prêt pour l’ouverture de la
campagne.
L’intendant donne au général des vivres , un état
des troupes qui compétent l’armée, & du temps auquel
chacune d’elles doit arriverai! lieu d’a.ffemblée ;
veille pendant toute la campagne aux travaux des
fubfiftances , à la bonne qualité des fourrages &
grains, à celle du pain & à.fon poids; charge un
commiffaire honnête homme, de prendre connoif-
fance des défordres & abus dont il fera porté
plainte à l’égard des fournitures , & fait rendre juf-
tice à qui elle appartient. Il doit faire vérifier les
procès-verbaux des commis aux vivres pour perte
de pain , de grains , &c. foit par incendie , attaque
des ennemis, corruption naturelle , enlèvement de
convois. Le commiffaire qui en eft chargé, doit le
faire deux ou trois jours après l’événement, fans
quoi le procès - verbal eft nul, fuivant l’ordonnance.
Il doit veiller à ce que les équipages de charroi
foient bien nourris, afin qu’ils puiflènr fupporter
toutes les fatigues , Sc que les tranfports néeeffaires
pour les opérations, ne foient pas retardés; à ce
qu’on paye bien & régulièrement les charretiers ,
afin qu’ils travaillent avec zèle, & ne défertent pas ;
régler avec le général des vivres , les places d'où
les fubfiftances de l’armée doivent être tirées à
chaque mutation de camp , ou donner ordre pour
le travail, s’il doit être fait à portée du camp ; faire
vérifier l’objet des plaintes portées par les troupes
au fujet de la qualité du pain , & punir les commis
q u i, par négligence, auront laiffé gâteries farines
& les bleds, ou les boulangers qui , par ignorance
ou par friponnerie, l’auront mal fabriqué ; fe faire
donner de temps en temps, par les munitionnaires,
des états de leurs magafins , & y faire remplacer,
fans aucun délai , ce qui pourroit y manquer.
ISintendant d o it s’atta c h e r à b ie n c o n n o ître le
I N T pàys où les troupes doivent fe porter , ce qu’il produit
, ce qu’on peut tirer de chaque diftriti & même
de e'haque village , en foin, grains, paille, bois ,
charriots & autres néceflités.
Lorfqu’il faut pourvoir aux fournitures , on ne
peut rien faire de mieux que de faire affembler touts
les magiftrats des environs du quartier général, de
leur donner l’état de ce qu’il faut par jour en foin,
paille & bois de chauffage , de les charger d’en faire
eux-mêmes la répartition : de cette manière, elle
eft faite avec meiure & proportion. .
Il doit veiller avec foin , & employer touts les
moyens que fa juftice & fa dextérité pourront lui
fuggérer pour empêcher les malverfarions de ceux
qui font fous fes ordres. Il y en aura de toute ef-
péce, s’il néglige d’y remédier. Une des plus ordinaires
, eft le prix fouvent exigé de l'expédition
des ordres pour le payement des fommes dues,
foit aux entrepreneurs des vivres , foit à ceux des
hôpitaux , foit aux troupes mêmes. Ceux-ci, pour
ne pas fupporter le poids de cette iniquité, le rejettent
fur d’autres, deviennent iniques à leur tour ;
les troupes fouffrent, & l’état pâtit.
L’intendant, à la fin de la campagne , prend
l’ordre du général pour le licenciement des équipages
, 8c le donne par écrit au munitionnaire ,
pour que celui-ci le produite dans fon compte avec
le premier état de la revue faite pour la marque ,
ces deux pièces devant fervir à régler la folde des
chevaux. Si la campagne eft continuée après le
premier otiobre, on ne congédie point les caif*
ions : ils font retenus fur un nouvel ordre du roi
pour continuer Si on fournitl ed ufe prvaiince .aux troupes pendant l’hiver,
Yintendant ordonne aux tréforiers. d’en faire la
retenue, conformément au traité fiait par le mi-»
niftre avec le munitionnaire, & fuivant les états
certifiés de cette fourniture, repréfentés par les commis.
Lorfque les tréforiers ont affez d’argent, ils
remettent tours les mois au munitionnaire le montant
de ces retenue* fur l’ordre de l'intendant. Mais
s’ils ne peuvent en faire la remife fur les lieux ,
leurs commis donnent des refcriprions payables à
Paris.Lorfque la guerre doit être continuée, Y intendant fait faire pendant l’hiver de nouveaux achats ,
veille à l’approvifionnement des magafins , 8c s’en
fait donner des états dont il rend compte au mi-
nifIlrl ea.rrête les états de fournitures de garnifon & de
campagne faites aux troupes raffeniblées en corps
d’armée. Ceux des fournitures délivrées aux régiments
, lors de leur paffage dans les villes des pro-,
vinces frontières, le font par les intendants de ces
provinces. Ces états font arrêtés fur les revenus
des commiflaires des guerres , les ordres des offh
tiers généraux , &‘ceux des intendants. L intendant eft juge-né des procès que le munt-
tionnaire & fes commis peuvent avoir entr’eux. Cependant,
le roi le conftituç tel ordinaire, par un arrêt
INT
<5e fon confeil, non-feulement à l’égard des commis
, mais aufii de toutes fortes de perfennes qui
peuvent avoir quelque différend au fujet des vivres. F Voye{ Munitionnaire des armées par No dot. Détails
militaires par Chenevïeres ).
INTERDICTION. Punition militaire qui fuf-
pend pendant un temps limité le cours de l’autorité
d’un officier ou d’un bas-officier.
Les ordonnances militaires françoifes n’ont point
mis Y interdiCliori[au rang des moyens faits pour
punir les gens de guerre : il femble cependant que
chez un peuple gouverné par l’honneur , dont les
foldats ont été quelquefois contenus par la crainte
d’être privés de la gloire de monter à l’affaut, Yin-
terdiCtion prononcée à propos, 8c avec ménagement,
produiroit beaucoup d’effets heureux.
Je. dis que Y interdiction doit être prononcée à propos
& avec ménagement ; car , tirant fa force de 1 opinion
, elle la perdroit, fi on en faifoit un ufage
trop fréquent , ou fi on l’employoit contre des
hommes qui euffent affez peu d’énergie & de raifon
pour ne pas regarder la faculté de remplir leurs
devoirs comme un plaifir , & même comme une
récompenfe.
On pourroit divifer YinterdiClion en deux claffes :
la première feroit appellée interdiction fimple ; elle
n’entraîneroit après elle aucune autre peiné : la fécondé
, qu’on pourroit nommer interdiction com•
pofêe , devroit être fuivie de queîqu’aurre châtiment
deftiné à en rendre les coups plus forts & plus pénétrants.
Xe moment où l’on feroit ufage de Yinter-.
diction , devroit encore être confidérè avec attention
; car YinterdiClion ne peut pendant la paix être
toujours auffi fenfible que pendant la guerre.
U interdiction fimple peut être employée avec
beaucoup de fuccës , tant pendant la paix que pendant
la guerre , contre les officiers de tOuts les
grades ; mais principalement contre ceux qui ont
atteint un âge mûr, & qui occupent une place élevée.
Pour ceux-ci, elle doit être mife au rang des
peines. Tout officier général, tout brigadier, colonel
, lieutenant-colonel, major 8c capitaine , qui
ne fe fent pas vivement puni quand on le fufpend
de fes fonctions , eft un homme fans énergie , de
«mi il ne faut rien attendre de grand , fur qui la pri-
ion , les fers même ne feroient qu’une imprefîïcn
foible 8c peu durable. Pour touts les militaires, 8c
principalement pour ceux que nous venons de
nommer, c’eft la faute qui doit faire la honte.
Les jeunes militaires, qui écoutent prefque toujours
avec plus d’attention la voix de la pareffe ou
celle des paffions fougueufes , que celle du devoir,
pourroient fouvent, pendant la paix, envifager
YinterdiClion fans en être effrayé ; .quelques-uns
pourroient même la voir , avec un certain plaifir ,
tomber fur leur tète indolente. Je ne ferois donc
ufage de cétte punition, pendant ja paix, qu’avec
des jeunes militaires pleins d’ardeur ; pendant la
guerre, je m’en fervirois avec touts ; la guerre ré-
I NT 109
veilléles préjugés, renforce leur voix & étouffé
celPleo udre sl epsa fbfiaosn-so flfeicsi eprlsu s nobles. YinterdiClion pourroit être
fimple, pendant la guerre, 8c compofée , pendant
la paix. •
\JinterdiCûdnfimple produiroit, pendant la guerre,
autant d’effet fur les bas-offitiers que fur les officiers
fubalternes ; mais il faudroit , pendant la
paix, qu’elle fe montrât toujours accompagnée de
quelque châtiment fait pour augmenter fa force ;
j ai vu des régiments dont les fergents 8c les caporaux
qui avoient commis une faute grave, étoient
condamnés à faire , pendant quelque temps , les
premiers le fervice de caporal, 8c les féconds celui
dcfoldat. Les uns 8c les autres gardoient cependant
les marques diftintiives de leurs grades ; les bas-
officiers , à qui on faifoit ainfi defeendre un degré ,
n e touchoient que la paye du grade qu’ils remplif-
foient momentanément, 8c leur haute-paye étoit
reverfée dans la maffe de propreté de leur compagnie.
Cette punition ainfi aggravée , me paroît faite
pouLre sp aropdpuoiirnet édse, glreasn gdrse enfafedtise.rs 8c les autres foldats
d’élite pourroient auffi être fournis à Y interdiction
compofée pendant la paix , 8c à YinterdiClion.
fimple pendant la guerre ; YinterdiClion fimple ies
laifferoit dans l’inaction ; YinterdiClion compofée les
ramèneroit parmi les foldats ordinaires , 8c leur fe*
roit perdre leur fupplément de paye.
Quelques foldats ordinaires ont bien affez d’énergie
pour être fenfibles à YinterdiClion fimple j
mais le plus grand nombre feroit peu affeéié par
cette punition. Quant à YinterdiClion compofée , il eft
impoffible d’en faire ufage avec les foldats ordinaires
; car il n’y a aucun degré dans le militaire
qui foit placé au-deffous de celui qu’ils occupent,
& leur paye ne peut être diminuée ; ainfi les deux
efpèces d'interdiction ne doivent jamais , ce me
femble , defeendre jufqu’au peuple militaire.
Un officier fupérieur, particulier ou fubalterne
manque t-il par ignorance ou par oubli, à remplir
fes fondions , je Yinterdis , ou pour qu’il ait le
temps de s’inftruire, ou pour que la honte , réveillant
fa mémoire, la rende plus fure. Ne punit-il
point une faute qu’a faite un de fes fubordonnés ,
la punit-il avec trop de févérité ou trop de douceur
; en Yinterdifant je fuis cenfé dire : je vous
retire pour quelque temps l’autorité que le roi
vous a confiée , parce que vous en avez méfufé ,
ou parce que vous n’en avez point fait l’ufage
que vous deviez en faire.
Je tiens le même langage au bas-officier , &
j’ajoute , « comme le roi ne vous donne une haute-
paye que parce que vous le fervez en qualité de
fergent ou de caporal, vous ne devez plus la toucher,
cette haute-paye , quand vous n’ètes plus
fergent ou caporal. Com.ne vous remplirez cependant
, malgré votre interdiction, les fonélions de
caporal ou celle de foldat, il eft jufte que vous
touchiez la paye affeétée à une de ces deux places ;