
ne le lui accorde, pas dès la première année -,
murmure dès la fécondé, & fe dégoûte avant la
fin de la troifième. Il vole à Paris toutes les fois
qu il le peut, crie par-tout à l’in juftice, fait retentir
Verfailles de fes plainte*, emploie toute efpèce de
moyens pour obtenir des proteéleurs, confumê en
courfes une grande partie de fa fortune , & Souvent
quitte la capitale moins digne de commander qu'à
1 inftant ou il y eft arrivé. Èn rentrant fous fes drapeaux,
il verfe par fes plaintes , dans l’ame de fes
camarades t une partie de l’amertume dont la fienne
eft abreuvée; & leur communiquant l’opinion qu’il
a conçue du fervice, il les en dégoûte , ou éteint
au moins leur émulation & leur zèle. Je ne lis jamais
fans plaifir une réponfe qu’un gentilhomme
fit à Louis XI. Cette réponfe renferme une grande
leçon , je dois la tranfcrire : Ce gentilhomme étant
venu fnpplier le roi de lui accorder un certain emploi,
fa majefté, après l’avoir écouté avec atten-
**on , lni répondit qu’il ne devoit rien efpèrer. Le
roi s’étant apperçu que le gentilhomme l’avoit remercié
avec un air très gai, imagina que fa réponfe
avoit été mal entendue ou mal interprétée, il fit
rappeller le gentilhomme, & lui répéta qu’il n’ob-.
tiendrait point ce qu’il demandoit. Sire , répondit
le folliciteur, j aèois bien compris d’abord la réponfe
de votre majefté. Pourquoi donc , lui demanda
le roi, cet air gai que je vous vois ? C/eft,
repartit le gentilhomme, que je regarde comme
une grâce le prompt refus de votre majeflé: il
m’épargne & la dépenfe & les pas que j’aurais faits
inutilement, fi la réponfe de votre majefté , moins
précife , m’eût laiffé quelques efpérances.
La grande facilité à promettre, multiplie les prétentions
à l’infini. Prenez le contrôle d’un régimenr
lifez la lifte des capitaines , & vous aurez lu le nom
de douze ou quinze prétendants à des majorités ou
à d’autres grades. Cette ambition ferait heureufe fi
elle étoit motivée , fi elle réveilloir le zèle , rallu-
. moir l’émulation; mais rarement elle produit des
effets anfli heureux t on n’annonce de bonne heure
fes prétentions , que parce qu’on fait qu’on n'en
vietu à bout que long - temps formées. après qu’on les a
Mais cette facilité , après avoir été funefte aux
protégés , ne l’eft - elle pas aux proteéleurs eux-
mêmes ? Elle leur fait perdre leur crédit auprès du
roiniftre , la confiance de leurs clients , & leur
dunone nreé pfuotuatvieonnt qeun’i lésc hfearnagieen dt ea uce sd ébfieefnpso pirr édci’eauvox ir
méritée. Le miniftre , habitué à voir un in fp c c - fntrarriver avec un porte-feuille plein de demandes
dont peu méritent des égards, & qui cependant
font toutes appuyées avec une égale chaleur, con-
traéle tellement l’habitude de refufer, cju’il n’ac.
corde même plus ce qui eft dé la juftice la plus ri-
goureufe. Le protégé voyant s’évanouir toutes les
promeffes qu’on lui a Ctites , penfe, avec quel-
lq'au ’efpèce de raifon , que fon prétendu protecteur oublié ou l’a trompé , ou qu’il s’eff targué d’un
I NS
crédit qu il n’avoit point ; & alors, le rire malin de
la froide ironie, fît fouvent même le mépris, fe
mnooinfftarnecnet obùri lll’eerft.ime devoit paraître , & la recon-
VinfpeScur, au contraire, qui n’accueille que les
demandes, juftes , qui n'accepte que les mémoires
bien motivés , qui ne follicite que ce qu’on ne peut
prefque lui refufer, qui promet peu, mais tient
beaucoup , prévient les maux que nous avons dépeints
, évite aux officiers de fon infpeéliôn , les dé-
fagrémens que nous avons décrits , voit chaque
jour fon crédit auprès du miniftre , croître avec
force ; & la confia ce des militaires fournis à fes
ordres , augmenter avec rapidité.
Je ne m’arrêterai pas plus long tems fur les qualités
neceffaires aux injpcêleurs ; je ne leur prouverai
point-qu’ils doivent fuir la partialité , bannir de
leur ton , de leurs propos & de leurs manières ,
1 orgueil, ta fierté, le dédain , &c. : c’eft dans notre
article General , que nous avons montré combien
ces vices font funeftes, & q,ue nous avons raffem-
blé les connoiflances & les vertus dont doit être
ornée I ame de touts les chefs du militaire françois.
Si jamais il m’en a coûté de füivre la loi que je me
fuis faite de ne nommer ni de nedéfigner jamais au-v
cun homme vivant, c’eft en compofant cet article :
le plaifir que j’aurois *eu à écrire le nom de quelques
infpeâeurs dont les talents & les vertus m’ont inf-
piré, comme à toute l’armée, l’eftime la plus haute ,
auroit été mon falaire le plus doux. Je me ferois
d ailleurs évité beaucoup de travail ; car je n’aurois
eu qu’à dire à ceux qui veulent sïnftruire fur les
talents & les vertus des injpeâîeurs: Imitez ceux que
je viens de nommer, & vous ferez afturés d’obtenir
comme eux l’amour du militaire , la confiance du
miniftre , les grâces du Roi & l ’eftime de là nation.
(C . )
INSPECTION. Examen des troupes, relativement
à leurs devoirs. Nous diftinguerons cinq efpècçs d’infpe&îons militaires
: i°. Yinfpeaion des armes ; 2°. les infpeaions faites par les infpeéleurs ; y°. les infpeaions des
gardes & des détachements pendant la paix; 40. les
infpeaions des gardes & des détachements pendant
la guerre; & 50. enfin , les infpeaions générales
faites par les capitaines & les chefs de corps.
§• I*
Infpeaion des armes.
L’officier qui veut examiner fi les foldats ont leurs
armes en bon état, leur fait le commandement,
g a r d e - à - v o u s, in fp e a io n -d e s -a rm e s . A ce commandement
, le foldat, qui eft repofé fur le fufil, met
la baïonnette au bout du canon , & auffi-tôr après ,
la baguette dans le fufil ;. alors , l’officier prend fuc-
ceffivement l’arme de chacun d’eux ,, l’examine , 8c
la rend après s’être affiirê qu’elle eft fans rouille ,
& dans l’état de propreté convenable ; que Tintérieur
du canon eft bien nétoyé ; que la pierre
eft bonne , bien taillée & bien placée, &c. L’O rdonnance
ne devroit - elle pas preferire au fol-
dar d’élever fon arme & de la préfenter à fon officier
i de manière à ce que celui-ci pût avec facilité
en faifir la'poignée. L’ordonnance veut que le fol-
dat ouvre fa giberne au moment ou l ’officier prend
fon arme. Cet ordre fuppofe que deux perfonnes
font Y infpeaion dans le même moment, & qu’il faut
autant de temps pour examiner une giberne que
pour infpeéïer un fufil. Cet article exige , ce me
femble, quelque modification.
Quand le foldat a la baïonnette au bout du canon
, & qu’on veut feulement faire mettre la baguette
dans le fuf i lon commande , baguette dans
le canon. J’ai vu desrégimens dans lefquels l’officier
qui vouloit favoir feulement fi l’intérieur'du canon
des fu-fils étoit propre , obligeoit fes foldats, à me-
fure qu’il pafîoit devant chacun d’eux, à élevçr
avec la main droite la baguette d’environ fi pouces,
& à la biffer retomber auffitôt dans je-canon : au
fon que rendoit la baguette en frappant contre le
fond du canon, l ’officier diftinguoit s’il étoit refié
de la craffe dans le fufil. Ne feroit-il pas utile de
rendre cette coutume générale ?
Quand on veut feulement faire mettre la baïonnette
au bout du canon, on commande : Baïonnette
au. canon.
La manière dont s’exécutent les différents commandements
de Yinfpeaion des armes, eft détaillée
dans les ordonnances pour l’exercice des troupes.
§. 1 1 .
Des infpeélions faites par les infpeaeurs.
Voye^ le paragraphe I I I de l’article INSPECTEURS.
§. n i .
Des infpeélions des gardes & des détachements pendant
la paix
Nous avons avancé dans le §. I I . de l’article
E x e r c ic e , qu’il étoit poffible de tirer un grand
parti de Yinfpeaion des gardes : nous irons plus loin ;
car nous dirons : Si lès différentes perfonnes chargées
d’infpeâer les gardes , faifoient leur devoir
avec attention , on n’auroit jamais befoin de revenir
fur les détails relatifs à la pofition du corps , au
port de l’arme ,en un mot, fur tout ce qui eft compris
fous le mot m a n iem e n t des a rm e s . Suppofez
un régiment dans lequel le caporal qui infpeéle les
foldats de garde de fon efeouade ,le s oblige à fe
placer & à porter leurs armes comme l’ordonnance
le preferit ; fuppofez que le caporal de femaine ,
qui infpeâe ces mêmes hommes, à huit heures &
demie du matin , en agît comme le caporal d’ef-
couade ; que le fergent de femaine imite à neuf
heures ces deux caporaux , & qu’il fait de plus exécuter
aux foldats , avec la plus grande précifion >
quelques mouvements d’armes ; que le lieutenant
de femaine commence fon infpeaion à un roulement,
& ne la finit qu’à un fécond roulement.,
dont un des chefs donne le fignal ; qu’il emploie le
temps compris entre ces deux roulements , à inf-
pe&er la ténue & la pofition des foldats , & à leur
faire exécuter^auffi quelques temps du maniement
des armes ; que le capitaine chargé d’infpeâer- la
garde, & qui doit l’aftembler vers onze heures,
emploie bien l’heure pendant laquelle il doit l’exercer
; que l’officier ou bas-officier de garde veille à cc
que chaque foldat foit, toutes les fois que la garde
fe préfente, bien ccëffé , bien placé , &c. ; que les
officiers qui font la vifite de jour, tiennent la main
à touts ces objets : fuppofez enfin, que le lieutenant
qui infpe&e à quatre heures du foir les foldats qui'
ont delcendu la garde,fait une infpeâion auffi exafta
que celle qu’il a faite à dix heures du matin, & vous
ne ferez plus étonné de la propofition que j ’ai
avancée. Ah ! fi j’ofois tranfcrire un proverbe trivial
,vj’ indiquerois bien fûrement dans une feule
phrafe,la caufe de touts les défordres qu’on remarque
dans le militaire françois : mais pourquoi
ne le copierois-je point ? La grande vérité qu’il renferme
en mon exeufe î c’ejl parce que chacun ne fa it
pas fon métier, que les vaches font mal gardées. Voulez
vous quelles le foieht bien, que la machine militaire
marche toujours d’un pas égal , & produifeles
effets que vous avez droit d’en attendre ? Voulez-,
vous n’avoir jamais befoin de la remonter & de la
réparer ? veillez avec la plus grande attention à ce
que chacune de fes parties faffe avec précifion les
mouvements qui lui font propres. Voilà le feul ,
Tunique, le grand fecrer. Oui, quoique les loix
militaires auxquelles nous fommes fournis , ne
foientpas auffi parfaites qu’elles pourroient l’être
on cefleroit de fe plaindre de leurs imperfeâions
on ne s’appercevroit même peut-être pas de leurs
vices, fi une rigidité falutaire, forçoit’ceux qui ont
juré de les accomplir, à tenir leur ferment avec
cette exa&itude fcrupuleufe qu’ils portent dans
l’exécution du refte de leurs promeffes les plus
Amples. En réfléchiffant fur 2a délicateffe avec laquelle
les militaires françois tiennent les promettes
dont leur honneur eft garant, je me fuis demandé
s’il ne feroit pas bon , s’il ne feroit pas fage de faire
jurer à nos officiers , fur leur parole d’honneur •
qu’ils rempliront les obligations que les loix militaires
leur impofent dans tonte leur étendue.
Ç ’eft dans l’article Serment, que nous tâcherons
de développer cette idée. Nous devons ne nous occuper
ici que des objets fur lefquels les infpeaions
doivent porter.
Les infpeaions pendant la paix, doivent porter
fur Tar^nement , l’équipement & Thabillemenr.
Quant à l’armement, nous en avons déjà parlé fous
le mot Fusil , dans le §. I. de cet article Inspection
, & nous y reviendrons encore dans le §. IV.
Quanta l’équipement & à l'habillement, voyez T m-
nv£ & Habillement»