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places fortifiées de la forte, & que prefque toutes .
font régulières en partie , 8c irrégulières en
d'autres , par rapport à-leurs fortifications , prefque
toujours compofées de vieilles & de nouvelles
pièces, elles ont toutes quelques défauts ou avantages
, par rapport à lafituation , plus grands à un
côté qu’à l’autre , ou par la nature de la campagne
des environs , cela fait une diverfité qui nous
oblige à autant de différentes obfervations.
Si la fortification d’une place a quelque cote
fitué fur un rocher de 25 , 30, 40 , 50 ou 60
pieds de haut, que ce rocher loit fain 8c bien ef-
carpé , nous la dirons inaccellible par ce côté_; fi
Ce rocher bat au pied d’une rivière d’eau courante
ou dormante , ce fera encore pis ; fi quelque coté
en plein terrein eft porté par une rivière qui ne
fait pas guéable , & qui ne puiffe être détourné,
que cette rivière' foit bordée du cote de la place_
d’une bonne fortification capable d'en défendre le
paffage, on pourra la dire inattaquable par ce cote ;
que fi fon cours eft accompagné de prairies balles
8c marécageufes .en tout temps, elle le fera encore
davantage.
Si la place eft environnée en partie d’eau & de
marais qui ne fe puiflent deflecher, & en partie
acceflible par des terreins fecs qui bordent fes marais
, que ces avenues foient bieq fortifiées , &
qu’il y ait des pièces dans le marai^qui ne foient
pas abordables , & qui puiflent voir de revers les
attaques du terrein ferme qui les joint; ce ne doit
pas être là un lieu avantageux aux attaques , à
eau fe de ces pièces inacceflibles,-parce qu ii faut
pouvoir embraffer ce que l’on attaque. Si la place
eft toute environnée de terre bafle & de marais ,
■ comme il s’en trouve aux pays-Bas , 8c qu elles ne
foient abordables que par des chauffées , il faut :
i°. Confidérer fi on ne peut point deflecher les
marais , s’il n’y a point de temps' dans 1 annnée où
ils fe defîèchent d’eux-mêmes, & en quelle faifon ,
& en un mot fi on ne peut pas les faire écouler $c
mettre à fec. _
20. Si les chauffées font droites ou tortues , enfilées
en tout ou en partie de la place, & de quelle
étendue eft la prairie qui ne l’eft pas , & à quelle
diftance de la place, quelle, en eft la largeur, & fi
l’on peut y tournoyer une tranchée en la défilant.
30. Si on peut affeoir des batteries au-deffus ou
à côté , fur quelque terrein moins bas que-les
autres, qu.i puiflent croifer fur les parties attaquées
de la place.
40. Voir fi les chauffées font fi fort enfilees qu il
n’y ait point de traverfale un peu confidérablé qui
faffé front à la place d’affez près , & s’il n’y a point
quelque endroit qui puiffe faire un couvert confi-
dérable entre elles , en relevant une partie fur
l’autre, & à quelle diftance de la place elles fe
trouvent.
50. Si des chauffées voifines l’une de l’autre qui
aboutiffent à la place fe joignent, & en quel endroit,
& fi étant occupées par les attaques, elles
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fe peuvent entre-fecourir par des vues de canon
croifees , ou de revers.fur les pièces attaquées.
6°. De quelle nature eft le rempart de la place 8c
de fes dehors , fi elle a des chemins couverts, fi
les chauffées qui les abordent y font jointes , 8c
s’il n’y a point quelque avant-folfé plein d’eau courante
ou dormante qui les féparent ; où cela fe
rencontre , nous concluons qu’il ne faut jamais attaquer
par-là, pour peu qu’il y ait d’apparence
d’approcher de la place par ailleurs , parce qu?on
eft prefque toujours enfilé 8c continuellement
efearpé du canon, fans moyen de s’en pouvoir
défendre , ni de s’en rendre maître , ni embraffer
les parties attaquées vers la place.
A l’égard de la plaine , il faut :
i°. Examiner par où l’on peut embraffer les
fronts de l’attaque, parce que ceux-là font toujours
à préférer aux autres.
20. La quantité de pièces à prendre avant de
pouvoir arriver au.corps de là place, leur qualité
& celle du terrein fur lequel elles font fituées.
30. Si la place eft baftionnée 8c revêtue.
4®. Si la fortification eft régulière ou à-peu jprès
équivalente.
~ 50. Si elle eft couverte par quantité de dehors,
quels & combien , parce qu’il faut s’attendre à autant
d’affaires qü'il y aura de pièces à prendre.
6°. Si les chemins couverts font bien faits /con-
treminés & paliffadés , 8c fi les glacis en font
roides , 8c non commandés des pièces fupérieures
de \z place.
7°.;S’il y a des avant-foffés 8c de quelle nature.
8°. Si les foffés font revêtus & profonds, fees
ou pleins d’eau , de quelle profondeur; fi elle eft:
dormante ou courante, 8c. s’il y a. des éclufes, 8c
la pente qu’il y peut avoir de l’entrée des eaux à
leur fortie.
90. S’ils font fec.s ,& fi les bords en font bas &
non revécus ; au refte on doit compter que les
plus mauvais de touts font les foffés pleins d’eau
quand elle eft dormante.
Les foffés qui font fecs , profonds & revêtus
font bons ; maïs les meilleurs font ceux qui, étant
fecs, peuvent être inondés , quand on le v eut,
d’une groffe eau courante ou dormante , parce
qu’on peut les défendre fecs, 8c enfuite les inonder,
& y exciter des torrents qui en rendent le
trajet impoflîble. Tels font les foffés de Valenciennes
du côté du Quefnoy, qui font fecs , mais
danslefquels on . peut mettre telle quantité d’eau
dormante* ou courante qu’on voudra , fans qu’on
le puiffe empêcher. Tels font encore les foffés. de
Landau , place moderne , dont le mérite n’ eft pas
encore bien connu. Cette place toute neuve & fans
être achevée, a déjà foutenu trois grands fièges,
dont aucun n’a été.conduit avec une grande intelligence
, 8c les défenfes l’ont été encore plus mal.
Les places qui ont de tels foffés avec des réfer-
voirs d’eau qu’on ne leur peut ôter, font très difr
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M e s à forcer , quand ceux qui les défendent
favent en faire ufage. . ■ ■ '
Les foffés revêtus des qu ds ont 1 0 , 1 4 , 1 5 ,2 °
Seat pieds de profondeur, font auffi.tort bons,,
parce que les bombes ni le canon ne peuvent rien
contre ces revêtements , & que l’on n’y peut entrer
que parles defeentes , c’eft-à-dire, en défilant un,
à un , ou deux à deux au plus, ce qui eft fujet a
bien des inconvénients , car on vous chicane par
différentes fouies fut votre paffage &. vos, logements
de mineurs, ce qui oattfe beaucoup de^ retardement
& de perte ; outre que quand il s agit
d’une attaque, on ne la peut foutemr que toible-
nient, parce qu’il faut que tout paffe par un trou
011.deux, & toujours en défilant avec beaucoup
d’incommodité. ;
Il faut encore examiner fi les foffés font tailles
dans le roc, fi'ce roc eft continu & dur ; car s il
eft dur & mal aifé à miner, vous ferez oblige de
combler fes foffés jufqu’a iirez du chemin, couvert
pour faire votre paffage, qui eft un travail long &
difficile, principalement s’il eft profond ; car ces
manoeuvres demandent beaucoup d’ordre &, de
temps , pendant lequel l’ennemi qui fonge à fe
défendre, vous fait beaucoup fouffrir par fes chicanes.
Il détourne les matériaux, arrache les fa*-' '
cinés , y met le feu , vous inquiété par fes forties
8i par le feu de fon canon , de fes bombes & de
fa moiifqiieterie , contre lequel vous êtes oblige de
prendre de grandes précautions , parce qù un
grand feu de prés eft fort dangereux ; c eft pourquoi
il faut de néceffué l’éteindre par un plus
grand, & bien difpofé.
Après s’être bien inftruit de la qualité des forti- -
fications de la place que l’on doit attaquer, il en
faut examiner les accès , & voir fi quelque rideau ,
chemin creux ou inégalité de terrein peut favori-
fer vos approches , & vous épargner quelque bout
de tranchée. S’il n’y a point de commandement
qui puiffe vous fervir , fi le terrein par où fe
doivent conduirè les attaques eft doux & aifé à
renverfer , s’ il eft dur & mêlé de pierres , cailloux
©u rocaillès',' ou de rochers pelés dans lequel
on ne puiffe que peu, ou point s’enfoncer.
Toutes ces différences font considérables , car fi
c’eft un terrein aifé à manier , il fera facile d’y
faire de bonnes tranchées en peu de temps, & on
y court bien moins de rifque. S’il eft mêlé de
pierres & de cailloux, il fera beaucoup plus difficile
, & les éclats de canon y font dangereux.
Si c’eft. un roc dur & pelé dans lequel on ne
puiffe enfoncer , il faut compter d'y apporter
toutes les terres & matériaux dont on aura befoin ,
de faire les trois quarts de la tranchée de fafeines
8c de gabions, même de balots de bourre & de
laine , ce qui produit un long & mauvais travail,
qui n’eft jamais à l’épreuve du canon, 8c rarement
du moufquet, 8c dont on ne vient à bout qu’avec
du temps, du péril &. beaucoup de dépenfes ; c’eft J
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pourquoi il faut éviter , autant que l’on peut, d’attaquer
par de telles avenues.'
Choix d'un front de place en terrein égal.le plus ftr
varable pour Vattaque.
Il faut examiner & compter le nombre des
pièces à prendre ; car celui qui en aura le-moins ou
de plus mauvaifes , doit être confidéré comme le
plus foible , fi. la qualité des foffés ne s’y oppofè
point.
Il y a beaucoup de places fituées fur des rivières
qui n’en occupent que l’un des côtés, ou fi elles
occupent i ’autre, ce n’eft que par de petits forts ,
ou des dehors peu confidérables, avec lefquels ou
communique par un pont ou par des bateaux , au
défaut dupont; tel étoit autrefois Stenay , 8c tels
.iont encore Sedan , Mezières , Charlemont & Na-
mur fur la Meufe , Metz & Thionville fur la Mo-
felle, Huningue, le vieux Brifack , Strasbourg 8c.
Philisbourg lur le Rhin , 8c plufieurs autres.
_ Où cela fe rencontre , il eft plus avantageux
d’attaquer le long, des rivières, au-deffus ou au-
deffous, appuyant la droite ou la gauche fur un
de leurs bords, & pouffant une autre tranchée
vis-à vis,, le long de l’autre bord , tendant à fe
rendra maître de ce dehors , ou d’occuper une
fituation propre à placer des batteries de revers fur
le côté oppofé aux grandes attaques.
Comme les batteries de cette petite attaque
peuvent auflivoir le pont fervant de commuai caution
à la place de ce dehors , les grandes attaques
de leur côté en pourroient faire autant, moyennant
quoi il feroit difficile que. la place y pût communiquer
longtemps ; d’où s’enfuivroit que pour
peu que ce dehors fût prêffé , l’ennemi l’abandon-
neroit, ou n’y feroit pas grande réfiftance, principalement
s’il eft petit & peu contenant ; mais ce
ne feroit pas la même chofe fi c’étoit une partie
deriav ille ou quelque grand dehors , à-peu-près
de la capacité de W ick , qui fait partie dé la ville
de Maftrickh ; tout cela mérite d’être bien démêlé ,
& qu’on y-faffe de bonnes 8c férieufes réflexions ,
car il eft certain qu’on en peut tirer de grands
avantagés.
Après cela il faut encore avoir égard aux rivières
8c aux ruiffeaux qui traverfent la ville , 8c
aux marais & prairies qui accompagnent leur
cours ; car quand les terreins propres aux attaques
aboutiffent contre , ou les avoifinent de près , foie
par la droite ou par la gauche, cela donne moyen,
en prolongeant les places d’armes jufques fur les
bords, de barrer les forties de ce côté-là , & de
mettre toute la cavalerie enfemble fur le côté des
attaques qui n’eft point favorifé de cet avantage,
çe qui eft un autre bien confidérable, parce que
fe trouvant en état de fe pouvoir porter tout enfemble
à l’aâion , elle doit produire un plus grand
effet que quand elle eft féparée en deux parties
éloignées l’une de l’autre.