
qui furent îhflitués par Philippe-Augufîe avoieiit
un privilège qui .4 to.it de .n’être jugés que par le
, roi & parle comjé.tabLe. Il falloir donc que le connétable
eut un tribunal. D.e plus , les gens de fon
, hôtel ne pouvoient être jugés par d’autres fars lu i ,
cell-à-dire . que par lui & les maîtres de fon hôtel.
Or ces maîtres croient des juges.
Les maréchfiux de France ayoient autrefois certains
droits pécuniaires , ainfi qu'il eff cnoncé dans
la lettre du r.oi^ Philippe de Valois au maréchal de
Morcul, que j’ai tranferite. C e prince , comme il
ledit lui-même dans cette lettre, les leur retrancha
à caufe des fraudes qui s’y commertoient ; il ne
marque point quels étoient ces droits : c’étoit apparemment
fur lafoldedes foldats & .quelque chofe
de femblable à ceux que prenoit le connétable ,
defquels j’ai parlé en .traitant de cette dignité ; ou
bien ils étoient fur ies denrées qui fe diliribuoient
dans le .camp. Ces droits préfentement appartiennent
au grand - prévôt de ,1’arméé. Le roi
Charles V leur avoit déjà retranchéles droits qu'jls
prenoient fur la folde des foldats , comme On le
voit par les provifions qu’il donna au maréchal de
Blainville en 1638, rapportées dans l’hifloire des
grands officiers de la couronne.
Tout le revenu de leur charge, comme l’a dit
ci-deffus Philippe de Valois , n’étoit que de 5.00 1. ,
encore n’en jouiffoient-ils que durant qu’ils en fai-
foient aéluellement les fondions. Quand ils par-
toient pour quelque expédition, le roi leur don-
noit un cheval de fon écurie ; c’eft ce qui paroît
dans une ancienne montre de gendarmerie que j’ai
trouvée parmi divers papiers de la chambre des
comptes de Paris, qui étoient entre les mains de
feu M. du Fourni, auditeur des comptes-
« Ci enfuivent les noms des Gendarmes de la
Tetenue de Ihobert Bertran , lire de Briquebec ,
maréchal de Franc r , faite au voyage de Flandres’
où il fut envoyé de parle roi, monfeigneur, aux
gages dudit feigneur, & fous le gouvernement de
M. le comte d’Eu , connétable deFrance, en l’aide
& confort du comte de Flandres, fus aucunes dé-
fobéiflances & rebellions que les gens de la ville
de Gand lï faifoient ; à quoi il appella & requit
l’aide du rdi après Noël, l’an 1337, avec la venue
Si montre defdits Gendarmes baillées & rendues
adoneques des fufdits Jehan . . . . thréforier de la
guerre pour le temps, pour faire fur ce le compte
des gages dudit voyage par ledit maréchal & la
garde de foute fadite retenue ».
» Premièrement ledit -maréchal Bonneret monté
fur fon cheval gris liart de la livrée du roi » ; ( ce
qui marque qu’il étoit de l’écurie du roi ).
» Item , un autre cheval fieu propre pour fon
corps , tout liart, prix de 3 00 liv. tournois , &c. ».
Ce fien propre montre encore que l’autre lui avoit
été fourni par le roi. C ’étoit des diftinâions dont
on fe faifoir alors grand honneur.
Fai déjà remarqué , en parlant du connétable ,
qu’il avoit un pareil privilège exprimé en ces
MA R
ternies : << Et fe on amène plufieurs chevaux pou*
faits d ar-mes de la journée, quand le roi a pris le»
«quel il veut, le connétable prend le fecondaprès
apparemment le maréchal prenoit le troisième.
Ces ufages ont changé ; les appointements des
maréchaux font devenus beaucoup confidérables ;
ils font maintenant de 12000 livres , même en
temps de paix. Je trouve dans cet état de la France
de 1598, qu’ils avoient ces gages dès le temps de
Henri iV. Et quand ils commandent l'armée., ils ont
encore des appointements beaucoup plus forts. Ils
font de 8000 liv. par mois de quarante-cinq jours.
On leur entretient un fecrétaire, un aumônier, un
chirurgien , un capitaine des gardes , & leurs
gardes, &c.
H me paroît hors de doute que les maréchaux de
France ont eu de tout temps des droits honorifiques
, & que les gens de guerre leur ont toujours
rendu de certains honneurs, fur-tout dans les armées
& dans les places de guerre* & principalement
qyand ils commandoient ; mais le cérémonial
n a jamais été exaélemènt règlé en cette matière
jufqu’au règne de Louis-le-Grand. Il y a plufieurs
ordonnances de ce prince fur ce fujet. ( V . ordon.
concernant les honneurs militaires & le Jervice des
places ).
Avant ces ordonnances , la cérémonie de battre
aux champs n*a pas toujours été un droit incon-
teftable pour les maréchaux de France. Voici fur
cela un fait allez remarquable que l’on trouve dans
les mémoires de Puyfégur.
« Sous le règne de Louis XIII, en 1633, après
la prife de Nancy, dit le fieur de Puyfégur, le roi
envoya M. le maréchal de la Force âffiéger Epinal ;
& comme il fortoit de fon logis , étant à la tête de
ma compagnie qui étoit de garde , il me dit : M. da*
Puyfégur, certes, iljne femble que vous devriez
bien battre aux champs quand je fos$ ,puifque nous
fommes hors du royaume ; car pour dans le
royaume , je fçai bien que cela n’eft dû qu’au roi ;
je lui d is , Moniteur , j’en parlerai à M. de la
Ilière, qui commande le régiment, & à M. Lambert;
fur quoi les capitaines s’alTemblèrent , 'Sc
m’envoyèrent à Nancy trouver le ro i, à qui je dis
la prétention de M. le maréchal de la Force ; il me
dit d’abord que cela ne lui étoit point dû , & qu’il
ne le voulait pas ; je lui dis : Sire, il dit qu’il fait
bien que cela ne lui eft point dû en France, mais
que hors du royaume il lui eft dû ; que quand
même l’armée de Henri IV alla dans le pays de
Juliers, aufîuôt qu’elle fut hors du royaume , elle
battit aux champs devant M. le maréchal de la
Chaftre, qui la commandoit. Lorfque le roi eut
entendu cela , il me dit : s’il vous le-commande encore
une fois, faites-le; mais fouvenez-vous de ne
le faire jamais dans le royaume, car cela n’appartient
qu’à moi ».
Il eft hors de doute que la chofe fut exécutée
comme 1< maréchal le fouhaitoit, &. que la réponfe
duroipaffa pour un réglement > car le même M,
Je Puyfégui* parlant de la revue de l'armée qui fe
fit en 1649^11 camp de Caftëau-Cambrefis, en pré-
fence du cardinal Mazarin , dit que ce cardinal for-
tant de fon logis, le tambour battit pour lui J à
caufe, dit-il, qu’il étoit hors de France. Au relie
les ordonnances de Louis-le-Grand ne me pa-
roiflent point faire cette -diftiiiflion des armées
hors de France & des armées étant fur les terres de
fa domination» ■ > .
Le roirn 1705 ufa d’une très grande difttnélion
envers tou ts les maréchaux de France qui vivoient
alors , il les fit tbuts chevaliers de Tes ordres , &
leur donna le cordon bleu ; il n’y eut que le maréchal
de Catinat qui n’accepta pas cet honneur, par
une modefiie fingulière, laquelle 9 avec tant d’autres
-qualités qu’il avoit pour la guerre & pour le cabinet,
fit toujours une partie de fon cara&ère.
? Sur l’endroit cité de Brantôme au fujet de l’amiral
d’Annebaut, on peut encore remarquer que ce
n’étoit pas la mode de fon temps , de parvenir au
bâton de maréchal de France par le Ter vice delà
mer; mais fous le règne de Louis-le-Grand , où
ce fervice eft devenu beaucoup plus confidérable ,
on a ouvert ce nouveau chemin pour parvenir à
cette haute dignité ; nous en avons des exemples
dans les maréchaux de Tôurville , de Chafteaux-
Renard, & dans les deux derniers, maréchaux du
nom & de la maifon d’Eftrées. Jean d’Eftrées , père
du maréchal d’aujourd’hui, eft le premier qui fraya
cette route; il eft vrai qu’il s’étoit déjà diftingué
dans les troupes de terre à pouvoir parvenir à ce
terme en-fuivant les voies ordinaires. Il le représenta
même au roi quand on lui offrit de commander
fur la mer ; & ce prince lui répondit que ce
commandement ne lui feroit d’aucun préjudice à
cet égard. C’eft un nouveau relief pour ce feigneur,
d’avoir le premier introduit la dignité de
maréchal de France dans la marine; & c’eft une remarque
importante que je ne devois pas omettre
dans une hiftoire de là milice françoifê.
Sous les règnes précédents, & même encore
pendant longtemps fous le règne de Louis-le-
Grand , quand deux maréchaux de France étoient
dans une armée, ils rouloient enfemble pour le
commandement, excepté que le plus ancien avoit
le premier jour le commandement. Le maréchal de
Cfiaftillon, da ns une lettre au cardinal de Richelieu,
dit qu'il croyoit qu’en qualité de plus ancien , il
auroit aufli droit de commander un jour de bataille
, quoique ce ne fût pas fon jour ; que cependant
il ne s’ en étoit,pas prévalu à la bataille d’A -
vein , où il laiffa prendre la droite au maréchal de
Brezé,fon cadet. Maisûl y a plufieurs années que
c’eft le plus ancien qui commande toujours en
chef. Nous n’avons vu qu’un exemple contraire
depuis longtemps ; ce fut à la bataille de Malpla-
quet, où les ennemis achetèrent le fléfile honneur
de demeurer maîtres du champ de bataille par le
plus horrible carnage qui fut fait de leurs troupes.
Cet exemple fut celiti de M, le maréchal dé Bouf-
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fiers. Il étoit l’ancien de M. le maréchal dé Villarsy
& voulut bien à cette journée commanderToüs lur.
Il en fut bien réco'mpenfé par l’honneur qu’il eut
d’avoir confervé l’avantage du combat à fon aile
droite, même après la bleffure du maréchalde Vil-
lars, & encore plus par la belle & glorieufe retraite
qu’il fit en bon ordre à la vue des ennemis, qui
n’ofèrent jamais le pourfuivre. | Ces deux fei-
gneurs , en cette rencontre, fignalerent chacun leur
zèle pour leur roi & pour là patrie ; 1 un aux dépens
de fon fang, & l’autre par fa grandeur d’ame ,
qui le fit paffer par-deffus un point d honneur qu’il
méprifà pour le bien de l’état»
Les maréchaux portent pour marques de leur dignité
, deux bâtons d’azur femés de fleurs-de-lys
d’or, pàffés en fautôir derrière l’écu de leurs armes*
Du temps dêtliifioriên du Haillan , c’eft-à-dire *
du temps de Henri III, les Maréchaux coutumièrement
mettoient au cote de leurs armoiries une
haché d’armes , comme le connétable une épée
nue. Un auteur qui a écrit fur les armoiries , die
que « fur quelques anciens tombeaux & fur la porte
de quelques châteaux , on voit les armes de divers
mdrèchaux dé France, côtoyées de haches d armes
On voit par-là que les'bâtons ajoutés en faütoir
par les maréchaux & lés deux épées mifes par le
connétable à leurs armoiries , ne font pas Tort anciens.
Je crois même que ces fymboles ne furent
pas d’abord.en ufage dans leurs armoiries , & que
ce font des ornements poftiches ajoutés par les hé-
raults d’armes, félon l’idée de ceux qui fe mêloient
de l’art héraldique ; & qu’ils firent ces additions
avec d’autant plus de raifon, que l’épée à l’égard
des connétables, & le bâton à l’égard des maréchaux
, étoient les inftrùments par lefquels ils rece*^
voient l’inveftiture de leurs charges, comme autrefois
les évêques recévoierit rinveftiture de leurs
fiefs de la main du fouverain par la croffe & pac
l’anneau. J’ai lu quelque part que Vulfon de la Co-
lombière étoit l’auteur de plufieurs de ces orne-'
ments. ,
j Ce qui me péçfûade de la nouveauté de ces fym-
bolès, c^eft que parmi divers papiers de là'chambre
des comptes de. P a r is ,j’en .ai vu où étoient les
ffcéaux du connétable de Cliffôn & du maréchal de
Giéy ou ni l’épéè, ni la hache d’armes, ni les bâtons
he fönt point.
Voici le ferment que lés. maréchaux de France
fönt entré les mains du. roi quand ils font revêtus
dé cette dignité*
« Vous jurez à Dieu , votre créateur, fur la Foi &
la loi que vous tenez de lui , & fur votre honneur ,
que bien loyalement vous Tervirèz le roi ci
préfent en l’office de maréchal de France , duquel
ledit feigneur vous a aujourd’hui pourvu envers
touts & contre touts qui pourront vivre & mourir,
fins perfohne quelconque en excepter , & fans
aufli avoir aucune intelligence ni particularité avec
quelque perfonne que ce foit au-préjudice de lui
* & dé fon royaume, & que fi vous entendez chofe