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des terraffes dans les jardins, des rampQ6 douces,
des talus, & autres ouvrages de- terre,
C L E F , f. £ C e nom fe donne' dans l’architec-
lu ie à la dernière pierre d’un arc d’une voûte plate
ou ceintrée, & q u i, étant plus étroite par le bas
que par le haut, preffe & affermit toutes les autres.
L a clef e f t , comme l’on v o it , la pierre du milieu ,
& on l’appelle ainfi, parce qu’elle forme en quelque
forte la clôture ou la fermeture de la voûte.
La cle f y félon Y ign o le & félon la convenance,
varie de cara&ère félon le mode des différens ordres
qui décorent les conftru&ions. A u tofean & au
do r iq u e, ce n’eft qu’une fimple pierre en faillie
o u boffage. A l’ionique, la clef eft taillée de
nervu re, en manière de confole , avec enroulement.
A u corinthien & au cotnpofite , c’ eft une
confole riche de fculpture, avec enroulemens ,
feuillages de refend, &c.
L ’orfqu’aucun ordre ne preferit à l’édifice de
mefûre auffi pofitive & de gradation auffi marquée
dans fa richeffe, c’eft au caraâère général
du bâtiment, à l’apparence plus ou moins grande
de luxe ou de fimpUcité qui y domine , qu’on devra
s’en rapporter , pour donner aux clefs le dé- t
gré de force qui leur convient.
Les anciens nous ont laiffé de beaux modèles de
la manière dont on peut décorer les clefs des arcades
ou des ceintres.
Le voulfoir du milieu ©u là cîef, étoit ordinairement
, chez e u x , la place de quelque ornement ou
figure caraéiériftique de l’édifice.
O n vo it à Capoue les clefs des arcades de l’amphithéâtre
détruit, de l’antique Capua ; elles font
ornées de têtes fort faillantes des divinités auxquelles
cet édifice étoit probablement confacré.
A u x arcs de triomphe les clefs étoient ornées
de fymboles allégoriques & de figures allufives au
fujet. T an tô t c'eft une province captivé comme
à la belle confole qui fupporte la ftatue de Rome
fous le portique du palais des confervateurs au
capitole ; tan:ot c’eft une viftoire ; tantôt l’empereur
lui-même y eft repréfenté ; d’autrefois on y
voit la figure même de Rome comme à celle de
l’arc de Tiras.
Celle-ci eft une des plus belles clefs, des plus
r ich e s , 8ç des mieux ornées qui foient renées
de l’antiquité. Elle eft faite en forme de confole ,
compofée de deux enroulemens, dont le plus fo r t ,
félon l’u fag e, fait la partie /upérieure, lorfque le
plus foible fert d’agraffe aux bandeaux de l’arc. Un
grand rinceau fort de la partie inférieure & faille
affez pourfervir de fnpport à une figure de femme,
qu’à fon ca fque, à fou habillement, aux armes
qu’elle t ien t , on reconnoît pour Rome, Les nervures
ou arêtes de la confole font ornées de perles ;
les yeux ou axes des deux volutes font remplis
par une roface ou fleuron ; des tigètes fortent de
Fenroulement fupérieur & meublent, fur le profil, .
la partie de la clef qui fe joint a 1 arc.
L a clef dé l’arc de Conftamjn offre un travail
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moins magnifique , mais une compofition plus
curieufe. Dans l’épaiffeur de la pierre on a fcuîpté
un t rô n e , fur lequel eft aflife la figure de Rome
drapéê, tenant d’une main le globe , & de l’autre
une pique ; le tout eft également foutenu, comme
à l’arc de T itu s , par un grand feuillage qui fo r t ,
quoiqü’avec beaucoup moins de grâce, de là partie
inférieure.
A l’arc de Septimius Severus, c’eft l’empereur
lui-même qui eft repréfenté debout tenant le bâton
de commandement derrière lu i, & à fes pieds font
des trophées & des grouppes d’armes. Cette clef ne
diffère de l’arc dé Titus que par la pureté des orne-
mens, la beauté de la proportion & celle de l’exécution
; la- maffe en eft la même.
Il feroit inutile de fe livrer à de plus longues
deferiptions fur cet ob jet, dans lequel la théorie ne
fauroit fuppléer à la vue des monumens eux-niêcr.*/»,
ou des définis qu’on en a faits.
O n fe fert quelquefois du mot agrafe, pour dé-
figner ce qu’on appelle clef; mais alors on n’entend
parler que de la partie extérieure de la clef ou de
fon ornement, q u i, placé fur les bandeaux des
arcs, fembîe unir enfemble plufieurs membres d’ar-
chiteâwre. C ’eft fous ce.rapport & fous celui de
décoration, plutôt que fous celui de conftru&ion,
qu’on -donne quelquefois aux clefs le nom d'agrafe.
( Veye^ A G R A F F E ) .
C l e f , f. £ ( confr'Æon ). C ’e f t , dans l’art dé
bâtir., une pièce qui fert à entretenir les parties d’un
ouvrage de maçonnerie ou de charpente, & même
de menuiferie.
Les voûtes, les arc s , les plates-bandes conftruits
en pierre de ta ille , en moellons ou en briques ,
ne fe foutiennent que par le moyen de leurs clefs. .
Dans les plates-bandes, les arcs en plein-ceintre,
ou ceux dont la courbe .eft fymmétrique , c’eft la
pierre du milieu qui forme clef
Dans les voûtes *en berceau, la clef eft compofée
de plufieurs pierres qui forment enfemble
la longueur de la voûte.
A u x voûtes d’arête, la clef forme une croix ou
une étoile, quia autant de branches qu’il y â de
côtés ou de lunettes.
Dans les voûtes en arcs de cloître Sc lés voûtes
fphériques & fphéroïdes, les claufcirs de chaque
rang de vouffoirs forment clef, & de plus, il y
a une clef -principale placée au fommet de la voûte,
dont la forme eft ordinairement femblable au plan
de la voûte. Voye^ les mots C oupe des pierres
& V o û t e .
Lorfqu’on confiruit une v o û te , on ne prend les
meiures de la c le f que lorfque tous les autres v o u f foirs
ou claveaux font p o fé s , afin qu’elle p’âffe
remplir jufte l’efpace qui refte. Pour plus grande
folid ité, on garnit par le haut, les joints avec clés
coins de fer ou de b o is , ou plutôt avec des ardoifes 9
ainfi qu’on l’a pratiqué pour les voûtes de la nouvelle
églife de Sainte-Geneviève. Il eft auffi dangereux
de tr<$p forcer les coins que l’on met de
chaque
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chaque côté de la c le f d’une voûte pour la bander,
que de ne pas les forcer affez , parce que dans le
premier cas on rifqne de faire ecarter les murs,
& que dans le fécond, la voûte n’étant pas affez
b an d ée, eft fujette à s’aftàiffer , & quelquefois à
tomber. Nous avons vu des exemples de ces deux
effets oppofés.
Les clefs des arcs,. arcades & plates-bandes, font
quelquefois diftineuées des autres vouffoirs ou cia-,
veaux par une fa illie ; quelquefois on les orne
d ’agraffes de confoles, de têtes & autres ornemens
de fculpture. ( Voyeç l’article précédent ).
Il y a des clefs à boffage, à pointe de diamant,
à croffettes -, & des clefs pendantes.
Les clefs à boffages & celles à pointe de diamant
lon t plus faillantes que le n u d , avec cette différence,
que celle s à boffages ont une faillie uniforme,
& que celles à pointe de diamant forment au
centre , un angle fo lid e , terminé par quatre fur-
faces triangulaires, comprifes entre les deux diagonales
du quadrilatère qui forme la clef
Les clefs à croffettes o n t , par le haut, deux
reffauts carrés & fyrnni étriqués qui interompeHt les
jomts & leur donnent l’apparence d’un T . O n fait
ufage de ces clefs, fur-tout pour les plates-bandes.
Les clefs pendantes font celles qui defeendent
plus bas que le 'deffous des volutes ; on en trouve
plufieurs exemples dans l’architeâure gothique : une
des plus fameufes eft celle que l’on voit à la voûte
de la croifée de l’églife de S. Etienne-du-Mont,
qui defeend de près de quinze pieds au-deffous
du fommet de la voûte.
Cette cle f forme une efpèce de cul-de-lampe
qui reçoit tout autour des retombées de voûte.
L ’effet qui en réftrite pàroît furprenant; il femble
qù’on ait fupprimé la colonne qui foutenoit ces
retombées, & qu’il ne refte plus que le chapiteau,
qui fe foutient d’une manière merveilleufe.
T o u t l’artifice de cette efpèce de tour de force
confifte en ce qu’on a fufpendu à la partie fupérieure
de la voûte qui fe trouve ca ché e, une clef pendante
par le moyen de plufieurs barres de fer.
Cette clef pendante., qu’on a fait en marbre blanc
pour une plus grande folidité, forme, comme nous
l’avons déjà dit ., un chapiteau qui foutient tout
autour les retombées d’une fàuffe voûte qui a l’air
de tout porter, tandis qu’au contraire elle eft fuf-
pendue au fommet caché de la grande voûte.
C l e f p e n d a n t e , en charpenterie, eft une p ièce
de bois arrêtée par le haut & contre-buttée par
d’autres pièces pour foutenir en-deffous d’autres
parties de charpente ; on en fait ufage pour les
formes de comble & de ceintres. Voye^ ces mots.
C L IM A T , f. m. J’entends par c e mot, lafomme
de toutes les caufes phyfiques, générales ou communes
qui dépendent de la température d’un pays , de
la qualité de f air, de la nature du fol, des alimens, & c.
& de tous autres principes du même geswe qui
agîffent & influent plus ou moins directement lur
Arçhitsfture. Tome h
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le cara&èré des hommes comme fur celui de leurs
ouvrages.
Quand on confidère que tout ce qui v it tk
v é g è te , que toutes les produirons de la nature ,
toutes les races d’ animaux, éprouvent des dif-
femblances fi frappantes , on eft forcé d’en chercher
les raifons dans les caufes premières du climat.
Pour être doué de l’intelligence , l’homme n’y eft
pas moins fournis. L ’air qui l’enveloppe , l’im pref-
fion fi différente des températures, l’a i io n des élé-
men s, la vertu des plantes dont il fe nourrit, la
diverfité des habitudes réfidtantes de la variété des
productions naturelles, tout nous force de le confi-
dérer comme recevant, ainfi que les v ég étau x, des
modifications particulières, félon la nature des agens
extérieurs qui façonnent, fi l’on peut d ire , fon être
matériel.
Rien dé fi univerfellement avoué dans le général
, rien cependant de plus généralement contefté
dans le détail & dans l’application , que cette analogie
du climat à la conformation même extérieure
de l’homme. A cet égard , on peut dire que rien
n’eft moins connu , rien n’a fait fi peu de progrès
que la véritable hiftoire naturelle. Peut-être la vue
de l’homme eft-elle trop bornée pour en embraffer
les grands rapports.
Cependant la philofophie manquera toujours
de bafe & de point d’ap pui, tant que l’hiftoire
de l’homme moral n’aura point pour principe celle
de rhomme phyfique. Comme l’on remarque dans
le particulier , que les affeCtions , les facultés morales
d’un homme, font toujours en rapport avec fa
ftruCture, fon organifation & la qualité de fes humeurs
, il faut bien réconnoitre cette même corrélation
dans les affemblages d'hommes qu’on appelle
peuples. Mais l’oeil qui faifit & embraffe aifément
un être ifolé , fe trouble & fe confond dans le
rapprochement en grand qu’il veut faire d ’une multitude
d’êtres. Les détails & les difparates que la
fociété & la communication des peuples multiplient
fi fo r t , lui font perdre de vue les points généraux ;
le concours des inftitutions faciales avec les caufes
phyfiques „ rend encore cette théorie plus difficile.
O n ne s’attend pas fans doute à trouver dans
cet ouvrage de pareils développemens. Mais celui
qui s’étonneroit de rencontrer dans un dictionnaire
{FarchiteCtnre le mot qui fait le fujet de cet article
, connoîtroit bien peu l’effence des arts en général
, leurs corrélations intimes avec la nature :
fur-tout il auroit peu réfléchi fur les rapports de
tout genre qui lient l'architeCture à toutes les
caufes naturelles des différens pays.
Ces caufes font de deux genres ; les unes qu’on
peut appeller générales ou indirectes , les autres
particulières & immédiates,
Le climat , ou les caufes phyfiques ’, agit fur
l’architeRure ainfi que fur tous les autres a r ts , en
tant qu’agiffant fur le caraCtère , l’efprit & le goût
des hommes , il communique néceffairement à
T t t t