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corte d’un détachement de la police ; les ' valets i
non plus que les foldats , ne pourront , fous
quelque prétexte que ce foit , s’éloigner-de leurs
corps refpeâifs ou de leurs bagages ; à l’égard des
vivandiers , comme ils font obligés de s’occuper à
faire des provifions , ils font forcés , pour en trouver
, de s’écarter & d’entrer dans les villages 8c
dans les maifons ; la police défignera chaque jour
ceux qu’elle voudra permettre d’aller à la provi-
fion , elle fera inferire leur nom , & pour une plus
grande fureté , elle établira dans touts les villages
par lefquels ou auprès defquels paffent les colonnes
, des gardes deftinéës à réprimer lès défordres
; elle enverra en outre des patrouilles fur
toute la marche, 8c principalement aux environs
des colonnes des bagages de l’artillerie , & de
celle des vivandiers , ouvriers & marchands.
. 2°. Campements.
' Quand on aura défigné l’endroit où l’armée doit
camoer, la police fera couper fur le front & dans
toute l’étendue du campement.,.. les denrées qui
pourroient s’y trouver, St les fera mettre à part ,
pour qu’elles fervent à l’ufage de l ’armée,; elle fera
auffi couper & bûcher le bois néceffaire à l’armée ,
lé fera ranger, & veillera à fa diftribution , empêchant
par-là que l’on puiffe avoir dés prétextes^
d’abattre.du boisa volonté , & veillant à ce que
perfonne ne fe permette pareil défordre. r-
Elle s’occupera des eaux , auraToin de faire
goûter quelles font les meilleures , afin de les indiquer,
de les rendre bien propresSc bien courantes ,
d’en faciliter les abords , & d’y mettre des fenti-
nelles pour empêcher qu’on né les troublé, 8c y
maintenir l’ordre lorfqu’on viendra en puifer.
3°. Fourrages.^ ,
La police , foit dans les marches , foit pour les
campements , s’occupera à connoître quels.font les
endroits les plus propres pour les fourrages en
verd ; elle les défignera , ainfi que l’efpace auquel
il faudra fe borner ; afin de ne point faire de dégâts
, elle tâchera de les empêcher ; quant aux
fourrages au fe c , elle préférera les livraifons de
la part des propriétaires, afin d’affurer leur tran-:
quiljiii & une plus grande abondance dans l’ar-.
mée ; en conféquence elle avertira à temps.lès ha?
bitantà. de battre les bleds' ou autres grains , & leur
ordonnerâ de préparer hors des villages l’amas des
denrées néceffaires, afin qu’il ne fe gliffe perfonne
dans les maifons, 8c éviter par-là les défordres.
Elle défendra, fur tout, que qui que ce foit ne
force les habitants à donner des chevaux , des
charriots ou des guides, fans l’ordre du général
de la police , ni ne touche aux denrées deftinées à
l’armée ; elles feront diftribuées dans le plus grand
ordre, ou livrées aux différents ouvriers qui de-,
vrontles employer pour l’armée dont on fixera
lefalaire pour leurs peines.
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Au moyen de ces précautions , une armée fub-
fiftera deux fois plus longtemps qu’elle ne peut le
faire actuellement, les opérations feront plus allurées;
8c les habitants , certains d’être à l’abri des
vexations , s’emprefferont de concourir aux be-
foins de l’armée , & d’y répandre l’abondance.
4 . Détachements.
Quand une troupe fort du camp pour aller en
détachement, il faut que le chef réponde de fa
conduite , qu’il ne foit permis à perfonne de chaf-
fer , ni de pécher, ni de s’écarter des chemins, ni
de s’arrêter dans les villages, enfin il faut les fou-
mettre à la police la plus exaéte.
La police veillera à c.e que le détachement qui
doit fortir, ait les guides, les vivandiers , boulangers
, bouchers , ouvriers qui peuvent lui être né-
ceffaires, fans quoi il pourroit être expofé à manquer
de ce dont il auroit un befoin indifpenfable ,
ou le chef feroit obligé de biffer les foldats s’occuper
à fe procurer ce qui leur manqueroit, d’où
r il naîtroit naturellement des défordres St des maux
fans nombre ; il ne feroit pas non plus hors de
propos que la police fît fuivre chaque détachement
par un certain nombre de fes foldats du guet à
cheval. ;
5°. Habitants, &c.
Quand même on vondroit mettre à part l'humanité
St le droit des gens , il feroit encore de l’intérêt
particulier d’une armée, de ménager. les habitants
du pays où l’on fait la guerre, ainfi que leurs
biens , & de leur accorder toute prbteéiLon contre
les violences, les vols St les dégâts; fans ces précautions
fages & néceffaires , on manque bientôt
de fubfiftances , on eft gêné, dans fes opérations ,
forcé fouvent de quitter des pofitions avantage a fes,.
St d’en prendre d’autres qui procurent à l’ennemi
des moyens dont il profite, St dont il vous , rend
la viétime-;on ,1e répète fans ceffe , mais on l’oublie
plus vite encore. Voulez-vous vous -affurer
des fucc.ès à la guerre , affurez-vous des .fubfiftances,
St que jamais vous ne foyez ni gêné ni
contrarié par elles. Toferois prefque dire que les
fubfifiances font à une armée, ce que font le fang
8c les humeurs dans le corps humain ; fe rea-
contre-t-il le moindre obftacle dans les vaiffeaiix.,
bientôt ils s’engorgent, St iffe prépare une obf-
tru&ion ; elle.s’y forme, elle y augmente , la circulation
eft arrêtée, la maladie arrive , St l’homme
fouffre, réfifte avec peine , languit ou meurt.
Cependant ces fubfiftances fi néceffaires dans
une armée , c’eft la police qui peut le plus contribuer
à les lui procurer , St fur-tout à influer fur
leur plus longue durée, par une diftribution fage ,
continue , & faite fans contrainte. Mais jufqu’à
présent on a trop négligé cette partie fi effentielle,;
elle exige , elle.,feule , une perfonne très intelligente
, qui s’en occupe uniquement, St qui fâche
réunir une grande aftivité à une jufte févérité. Cette
perfonne devroit être connue fous la qualité de général
de la police', mais comme cette partie exigeroit
des connoiffances fur 1a guerre , le droit, le commerce,
la médecine, les peines à infliger, Stc. ,
connoiffances qui ne peuvent pas fe trouver dans
un feul. hom m e au point où cela lèroit néceffaire
, il feroit important que le général de la po-
lice fût aidé par un confeil auquel il préfideroit ; ce
confeil feroit compofé d’un officier général, d’un
médecin, d’un Homme verfé dans les loix & le
commerce , 8t d’un prévôt de la marèchauftee ,
dont les fondions feroient bornées à tenir fous fa
garde les coupables , St à leur faire infliger les
peines auxquelles ils feroient condamnés, ou par
les ordonnances du confeil de la police , ou par le
confeil lui-même.
Le commandant de l’armée donneroit fes ordres
au général de la police, celui-ci en feroit part au
confeil, St fes délibérations feroient enfuite pré-
fentées \au commandant de l’armée , qui les figne-
roit fi il vouloir les approuver.
Indépendamment du confeil de police , le général
auroit des lieutenants , lefquels auroient à leurs
ordres des officiers, des bas officiers St des troupes
à pied St à cheval, fous le nom de guet ; le grand
prévôt auroit fous lui la maréchauffée.
Le guet né. feroit compofé que par des foldats
vétérans ayant la plaque , ou par des invalides en
état de fervir. Les bas - officiers feroient choifis
parmi ceux de l’infanterie 8c de la cava|erie, 8c
dans le guet de Paris, les officiers ne feroient choifis
que parmi les officiers de fortune , ou retirés ou
en a,élivué ; quant aux lieutenants du général de la
polipe, ils auroient rang de lieutenant-colonel, 8c
feroient choifis parmi les lieutenant-colonels 8t les
majors de l’infanterie St de la cavalerie les plus
inftruits St les plus en état de bien remplir une
place auffi pénible, auffi difficile 8c auffi importante.
Comme il ne faüdroit pas trop multiplier ces
troupes , dès qu’une patrouille ou quelque autre
troupe du guet auroit arrêté un coupable , elle le
remettroit à la marèchauftee ; dès qu’elles auroient
befoin de main-forte 8t qu’elles en demanderoient
à quelque troupe que ce puiffe être , aucune ne
pourroit s’y refùfer à la réquifition que leur feroit
l ’officier ou le bas-officier qui commanderoit une
patrouille ou une troupe du guet.
L’uniforme de ces troupes devroit être très dif-
tinft de celui des différentes troupes quf compo-
feroient l’armée.
Quant au moyen de les foudoyer pendant la
guerre , on trouveroit des re(Tources peut-être plus
que fuffifantes , dans les gratifications tirées des
habitants pour la fureté de leurs poffeffions , dans
un impôt peu confidérable fur les vivandiers , cof-
fetiers , ouvriers, & toute efpèce de marchands;
dans les confifcations , les amendes pécuniaires ,
& une retenue fur les ventes publiques, 8cç. ; pén-.
dant la paix les membres de ce corps ou rentre-
roienj aux invalides, ou fe retireroient chez eux
avec une paye fuffifante pour leur fubfiftance.
La police générale ainfi établie, il feroit effen-
tiel que celle particulière des corps fût fubor-
donnée à celle de l’a/mée , fans cela les fautes
contre la police refteroient très fouvent impunies ;
tout doit concourir au même but, qui eft le bien
public ; il faut donc détruire line indépendance
nuifible au bon ordre ; la police des corps une fois
fubordonnée à la police générale, on fe hâteroit
d’abolir cette coutume impitoyable de punir de
mort un miférable foldat qui a volé un choux ou
une rave ; cette févérité, au lieu de remédier au
mal, ne fert qu’à l’a,graver ; file foldat eft pris , il
eft pendu & perdu ; fi il n’eft pas pris , il a déferté ,
8c il eft encore perdu ; mais l’ennemi en profite .,
8c la perte eft double, d’autant que les maraudeurs
font pour l’ordinaire les hommes les plus
braves & les plus courageux de l'armée.
Cependant en admettant , comme on le pro-
pofe, une- police exatfie, jufte 8c févère , tours les
différents corps de l’armée concourent avec elle à
ce que fes ordonnances foient ponctuellement exécutées
; le camp, les villages qui Favoifinént, les
campagnes qui l’entourent, les marchés où les foldats
doivent trouver ce qui leur eft néceffaire ,
tout enfin ce qui peut tendre à augmenter la fureté
•au-dedans 8c au dehors , étant continuellement
furveillés par les refpe&ables vétérans qui com-
poferoient le guet, on a lieu de croire qu’on établirait
une abondance fuffifanté fur tous lès ôbjets^
qu’on jouiroit d une bien plus grande tranquillité ,
èt qu’il y auroit bien moins de défordres à réprimer.
( Le chevalier de Setvan , major d'infanterie ).
POLYGONE. Eaceinte de place qui a plufieurs
côtés. On nomme auffi polygone , un front de fortification
deftiné à inftruire les jeunes ingénieurs 8c
artilleurs dans l’art d’attaquer les places , & on fait
devant ce front tout le fimulacre d’un fiè'ge. Il y à
des polygones dans les écoles de génie.
PONTS 8c CHAUSSÉES. Les anciens peuples
ne mettoient pas au rang des adminiftrations brillantes
, celle de l’entretien des chemins publics.
Suétone nous apprend que Cæfar, la première fois
qu’il fut créé conful, fe tint offenfé de la propofi-
tion qui fut faite au fénat, d’ajouter cette dirëécion
à celle des eaux & forêts , aux autres fondions du
confulat; 8c Plutarque rapporte que dans une oc-
càfion où le parti dominant du confeil de Thèbés
étoic contraire à Epaminôndâs , on conféra la
charge des chemins à ce célèbre général, comme
pour l’humilier, lorfqu’il s’attendoit, avec raifon ,
à être continué dans les premières dignités de la
république. Sa vertu fut bien s’en venger par cette
belle réponfe fi digne d’une grande ame 8c du zèle
d’un bon citoyen : « Je ferai enforte, dit-il, que
la baffeffe de cet office ne me nuira pas tant, que la
dignité de ma perfonne lui profite » ; fans doute
ce:ie idée de yilité■ qire les Thébaitis aitachoient à