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La fécondé rai fon , qui èft cellé d’établ?r des'bon-
tTibutions dans-le'pays ennemi, n’eft^sas'lborine:
C ë fle font point les partis qui fortenr de : là: ligne
qui établirent la contribution, ce font ceux qui
• forcent des places.
Celle' de la facilité pour la communication d’une
' place à T-autre , eft un peu plus apparente pour le
détail de ceux- qui, à couvert de 4a ligne , veulent;
aller feuls. Voyez pour cet effet ce quenous avons!
dit page 195— 196, en nous appuyant du fùffrage
de rM. de Feuquières..
Voilà quelles ont été les premières raifons pouti
mettre les lignes en ufage; & ce que j ’oppofe à cesj
raifons , me paroît fuffilant pour les détruire , fans
rapporter ici les exemples, qui juftifîènt ce que;
j ’avance,contre\es-lignes* \i:
^ Cn a fait dans les deux dernières guerres un troi-j
fième ufage des lignes, fur lequel je m’étendrai
feulement pour en foire fentir le mauvais. On ai
voulu foire un fyftème nouveau d’une guerre défen-
- f iv e , derrière des lignes dune longue étendue de
pays ; & l’expérience a fait connoître la fouffeté
de ce fyftème , qui réfide en deux points incontefl
• tables.
Une armée dans des lignes , n’en peut plus fortir
qu’en défilant; & par conféquent, l’ennemfqui s’en
approche, éft libre dans fbuts fes mouvements ■
qu’il fait auffi hafardeux qu’il lui plaît, fans craindre'
d’inconvénient.
Une armée dans des lignes, .n’y eff jamais en-
femble , parce qu’il fout qu’elle garde un trop grand
front ; & par conféquent, lorfque l’ennemi atraque
un endroit de ligne, dont il a dérobé la con-!
noifiance, foit par un mouvement que la conftiru-
tion du pays lui aura donné la facilité de cacher,
foit par une marche de nuit, pendant qu’il fera attaquer
le côté oppofé à celui de fa véritable attaque
, il eft certain que cet attaquant n’aura jamais:
à faire qu’à une partie de l’armée , dont le refie ne
pourra même marcher aufecours du corps attaqué,!
que très difficilement & en colonne , ce uni efl périlleux.
Ainfi je conclrtds que l’armée qui efl contrainte
dans routs fes mouvements, efl toujours inférieure
à celle qui fait touts les fiens avec une liberté fi entière
, qu’elle peut hafarder les moins prudents , fans
craindre d’en être châtiée.
Les dernières lignes qui ont . été confinâtes dans
la vue de ce nouveau fyflème de guerre défenfive
ont eu une trop grande étendue : il a fallu employer
à leur garde, un trop grand nombre de
troupes; ce qui n’a pu .fe faire qu’en affoibliffant
l’armée ; ou bien avec toute l’armée , ce qui a fait
qu’elles ont été forcées toutes les fois qu’elles ont
été attaquées.
Des lignes d’ailleurs dans une fi grande étendue ,
ne peuvent être fuffifamment garnies de redans ôc
d’ouvrages fermés ; ainfii elles ne peuvent jamais
£tre bonnes,
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,> cas- auquel je puis approuver les lignes,
■■ eu quand- eH'es font courtes , qu’elles couvrent
•une','grande tètëndiie- dè pay s , & quelles font
appuyées & foutenues par des places, de ma.
nierë que' la diftàn'cé fdit petite entre les places &
•les gros portes fortifiés qui foutiennent les lignes -,
eh-lorte qued-Gn-'iptufle réduire l’armée qui les veut
artaquer, a ftes< points d’attaque.
Je pàffe à présent a la manière d’attaquer avec
fucêès les lignes qui' couvrent un pays.
J.ai' dit précédemment , que, .toutS’ les mouvements,
de .celui qui. attaque font libres ; par conféquent,
les faifan.tr b,u, & comme il.lui plaît, il efl
prefqiiimpoflible qu’il ne réuffiffe dans fon def-
•fein. .
L ennemi qui veut, attaquer ces. lignes gardées ,
foit- fimplement par un corps de .troupes , foit par
l’armée, entière ,!exécqte.ce deffein de deux manières.
Si les lignes font gardées, par un corps de
troupes , cette entreprife. efl fort aifée. On y
marche, enfemble jufqu’à portée de ..la ligne ; on
lui dérobé de nuit une marche , en laiffant.toujours
devant lui quelques troupes pour retenir, fon attention
jufques' vers le temps de. la fin delà nuit,
& celui qu’on juge convenable pour rejoindre le
corps qu on aura fait marcher , pour forcer la ligne
par un endroit qui aura' été dégarni.
On fe forme dès qu’on eft entré dans la ligne ,
& l’on marche diligemment au corps qui eft
commis à la garde de la . ligne, lequel ne fe trouvant
pas , ou tout enfemble ou en bataille, eft
forcé d’abandonner toute la ligne pour fe retirer
fort en arrière , ou de combattre avec défavantage.
Cette operation.eft prefque toujours fûre à exécuter
, dans la fuppofition qu’on a marché à ces
lignes., avec un corps fupérieur à celui qui les
garde.
Que fi l’on marche avec toute l’armée pour attaquer
des lignes dans lefquelles l’armée ennemie
* feroit entrée pour les garder & les foutenir, cette
opération eft encore plus àifée à exécuter que la
première, dont je viens de parler ; parce que les
mouvements de cette armée ainfi allongée en-dedans
de la ligne, font plus périlleux à faire en colonne
, que ceux d’un corps médiocre ; & qu’il eft
prefque toujours ;lur , que pourvu que cette ligne
fe trouve forcée en un. leul endroit, on fe trouve
plus promptement formé & en bataille en-dedans
de la ligne, quemele ,peut être ^attaqué , qui
trouve en colonne, & fou vent féparé-de la partie
de fon armée, qui-fe fera trouvée en-delà du lien
par lequel la ligne aura été forcée.
Ces mouvements pour attaquer des lignes étendues
& gardées par une armée , doivent toujours
être faits de nuit, afin de dérober la connoîffance
de la véritable attaque , qui doit toujours être fa-
vorifée par quelques autres fouffes- attaques fort
LIG
éloignées- & fort v iv e s , pour y attirer l’attention
de l’ennemi.
La véritable attaque même ne doit commencer
qu’un temps confidérable après les fauffes afin de
donner le temps à l ’armée attaquée dans les lignés
défaire quelque mouvement du côté de la fan fie
attaque , & au général celui de .s’y porter Mjjfo
meme. . : ’ i f -
•Un grandiront ne peut, jamais etre sli uni 1 qp 11
ne foit ai fié , à l’attaquant, dé cacher (es) principaux :
mouvements, au moins en partie- Ainfi>çe fera lur
la .'connbiffance qu’il aura pris; du <teri;ein , quil-
fera fa difpofition pour l’attaque* j
Rertïafquês,
Comme j’ai dit dans mes maximes tout ce ;qu ilr
y -àvoitbà dire pour - &.^contre, ces, lig n e s je jiiie '
contenterai de rapporter ici les exemples .que j ai.,
vus. de-leur inutilité, non-feulement pour les deux
objets des courfes & des contributions dont ori.-
prétend par-leur moyen garantir un pa-ysr, ;.mais
même de Centrée de rarmée-ennemiedans. Géipays..
couvert de lignes ,. quoique gardées par une arm,éei,
principalement lorfque l’étandue .de la iigne- ,s ei\-
trouvée plus confidérable que eeHendpùfront 4 ?
l’armée, ce qui arrive toujours, Vf! j&fÿ'é ,>
Les lignes les plus; com tes quei nouÿayons construites
.pour nous couvrir -un-pays; .que paus avp.ns,;
voulu exempter <ée la corf tribu taon , <Ant >,éLé\les-
lignes de Courtrai, entre la-Lys &M’E/caiit. -
Elles furent abandonnées par MM. dè la Vallette
& de Villars , toutes;les deux fois que- les, ennemis
y ont fait marcher lun■ .coirp.sj$<fèftroupes; fppçvietir
à celui qui les gardoit ; en quoi ces deux générap^
ont prudemment agi,-avecdifférence,p6utcantd^ç$
leurs mouvements.
M. de la Vallettè , trop foible ■ ; fut obligé-4 e |e,
retirer forten arrière, dans un lieu où il pût .être-
en fûreté,'jufqu’à ce que M. de Luxembourg-,pût-
le mettre à l’aife, par le gain de là bataille de Nety
winde.
M. de Villars , qui àvoit un corps-, 4 e> treize à '
quatorze millq' hommes, prit un fortibort parti ; il-
jugeaque s’il fe préfento.it à l ’ennemi poùn;foute-.
nir la ligne , il y feroit aifément forcé-;, ,parce- qu’il
feroit plus foible que l’ennemi par-tout où , à la fa- 1
veur de la nuit , il feroit fon -principal effort.: U fe
choifit donc un bon pofte en-dedans de la-ligne 9
vers fon centre.
Cette contenance retint l’ennemi», qui n’pfa ni »
marcher à lui pour l’attaquer dans ce pofte où.il
étbit enfemble', niimarcher en avant •poïk-^péné^
trer dans le pays1 > en prêtant le flanc, ou en-laiffant-
derrière lui le corps de M. de Villars.
Le parti judicieux que M. de Villars a prb dans ;
cette occàfion j prouve la fûreté de ma • maxime; ;
contre l’ufage de cette efpèce de lignes, èc,fait;éy.-i-j j
demmènt ccfnnoîtt-é que la . rifque d’un-corps dô
troupes qui vêut fOuteniV une /i^e dahs tout/fonr
front, eft tQujoius-'fort'gi'and ; Ôc que le choix -d’un ;
il) I G i çij,
pofte ayamageux" pour, empêcher un ennemi de pénétrer
dans Lp p a y s e f t lé plus.fur..
Les lignes „de la Lys à Ypres n’ont point été for- •
çées, parce qifèlles.u’bnt point été attaquées ; mais
auffi a-t-il fallu les garder en 1695 ?Yeê totiïé l ’armée
; & elles n’çnt.férvi que d’une excule à M. le
maréchal de Villeroÿ , pour ne pas battre Mi' lé
prince d’Orange.j lorfqu’ilfvint camper à Becclaer.
I Car fi ce général n’avoiî point eu ordre de garder
la lignç. "découvrir Ypfesi., il ne fe feroit pas
Apparemment difpenfé.d’acc^lër M. leprùice d’O-
range fi près dé lui, béauepup plus foiblé,.6<: campé ■
fort.défavantageûfemenr &’ félon toutes', les apparences,
'M. le prince d'Orange ne fe ferôît pas
féparé , comme il fit dans cette pccafion , s’il n’a-
voit jpas eu à faire à une armée qui. étoit pbligée à
fortir,de fes lignes en.défilant, pour marcher à lu*.
; Çel’ie occafion perdue par'M.'. lè maréchal de
ViIietPy, prbuVè encore là vérité dè ma.mà^imè
contre lufogede ’cette efpèce'"4 é 'lignes, l'orfque je
disq:ùé'lfùn de leurs plus grands défauts ,*eft'cé!-ui
de-la negeffité prefque iridifpenfable où fe trouve
! l e ’général chargé de leur garde, de voir fo-irg à-
fon ennemi des mouvements hafardeux, fans pôu-■
yoîr l’erf châtier j parce qu il ne'fàur'oit'fôrtir déf fa
ligne qu’ enMéfilànt , & que pâr-la pertè/COnfidé- ’
râblé dé ce temps , il làiftérPit à fon ennemi celui
1 éle'-redreffe-r fori mbuvement hafordé : ,& qu’il, a»-
Borf le temps de le faire fûrement', Se de»1 e battre'à -
moitié forti de la ligne, parce qu’il auroit fait ce
mouvement-hafardé fort près de la'ligne.
j L e s q u i ont été1 foites de-là Hayne à la
$a'mbre:'n’o'nt point été forcées , parce1 qu’elles
ù’ont pôint-été attaquées; M-ais-'fiLon avoir fait- uiï '
calcul jufié! de ce qiie leur'conftruclion & leur err- '
tret-ien- ont coûté- au pays qne'l’on ' a prétend®11
couvrir , je fuis perfuàd'ç troirveroitique-
, cette fo'mjne'égaîeroit/tout 'au moins celle que les
* ennemis anroient pu lever par leurs çontriburions ,
fuppofé mèmeque les garni fonsdesplaces n’eu fient
basrpu les, empêcher derpépétr-er' le .pays, par les
• petits partis ; & fi l’on àvoit ajouté à cette dépenfe
, lp nombre d’hommes (employésàdq. garde de ces
on trouverait encore que leur-fervice au-
rjoiî été plus, utile dans les armées.
! Les lignes de la Meufe;& de la Senroye n’ont pas
été-plus utiles à la Champagne 8t aux trois évêchés
,1 à qui leur conftruâion & leur garde ont coû:é
des femmes .ianmenfes , fan§ qu’elles aÿent fervl à *
ajutre chofe qu’à enrichit ceux- - qui ont été .chargés
de les-garder.-
• Les lignés de Weifiembp.urg & de Hagueneau y
pour couvrir la baffe-Alface , ont été» forcées ou
abandonnées-dès que-les ennemis y ont paru en
état de les attaquer. Quel a été l’inconvénient de
cet.abandon ? Il n’a produit à nos ennemis que la
fatisfa£lip:n de camper quelques jours .e^dedans 4e
là li.gn?>,'\
• Mr le .maréclial'de Villars qui coriimà-ndbit farinée1
du roi, a pris - dans cette occafion , le même