
gendarmerie , dans la maifon du roi & dans les
autres troupes , on voit des lieutenants , des enseignes
, des guidons, des cornettes, des maréchaux-
des-logis, &c. ; mais jufqu’au temps que je viens de
marquer , je ne me Souviens point d’avoir vu de
Sous-lieutenants.
Le premier que j’aie trouvé avec cette qualité ,
eft M. de la Guiche de Saint Geran, qui fut en fuite
capitaine lieutenant des Gendarmes de la Garde. Il
âft dit da ns î'es provifions pour cette charge, en laquelle
il fuccéda à M. le maréchal de Souvré , qu’il
avoir été fait fous-lieutenant de cette compagnie par
Henri IV.
Dans les rôles des Chevau - Légers de la Garde ,
qui font à la cour des aydes, on ne voit point de
fous-lieutenants avant l’an 1665. Dans le plus ancien
rôle que j’aye vu de la première compagnie
des M oufquetaires , il y a un fous-lieuter ant : mais
ce rôle n’eft que de l'an 1643 » '• n*y- en a jamais eu
dans les quatre compagnies des Gardes-du-Corps,
ni dans les deux compagnies de cent gentils-
liommes.
Dans les livres fur la milice, faits du temps de
Henri IV , on ne voit point de fous-lieutenants• :s
mais dans les Difcoûrs Militaires du fic-ur le Normand
, imprimés en 1632, du temps de Louis XIII,
il eft fait mention de fous - lieutenants dans ia cavalerie.
Il falloir qu’il y en eû: quelques-uns de fon
temps : mais cela ne dura pas. Il faut en excepter
la compagnie colonelle de la cavalerie légère, où I
il y a un Tous-lieutenant', 8c qui obéir dans le corps
au corne»te qui porte la cornette blanche.
Pour ce qui eft de l’inftitution des Tous-lieutenant
s dans les régiments d’infanterie, je n’en trouve
point avant l’an 1657 : Ie r°i cn créa un dans les
compagnies du régiment des Gardes-Françoifes ;
il es mit auffi dans les Gardes-Suiffes, & enfin dans
les autres régiments d’infanterie : mais pour ceux-ci,
•n m’a alluré qu’il n’y en avoit point eu avant 1668.
On les fupprima dans la fuite , & on les rétablit
en 1687, pour placer dans les troupes plus de neuf
ceats jeunes gentilshommes, que lé roi faifoit élever
& former pour la guerre dans plufieurs places frontières
du royaume , comme à Strasbourg , à Long-
w y , &c. Ordinairement on füpprime la plupart
des Tous-lieutenant s à la fin d une guerre , & ©n les
rétablit quand on en commence une nouvelle«
Dans tomes les compagnies de la maifon du roi,
excepté les Gardes-du-Corps, il y a des fous -lieutenants
: il y en a auffi dans toutes les compagnies de
gendarmerie. Ce font les féconds officiers de toutes
ces compagnies. ( Daniel, M i1. Fr., tom. II ).
Lieutenant - Général. Ce titre eft donné à
des officiers de juftice : on le donne aux gouver-
neurs de provinces dans l’étendue de leur gouvernement
; on le donne même en divers endroits à
ceux qui commandent dans line province ou dans
de cerrains diftri&s , fous les ordres du gouverneur.
Il y a eu quelquefois des lieutenants-généraux
royaume. Enfin ? on le donne depuis plufieurs
années à des officiers de guerre qui ont le commandement
immédiat fous celui qui commande l’armée
en chef. C ’eft de ces derniers dont je vais traiter ici.
Mais il faut encore obferver que celui à qui l’on
donne aujourd’hui le nom de général (tannée , n'eft
lui-même , à parler proprement 8c exaâement, que
lieutenant-général, en tant qu’il repréfente la per-
fonne du prince à la tête des armées ; & pendant un
très longtemps, il n’avoit en effet que ce titre de
lieutenant-général.
Ce titre, pris en ce fens, étoit en ufage fous le
règne de Charles VII. Le fameux Jean , comte de
Dunois, le prenoit dans les aéles publics, parmi fes
qualités: Jean, bâtard d Orléans , comte de Dunois 9
chambellan de France , & lieutenant-général du roi ,
chef des arrière-bans de France ; c’eff ainfi qu’il fe
qualifie dans un aéte de l’an 1450, que j’ai cité en
parlant de ia charge de porte-oriflamme ; & ou lui
donne plufieurs fois ce titre dans les hifloires d u
règne de Charles VIL
Il efl auffi donné dans les hifloires du même
règne , au comte de Clermont, fils du duc de Bourbon
, & au comte de Vendôme , coufin çhî comte
de Clermont. On le voir fou vent dans les- hifloires
des règnes fuivar.ts dans touts ces endroits , il
fignifie celui qui commandoit en chef Un corps d’armée
, par la raifon «u’en Qette qualité, il tenoit la
p'ace du ro i, qui efl le commandant né de toutes
fes armées ; & c’efl par une efpèee d’abus & d’abréviation
dans les difcoûrs , que le chef d’une armé«
a été depuis appvMë général, au lieu de lieutenants
général.
Cela efl fi vrai, que dans les patentes que le roi
donne à un général d’armée pour le commandement,
il ne l’y qualifie que de fon lieutenant-général*
C ’efl: ainfi , par exemple, qu’il s’exprime, dans
celles qu’il donna à M. le vicomte deTurenne,
lorfqu’il lui confia le commandement de l’armé«
d’Allemagne, après la mort du maréchal de Gué-
briant, qui mourut de la bleffure reçue au fiège d«
Rotueil : « Louis-, par la grâce de Dieu , roi d«
France & de Navarre : à tous ceux , Sic. Après la
perte fenfible que nous avons faite de notre très
cher & bien amé coufin le comte de Guébriant, maréchal
de France, notre lieutenant-général en notr«
armée d’Allemagne.. . . Nous avons eftimé ne pouvoir
faire un plus digne choix que de notre très
cher & bien amé coufin le vicomte de Turenne;,
maréchal de France.. . . Sçavoii faifons que par ces
caufes & autres confédérations à ce nous mouvants.
. . . nous avons notredit coufin le maréchal
de Turenne , fait, conflitué & établi, faifons ,
conftituons & établifîbns par ces préfentes, fignées
de notre main , notre lieutenant-général, repré fenw
tant notre perfonne en notredite armée d’Alle-,
magne, &c. ».
Encore du temps de Henri IV » dit le maréchal
de Biron, premier du nom , on appelloit fimple-
ment du nom de lieutewM du roi, celui qui coflit
mandoit l’armée.
Nonobftant cela , l’ ufage efl aujourd'hui qu'il»,
maréchal de France commandant une armée , lors
même que le roi y efl en perfonne, efl appellé
général ; & cela par deux raifons : la première ,
qu’effeélivement il a le commandement général fur
toutes les troupes & fur touts les officiers qui com-
pofent l’armée; la fécondé, pour le diftinguer des
autres lieutenants-généraux qui portent maintenant
ce titre dans les armées , ,& auxquels il efl attribué
en un autre fens que celui dans lequel il efl donné j
au général dans fes patentes : car le titre de lieutenant
général lui efl donné comme reprefentant la
perfonne du roi à la tête de l’armée ; 8c les autres
ne le portent pas feulement par rapport au ro i,
mais auffi par rapport au général même, dont jls
tiennent la place dans la partie de larmee qu ils
commandent fous fes ordres , & parce qu à fon défaut
„ c ’eft-à-dire , par exemple, au cas qu il fut
tué, foit dans une bataille , foie dans ü | fiege,
c’eft à eux, félon leur rang d’ancienneté, à commander
l’armée ; d’où vient que dans leurs patentes,
il efl exprimé qu’ils commanderont les troupesriont
l’armée efl compofée, fous 1 autorité de nos lieutenants
généraux qui commanderont en chef nos armées.
11 y a encore une différence dans leurs pa^
tentes ; car dans celles de lieutenant-général, a qui
l’ufage donne le titre dé général, il efl dit : Nous
avons fait, conflitué nOtf e lieutenant-génèr N.J 8c
dans tes patentes de ceux dont je parle , il efl dit :
Nous avons fait, conflitué N ., l’un de nos lieutenants
généraux , pour marquer que dans une armee:
il n’y en a qu’un de la première efpèee , qui feul
repréfente le fouverain, 8c qu’il y en.a ou qu il peut
y en avoir plufieurs de l’autre efpèee.
L’infcription des patentés‘des; lieutenants-'géné-.
Taux dont il s’agît ic i , efl encore'remarquable': çe
ne font point des provisions comme'pôur plufieurs
autres charges militaires ; ce n'eft point non
plus un brevet comme pour les maréchaux de
camp; l’infcription efl telle: Pouvoir, lieutenant-
général , d’armée pour le fieur N.
Il efl a r r iv é quelquefois qu’un maréchal de France
même portât cette qualité lorfqîfil avoit un prince
au-defîiis de lui qui commandoit l’armée.en chef,
comme, par exemple à la bataille de Rocroi., le
maréchal de l’Hôpital étoit lieutenant-général fous le
duc d’Anguien.
La charge de lieutenant-général eft la plus haute
dignité de l’armée , après celle de maréchal de
France. Le lieutenant-général' efl le premier entre
ceux qu’on appelle officiers-généraux. C’efl un grade
où l’ori parvient aujourd’hui qprès être monté',à
Celui de brigadier , & enfuite à celui de maréchal d e
camp. On ne le regarde point comme une fimpïe
commiffiort celui qui en eft pourvu , en Conferve
le titre, même en n’en faifant plus les fondions.
Ce font eux qui aident le général de leurs confeils ,
qui commandent les ailés d’une.armée ; du l’infanterie
dans une bataille , à moins qu’il p’y ait plu
fleurs maréchaux de France. Il's commandant tes
quartiers, les attaques & les tranchées à un fiège,
chacun à leur tour. On les charge auffi , pour l’ordinaire
, des gros détachements que le général fait de
fon armée , foit pour iriveflir une place qu’il veut
affiéger , foit pour d’autres defleins.
Cette charge » telle qu’elle efl aujourd’hui, n’eft
pas fort ancienne en France: il n’en eft fait aucune
mention parmi les officiers d’armée , ni par du Til-
1er, qui ècrivoit fous le règne de Chàrîés IX , ni
par du Hail 1 an , dont le livre fut imprimé du temps
de Henri III. Je n’ai pas d’idée d’en avoir vu non
plus fous le règne de Henri IV. Le maréchal de
Biron,dans fon livre des maximes de guerre , n’en
dit rien , & parle du maréchal de camp comme du
premier officier après le commandant général.
On commence à trouver dé cette nouvelle ef-
pèce de lieutenants - généraux fous le règne de
Louis XIII. Il n’y en avoit pas dans touts les corps
d’armée ; & une marque évidente de cela , c’efl:
que dans les lettres où les généraux rendoient
compte au cardinal de Richelieu ou aux fecrétaires
d’é tat, dés corïfeils dé guerre tenus pour quelque
expédition, ils drfent qu’ils ont aflemblé leurs ma-
réchaux-de camps, & n e ‘font nulle mention de
lieu tenant-gênerâuk, dont ils rï’aù'r oient pas manqué
de parler, s’il y en avoit eu dans les armées. On
voit enepre dans la patente par laquelle' le roi
Louis XIII faifoit le duc de SaVoye capitaine général
:deS armées de France , & de celles des alliés en
, 1635 , que le maréchal de Créqui, tours les maré-
chaux-de-càmp , colonels , &e.., avoient ordre de
lui obéir, fans qu’il foit fait là aucune mentiôn de
iietctenâhrs-généraux.
'Ce'peftdânrfl y en eut dès-lors quelques-uns ;
f ie pouvoir de 'lieutenant-général donné à Bernard
No;gat;et d’Epernon, duc de la Valette, efl du 4
juillet i 6ï i ; celui du marquis de Saint-Chain on d
du 4 décembre 1630 (K. ) ). Car dans les préparatifs
que l’on fit pour, attaquer les Efpagnols l’an
1(53.8 , le prince de Condc devant entrer avec une
armée en Efpagne , il eft dit qu’il devoir avoir pouf
lïeütendht-général le marquis de la Force. Parfeille-
merit l’e duc de Longueville, qui devoit agir en
Franche-Comté , avoit pour fon lieutenant-général
M. dé Feuquières. Ces témoignages fuffifent pour
montrer qu'en ce temps-là il y eut des lieutenants
généraux fous les commandants en chef dans les
armées de France, & que quand il plaifoit au roi
d’en nommer , il n’en mettoit ordinairement qu’un
dans uhé afffiéë , & Rarement deux. Urne paroît,
par quelques exemples , que fur là fin du règne de
ce prince , quand deux maréchaux de France rou-
loient eufenrble dans la même armée , ils avoient
fous eux chacun un lieutenant-général. Je crois que
ce n’étoit alors qu’une Ample commiffion , &
qu’on né donnoit cette qualité que par une lettre
de fervice pour une campagne. C ”eft donc fous le
régné dé Louis-l’e-Grand qaèTlïfdge a été introduit
de mettre dans une armée Y^^Titors.Ueutenants-g.é-
héraux fous les ordres du commandant en chef,