
Harpocration nous inftruit, d’après Hélibdoré, d'une
particularité de ce monument que Paufanias a omife;
c ’eft qu’il étoit percé de cinq portes. Ces marques
que les auteurs anciens nous ont laiflees pour recon-
noître les Propylées , font frappantes, même dans
l ’état de ruine où eft actuellement cet édifice. La
plupart des voyageurs modernes l ’avoient cependant
méconnu. Spon penfoit que c’étoit un temple * parce
qu’il y avoit un fronton à la façade. Fanelli l’appelle,
avec le vulgaire, l'arfénal de Lycurgue. Whélerparoît
être celui des trois qui a le mieux rencontré fur cet
objet. Il fe doute que ce pourroit être les Propylées ;
mais il n’en donne aucune preuve. M. le Roy eft le
premier qui ait bien reconnu cet édifice , & qui'l’ait
reftitué félon fou ancienne deftination. ( Voye^ lés
preuves qu’il en apporte dans l’ouvrage même. ) Nous
ne les rapporterons point ici , & nous pallons à la
defcription qu’il nous en donne.
L ’édifice, en queftion, annonçoit bien par fa grandeur
, par la beauté du marbre, blanc dont il étoit
conftruit, & par fa belle difpofition, l’entrée de la
citadelle d’Athènes. Les deux grands piédeftaux qui
étoient au-devant de fa façade , le nombre des marches
fur lefquelles il étoit élevé , les portiques qu’on
voyoit à droite & à gauche en arrivant, mais particulièrement
le falon du milieu qui étoit tout ouvert,
& au travers duquel on découvrait encore les colonnes
du périftyle qui regardoit l’intérieur de la citadelle ,
toutes ces cho(es reunies dévoient produire un fpéta-
cle magnifique , & dont aucune defcription ne fau-
roit donner l’idée.
L a face de ce monument qui regardoit l ’extériéur
de la citadelle d’Athènes , étoit compofée de fix
colonnes , comme celle qui regardoit l’intérieur ; ce
qu’on reconnoît par le plan ( Voye* M. le R o y , t. 1.
pl. 14. ) On voit avec quelle Tageffe , Mnéficlès, qui
le conftruifit , s’écarta de la règle générale que les
Grecs avoient toujours fu iv ie , de faire leurs entre-
eolonnemens ferrés. Il donna beaucoup de largeur à
celui du milieu, afin de bien indiquer que cet édifice
éroit une porte. Get entre-colonne a v o it , de l’axe
d’une colonne à l’autre,-trois triglyphes & trois métopes.
Les autres font monotriglypnes, ainfî que ceux
des anales des deux façades ; mais ces derniers font
les plus petits, parce qu’ il y avoit un triglyphe à
l ’angle de la f r i fe , ce qui avoit çontramt de les
faire ainil.
On arrivoit à cette façade par un grand efcalier au
milieu duquel fe trouvoicun repos ou pallier 5 car
Je monument des Propylées étoit affis fur un lieu
inégal , ce qui dût en rendre la compofition difficile ;
mais ces difficultés, loin de nuire à fa difpofition,
ont donné lieu à l’architecte qui l’a conftruit, d’y
ajouter de nouvelles beautés. On voit qu’il fçut profiter
avec adrelfe de l’inégalité du terrain pour donner
plus de nobleffe à cet édifice. L a coupe fait fentir
combien la pente qu’on montoit en le traverfaut étoit
confidérable. Mnéficlès, afin de la rendre moins fen-
f ib le , lui donna beaucoup dé profondeur, 6ç mit avec
art Ja plus grande partie des degrés au devant de la-
principale façade.
Celle-ci étoit accompagnée de veftibules qui qous
montrent q u e , dès le tems de Périclès, les Grecs
unifloient dans leurs bâtimens les grauds ordres avec
les petits. L a proportion de l’ordre de ces petits veftibules
, avec celui des façades du même monument,
eft fort belle ; elle eft la plus eftimée de nos jours ,*
le petit ordre étant à-peu-près le tiers de la hauteur
du grand.
' On entroit dans une efpèce de falle couverte & divi-
fée par deux rangs de colonnes Ioniques , dont M. le
Roy n’a pu voir les bafes : il a conjecturé qu’ elles
dévoient pofer fur des piédeftaux. On admire le plafond
de cette falle. Il étoit formé de neuf grandes
poutres de marbre de 16 piedis de long qui foute-
noient toute la couverture. Une a\itre plate-bande ,
encore entière, qui couvre la grande porte, a près
de z,z pieds. Paufanias fait mention de la grandeur
de ces pièces de marbre. C e caractère feul eût fuffi
pour faire reconnoître, dans ce monument > celui des
Propylées.
Mais c’eft particulièrement aux* cinq portes, dont
M. le Roy a retrouvé les indications, qu’on doit la
preuve la plus complette de l’authenticité de cette
découverte. Il falloit encore - monter cinq marches
pour y arriver : elles font, percées dans le mur qui
regarde l’intérieur de la citadelle, & répondent ex aminent
aux cinq entre-colonnes de la façade. Toutes
ces portes ont de hauteur le double de leur largeur.
L a plus grande a n pieds 7 pouces de large 5 les
deux inférieures ont 8 pieds 8 pouces, 6c les deux plus
petites 4 pieds 4 pouces. Ces deux dernières font plus
difficiles à voir que' les trois autres, parce qu’elles font
enterrées.
Une des plus grandes Angularités de ce monument
étoit les deux piédeftaux couronnés de ftatues, 6c
placés au-devant de la principale façade. L ’antiquité
nous offre., à la vérité , quelques exemples de fem-
blables piédeftaux qui ornoient le devant des temples;
mais on n’en connoît point de fi grands que ceux-ci,
Leur hauteur eft égale , à quelques pouces près, à
celle des principales colonnes Doriques de cet édifice;
& elle fut réglée, fans doute, fur leur proportion. Les
profils en font affez beaux. L a difpofition des aflifes,
dans leur conftruCtion, produit un effet agréable ; elles
font alternativement grandes & petites, les unes n’étant
que la moitié des autres,
I l y a lieu de croire que le monument des Propylées
commença à perdre fa forme, quand les Turcs
s’emparèrent d’Athènes. Ils firent alors du corps principal
un arfénal & un mqgafin à poudre , par confé-
quent, ils dûrent fermer par des murs les cinq entre-
colonnes de la fa c e , & les cinq portes qui étoient
vis-à-vis. Mais la foudre mit lé feu , en 1656 , aux
poudres de ce magafin , & fit fauter en l’air le pla-r
fond de l’édifice 6ç le logement 4’Ifo u f aga qui étoit
deiTuS',
Il s*eft confervé des débris du théâtre d’Athènes :
on peut même confidérer cet édifice comme un des
plus anciens de ceux qui fubfiftent dans cette ville.
Il paraît porter l’empreinte de l’origine des théâtres.
La plus grande partie des gradins n’eft pas foutenue
fur des voûtes , comme on le pratiqua depuis ; mais
ils font appuyés, & comme taillés dans le rocher de
la fortereffe d’Athènes. C e théâtre a de largeur, en-
le prenant dans fon plus grand diamètre , environ 14
pieds. Le lieu de la fcène ', ou le grand diamètre de
l’orcheftre, eft à-peu-près de 104 pieds : le refte eft
pour les gradins. Les murs font de 8 pieds 3 pouces
d’épaiffeut. Il eft conftruit tout en marbre blanc. On
voit encore au haut des gradins vers le milieu,
deux niches taillées dans Je roc: c’eft dans la première
qu’étoit, vraifemblablement, renfermé un trépied fur
lequel en voyoit repréfentés Apollon & Diane perçant
de flèches les enfans de Niobé, C e théâtre fervoit
aux Athéniens, non-feulement pour la repréfenta-
tion des tragédies & des comédies , mais aufn pour la
délibération dés affaires les plus importantes.
Le temple dé Théfée eft un des plus magnifiques
monumens d’Athènes 6c des mieux confervés. Il eft
prefque tout entier. Toutes les colonnes font debout,
& peu mutilées : fon entablement eft dans le meilleur
état ; Sc il ne manque que quelques tables aux plafonds
de fes portiques ; ce qui n’empêche pas d’en
pouvoir concevoir le deffin. Il eft d’ordre Dorique &
parallélogranje par fon plan , comme prefque tous les
temples Grecs. Une rangée de colonnes tourne tout
à l’entour. On en voit fix de face & treize de retour.
Il reuemble enfin beaucoup à celui de Minerve, ce
derhiér ayant été copié en partie fur celui de Théfée,
élevé quelques années auparavant.
Le plan avoit dé longueur plus du double de fa
largeur. L ’intérieur forme un parallélograme qui a
de longueur plus de deux fois & demi fa largeur. Cet
intérieur n’eft décoré d’aucuns pilaftres. L ’extérieur
même de la Cella , ou corps du temple , n’en a que
Quatre fîtués aux quatre angles, & qui ne répondent
a aucune coloqne de la' face ni du retour. On v o it ,
par la , que les anciens délirant que leurs façades
fuflent compofées de' colonnes peu efpacées , iis ne
fe piquoient pas de, faire répondre les pilaftres des
angles de la Cella vis-à-vis une des colonnes de la
façade, parce les portiques du côté du temple feroient
devenus trop petits ou trop grands. Cette licence qu’ils
fe permirent, pàroît d’autant plus tolérable , qu’elle
échappe dans l’exécution aux fpeéfateurs. Les colonnes
du temple de Théfée n’ont que fix diamètres., tout au
plus, de hauteur , comme toutes celles qu’011 obferve
aux édifices élevés à Athènes , dans le plus beau
tems des arts. L ’entablement quelles foutiennent eft
fe tiers de la colonne., & le fronton qui termine la
façade eft fort b a s , & plus bas même qu’il ne le
ferait èn le traçant par la règle que Vitruve donne
pour déterminer leur hauteur. Les plafonds font difpo-
s d une manière fingulière. Il y a comme de grandes
poutres de'marbre à -la'hauteur de la corniche, qui,
à peu de chofe près , répondent à chaque triglyphe ,
& retracent l’idéé de la- première difpofition despièces
de bois qui formoient ces ornemens dans l’origine
de l’architeéture. Cette conftruérion’eft une forte
preuve de l’antiquité de ce temple, puifqu’on y voit
repréfentées, en marbre, ces mêmes pièces qui 11’é-
toient d’abord exécutées qu’en bois.- { Voyez P l a *
fond. ) 1. , . : *
Le temple de Théfée eft enrichi de belles fculp turcs
, dont Paufanias n’a pas négligé .de parler. On y
voit le combat des Centaures & des Uapithes , 8c
eelui des Athéniens contre les Amazones. Ces bas-
reliefs font fur les frifes des deux faces de la Cella ,
ou corps du temple. On remarque encore fur la face
de derrière de ce temple , 6c fur les parties des faces
latérales de l ’édifice qui en font proches , des bas-
reliefs renfermés dans ces efpaces quarrés que les s
archite&és appellent métopes. Il y a lieu de croire que
Micon , fculpteür dont parle Paufanias, les a faits ï
& que fon projet étoit qu’il y en eût de femblâbleâ
tout autour du temple. Quefques-unS de ces bas-
relifs ont un rapport frappant, avec Ce que l’hiftoire
raconte des différentes aérions tiê TW fee ; d’autres
femblent plus difficiles à reconnôître.
L ’ intérieur du temple n’eft pas orné commeA’exté-
rieur : il fert à préfent d’églife aux Grecs , malgré la
jaloufîe des Turcs' qui leur envient la poifeffion d’un
fi bel édifice.
A peu de diftance du temple de Théfée , on. trouve
fur la gauche , en allant au Pirée, les relies de VO-,
deum, bâti par Périclès lui-même. (V o y e z Odeum. )
Delà-, en dirigeant fa route vers le N o rd -e ft ,F&
paflant le long de la muraille méridionnale de la citadelle
, on entre dans la v ille , & l’on ne tarde point
à découvrir le petit monument appelle la lanterne de
Démofchènes. Cet édifice eft d’une grande antiquité^
puifque l’infcription qui eft fur les faces de l’archil
trave , nous apprend qu’il a été élevé fous Evàmetus,
qui fut Archonte d’Athènes, la deuxieme année de
la C X I Olympiade, 3 3 ƒ ans avant l ’Ere Chrétienne ,
l’an de Rome 418.
La dénomination de ce monument n’a d’autre fondement
qu’une tradition populaire & deftituée de
vraifemblance. On lit fur la frife une Infcription qui
apprend, qu’à des jeux où Evænetus préfidoit la
jeuneffe de la tribu Archamantide remporta le prix;
que Lyfiade Athénien avoit fait la pièce ; & que
Théon avoit compofé la mufique ; enfin qu’il avoit
été érigé en l’honneur de Lyfiçrate ,, qui avoit donné
les jeux. .. . .
Ce t édifice eft circulaire ,> & conftruit tout en marb
re , excepté une partie du piédeftal qui eft en pierré.
L entablement eft foutenu par fix colonnes efpacées
également, dans la circonférence du monument. Des
fix entre-colonnes , les uns font ouverts , les autres
remplis par des dalles de marbre qui font d’une feule
pièce , ainfi que les colonnes. L e haut des tables eft
prué de trépieds. Les chapiteaux des colonnes font