pouces par toiles, les charrois ne peuvent y
monter iju’avec beaucoup de peine.
Chemin teuri. Petit chemin qui eft à côté de
cetui des charrois, & qui fert pour les gens de
pied, comme Ses banquettes des quais (St des ponts
de pierre, &. les bermes des foliés & canaux
faits par artifice.
Chemin royal. On appelle ainfi celui de tous
les chemins oit l’on épargne le moins la dépenfe
& le travail, pour le rendre le plus court, le
plus commode th le plus lûr qu’il eft pofliblé.
Chemin terrejlre. C ’eft celui qui eft formé naturellement
par la tetre qui le trouve fur le lieu,
ou par des terres rapportées en manière de levées,
foutenues de berges en glacis, avec aire de gravois
ou de pavés.
L’art de conftruire, de difpofèr & de percer
les chemins, eft fans doute un de ceux qui contribuent
le plus à l’ut.lité & à la gloire d’un
empire. Tout ce qui a rapport à cetta partie fi
intêreffante de l’architefture, fe trouvera traité
avec plus de détails & d’étendue qu’on ne pourrait
le 'faire ici, dans le diélionnaire des ponts &
chauflées. Pour ne pas priver cependant ce'ui ci
des notions générales qutl comporte, on a divilé
en deux atticles celles .qu’on eft en droit d’y
chercher. Les connoiffanccs de conllru&ion vont
fe trouver dans l’article fuivant, traitées fuccin-
tement; celles dhifloire ou de defeription le font
de la même manière à l’article V OIE.
Chemin , ( conftruSwn. ) Ce qu’on fe propofe
de dire ici fur la conftruéiion des chemins, fe par-
taae de foi-même en deux parties, dont l’une a
rapport aux procédés des anciens, £t l’autre aux
pratiques modernes.
Des chemins antiquesl
Les matières dont les Romains faifoient ufage
dans la conftru&ion de leurs chemins, étoient la
chaux, le fable, la terre franche, l’argile, l’arène,
la grève , le gravier, les cailloux, les pierres
dures, les grais, les laves.
Les anciens comprenoient, fous le nom de
cailloux, les galets ou pierres globuleüfos de
différentes couleurs qu’on tiouve au fond des
rivières & fur la grève des mers & des fleuves,
fur tout dans les ports & havres, où fouvent ils
fe rencontrent en fi grande abondance, qu’ils les
obftruent. Outre les galets, les anciens, ainfi
que nous, ont donné le nom de cailloux à toutes
les pierres ignefeentes, c’eft-à-cire à celles dont
on peut tirer du feu, en les frappant les unes
contre les autres, ou avec l'acier.
Sous le nom de pierres dures, on peut comprendre
les cailloux, les laves $£ les pierres calcaires
; cependant ces dernières ne s’employoient,
pour le pavé, qu’à défaut d’autres, mais on les
^ettoit en oeuvré pour former le maflif intérieur
qui fer voit de fondement aux grands chemins i
c’eft à fa conftruéiion & à (on épaifleur- qu’étoiene
dues la folidité & la durée des voies antiques.
Ce maflif fe compoloit de différentes couches
que les Romains dèfignoient fous les noms de.
jlatumen, rudus, nucléus, fumma crufta ou fummutw
dorfum.
Le jlatumen étoit compofé de moellons plats,
-pofés fur une forte couche & maçonnés à bains
de mortier. Avant de pofer cette première couche,
on creùloit une tranchée «mue deux lignes parallèles,
de la latgeur du maflif. Lorfqu’on avoit
reconnu que le fol étoit ferme &. (olide, on fe
contentoit de le battre avec de fo;ts pilons ferrés
ou de gros cylindres qu’on rouloit plufteurs fois
fur le fond égalifé. La profondeur de la tranchée
tievoit être telle, que la (uperfide fupécieure du
chemin pût être plus élevée que le niveau de la
campagne. Il y en avoit,.tels que ceux de la
Gaule Belgique, dont la hauteur étoit de 15 à
20 pieds au-deffus du fo l; c’étoieat proprement
des levées.
La fécondé couche, appelée rudus, étoit formée
■ d’une maçonnerie de blocage .& compofée de
petites pierres de toutes formes & de toutes natures,
mêlées avec force mortier. Cette fécondé
couche, qui avoit environ i pied d’épaiffeur,
etoit battue & maflivée, avant de recevoir la
treifième, qu’on appelloit nucléus.
Le nucléus ou noyau étoit compofé de différentes
matières. Dans quelques chemins, c’eft un
mélange de chaux, de craie & de terre franche,
battues & corroyées enfemble. Dans d’autres ,
e’eft une couche de béton, c’ eft-à-dire de gravier
corroyé avec de la chaux; enfin, dans d’autres 9
cette troifième couche ne s’y trouve point.
La quatrième couche, appellée fummum dorfum,
fumma crujla, étoit formée de cailloux ou de
grandes pierres plates , taillées en polygones irréguliers,
où équarries à angles droits. Ces pierres
étoient enfoncées dans la couche appelée nucléus,
Le pavé de la voie Appienne, une des plus célèbres
de l’antiquité , eft toute en grandes pierres
de lave, pofées de cette manière, taillées en
pointes de diamans par deffus, & formant des
figures de 5 , de 6 ou de 7 côtés. Les plus grandes"
oat 3 ou 4 pieds de diamètre. Selon Palladio,
on fe fervoit de lames de plomb pour prendre
les angles & le contour jufte des parties qui
dévoient fe raccorder. La largeur de la voie, entre
les marges, eft d’environ 14 pieds : les marges
ent 15 pouces de haut fur 21 pouces de large;
les pavés font enfoncés dans une efpèce de maçonnerie
en blocage, d’environ 9 pouces d’épaiffeur,
au-deffous de laquelle on n’apperçoit que la terre
battue & affermie. En d’autres endroits, le maflif
eft beaucoup plus épais, & l’on trouve deux
murs de fondation fous les marges. On remarque
dans celles-ci des pierres plus élevées, éloignées
'd’environ 12 pieds. Au-delà des marges, il pouvoit
y avoir de chaque côté un demi-chemin dont le
deffus étoit garni d’arène ou de gravier ; cependant
cette difpofition n’ étôiç pas toujours uniforme ;
ca r , dans quelques endroits, on découvre les
reftes des maflifs qui étoient fous ces parties de
chemins, & ailleurs .on remarque ^ des veftiges
d’édifices, dont les faces font prècifément fur
l’alignement de la partie payée. Les fragmens
encore exiftans de cette ancienne voie , fe retrouvent,
en beaucoup d’endroits, fains, entiers,
bien unis, 8c ne paroiffant avoir fouffert aucune
altération depuis deux mille ans. ( Voyeç A ppienne
yoiE. )
Les chemins antiques, dont la fuperficïe n étoit
point pavée, fe form oient par une couche de
béton , c’eft-à-dire d’un mélange de gravier broyé
avec de la chaux fraîchement éteinte & mafliw.-e
avec des pilons ferrés. Les parties de ce gravier,
qui étoient quelquefois d’un gris blèuâ're, ont
fait donner le nom de chemin ferré à ceux dont
la furface étoit formée de ce;te manière; elle
acquéroù avec le teins une plus grande dureté
que les pavés en pierre de taille. On voyoit
autrefois, près de L y o n , des parties de'béton
qui avoient formé la fuperficie d’un chemin antique.
Leur largeur étoit de 7 à 8 pieds lur 1 pied &
demi d’épaiffeur ; des blocs de la pierre la plus
dure étoient moins folides.
Nicolas Bergier fit découvrir plufienrs parties
de grands chemins, conftruits par les anciens Romains
dans la Champagne. La première fouille
qu’il fit {faire fut dans le couvent des capucins de
Reims, fur une partie de marais de la rivière
de Vefle. Ayant fait creufer jufqu’à 9 pieds de
profondeur 4 il trouva la terre ferme fur laquelle
le chemin étoit fondé : cette fondation commençoit
par une couche d’un pouce d’épaiflèur de mortier
compofé avec de la chaux & du fable. Sur ce lit de
mortier il y avoir un maflif de pierres larges &
plates de 10 pouces 'd’épaiffeur/maçonné avec
în mortier fort dur qui uniffoit ces pierres avec
beaucoup de force. Ce maflif répond au Jlatumen
dont parie Vitruve, Liv. n i , chap. 1, où il eft
queftion du pavé des appartemens. {Voye^ A ire.)
On trouva p a r -d e f fn s une couche de maçonnerie
en blocage, de 8 pouces d’épaiffeur, compofée de
petites pierres i r r é g u l iè r e s de toutes fortes de
formes, rondes & ovales, & de 2 à 3 pouces
de diamètre, plus tendres que les cailloux ordinaires,
& qui ne faifoient point de feu avec i’acier.
Cette couche formoit un ouvrage fi folide & fi
bien lié , qu’un ouvrier n’en pouvoit détacher,
dans l’efpace d’une heure, qu’autant qu’il en
pouvoit porter fur les épaules. Elle en fupportoit
encore une autre d’un p i e d d’épaiffeur, compofée
d’une efpèce de craie afftz tendre. Bergier appelle
Cette couche nucléus, parce que, félon lui, elle
répond à celle qui portoit le même nom dans
les aires antiques, félon Vitruve. La dernière
couche, qui formoit la fùperficie du chemin, avoit
6 pouces d’épaiffeur. Bergier ne dit pas de quoi
elle étoit compofée.
Il alla une demi-lieue plus loin pour examiner
nne autre partie de chemin antique, élevée de 4
à 5 pieds au-deffus du terrein où elle paffe. Il la
trouva compofée des mêmes couches que la précédente,
excepté qu’il n’y vit aucuns fragmens
de tuiles ou briques, comme il en avoit vu
dans la première partie du chemin qu’il fit fouiller»
La troifième portion de voie antique que ce
favsnr fit ouvrir, fe trouve à trois lieues de
Reirm, en allant à Mouzon. Il trouva que \ç
maflif, 00 la première couche , éfoir fait de deux
rangs de pierre plates , dont le premier avoit 10
pouces d’épai fleur, & le fécond 11 pouces; ils
étoient fans mortier. Ce double rang porroir le
nucléus, ou noyau , quhavoit4ou 5 pouces d’épaiffeur,
& étoit compofé d’une terre rouffe, étendue
fur le dernier rang de pierres plates pofées fans
mortier. Au-deffus du noyau évoit une couche de
béton de 10 pouces d’épai fleur. Elle fe compofore
de petits cailloux ronds & liffes, dont la groflêtHf
étoit depuis celle d’ un noyau de cerife jufqu’àf
celle d’une noix , liés avec un ciment fort dur».
La dernière couche, qui formoit la fuperficiedu?
chemin, avoit 6 pouces d’épaiffeur; elle étoit formée-
de cailloux plus gros, liés au.Ai par du ciment».
L’épaiffeur de toutes les couches, dont cette partie
de chemin éroit formée, avoit 3 pieds & demi.
Les Romains faifoient aufli des chemins faits y
employer de ciment ou du mortier de chaux &
fable : ils y fubftituoient la terre franche ; cela
n’empêchoit pas qu’ils n’obfervaffent le même
nombre de couches maflivées fortement,, ce qui?
ne laifloit pas de leur procurer une fermeté &
une folidîté fupérieure encore de beaucoup &
celle des chemins modernes, où l’on n’obferve pas»
le même procédé.
Lorfque les chemins dévoient être élevés au-
deffus du niveau de la campagne, ils en foute—-
noient les bords par des mues de revêtement».
Entre ces murs, ils arrangeoient par couches*
tous les matériaux qui dévoient former ia chauffée»
ils avoient foin d’employer les plus gros pour
former les premières couches, & de battre chaque
couche avant d’en ajouter une autre.
Quelquefois l’endroit même où l’ori fai foi t
pafler le chemin, pouvoit fournir les matériaux
néceflaires à fa conftruéiion. Alors ils creufoient'
à droite & à gauche du chemin, pour en retirer
ces matériaux. Dans d’autres endroits, on eft
étonné de ne trouver, aux environs des chemins,
aucune des matières dont ils font compofés, ce
qui fait croire que fouvent elles étoient amenées
de fort loin, ou que pour les trouver, ©n faifoit
des fouilles très profondes.
Les anciens ont èpuifé, dans l’art des chemins 9