
immédiatement aû-deffus, & quelquefois élevé fur un
ou plufieurs rangs d’arcades. Audi diflingue-t-on
ordinairement deux fortes d'aqueducs : les apparens'
& les fou terrains : les premiers font conftriiits à travers
les plaines, les vallées- & les fondrières, &
compofés de trumaux & d’arcades, comme ceux
qu’on voit dans la campagne de Rome. Tels font
encore les aqueducs du Gard, de Mari y & de Bucq
près.de Verlailles. L esfouierrains font percés à travers
les montagnes, & couverts en deffus de voûtes ou
de pierres plactes, qu’on appelle dalles. Tels font
ceux de Roqùeiicourt, de Belleville, & du Pré-S,-
Gervais. Ces deux fortes d'aqueducs ont été employées
& s’employérît foüvent dans un feul : elles le
furent prefqué toujours par Tes anciens, qui les réunirent
toutes les deux à chaque conduite d’eau.
On diftribue encore les aqueducs en j impies, dou- ■
blés & triples. Les (impies-font ceux qui ne font compofés
que d’un rang/a’arcades, tels que lés aqueducs
de Y A qua M a n ia , à Rome , ( Voye^ Eig . 18 3 ') de
Bucq, près de V erfailîes. Les doubles ont deux rangs ,
comme il s’en voit dans là campagne dé Rome , !
( Voye^ F ig. 18-4. ) h e S l aqüedâcs triples, font por- |
tes fur trois rangs d’areadfefc tel's qàé ceux du Gard , ;
de Caiferte 5 tel- était encore -c e lu i que Prôcopè .
dit avoir été conftruit par Cofroës , roi de Pèrfe j
pour la ville dè Petra, èi\ Mingrelie 5 il aVoit trois
conduits fur" mie même ligne , les mis élevés au-
deffus des autres.
Lés aqueducs dè tout genre étoient une des mêr-
véfflès de Rome. Pline Tes mettait au nombre de
céHes’ de TUniVers. Dénys d’Halicàrnâflè difoit
que -de 'tous les monUméns de Rome , les trois j
qui Tui paroiffoient annoncer le plus particulièrement
la puiflànce & la magnificence Romaine étoient les
grands chemins, les égoûts & les aqueducs. Le C o n - .
fûPFrbncin , qui avoitd’infpeââon des aqueducs fous
l ’erhpetétir- N ë rv a ,- a fait un traité fiir cet objet: il
ÿ'*pârlê dé nèuf ‘aqueducs, qui avoient treize mille j
clfiq-cèhts qüàtrfe-vftlgt-q'uatorze tuyaux , d?un pouce
dé diàmetfe. Prdcdpe qûi a écrit après lu i , compta
'qiTâfcôrzé canaux portés par -les neuf aqueducs .
vigefûs ‘ a- -calculé .que' ' Rome recevoir dans Tefpace
dé ryiiTgtr- quatre heures , 'cinq mille muids d’eau.
: Les neufs aqueducs de Rome fe diftinguoient, ou
par ' lès' noms de S éàux qu’ils ëbnduifoiént^, ou par
tés .noms ^dé ceux: fqiiï: Tes- avoient fait -eonftriiire.
èVT'ôici coiiinie iIh S’uppéHbieht t:
S De L’eau Àppia.
De l’Anienisj '-yeteris.'
De T eau Marcia.
De Téau Tepula.
, De l'eau Giulia.
De l’eau V irgo .
De Teaji Afttétmà-, '
DeTearu Claudia.
De. T Ameiris novi.
Le s trois premiers ‘•furent conftruits dès lés eôm-
Hiencemeas ae Rome. L e premier par Tes cenfeùrs
Appius Claudius, l’aveugle, & C . Plautius Velox,'
fous le confulàt de M. Valerius M e f la la , & de P,
Dec iusMu rus, l’an de R om e ,C D X L I . Le fécond,
quarante ans après , par le cenfeur M. Cürius Den-
tatus, fous le fécond confulat, de’ Sp. Carv-ilius ,
& de L. Papirius y le troifiéme , dans là même année,
par le Préteur Q . Marcius. On a de là peine à concevoir
comment les Romains exécucoient de fi grands
ouvrages en fi peu de tem s , lorfqu’on fait réflexion
que ces aqueducs furent commencés & terminés par
des contais , des cenfeùrs , des préteurs, dont la
magiftrature ordinairement ne duroit qu’un an.
Cette grande quantité à'aqueducs, les fomrnes
immenfes employées à faire venir des eaux d’endroits
diftans de trente, quarante & foixatite milles , fur
des arcades prolongées jufqu’à Rome , ou fûppléées
par d’autres travaux , comme dés montagnes coupées
& des rochers percés, tout cela n ep eut qu’étonner
, & frapper de l’admiration la plus' forte. On
eft loin d’entreprendre - aujourd’hui rien de fembla-
ble ; on n’oferoit même penfer à acheter fi chèrement
la commodité publique.
On voit encore en divers endroits de la campagne
d:e Rome , de grands refies de ces aqueducs, des
fuites prefques contiguës d’arcades, confervées dans
une longueur de plufieurs milles. Ces arcs font quelquefois
bas & quelquefois d’une grande hauteur ,
félon que l’inégalité du terrain l’exigeoit. 11 y en à
quelquefois à deux arcades, Tune fur l’autre , & cela
de crainte que Le trop de hauteur ne rendît la ftruc^
ture moins folide. Ordinairement ils font de briques ,
fi bien cimentées, qu’on a de la peine à en détacher des
morceaux. Quand le terrain é toit fi exhauffé qu’on
ne pouvoit trouver là pente, née e flaire, on faifoic
des canaux fouterrains d’une forte conflruétion, qui
portoient l’eau dans lès aqueducs é levés fur terre,
& bâtis-dans Tes fonds & fur les penchans des montagnes.
Si l’on ne pouvoit trouver fa pente qu’au
travers d’une roche , on perçoit cette roche a la
hauteur de Y aqueduc fupérieur pour porter l’eau
dans Y aqueduc inférieur. On en voit un femblable
au-deflus de T iv o li ,, dans un lieu nommé Vicovaro.
L e canal qui faifoit la fuite de Yaqüeduc, eft taillé
dans le roc v i f , l’efpace de plus d’un mille. C e canal
a environ 5 pieds de haut Sc.4 de lârge.
Une chofe remarquable eft que ces aqueducs, qui
pouVoieiit aller tout droit à la ville , n’y vont/que
par des finuofités fréquentes*, & des,/efpèceâ, de
zigzags. On en a cherché & i apporté plufieurs rai-
Tons : Tes uns ont dit qu’on - a ftiivi ces routes tortue
u (es , pour prendre les terrains plus élevés:, &
éviter par - là les frais d’arcades d’ une hauteur
extraordinaire. C ’eft le fentimenr de Fabretti ; cette
’ ràifon telle qu’elle tait,* vaut toujours mieux que
la conjefture de ceux qui ' penfeüt que lès anciens
en ont ufé ainfi , pour rendre l’ouvrage plus merveilleux
, en augmentant la longueur & là dépenfe
‘par la finuôfité de l’édifice. Flaminius Vacca , en
d'onne une raifon qui pàroît M plus vraifemblable.
On a , d i t - i l , Tait ces toute & détours /pour rompre
la trop grande impétuofité de l’e a u , qui, coulant
en ligne droite par un efpace imiuenfe , autoit
toujours augmenté de v îte fle , & auroit nui aux
canaux en peu de tems 3 au lieu que ces coudes &
ces détours modéroient d’efpace en efpace la violence
de fon cours. On demande encore pourquoi
y ayant une fi grande pente de ' là cafcadje de T i voli
à R om e le s Romains ont pris l ’eau de la meme
rivière, à plus de' vingt milles au - delfus. Que di-
fons-nous Vingt milles 1 à plus de trente, en y comprenant^
les détours d’un pays plein de montagnes.
On répond que la certitude d’avoir des eaux meilleures
& plus pures, fuffifoit aux Romains pour leur
faire croire lèùrs travaux nécefiaites , & leurs dé-
penfés jüftifiéës, ' Si l’on ajoute., d’ailleurs, que le
T’éveronè, près de T iv o li , pa(Te par des terresfulphu-
reufes , Sc s’y charge dé parties minérales & malfaines
J^bn fera fàtis fait de cétte réponfe. .
Que Ton confultè les figures , 183 , 184 & 18 5, &
T on verra avec quel foin ces immenfes ouvrages
étoient conftruits. L a première repréfente un de cës
arcs doubles, c’eft-à-dire, à deux érages , qu’on faifoit
ainfi plus élevés dans lês lieux bas pour trouver
au plus jufte la pente de l’eau. Ces arcs; :ont
i z pieds- d ’ouverture.. On ne trouve pas par - tout
la même diftance d’une prie à Tautfe les piles qui
font quarrées, ont 8- pieds de chaque côté. L a figure
( 18 3 ) fait voir un autre arc fort b a s , parce qu’il
fe trouve dans un terrain plus élevé. L ’arcade n’a
ic i que 10 pieds. & demi d’une pile à Tautre. On
voit àu-deftus un de ces foupiraux , qu’on laifibic
d ’efpace en ; e fn a c e a f in que fi l’eau vênoit à être
arrêtée par quelqu’accident, elle pût fe dégorger juf-
qu’a ce qu’on eut' nettoyé le conduit. Il y avoit aufli
dans le canal de Y aqueduc des puits, où Teau dépotait
fon limon , & des pifeines qui la recevoienu
pour s’y repofer & s’y purifier.
’ L e plus beau de tous les aqueducs de Rome ,
pour la conftruétion & pour le caractère d'architecture
qui convient à de pareils monumens , eft celui
de YAqua Claudia (Voyei Fig. i8 t f ) : i l eft tout en
belle pierre de ta ille , ruftiquement taillée 5 ce fut
l ’empereur Claude qui le conftruifit : il avoit quarante-
fix milles de longueur, dont plus de dix étoientformés
par des arcs élevés quelquefois de plus de 100 pieds.
Ceux de T Ajua-Marcia s’avancent parallèlement avec
1 aqueduc de&lÈ/Iaude dans la plaine de Rome, au nord
de la V oie Latine, qu’ils traverfent à 4 milles de Rome.
Les arcs' ont 1 6 pieds d’ouverture- : ils font conftruits
de trois différentes fortes de pierres, l’une rougeâtre
, 1 autre brune, 8c l’autre couleur de terre. Us
portent deux canaux, dont le plus élevé étoit de
le a u nouvelle duTeverone, & celui de deffous, étoit
de 1 eau Claudienne. L ’édifice entier a 7 a pieds R o mains
de hauteur.
Les Romains avoient
prefque tous- les lieux conftruits des aqueducs dans
où leur domination s’étoit
établie. S ’il, faut en croire C o l menâtes,r qui a :faic
Thiftoite d e . Ségovie , & d’autres auteurs qui ontr
Voyagé en Efpagne , Y aqueduc de Ségovie peut être
comparé aux plus merveilleux ouvrages que l’antiquité
nous ait tïanfinis. II. en refte encore cent cinquante
neuf arcades, toutes de grandes pierres, fâns
ciment. Ces arcades.,, avec tout l’édifice, ont io z
piefis de hauteur, & tant à deux rangs l’un fur Tautre.
L 'aqueduc traverfe la v ille , & paffe paivdeffus
là pliis grande partie des maifons qui font dans le
fond. ( y ç y e i Fig. 188) h'aqueduc de M e t z peut aufli
fe mettre au rang des monumens fameux en ce genre.
Qn en voit encore aujourd’hui un grànd nombre d’arcades
fort hautes : elles traverfoient la M o fe lle ,
grande rivière , qui eft fort large en cet endroit.
Les foijrces abondantes de Gorze fourniffoient l’eau
à la Naumachie : ceS eaux fe ralfembloient dans un
'réfervoir.j de-la elles étaient conduites par des canaux
^fouterrains, faits de pierre de taille,**& fi fpaçieux,
qu’un homme pouvoit y marcher fans fe courber.
Elles paffoient Ta Mofelle fur ces hautes & fuperbes
arcades , qu’on voit encore à deux lieües de M etz ,
& qui font fi bien maçonnées & fi bien cimentées ,
qu’excepté la partie, du milieu que les glaces, onc.
emportée , elles ont ré lift é réfiftent aux injures
les plus violentes des faitans. D e ces arcades, d’autres
-tf ÿwcdtfcjeonduifoientles eaux aux bains, & au lieu dé
la naumachie.
L 'aqueduc de Nifmes -, vulgairement appelle le
pont du Gard, eft un des grands & éternels ouvrages
de lapiiiflanceRomaine. I l eft élevé fur la rivière-
du Gardon , à trois lieues au nord-eft de Nifmes.,
entre deux montagnes. Sa conftruéHon eft toute de
pierres de taille pofées à fec , fans mortier , ni ciment,
elles paroiffent avoir été tirées d’une carrière
fituée à un demi-quart de lieue de là , en defeendant
la rivière fur la gauche.
Ce t aqueduc eft compofé de trois rangs d’arcades
en plein ceintre , élevées les unes-fur Tes autres^ :
lé premier rang eft de 6 arcs : il a 10 toifes z pieds
de hauteur, & 8,3 -toifes de longueur. Les eaux de
là rivière paffent tau s- la cinquième arche qui a 1 1
toifes d’ouverture. Le fécond rang eft formé de 1.1
arcades y il a 10 toifes de hauteur, & 133 toifes z
pieds de longueur; Enfin le troifiéme de 3 5 arcades ,
a 4 toifes de hauteur , & 13 6' toifes z pieds de
longueur. L ’élévation entière de l’édifice, depuis l’eau
jùfqu’à la cime du troifiéme rang d’arcades, eft de
Z4 toifes 3 pieds.
Sur ce troifiéme rang eft conftruit le canaTde Y aqueduc,
à niveau du fommet des montagnes, entre lefquel-
les paffe la rivière. Il a 4 pieds de largeur & y de hauteur
dans oeuvre. Des dalles d’un pied d’épaifleur,
de 3 delargeur, & d’un pied de faillie, le couvrent entièrement.
Le dedans eft enduit d’un ciment épais
de 3 pouces , recouvert par une peinture de b o l rouge
pour empêcher la tranfpiration des eaux y & le fond
eft un blocage de menues pierres mêlées avec du
gravier & d e là chaux y ce qui forme un maflif folide'
de 8 pouces d’épaiffeur,
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