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d’archite&ure ru ftiq u e , un herm itage, quelques
cabanes.
Q u o iq u e , d’après ces apperçus , il faille une
forte d’art pour rendre le bois un objet d’agrément
& d’in té r ê t, on doit cependant lui conferver
par-tout cet air d’aifance & de négligence même
qu’indique la nature : c’eft ce charme inimitable
& fenri qui donne aux bois un p rix , que n’auront
jamais les plus beaux jardins, les plus délicieux
bofquets.
Confidéré comme objet d’a fp e â , le bois eft d’un
grand effet dans les jardins. C’eft la limite la plus
avantageufe pour terminer un horizon : les arbres
lient le ciel & la terre d’une manière infiniment
agréable : c’eft la perfpe&ive la plus riche à pré-
f e n te r , fur-tout quand elle efh lointaine. Plus la
pente eft rap id e , plus le bois en amphithéâtre paroît
lufpendu, & plus l’afp e â en eft impofant. L’efiet
que produit un bois ainfi fufpendu, s’augmente
quelquefois par le foin qu’on prend de le fortifier,
en mettant du choix dans la proportion des arbres. On
p la c e , fur la fommité , les plus grands, & les plus
petits dans le bas. Les arbres , employés en pareilles
circonftances, étant néceflairement d’efpèces
différentes, il f a u t , dans leur affociation , avoir
égard à l’harmonie des formes & des tons qui doit
en lier les maffes.
Une obfervation importante porte fur la ligne
extérieure qui termine le bois : cette ligne fait
fouvent une portion confidérable de l’a fp e â de
la maifon : elle defline les clairières , termine les
p e lo u fe s, & décide leur forme : il eft peu de
parties qui exigent autant de goût & qui demandent
autant d ’attention. Il faut que le trait qui fé-
pare le bois des g azons, ait dans fes contours cette
négligence aimable, & cette riche variété qu’a
toujours la nature dans fes ouvrages ; que tantôt
la peloufe s’enfonce profondément dans lé bois,
& aille s’y perdre ; que tantôt le bois faffe une
faillie en pointe fur la peloufe. Cette m an iè re ,
large & p ro n o n cé e , agrandit, aux yeu x de l’imagination
, un tapis de verdure ; elle d o n n e , au
bois le moins épais, une apparence de profondeur.
Un e ligne formée par des ondulations molles &
trop égales-, échapperoit à la v u e , fur-tout à une
certaine diftance.
C’eft donc à l’aide des faillies & des grandes
projections , jointes à la variété des plantations ,
qu’on peut jetter de l’agrément dans la ligne extérieure
d’un bois, & lui donner du mou v em en t,
tan t dans le trait qui la defline , que dans fon effet
vertical.
% Pour bien fentir & diftinguer les caraâériftiques
des bois, des bocages & des bo fq u ets, voye% ces
deux derniers mots.
. BO ISÉ , ( Jardinage. ) fe dit des endroits garnis
de bois par la nature- ou par l’art : on dit des coltines
, des monticules boifés. ( Voyeç B o i s , Jardinage.
)
BOISER, v. aâ. c’eft couvrir les murs d’une
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chambre ou d’un appartement d’ouvragés de me.
nuiferie , affemblés , m ou lé s , fcu lp tês , &c. Les
appartemens boifés font moins froids, moins humides
, & plus fains en tout temps. ( Voyeç L am-
briser. )
B O IS E R IE , f. f. ouvrage de menuiferie, où
l’on emploie le bois de ch ên e, de fapin & autres
pour les appliquer contre les murs des apparte-
mens. L e bois le plus propre à faire de belles boi-
fériés eft le chêne de Danemarclc, parce qu’il i
moins de noeuds & de défauts que celui des pays
plus chauds.
B O M B É , ou C ourbé , adj. C ’eft ainfi qu’on
cara&érife un arc qui a environ foixante degrés.
B O M B EM E N T , f. m. c’eft k con v e x ité , cur-
v ité ou renflement d’une fo l iv e , d’un a r c , &c,
B O N B A N C . (pierre de). Voye% Pierre.
B O N D E , f. f. ( ArchiteÜ. hydraul. ) efpèce
fermeture d’étang ou de baflin, en forme de tôn*
t ron qu é, que l’on pofe dans un t rou , à l’end-oit
le plus creux de l’étan g , pour le vuider à fond
par une pierrée ou un aqueduc.
B O R D , f. m. eft en général c e qui environne
quelque objet.
Bord de bassin. C ’eft la tab lette, ou le profil
de pierre ou de marbre ; c’eft le cordon de gazon
ou de rocaille, qui pofe fur le petit mur circulaire,
quarré ou à pans , d’un baflin d’eau.
B O R D E R U NE A L L É E . ( Jardinage. ) Ceft
planter, dans la longueur d’une allée, une bordure
de buis ou d’herbes fines, comme th ym , marjolaine,
fauge, ou m ême de fleurs, comme oeillets*, &c.
pour féparer la planche ou la plate-bande des carreaux
, d’a vec l’allée.
B O R D U R E , f. f. c’eft un profil en relie f rotA,
quarré ou ovale , le plus fouvent fcu lp té , peint
ou doré , qui renferme quelque tableau , bas-relief
oiTpanneau de compartimens. On donne plus vo?
lontiers le nom de cadres aux bordures quarrées.
( Voyei Cadre. )
Bordure. (Jardinage.) C ’eft une bande de thym,
de lavande ou de gazon , qui entoure les compartimens
d’un parterre. Les bordures des allées font
ordinairement de buis.
Bordure d ç . p a v é , nom qu’on donne aux
deux rangs de pierre dure & ruftique qui retiennent
les dernières morces , & qui font les bords
du pa vé d’une chauffée.
B O R N E , f. f. pierre qui fert de terme & de
limite à un héritage, ou qui marque l ’étendue &
les cenfives d’une terre feigneuriale. Sur cette
pierre font ordinairement les armes ou le chiffre
du feigneur. Les arpenteurs plantent les bornes aux
encoignures des ter res , & mettent des témoins
au-deffous ou à certaine diftance. ( Voyeç T émoin
de borne. ) Cela fe pratique dans les ouvrages
publics , comme les ponts, & e .
Borne de batiment , e fpèce de cône de pierre
dure, placée à l’encoignure ou au-devant d’un mur
de fa ce , pour le défendre des charrois. Ces bornts
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font adoffées aux mu rs , ou ifo lé e s ; & quand
elles renferment une place, en avant d’un bâtiment
fur une voie publique, c’eft une preuve que cette
place eft dépendante de l’édifice, & que le terrein
appartient au propriétaire du bâtiment.
Borne de c ir q u e , pierre en manière de cô n e ,
qui fervoit de but chez les Grecs pour terminer
la longueur du ftade , & qui régloir chez les R o mains
la courfe des chevaux dans les cirques &
les hyppodromes. ( Voye{ ces mots. ) O n la nom-
riioit Meta.
B O R N É , adjeâ. c’eft en général ce qui a des
bornes , des limites. On dit qu’une maifon eft bornée,
lorfqu’on ne peut l’augmenter ; qu’une vue
eft bornée, lorfqu’elle eft fituée dans un lieu d’où
l’on ne peut voir au lo in , à caufe des montagnes
ou des bois.
B O R N O Y E R , v . a&. regarder d’un feul oe il,
en fermant l ’au tre , pour juger par trois ou plu-
fieurs jalons , ou corps quelconques , de la droiture
d’une lig n e , pour ériger un mur d ro i t , ou
pour planter des arbres d’alignement.
BO R ROMIN I ( François ). L ’hiftoire des ar-
tiftes forme une partie fi importante de celle des
arts, que nous avons cru ne pouvoir pas y donner
trop d’étendue dans cet ouvrage , où nous avons
réuni tout ce qui compofe le corps des connoif-
fances archite&oniques. Rien de plus agréable, fans
doute, & de plus inftru&if en même temps , que
de connoître les perfonnes par leurs o u v rag e s, &
les ouvrages par les perfonnes. A l’exemple de
Varrôn chez les Romains, & de plufieurs m odernes,
qui ont placé les effigies des grands écrivains à la 1
tête de leurs o u v rag e s , nous avons cru ne pouvoir
mieux faire, que de joindre à la defcription
des monumens les portraits de leurs auteurs. Un
avantage que nous pouvons avoir ici fur Varron
& fes imitateurs, c’eft de repréfenter, dans les
portraits de ces grands artiftes, la portion d’eux-
mêmes , la plus noble & la plus intéreffante, leur
ame, leur caradère & leur goût. A cet effe t, nous
avons eu foin de recueillir tout ce que l’hiftoire,
ou la connoiffance même de leurs ouv rag e s, ont
pu nous fournir de traits propres à rendre ces
portraits reconnoiffables. Nous avons tiré de la
pouffière du temps, & du néant de l’ou b li, ceux
que l’ingratitude de la poftérité fembloit y avoir
enfevelis pour toujours. Ceux que le vain éclat de
la nouveauté feule embellit, ne nous en ont point
impofé. Peut-être fera-t-on furpris que pluueurs
de ces portraits, qui féduïfent le plus les y e u x ,
ne trouvent point ici leur p la c e , ou s’y montrent
avec des couleurs différentes de celles dont la renommée
avoit pris plaifir à les peindre.
L’intérêt des arts exige ce difcernement : peut-
être même demanderoit-il qu’on effaçât de leur
hiftoire la mémoire de ces artiftes trop fameux ,
^ui n’ont dû leur célébrité qu’ à la témérité de leurs
inventions , à leur mépris pour toute règle , & à
la licence effrénée de leurs audacieufes produdions.
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Peut-êtrê cependant l’exemple du v i c e , préfenté
dans toute fa difformité, eft-il un des meilleurs
préfervatifs contre fa contagion. Peut-être importe-
t-il au bien commun d’en faire connoître les ennemis,
& de les dénoncer à la cenfure de la poftérité
: interejl reipublicce cognofci malos. C ’eft fous
ces deux derniers points de v u e , & d’après ces
confidératîons, que nous allons donner i’hiftoire
du trop fameux Borromini, & développer les effets
t^op dangereux de fon funefte génie.
Biflone , dans le diocèfe de C o rn e , fut fa patrie ;
il y naquit l’an 1599- Son p è re , qui étoit architecte
, l’en v o y a à M ilan , dès l’âge de neuf an s ,
étudier la fculpture ,à laquelle il le deftinoit. Aprè s
fept années de travail & d’ études dans cet a r t ,
le defir de s’y perfectionner le conduifit à Rome :
il y fut reçu par un maître marbrier, fon compatriote,
qui étoit occupé aux marbres de S. P ierre ;
& bientôt il fut affociè à fes travaux. La vu e de
cette fuperbe bafilique lui fit naître la penfée d’en
defliner & d’en mefurer les principales parties. Ses
heures de repos ne fuffifoient pas pour ce nouveau
travail ; il retrancha celles dii fommeil.
Mad erne, fon parent, alors architecte de la fa-
briqûe de S. Pierre , remarqua le zèle de ce jeune
homme. Charmé des difpohtions qu’il lui v o y o i t ,
il lui donna les premières leçons de fon art , &
l’en v o y a chez un maître pour apprendre la géométrie.
Les progrès de Borromini furent te ls , qu’en
peu de temps Maderne, qui d’abord lui faifoit m ettre
au net fes deflîns, l’employa aux ouvrages que lui
confia Urbain V I I I , après la mort de G régoire X I I I .
A u milieu de ces occupations, il ménageoit quelques
momens pour la fculpture : il f i t , entre autres
chofes , dans S. Pierre , les chérubins qui tiennent
des feftons su-deffùs du b a s -relie f d’A t tila , & ceux
qu’on vo it fur les petites portes de l’églife. La
fculpture avoit des charmes pour lui : il s’y feroit
adonné de plus en p lu s , s’il eût été le maître de
fatisfaire tous fes goûts : mais Maderne, accablé
d’ infirmités, fe faifoit remplacer par lui dans toutes
fes entreprîtes d’architedure , & ne lui permettoit
pas de faire à cet art la moindre infidélité. Sa
mort étant arrivée en 16 29 , le Bernin lui fiiccéda
dans la charge d’architede de S. Pierre. Il ne fut
pas difficile à Borromini de s’introduire auprès de ce
nouvel architede. Les travaux qu’il avoit dirigés
dans l’églife de S. Pierre ( entre autres la grille
de la chapelle du S. Sacrement ) , lui donnoient
accès auprès du B e rn in , & lui affuroient de l’emploi
fous lui. Leur union fembloit devoir durer :
les différends qui s’élevèrent entre eux la firent
bientôt ceffer.
La jaloufie fut le v ice dominant de Borromini.
Cette paffion , capable feule d’altérer tous les germes
du ta len t, fe développa de bonne heure en
I lui : le Bernin en fut le principal objet. Borromini
fouffroit impatiemment fa g loire; il fouffroit en-
I core avec plus de peine de fe voir l’élèv e de fon
I contemporain, car quelques mois au plus féparoient