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que les ennemis ’avent connoiflance de votre
marche, & qu’ils changent cette difpofition de
leurs troupes dont vos efpions vous avoicnt donne
a v is . n •
Pififtrate, chef des Athéniens , mftruit que ceux
de Mêgare s’étoient mis en embufcade polir enlever
les*'femmes d’Athènes qui iroient célébrer les
fêtes* de Cérès , marcha avec des forces fupé-
rieures contre ces Mégariens ; il les furprit dans
leur embufcade , & prit les vaiffeaux qui les
«voient amenés. .
Afin que les ennemis ne voient pas de loin que
vous conduirez plus de troupes que celles qu ils
-attendoient, vous ne ferez paroître que celles que
v o u s a v e z d’ab o rd d eftin é es p o u r le d é ta ch em e n t ,
p o u r le c o n v o i o u p o u r le fo u r r a g e , & v o u s b i f fe
r e z le s au tre s en em b u fcad e dans q u e lq u e e n d
ro it com m o d e p o u r ac co u r ir à temps dès q u e le
c om b a t com m en ce ra . .
S’il n’y a ni bois ni montagnes qui puillent 1er-
v ira cacher ce plus grand nombre de troupes, il
fuffira de meure en ufageles moyens que je pro-
pofe en traitant des occafions ou il faut tacher a en
venir à. un combat.
De la furprife d'un camp volant.
L o r fq u ’ un co rp s d e trou p es en n em ie s fo r t de fes
pla ce s o u fe fépa re de fo n armée p o u r v e n i r o b server
les m o u v em e n ts d e la v ô t r e , p o u r in c om m
o d e r v o s c o n v o is & v o s fo u r r a g e s , o u p o u r c o u v
r i r q u e lq u e p a y s c o n tre v o s partis , o n p eu t efre
p - r fu a d è qu e fe s gardes fe ron t fuffifamment avan-
c é e s p o u r a v e rtir a ffe z t ô t , afin q u e to u t le détach
em e n t puiffe fe r e t i r e r , toute s le s fo is q u e v o u s
ma rch ere z v e r s l u i , pu ifqu e je fu p p o fe q u e v o u s
ê te s fu p è r ieu r en n om b re . .
Il eft encore à préfumer que ce feroit des troupes
choifies, nullement embarraffées de bagages ou
d’artillerie , ainfi , dès que la moindre chofe favo-
rifera tant foit peu leur retraite, elles la feront en
fureté, à moins que prenant de nuit un détour au-
delà de leurs gardes , vous ne mettiez en embul-
cade un détachement fur le chemin par ou vous
penfez que celui des ennemis fe retirera.
A v a n t mis c e d éta ch em en t en em b u fc a d e , v o u s
ma rch ere z a v e c un au tre d éta ch em en t en d roiture
v e r s e u x , p o u r v o i r f i , p a r q u e lq u e n é g lig e n c e de
la pa rt de leu rs g rand es g a r d e s , o u en p ren an t une
ro u te q u i v o u s fît é v i te r le u r r en co n tr e , v o u s ne
p o u r r ira pas les fu rp r e n d re o u le s me ttre entre
d eu x f e u x , fu p p o fé qu ’ils p r en n en t leu r retraite
v e r s l’en d ro it o ù v o u s a v e z p o fe en embu fcad e
v o s trou p es , qu i fe ro n t a r r iv é e s a leu r p o fte a y an t
q u e les ennem is d é c o u v r en t l.au tre d éta ch em en t.
Si vous n’avez pas affez de troupes pour former
deux corps, dont chacun fo.t plus fort que
celui des ennemis, il fuffira que celui de 1 embufcade
le foit ; & à la place du fécond détachement,
vous, enverrez feulement beaucoup de-tambours &
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de trompettes, q u i, à grand bruit J s’avancér'oUt
vers les ennemis longtemps avant le jour, afin que
s'ils fe retirent dans la crainte que ce parti ne toit
conftdérable , ils arrivent à l’endroit de 1 embufcade
avant que le jour paroiffe, car s’ils voyoïent
que votre parti eft peu nombreux, ils les chargc-
roient, retourneroient à leur ancien polie , fit ren-
droient inutile votre embufcade.
Afin que ces tambours & ces trompettes puu-
fent fuivre toute la nuit & s’échapper, fuppofé
que les ennemis les chargent,ils doivent être bien
montés; il faut néanmoins que le parti qui doit es
foutenîr, foit plus gros que les patrouilles &. les
grandes gardes des ennemis, parce que li,quelqu’une
venoit à battre votre parti, le corps principal
des ennemis n’abandonneroit pas ion ter-
rein , puifque le commandant, avant de fe mettre
en inarche, fera informé de la déroute ou de la
fuite de votre troupe. , f
Le maréchal de Villars., pour exterminer les fanatiques
rebelles , qui , au mots de feptembre
1704 s’ètoient retirés avec RaYanel, leur chef.,
dans le bois de Saint-Bénézet, détacha un bataillon
de Hainaiilt & un autre de Charolois pour les
attaquer. 11 ordonna qu’on leur lama le partage
libre du côté de Caffagnoles , jufqu’à 1 endroit ou
M de Villars avoir mis en embufcade quelques
compagnies de Suiffes & de dragons , commandées
par M.‘ de Courte». Les fanatiques voyant que
cette retraite leur étoit ouverte , la prirent, & ils
donnèrent dans l’embufcade , où ils furent entièrement
défaits. . , - • r
11 refie à favoir de quel côte les entremis feront
leur retraite, afin de dreffer r embufcade fur leur
chemin ; pour cela, ilfaudroit leur avoir donne
auparavant une fauffe alarme la nuit ,.& avoir mis
derrière eux des partis ou des efpions pour obier-
ver la route qu’ils avoient pris. Cette alarme doit
être donnée avec beaucoup de monde, lorfqu on
n’en doit employer enfuite que peu pour celle qui
doit les faire tomber dans l’embufcade-
Si le détachement eft de cavalerie, 011 peut jU-
oer qu’il fera fa retraite par la. plaine; & qupn
choifira une retraite différente,fi c eft un détachement
d’infanterie; mais qu’il fon de cavalerie ou
d’infanterie, il eft à préfumer qu il fe retirera vers
le corps de fes troupes ou vers celle de fes places
’ “s fc ê 'd èS iem en t fe trouve loin de fes places
& de fon armée , & s’il tire fa fubfiftance de quel
que lieu qu’il a derrière, d’ou touts les trois ou
quatre jours on lui apporte le via & 1 avoine
faites l'expédition que je propofe un jour aupaia
vant celui que les ennemis doivent recevoir ce! e
avoine & ce pain , ce qu’il vous fera atfe de favoir
par vos efpions. Portez l’etnbufcade fur le. chemin
qui eft entre les ennemis & celui vers lequel .1 eft
vraifemblable que les ennemis feront leur retraite,
afin d'y prendre la provifion neceffaire pour.conri
nuer leur marche, excepté que le commandant
SUR
du d éta ch ement n’ait eu la précaution d’ e n v o y e r
dans fo n camp pour d eu x o u trois jo u rs lin e ré-
fe rv e de pain.
Si les ennemis, fur l’alarme que votre parti leur
donne , fe retirent par un autre chemin que celui
où vos troupes font en embufcade , elles peuvent,
la nuit fuivante , changer de pofte , & s’aller embu
fquer fur la route que les ennemis ont tenue ,
parce qu’il eft probable qu’ils viendront occuper
le même terrein qu’ils occupoient auparavant.
Vous pouvez aufli faire marcher ouvertement les
troupes de votre embufcade pour fe venir joindre
au parti; & fous prétexte de fe rafraîchir, elles
feront aire jufques vers la nuit ; alors elles prendront
leur retraite par des hauteurs , afin que les
ennemis les puiffent appercevoir, & croire que
vous retournez à la place ou au camp d’où vous
étiez fortis.
Dès qu’il fera nuit , vous ferez une contremarche
pour vous venir mettre en embufcade dans
le même pofte d’où les ennemis étoient décampés ;
mais comme ils voudront laiffer paffer cette nuit
avant que d’y revenir, vous devez vous munir de
pain & d’avoine , & avoir la patience de vous y
tenir caché un jour & une nuit de plus. Il eft à
croire que les ennemis, après ce temps, retourneront
à leur ancien pofte ; lorfque vous aurezappris
par vos efpions qu’ils ont deffellé leurs chevaux
& dreffé leurs tentes, allez à grand pas pour les
charger , ayant mis ,fi vous le jugez à propos , de
l’infanterie en croupe derrière de la cavalerie.
Ce que vous avez le plus à craindre eft d’être
découvert dans votre feconcle embufcade par les
partis que les ennemis feront avancer pour battre
la campagne. Pour l’éviter, il faut que cette embufcade
foit un peu éloignée , un peu par le côté.
Je parlerai plus au long de toutes ces chefes en traitant
des eoebufcades.
Quand je dis de demeurer longtemps en embufcade
, cela fe doit entendre lorfque les ennemis
n’ont pas des troupes fupérieures à portée de venir
fondre fur le détachement qui forme l’embufcade,
ni fur votre armée, qui manque des foldats qui
compofent le détachement.
Une pareille embufcade eft fur-tout dangereufe
lorfque les ennemis peuvent, avec de la cavalerie
, voits pourfuivre dans la retraite que vous
faites avec de l’infanterie par un terre-plein; car
outre que leur cavalerie arrivera plutôt que l’infanterie
pour vous couper , elle aura de l’avantage
dans un combat en plaine ; les troupes de votre
embufcade n’auront pourtant pas beaucoup à craindre
, fi elles peuvent fe retirer par des montagnes,
des bois ou des défilés, lorfque les ennemis ne font
fupérieurs qu’en cavalerie; au contraire, s'ils ne
vous (urpaftent qu’en infanterie , il n’y aura pas
de danger pour l’embufcade que vous formerez
de Cavalerie feule, principalement fi vous pouvez
^l're retraite par urvpays où il n’y a pas d’étroits
dfftiés, parce qu’a loi s l’infanterie des ennemis ne
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pourra jamais atteindre votre cavalerie, ni le petit
nombre de la leur ne fe hafardera pas à fe détacher
de leur infanterie. Ces dernières réflexions
font les mêmes que le chevalier Melzo a faites précédemment
au livre 4 de fes règles militaires.
Il n’eft pas fi dangereux de fe tenir un jour entier
en embufcade , que d’y être deux heures de
la nuit fuivante, parce que le jour vos fen tin elfes
avertiffent fi elles découvrent de loin un nombre
conftdérable d’ennemis , & vous avez le temps de
prendre vos mefures ou de faire retraite ; avan-,
rage que vous n’avéz pas la nuit.
De la retraite après la furprife dun quartier , dune
place ou dun corps de troupes en campagne.
J’ai déjà dit en quel endroit orf doit mettre un
aftez grand nombre de tambours & de trompettes
pour fonner la retraire en fon temps. J ai parlé'
aufli de l’ordre qu’il faut donner par avance , afin
qu’au fon de ces mêmes trompettes , les troupes fe :
retirent pour venir fe former.
Ayant fait battre la retraite , un détachement
defliné à cette fin doit viftter dans les maifons &
courir dans les rues pour arrêter & punir les foldats
qui n’ont pas obéi ; après quoi on fera la
revue dans chaque compagnie ou dans chaque petite
troupe ; & s’il fe trouve qu’il manque plus de
monde que celui qu’on compte avoir été tué dans
l’attaque, on vifitera une fécondé fois dans les
maifons.
S i , malgré touts ces foins, les troupes , par l’avidité
du pillage , tardent à venir fe former, & s’il
y a du danger pendant ce retardement que les ennemis
ne furviennent en nombre fupèrieur, vous
ordonnerez qu’on mette le feu au camp ou au lieu
qui a été furpris, afin que les flammes chafîènt
ceux des foldats que par aucune autre voie on n'a
pu forcer d’abandonner le pillage.
Ce fut par cette raifon que Barthelemi d’AI-
biano fe fervit à Trévis de ce dernier expédient ;
car il eft certain que les troupes débandées pour
le pillage courent un rifque évident d’être battues,
même par un nombre inférieur d’ennemis.
J’ai parlé de ia défenfe qui doit être faite aux
foldats & à toute autre perfonne de fe retirer avant
ou après le détachement ; comme plufieurs le font
pour mettre à couvert le butin ou pour n’être pas
obligé de partager avec leurs camarades ; j’ajoute
qu’il faut avoir donné ordre qu’il y ait fur les chemins
qui mènent à vos places ou à votre camp ,
des gardes qui arrêtent touts les valets , foldats &
vivandiers qui pafferont ; les gardes du camp en
uferont de la même manière à l’égard de ceux
qui j n’ayant pas été arrêtés par les premières , arriveront
avant ou après le détachement ; & outre
le butin qu’on leur ôtera., on les punira , pour fer-
vir d’exemple, & éviter que le même défor dre
n’arrive dans un autre cas pareil.
J’ajoute ;à cî que j'ai dit touchant les voitures