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roc ; c’eft fur qupi il faut extrêmement fe précaution
ner.
A S ten a y ,le s affiégés allumèrent un grand feu
au pied du baftion de la gauche , devant le trou du
mineur, qui l’en chaffa fans retour.
-Au premier fiège de Manhould, les mineurs
furent chaffés de leur trou, 8c l’ennemi obligé de
changer d’attaque.
Au fiège de Mouzun, les affiégés firent un fi
grand feu au pied de la brèche, qu’on fut deux jours
fans en pouvoir approcher. Cela s'efl vu à plufieurs
places , 6* l'on avoit propofé de faire la même chofe
au dernier fiège de Lille tJi les munitions avoientper-
mis d'attendre l'ajfaut.
A Clermont, on s’y prit autrement; On attacha
trois mineurs prefque en même temps, l’un fur
la pointe d’une grande demi-lune bâtie fur le penchant
de la montagne qui couvroit l’unique porte
de cette place , dont le revêtement étoit beau 8c
très épais, mais fans contrefort ; c’eft pourquoi les
faces n’étoient point terraffées , mais feulement les
flancs d’une épaule à l’autre, 2 ,3 ,foutenues par un
fécond reculement formé en portion de cercles,
comme ©11 peut voir à la planche 30.
Les deux autres mines étoient ouvertes à moitié
des glacis, les galeries étant pouflees plus de
30 pieds au-deffous du chemin couvert, dont on
ne pouvoit fe rendre maître, à caufe de la trop
grande proximité du bafiion, dont le pied ne laif-
foit que 2 toifes entre lui 8c le parapet du chemin
couvert, fans le foffé entre deux. On pénétra plus
de trente pieds fous le corps de la place, 8c on y fit
trois mines, dont la première devoit être chargée
de 1600 liv. de poudre , la fécondé de 6000 liv .,
& la troifième , du côté du bourg, pouffée fous la
partie appellée Donjon, quoi qu’il n y en eût plus,
devoit être de 16 ou 18000 liv.
Ces mines étoient prêtes à charger, 8c on en
attendrit de terribles effets; mais il eft fûr que
celle de la demi-lune n’auroit fait qu’ouvrir le revêtement
, 8c que le refie n’auroit pas fuiv i, parce
qu’il n’y avoit rien quefes retranchements derrière,
qui étoient loin, 8c bien revêtus.
Il y avoit beaucoup d’apparence que les deux
autres auroient fait de grands efcarpements, 8c que
les brèches n’auroient pas été acceffibles. On les
fit voir aux ennemis dans le temps qu’on les al-
loit charger, ils en eurent peur, & fe rendirent.
S’ils avoient été bien habiles en fait de mines,
ils ne l’auroient pas fait, 8c fe feroient tirés d’affaire
avec bien plus d’honneur qu’ils, ne le firent.
Cela étant exécuté à propos, on fe rendra aifé-
jnent maître des tours. La place ne fera pas ceendant
encore ouverte , mais comme elle fera
ien prête de l’être, 8c qu’il ne reftera plus de
flancs aux ennemis , ils battront apparemment la
chamade, une plus grande réfifiance ne pouvant
fervir qu’à empirer leur condition , 8c à les faire
prendre prifonniers de guerre. C’eft pourquoi il
pe faut pas douter cju’ils ne fe rendent aufiitôt,
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fur-tout fi pendant les attaques de là contre-garde
8c de la tour, on a eu foin de bien tirer des bombes
8c des pierres dans les derrières, 8c aux environs
des tours ; que s’ils ne le tàifoient pas, il
faudroit s’établir dans les ruines de ces tours, s’y
fortifier, 8c rompre les galeries de la droite 8c de
la' gauche par des fougafles, 8c enfuite en venir
à de plus grandes mines, dont l’effet acheveroit
d’ouvrir la place, fi l’ennemi, foigneux de fon
falut, ne prévient fa perte par une prompte reddition
, fur quoi on fera pour lors en état - de lui
faire des conditions tort dures.
Des fondions des officiers généraux à la tranchée.
Le général qui commande l’armée qui fait le
fiège, a une autorité abfolue; il diîpofe 8c ordonne,
comme il lui plait, tout ce qui regarde les attaques,
8c l’on ne doit faire aucune entreprife confidérablé
que par fes ordres ; mais il doit confultçr, avant de
rien réfoudre, l’ingénieur général qui a la direéfion
des attaques ; le défaut d’obfervation de cette
circonfiance a coûté fouvent la vie à bien du
monde.
Il eft très important que le général vifitela tranchée
, mais de temps en temps feulement, 8c non
touts les jours. Il doit y venir peu accompagné, 8c
vifiter tout; fe faire rendre compte fur les lieux de
chaque chofe en particulier, 8c donner des ordres
fur tout, autant qu’il le jugera néceffaire.
Si les attaques font féparées, le lieutenant général
de jour choifit celle qu’il lui plait ; fi elles
font liées, comme il a le commandement général,
il commande aux deux, 8c par conféquent il doit
occuper le milieu entre les deux, mais non pas à
la tête des attaques, parce que les allées 8c venues
des gens qui ont affaire à lui, embarrafferoient le
travail ; outre qu’il feroit trop éloigné du gros des
troupes, le milieu de la tête des bataillons eft le
lieu qu’il lui convient le mieux. Il peut 8c doit
vifiter de temps en temps la tête des ouvrages.
Le plus ancien maréchal de camp doit fé^mettre
à la droite, l’autre à la gauche , les brigadiers à la
queue des détachements les plus avances.
Le lieutenant général de jour commande à la
cavalerie, infanterie, artillerie, ingénieurs, mineurs,
8c généralement tout ce qui regarde la fureté
8c l’avancement des attaques ; mais il fe doit
concerter avec le direéteur de la tranchée, 8c ne
rien entreprendre ni réfoudre fans fa participation,
car ce dernier eft lame 8c le véritable mobile des
attaques.
L’application particulière d’un lieutenant général
doit être de bien pofter les troupes , régler les
détachements, faire fervir les tètes de la tranchée,
8c fournir des travailleurs extraordinaires quand
on lui en demande.
Les maréchaux de camp font la même chofe
que le lieutenant général, par fubordination, 8c
ils doivent recevoir fes ordres, 8c les rendre aux
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brigadiers, 8c ceux-ci aux colonels, qui les dlftri-
büentà leurs régiments, à qui ils ont foin de les
faire exécuter. - % , .
Quand il y a quelques entreprîtes a faire , c elt
le lieutenant général qui en doit ordonner l’exécution,
par l’avis, 5 c fur l’expofédu direéleur général.
Lorfqu’il y a eu de ces premiers officiers dans
une armée , ce n’eft pas une néceffité que le lieutenant
général de jour couche à la tranchée, il
fuffit qu’il la vifite pendant le jour, 8c qu’il y donne
fès ordres.
Quatre lieutenants fuffifent pour une armée commandée
par un maréchal de France, le double des
maréchaux de camp, 8c le double de ceux-ci en
brigadiers, c’eft-à-dire que s’il y a quatre lieutenants
généraux, il devra y avoir huit maréchaux
de camp, 8c feize brigadiers; un plus grand nombre
eft inutile, 8c bien plus à charge que néceffaire
dans les armées.
Des rois & des princes.
Si les rois ou de grands princes, dont la vie
eft préeieufe aux peuples, étoient en perfonne à
l ’armée, 8c qu’ils vouluffent voir la tranchée, ce
qu’on ne peut défapprouver, il faudroit prendre
les précautions fuivantes fur le temps 8c les cir-
conftances de ces vifites.
i°. Que cela n’arrive pas fouvent, mais feulement
deux, trois ou quatre fois tout au plus pendant
un fiège.
20. Que ce ne foit qu’à des places confidérables,
8c non à des bicoques.
■ V . Que la tranchée foit bonne, 8c autant affurée
qu on peut le faire.
4a. Qu’ils voient l’ouverture de la tranchée fi
bon leur femble ; mais qu’ils ne la vifuent plus que
lorfque le canon fe fera rendu maître de celui de la
place.
50. Que la nuit qui précédera les vifites qu’ils
voudront faire, on envoyé une partie de leur garde
à la tranchée, diftribuée par petits pelotons en différents
endroits, pour plus grande fureté de leurs
perfonnes.
6°. Qu’ils y aillent fort peu accompagnés, 8c
feulement d’un capitaine des gardes, de trois ou
quatre de leurs officiers, de cinq ou fix feigneùrs
de leur cour, ou des officiers généraux, 8c du
direâeur de la tranchée qui doit marcher immédiatement
devant eux, pour leur fervir de guide, 8c
leur rendre compte, en chemin faifanr, de toutes
chofes.
7 °. Qu’ il ne fe faffe aucun mouvement de
troupes pendant qu’ils ieronr à la tranchée , mais
qu’elles fe rangent toutes fur le revers, 8c laiffant
le côté du parapet à fa marche.
8°. Qu’on faffe affeoir tours les foldats, leurs
armes à la main, les officiers fe tenant debout du
même côté , Tè chapeau à la main, fans laifier pa-
roitre leurs efpontons par-deffus la tranchée.
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ç8 Qu’ils vifitent tout jufqu’à la troifième place
d’armes, même jufqu’à la queue des fapes, afin
qu’ils en foient mieux inftruits.
iq°. Qu’ils montent de petits chevaux bas de
taille, doux , qui ne foient pas ombrageux , pour
faire leur tournée , au moins jufqu’à la fécondé parallèle
ou place d’armes, n’étant pas poffible qu’ils
y puiffent fournir à pied , quand les tranchées font
un peu avancées.
i i ° . Qu’on leur faffe un ou deux repofoirs dans
les endroits de la tranchée les pitis convenables ;
ces mêmes lieux pourront fervir après de couverts
aux officiers généraux de garde.
Après tout ce que nous avons dit fur la tranchée
, il faut encore ajouter une vérité confiante :
c’eft qu’il n’y a aucun lieu fûr dans la tranchée ,
quelque foin qu’on fe puiffe donner de la bien
faire. Comme il n’y a rien qui puiffe mettre à couvert
des bombes 8c des pierres quand on eft fous
leur bordée , 8c que la place en tire , il n’y a point
non plus de parapet de tranchée qui ne puiffe être
percé par le canon à 8 pieds au deffus du fom-
met ; 8c dans l’infinité de coups de moufquets qui
fe tirent, il y en a toujours quantités dont les
balles rafent le haut des parapets , s’amortift'ent 8c
plongent la plupart, avec encore aflez de force
pour bleffer & tuer ceux qui en font atteints.
Il y a plus, des coups de biais ou d’écharpes
qui rafent auffi le parapet de la tranchée, s’amor-
tiffent , 8c ne font pas moins dangereux , parce
qu’on ne peut guères les éviter.
Quand on eft fous la portée des grenades , c’eft
encore pis , les coups de feu font là dans leur
force, 8c bien plus certains ; outre que les éclats
des grenades 8c des bombes volent par-tout, 86
vont le plus fouvent tomber où on ne les attend
pas, c’eft pourquoi je crois qu’il eft de la prudence
que les grands princes , de la vie defquels dépend
le fort des états , dans les vifites qu’ils feront dans
la tranchée, ne paffent point au-delà de la troifième
place d’armes. Us ne doivent pas même ailes,
jufques-là.
De la manière cCempêcher les fecours.
Après avoir expofé dans les articles précédents
tout ce qu’on a jugé de meilleur 8c de plus utile
pour l’attaque des places , il refte encore à expliquer
la conduite que les affiégeants peuvent tenir
pour empêcher les fecours d’y parvenir.
i° . Il eft premièrement néceffaire que les lignes
foient bonnes , bien faites , fraifées 8c paliffadées ,
s’il eft poffible , en tout ou en partie, non fur le
haut A du parapet , comme on l’a pratiqué en
quelques endroits , ou dans le fond du foffé B
comme on a fait en d’autres lieux , mais le long
du bord extérieur comme on a fait au chemin couvert
; les paliffades ne valent rien ailleurs, ou fort
peu de chofe; car ia première A peut autant fervir
à-i’enneim qu’à nous, 8c la fécondé B «’empêche