
font v r a is , ce n’cft point à m o i , c’eft à la nature
même des chofes que vous d evez vous plaindre
de cette auftère morale. Il y a plus plus elle
vpus paroît au ftère, & plus vous en juftifiez la
néceflité : ft le contrafte de ce principe avec l’ar-
ch iteâure dominante vous ,paroît infoutenable ,
c ’eft l’art que vous condamnez, & non le principe ;
plus celui-ci vous paroîtroit ridicule , moins il
le feroit.
O u i , c’eft toujours, & dans tous les tems , fur
le type de la cabane qu’il faut reporter les y e u x
pour apprendre à rendre raifon de tout ce qu’on
peut fe permettre dans l’architeôure, à connoître
l ’emp loi, la deftination, la vraifemblance , la convenance
, l’utilité de chaque chofe. C e t y p e , qu’on
ne doit jamais perdre de v u e , fera la règle inflexible
qui redreffera tous les ufages dépravés, tous les
écarts vicieux , qu’une imitation fuccelîive des
ouvrages de l’a r t , & qu’une routine aveugle ne
manquent jamais d’introduire. Entre les mains de
l ’artifte , il aura la vertu toujours puiflante de régénérer
l’a rch iteâu re, & d’y opérer ces change-
mens fubits , ces révolutions de goût dont cet
art eft toujours fufceptijfle. Ce typ e précieux eft
en quelque forte un miroir enchanté , dont l’art
perverti & corrompu ne fauroit foutenir, la v u e ,
& q u i , en lui rappellant fon or ig in e , peut toujours
le rappeller à fa vertu première. ( Voye{ la
pl. i ere)
C abane , fe dit encore de tout aflemblage de
planches, dont on' forme à la hâte des retraites
de plufteurs genres, & qui prennent différens noms
de la variété de leurs, ufages.
C abane de berger, eft le nom qu’on donne à
une petite chambre de fix à fept pieds en quarré ,
„conftruite d’un bâtis de chevrons & de planches ,
monté fur deux effleux & quatre petites rou e s ,
qui fert à loger le berge r, lorfque dans l’été on
met le troupeau coucher au parc.
C abane ( Jardinage ). Les cabanes ne pouvant
fe confidérer que comme des habitations ruftiques,
ne fauroient trouver place dans les jardins p eign és ,
n i dans tous ceux q u i, compofés d’après les règles
de la fym m é tr ie , femblent n’admettre que les
embelliffemens recherchés du luxe & de la parure
qui leur conviennent. C ’eft dans les jardins
de ce genre qu’on trouvera les cabinets de treillage
& autres du même goût. ( Voye^ C abinet. )
Depuis qu’un nouveau fyftême de jardinage,
en rendant les jardins à la culture , y a ramené
l’afpeél & la réalité des champs, on a pris plaifir
à introduire dans ces tableaux de la nature, les
repréfentations naïves de tous les objets qui peu-
y en t opérer une entière illufion.
D e s fermes j des laiteries, des étables, les cabanes
ruftiques de tout genre , fe trouvent fou-
vent répandues dans ces jardins de la nature. Q u elquefois
elles y figurent fans aucun déguifement;
appellées p a r le befoin même, elles répondent,
& par leur u fag e , & par leur apparents ruftic
i té , à la deftination comme au caraâère de ces
jardins. D ’autres fois ces cabanes n’ont de ruftique
que la forme extérieure qui les met en rapport
a vec l’efpèce de payfage dont elles font partie*
mais par un contrafte allez piqu ant, l’argille &
le chaume cachent les marbrés & les métaux précieux.
On donne plus volontiers le nom de chaumière
à ces bâtimens hypocrites qui fe retrouvent dans
prefque tous les jardins du genre irrégulier. {Voye^
au mot CHAUMIERE, la defcription de quelques-
uns de ces caprices modernes. )
C A B A R E T , f. m. lieu où l’on vend du vin
en détail. C ’eft une falle au rez-de-châïïffée, où
fe trouvent des fièges & des tables pour y recevoir
& y fervir ceux qui y vont.
C abaret , nom d’un petit meuble deftiné autant
à la décoration qu’au befoin. C ’eft une petite
table avec des bords , ornée de dorures , de peintures
ou de vernis , fur laquelle on met les taffes,
les foqcoupes & autres vafes.
C A B E S T A N , f. m. ( Conjlrutiion. ) C ’eft une
efpèce de treuil placé verticalement, & qui fe meut
au moyen de leviers qu’on appelle barres. On donne
encore le nom de Vinda à cette machine. Les marins
l’appellent.cabejlan lorfqu’elle eft f ix e , comme
fur les vaiftfeaux, & vinda quand elle eft mobile,
comme celle dont on fe fert fur les ports & dans
les bâtimens. Dans l’art de bâtir, on ne diftingue
le cabejlan du vinda qu’en ce que ce dernier eft
plus petit. Q u oiqu e tout ce que nous dirons dans
cet article convienne à toutes les efpèces de cabejlans
, nous n’avons cependant pour , objet ici
que le cabejlan mobile. Cette machine eft d’un
ufage fort ancien : il en eft parlé dans les quef-
tions de mécanique d’ A r ifto te , & dans V itru v e ,
L . x , chap. 4. Ariftote la défigne par le mot
%vyov , & V itru v e l’appelle Ergata.
Les Italiens font beaucoup d’üfage du cabejlan,
& le nomment Argano. Combiné avec des poulies
de ren v o i, il leur tient lieu de g ru e , de chèvre
& de finge. O n s’eft fervi avec avantage de cette
machine, pour élever ou tranfporter les plus grands
fardeaux, tels que les obélifques de R om e , le
fameux rocher qui fait le piédeftal de la ftatue de
Pierre-le-grand à S. Pétersbourg , une des groffes
pierres qui forment les angles du fronton de la nou»
v elle églife de Ste G en e v iè v e , & c .
C e qui doit particuliérement déterminer à préférer
le cabejlan à toutes autres machines, îorf-
qu’ il s’agit d’une très-grande naafle., c’eft q u e ,
dans aucun c a s , les âge ns qu’on y emploie ne
courent de dangers. On peut appliquer aux ca-
bejlans des hommes ou des chevaux : l’effort qu’ils
produifent dépend du rapport qu’ il y a entre le
diamètre du treuil & la longueur des barres.
Le treuil du cabejlan mobile eft placé dans un
aflemblage de charpente, auquel on donne , en
plufieurs endroits , lè nom de chèvres, La forme
de cet aflemblage varie félon les pays. Les figures
29 & 30 repréfentent les formes qui font le
plus en ufage.
Le treuil du cabejlan ordinaire ( voye^ fig. 29 )
eft un cylindre terminé d’un bout par une tête
quarrée, percée de deux mortaiïes, l’une au-deffus
de l’autre, & qui fe croifent à angles droits. Dans
ces mortaifes on enfile des barres, auxquelles on
applique les hommes ou les chevaux qui doivent
faire tourner le treuil. L’autre bout du cylindre fe
termine par un tourillon qui fert à fixer par en-
bas le treuil dans la chèvre. On adapte ce tourillon
à un trou, rond du même diamètre, percé
dans un madrier, lequel eft arrêté fur les pièces
de bois qui forment la bafe de la chèvre ( Voye%
les fig. 29- & 3 0 ) . Le treuil eft maintenu dans
le haut par un autre madrier, entaillé demi-cir-
culairement, qui le butte en fens contraire de
l’effort.
Lorfqu’on veut fe fervir du cabejlan pour tranfporter
quelque fardeau, on commence , i°. par
l’arrêter à- un point fixe a vec un cord age, en
plufieurs doubles , attaché aux pieds de derrière
de la chèvre. Quand il ne fe trouve pas de
point fixe à p o r tée, on plante alors de forts pieux
pour en fe r v ir , ainfi qu’on le vo it repréfenté aux '
figures ci-dévant citées. 20. On prend un cable,
dont la groffeur foit proportionnée à la maffe qu’on
veut fe tranfporter. Après lui avoir fait faire plufieurs
tours fur le t re u il, on attache un de fes
bouts au fardeau ; & l’on fait tenir l’autre par un
homme qui eft aflis à terre.
A mefure que les hommes appliqués aux barres
du cabejlan font tourner le treuil, la partie du cable
attachée au fardeau fe roule fur Ce t re u il, tandis
que celle qui eft tenue par l’homme aflis fe développe;
de forte qu’ il y a toujours le même
nombre de tours fur le treuil. C ’eft pour faciliter
ce développement, qu’on place un homme à terre.
Il doit tenir le cable affez ferme pour l’empêcher
de glifler fur le treuil. La force qu’il faut pour
cela n’eft pas bien confidérable ; car d ’après des
expériences faites fur un treuil de quinze pouces
de diamètre, & fur un cable de deux pouces de
groffeur, on a trouvé que , lorfque le cable fait
trois fois le tour du t reuil, l’homme qui tient
le bout du cable p eu t, en agiffant avec cinquante
livres de force, faire équilibre à un effort de douze
milliers, & à 30 mille , fi le cable fait quatre
tours.
La partie du cable qui s’enveloppe fur le treuil
d un cabejlan , à mefure qu’on tire un fardeau,
s’élève à chaque tour de fon épaiffeur ; d’où il
réfulte qu’après un certain nombre de tours , le
cable ne trouve plus de place pour continuer de
s’envelopper. On eft alors obligé d’arrêter le ca-
bejlan , & de lâcher le cable pour le faire def-
cendre afin qu’ il puiffe s’envelopper de nouveau
: c’eft ce que les ouvriers appéllent choquer.
Cette néceflité d’arrêter le cabejlan pour choquer,
eft un des inconvéniens de cette machine. En
1 7 3 9 , l’académie des • fciences de Paris propofa
aux mécaniciens un prix fur ce fujet. O n trouva
dans les mémoires & les machines qui furent pré-
Tentés des chofes fort ingénieufes, mais trop compliquées
pour la pratique, & fujettes d’ailleurs à
plufieurs inconvéniens.
L ’expédient le plus fimple pour rendre le mouvement
du cabejlan continu , eft de faire un treuil
con ique , & d’y ajufter par-devant un ro u le a u ,
qui maintienne toujours le cable à la même haute
tir , comme on peut le voir à la fig. 30.
Un antre inconvénient des cabejlans ordinaires ^
c’eft que les ba.rr.es,.qui enfilent le treu il, étant
placées l’une au-dèmrs ‘‘‘de l’ autre , les hommes
qui y font appliqués n’agiffent pas avec un égal
avantage. Pour remédier à c e la , on a imaginé dé
faire une efpèce de moyeu , dont le trou eft quarré,
pour l’ajufter à la tête du treuil, qui elle même
a la même forme. O n perce autour de ce m oyeu
fix ou huit mortaifes , pour y adapter autant de
leviers. C ’eft de cette manière qu’étoient faits les
cabejlans avec lefquels on a transporté. le fameux:
rocher de S. Pétersbourg, & Ceux dont on s’eft
fervi pour tourner les grouppes de Mon te-Cav allô
à Rome en 1783. Par cette difpofition, les hommes
agiflent toits à la même hauteur & avec un égal
avantage. I l eft d’expérience que des hommes ,
appliqués aux barres d ’un cabejlan., y portent une
force moyenne de cinquante liv r e s , parce qu’ils
ajoutent à la force des bras une partie de la pe-
1 fanteur du corps, en s’appuyant contre les barres.
Ils peuvent fupporter ce travail pendant deux
heures en v iro n , au bout duquel temps il faut les
relayer.
Nous a llon s, d’ après ces notions , tâcher d’évaluer
le plus grand effort qu’on puiffe faire a vec
un cabejlan ; & afin de rendre ce calcul plus in-
térefl’a n t , nous l’appliquerons à un ,des cabejlans
qui ont fervi à tranfporter le rocher de S. Pétersbourg,
du poids de plus de trois million s,
y compris les équipages qu’on étoit obligé de
traîner à la fuite.
Selon les relations de M. le comte de Ca rbury
qui fut chargé de diriger cette opération , deux
cabejlans, mus chacun par trente-deux hommes ^
étoient fuftifans pour le faire marcher dans les
chemins à-peu-près de niveau. Comme les cabefi
tans avoient huit barre s, il fe trouvoit quatre
hommes à chacune. Ce s barres avoient huit pieds
de long depuis le centre du treuil. Les hommes
étoient placés de manière que le centre d’im-
preflion de la force avec laquelle les premiers
agiffoient, é toit à neuf pouces du bout dé la barre;
les autres étoient à dix-huit pouces l’un de l’autre;
ce qui donnoit un levier moyen de cinq pieds ,
à l’extrémité duquel on peut imaginer que la
force des trente-deux hommes étoit réunie. Ce tte
fo r c e , étant évaluée à raifon de cinquante livres
pour ch acu n , donnera mille fix cens livres pour
là valeur entière de cette force , qui décrira àk