
iiolès & fans rapport entre eux , d’où r.èfulte ce
car attire & en quoi il confifte ,1a nature me four-
iiiroit une réponfe bien fimple & bien facile ; car
à coup fur,'borné à l’inftinâ & à la voix feule
du bsfoin phyfique, cet art n’offriroit que'des
nuances confiantes & très-peu variées, & l’on dirent
, fans craindre de fe tromper, que le carattêre
de cet art fet o it , comme dans les ouvrages des
animaux, une manière d’être obligée, une configuration
néceffaire, dans laquelle fe peignent & !
s’expriment l’efprit, les habitudes 8c les befoins
généraux & partiels de chaque efpèce d’hommes
ou de chaque homme en particulier , & qui ré-,
fuite de l’aélion direâe des caufes phyfiques fur
elle.
Plus l’état de fociétè fait de progrès parmi les
hommes, plus alors la civilifation dénature leurs
premiers befoins. Elle parvient même à les dé- '
compofer ; elle en invente de nouveaux ;. des plus
fimples befoins elle fait des plaifirs , & elle convertit
les plus futiles plaifirs en befoins & en né-
ceflités. Alors on. perd infenfiblement de vue la
main de . la nature , on diroit qu’elle ait cefle de
diriger fon ouvrage , ou qu’elle l’ait abandonné
à l’im.pulfion de caufes fécondai res. On ne distingue
plus en effet , q n e l’aCLon de la fociété
qui façonne tout, l’empreinte première difparoît,
©il du moins a’efl plus apperçue que de ceux qui
favent- qu’elle peut être cachée, mais jamais effacée.
Dans cet état de chofes, il femblè qu’il fois
plus difficile de déterminer ce que c’efl que le
carattêre dans fart de bâtir des différens peuples.
Du moins eft il certain qu’on remarquera beaucoup
de contradictions dans.les idées qu’on s’en
forme 8c dans les définitions qu’on en fait, & cela
faute de croire que la nature influe encore fur
cet art, ou faute de voir de quelle manière agit
cette influence, jufqu’à quel point .elle agit &
Jufqu’à quel degré d’autres caufes. s’y mêlent &
concourent avec elle.
Quant à moi, quelles-que puifîëntêtrelescaufes
fubalternes & incidentes qui peuvent-concourir
à la formation du carattere_ général- de chaque architecture,
je ne faurois en- donner d?au?re- définition
que celle qui en rapporte la caufe à Inaction
primordiale de la nature , en y ajoutant toutefois
une aétion indireéle de cette mên'érnature & une
aClion direéte de la fociété-, quoique toujours fù-
bordonnée à- la première , & je dirai que le ca-
Tfittere d’architeéture des différens peuples confiffe
dans une manière d’être-, dans une conformation né-
cejjîtée par les befoins. phyfiques & les habitudes morales
, 6* dans laquelle fe peignent les- climatsles
idées, les- moeurs , les goûts-, ks' plaifirs & le caractère
mêine de^chaque peuple..
La nature a deux manières invariables & éternelles
d?influer fur les ouvrages des hommes, quels
qq’Us. io ie n iw ê js e , indépendamment de toute
aétion fociale : l’une direéte 8c abfolue ; c’efl la loi
du befoin., qui façonne d’une main impérieufe
toute les inventions des arts, & fur-tout celles de
l’architeClùre : l’autre, non moins defpotique , mais
plus fecrète & plus détournée ; c’efl: celle qui agit
fur les hommes , & par contre-coup fur les arts
au moyen des impreffions qu’ elle communique à
lame 8c à l’imagination des peuples. Cette vertu
fecrète efl celle qu’on apperçoit le moins , parce
qu’elle nous enveloppe fans que nous nous eu
doutions ; qu’elle agit fur nous d’une manière invi-
fible, & que fes moyens abftraùs ne font pas
faciles à démontrer, même à ceux qui en éprouvent
toute la force.
Quant à l’aélion immédiate des caufes phyfiques
ou naturelles fur le carattêre- des div ers ré fui ta ts
de l’art de bâtir chez les différens peuples, p.çr-
fonne fans doute ne conteflera cette corrélation
intime du genre de vie , do climat, des matériaux
avec les formés caraélèrifHqucs de Farchire&iire,.
eonfidéi;ée. fous fes rapports matériels. J’ai déjà
fait voir, au mot Architecture , que les t ois
genres de vie principaux . offerts par la nature
aux h-ommes dé toutes les contrées-, a voient dû né-
cefTairemënt y modifier d’une façon très-différente
les premiers efiais de l’art de bâtir ; que le
peuple , chnfleur ou pêi heur , dévenoit, par état,
[’habitant des antres préparés par la nature , oa
que fon induflrie pôuvoit lui ouvrir le long- des.
fleuves ou des bords de la mer ; que le - peuple
pa-fleur , obligé d’avoir des maifons ambulantes,
avoir dû imaginer L’ufàge des tentes; que le peuple
cultivateur ou agricole , attaché au champ
qui le nourrit , avoit dû fe former des habitations
plus folides & plus fixes , c’efl-à dire, des
cabanes de bois , qui pufient contenir & fa famille
& les productions- de fa terre. En indiquant
ces . trois genres de vie comme ceux qui durent
influer le plus fur le carattêreprimitif des;premières
habitations de toutes les. fociétés d’hommes, il y
auroit de l’abftirdité à croire que leurs réfuitats-
aient du être matériellement conformes les. uns aux
autres dans tous les pays.. Une telle uniformité
que les productions des animaux même ne nous
préfentem pas,. feroit une chimère ; mais ce qui
n’en, efl pas une , e’eft l’uniformité de principes
ou de carattêre qui- » dû en êtr.e l’effet..
Loin d’ici toute efpèce de fyfiême qui, par des
■ rapprochemens forcés ou des induélions captieu-
fement enchaînées , chercheroit à établir des
• rapports d’analogie- entre les réfukats- de détail
dan.s l’art de bâtir des différens peuples. Ce n’eft
- point par de femblables- effets qu’on doit rechercher
les caufes de leur carattêre. Le même carattêre
peut en effet, fe développer avec des différences
• de formes les plus remarquables. Mais on a déjà
fait ob fer ver que les carotter es de pefanteur , de
folidiîê & de légèreté qui fe rencontrent dansiez
principales architectures qu’on connoît, avoientiû
tiaître naturellement des trois genres de vie qui
furent les préludés nèceffaires de toute fociété.
C’efl ce genre de carattêre. effentiel ou inhérent
à l’efience' de chaque archite&ure qui tient particulièrement
à la nature ou aux caufes phyfiques ~
dont il efl queftion en ce moment. ( foye^ ce
qui en a été dit à l’article Architetture).
Le climat façonne aufli d’une manière immédiate
& femblable les inventions de l’art de bâtir.
Les befoins les plus impérieux des hommes tiennent
au climat, & ces befoins ont une telle puif-
fance , que quelles ques foient lés raifonsquitranf-
portenr d’une température à une autre, le genre de
bâtir d’un peuple »vous le verrez , au bout d’un cer-
taintems , prendre l’accord du climat, c’eft-à-dire,
s’approprier aux meeffitès de ceux qui en reçoivent
l’influence. Les climats chauds ou froids ,
fecs ou pluvieux, neutres ou tempérés , fe peignent
d’eux - mêmes , non • feulement dans le goût ,
mais dans les formes générales de l’arèJiitcCture.
Ici les,édifices vous étaleront le riant afpeCt de
galeries découvertes, de colonnades qui femblent
appeller les vents rafraîchi flans , de portiques ouverts
à la promenade , de terraffes auxquelles
l’azur d’on beau ciel fert de pavilliorU Vous diriez
que les édifices rne font habitables qu’au dehors ;
& de fait, leurs intérieurs ne vous offriront qu’un
petit nombre de pièces obfcures , qui ne_reçoi-
vent de jour que par des portes , & qui femblent
deflinées plutôt à ferrer les chofes nèceffaires qu’à
loger leurs habitans. Ailleurs , vous verrez l’homme
fe refferrer & fe concentrer dans l’intérieur
.de fes ré iuits , pratiquer, pour la lumière qui le
fuit, de "grandes ouvertures. Ses habitations vous
le montrent comme dans un état de guerre perpétuelle
avec la nature, comme armé contre toutes
fes attaques. De-là la nudité extérieure de fes habitations
; de-là. ces combles hériffés vers le ciel , ■
& qui paroiffent lutter contre les infultés de tous '
les météores ; de-là toutes ces inventions de commodité
intérieure auxquelles l’extérieur efl obligé
de s’affujettir. Dans les climats où le plaifir de
refpirer l’air & de jouir du ciel efl un des premiers
befoins de l’homme , les édifices nous pré-
fenteront tous les carattêre s de la gaiete , de lai-
fance & de la variété. Sous les. températures
condamnées à la rigueur des frimas , nous
. n’appercevrons, dans l’architeélure ».que. les ca-
rattères. de la tri fie néceffité,d’une froide monotonie,
d’une auftère pauvreté.
Le climat offre à celui qui fait en apprécier :
l’influence, des modifications & des nuances bien
remarquables dans tous les ouvrages de l’architecture.
Mais ees; diftinélions méritent un article à
part, & l’on en trouvera le détail au mot Climat.
cet article.):
Les matériaux dont l’architeélure conrpofe fes
ouvrages ne font pas une des caufes phyfiques
qui ait le moins de pouvoir fur le carattêre eflentiel
de l’art de bâtir. Ces différences de carattêre ré*
fultént de la nature 8c de la qualité des matières
qui tombent fous la main de l’homme , & qui fe
prêtent aux reffources de fon induftrie. Là , des
maffes énorm es de rochers n’attendent que le ci-
feau pour devenir des colonnes ; ic i , les arbres
des forêts vont prêter leurs troncs tout arrondis
au fupport des édifices ; ailleurs , la terre préparée
& durcie par le feu, va former des pierres factices
que le ciment faura rendre indiffolubles. En
général , l’emploi de la pierre eff celui qui donne
a l’architeéhire le plus grand carattêre , c’efl-à-dire
le plus de force , de fimplicité-& de févériré,
fur tout fi ces pierres font des marbres dont l’éclat
8c la folidité ajoutent encore à la difficulté de
leur travail. Plus ces matériaux auront de dureté ,
moins le caprice en variera les formes , 8c plus“'
elles réfléchiront , fi l’on peut dire, dans les édifices
, de grandeur & de force. Des matériaux ou
des pierres d’une qualité molle & facile à mettre
eh oeuvre infpireront à l’art de bâtir un carattere
équivoque 8c lâche , foit par l’impreflîon qui
réfulte de la fragilité de la matière , foit par
tous les détails acceffoires auxquels elle fe prête
trop aWément, & induit trop volontiers la main
8c le cifeau qui la façonnent. Le bois, félon l’ef—
prit qui en dirigera les différentes combinaifons 8c
l’emploi , faura produire aufli un carattêre plus ou
mo ns fort 8c impofant. Les bois de charpente
fur-tout pourront donner aux édifiées un. air de
grandeur 8c de folidité.La manière dont les Grecs
furent en faire ufage dans leur architecture primitive
en eft la preuve , & l’imitation qu’ils en
firent, en fubftituant la pierre au bois , prouve
que cette dernière matière, comme on l’a vu au mot'
Architecture , eft fufceptible , 8c des proportions
les plus heureufes, 8c des modifications les-
plus ingénieufes. Cependant , félon la qualité des«
bois qui fe préfentent aux effais de l’art de bâtir
en différens pays , on verra fes réfuitats varier
de carattêre depuis le fort & le fofide jufqu’au
plus grêle, julqu’au plus léger ; depuis le grave
8c le lérieux , jufq.u’au futile, 8c prefque jufqu’an
badinage. Ces matières , que la nature préfente %
rinduftris de chaque peuple, doivent, doncconP-
tituér l’effence du caractère, de leurs édifices ,.foit
qu’ils continuent de les employer en- réalité , foit
que , par une tranfpofition a fiez ordinaire , ils y
fubfiituent des corps plus fofid'es , tels que les.
pierres, les marbres , les briques. Mais alors le
‘ carattêre donné par la matièrç première , pafle dans-
: celle qui l’imite , 8c , quelle que foit là métamor-
' pliofè qu’elles fubiffentToeil' un peu clairvoyant
ne ceffe point d’appercevoir , fous des revérifiera
ens étrangers, le palmier de l’Egypte, l’ilex de
,“> la Grèce, le nan-raou de la: Chine 8c les hâutè&;
•' futaies des régions du Nord'.
Il eft encore des carattêre*'partiels & d'è détail
qui réfultent des- matériaux, dé chaque pays &
1 ces carattêres: fe développent dans-1& variété