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^revêtir de manteaux peints ou brodés la plupart des
fimulacres , a naturellement porté, les artiftes à les
fculpter fans beaucoup d’art. Quoiqu’aux pagodes
d’Elepliahta & de Tyronomaley au Ca raate, il y
ait des ftatues nues , néanmoins elles n’ont ni plus
de grâce ni plus de vie que celles qu’on couvre
d’étofres. D ’après les dedins qu’on en connoît, elles
n’offrent rien_, quoiqu’en dife N iébu rg , qui , pour
l ’art;3 approche encore de celles de l’Egypte.
L ’architedlure n’ayant nulle part, & ne pouvant
avoir d’imitation pofitive ', n’en acquiert que par
analogie, & par l’application des règles d’imitation
que lui préfeutent les autres arts imitateurs directs
de la Nature. Il eft donc certain, d’après ce qu’on
vient de d ire, qu’en Alîe l’architeélure ne trouva
rien de femblable , & quelle n’y put jamais, de
même qu’en Egypte , affeoir fur la N ature un fyftême
conféquent & luivi de règles & de proportions déterminées.
C ’eft fans doute de cette abfence de règles polî-
tives dans ces deux pays-, qu’on a voulu déduire les
rapports qu’on s” eft efforcé de trouver entre Y architecture
Afiatique & celle de l'Egypte, S’il exifte une
forte de fîmilitude entr’elles, c’eft uniquement dans
le rapprochement des fyftêmes de conftruétion qu’on
peut la trouver. Les plus anciens édifices 4e l'Afîe
font également formés de blocs énormes. E t , fans
citer les ruines de Perfépolis , dont l’architecture
paroît affiliée à celle dé l’Egypte , plufîeurs pagodes
font bâties de pierres longues de 40 pieds. Telle eft,
félon M. Rocher de la Périgne, la longueur de celles _
qui forment le foubaffement de la pagode de Ch a -
lembrom jufqii’à la hauteur de 30 pieds. Ces pierres
prodigieufes en longueùr ont quatre pieds dix pouces
de larcre , fur cinq pieds & demi' d’épaiffeur: elles font
pofées fur des colonnes proportionnées , fans autre
Jiaifpn que leur poids. Néanmoins, comme on l’ob-
fervè ailleurs, ( V oyez art de bâtir. ) ce goût de
conftruÇtion colôffale s’eft retrouvé le même chez
tous les peuples voifins de la Nature. L ’enfance de
de toutes les fociétés a produit par-tout ces prodiges
de force 5 & ces caractères. particuliers à tous les .
peuplés, n’indiquent point de communication entr’eux,
ni de rapports certains,/d’où l’on puiffe conclure une
véritable reflemblance de goût.
Ces grands efforts de conftruftion en Afie , pa-
roiffent tenir, moins à l’amour de la folidité,-qu’à ce
goût pour le merveilleux qui domine, dans tous les
ouvrages 4e ce pays, C ’eft ce penchant invincible ,
q u i, "dans tous les tems, a porté lès A fia tiques à
rechercher ces mafles gigantefques, plus étonnantes
par la hardieffe”, qu’agréables par la proportion.
Toute l’Afié éft remplie de monumens à plufieurs
étao-es , dont le grand mérite eft de Ce furpaffer en
kauceur & en légèreté. Les villes même y font ainfî '
difpofées 5 & l’on voit q u e , dans l’antiquité f ce
goût y régnoit déjà. Rien de plus conforme à ce .'
qu’on voit aujourd’hui dans plufîeurs v ille s, que la
difpofition ds l’enceinte d’Ecbatane,.
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Les Mèdes, d it Hérodote , bâtirent à Déjocès,
qu’ils ayoient reconnu pour Roi , un château avec
de bonnes fortifications. Enfuite on bâtit la ville à
laquelle on fit de graudes & fortes murailles enfermées
les unes dans les autres. Ce font-autant de cercles,
q u i ne furpaflent celui qui eft extérieur, que de
la hauteur des erénaux. L ’affiette du lieu , qui eft
une colline , favori fe ces gradations de hauteur;,
& l’induftrie des hommes en a profité. Ces encein-v
tes qui communiquent l’une à l’autre font au nombre
de fept. Dans la dernière , on'trouve le palais &'
le tréfor du Roi. La plus fpacieufe eft à-peu-près,
égale à l’enceinte d’Athènes, (félon M. d’Anville,
trois de nos lieues communes. ) Les erénaux de la
première font peints de blanc , ceux de la féconda
de noir, ceux de la troifiéme de pourpre, de la quatrième
en bleu , de la cinquième de fandaraque ou
roux ; & des deux dernières, les' erénaux de i’ure
font argentés , & ceux de l’autre font dorés.
Il eft impoffible, dit le Comte de Ca ylus, de nfé-
connoître à ce récit la difpofition générale de plu—
fieurs villes de f ’A f ie , telles qu’on les voit enccie
aujourd’hui. Mais cette difpofition eft particulièrement
plus marquée dans toutes les villes de l’Inde,
foit pour les variétés de couleur donnée aux murailles,
foit pour la répétition des enceintes.
L ’antiquité de ce goût pour les édifices à ptufîeuis
étages , fe prouvera mieux encore par la eompaiaifeu
de la tour de Bélus, avec toutes celles qui décorent
aujourd’hui toutes les villes de l’Afîe.. A u milieu du
temple'de Jupiter Bélus, dit Hérodote , eft une
tour folide qui a un ftade d’épaiffeur : fur cette . our
une fécondé : ainfî il y en a jufqu’ à huit les unes
fur les-autres.'On monte à ; chaque tour par des
degrés qui vont en tournant par le dehors ; & au
milieu de chaque efcalier , il y a une retraite & des
fîéges de repos. Dans la dernière tour , eft un
grand temple où l’on voit un lit de parade, & auprès
une table d’or.
L ’épithète de folide qu’Hérodote donne àv'Cétte
tour , nous apprend qu’elle étoit maflîve.; & les efea-
liers placés en-dehors confirment cette opinion. L ’auteur
aie dit point fi elle,étoit ronde ou quarrée. Il eft
vraifemblable que le terrain du temple 4e Bélus étant
quarré , on aura donné la même forme à la tour.
Lab afe dont la hauteur étoit ('gale à !a largeur, pré-
fentoit un bâtiment confidérable , puifque le ftade
Babylonien étoit de quarante-une ou 4e quarante-deux
toifes de Paris, Cette première tour étant furmoqtée
de fept autres, dont les proportions de hauteur Sç
de largeur doivent avoir été diminuées graduellement,
on doit fuppofer cette partie doublée , augmentée
même de plufîeurs pieds 3 ce qui doit avoir produit
une hauteur de 500 pieds.
Rien, ne reffemble plus à ce que vient de décrire !
Hérodote , que ces grandes tours--élevées dans toute
l’A f îe , & fur-tout celles de la Chine , q u i, fuivant
le P ..d u Ha ld e, font le plus grand ornement; des
villes. Elles font toutes à plufîeurs étages , & vont
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en diminuant, à mefure qu’elles s’élèvent, avec des
h fenêtres de cous les côtés de chaque étage. Celle dè
■ Nang-lcing , dans la province de Kiang-nam , eft la
1 plus célèbrej on l’appelle communément la tour de
■ porcelaine. Le P. du Halde lui donne plus de 2.06
■ pieds d’élévation. Ces tours font terminées , comme
K la tour de Bélus, paj: des temples ou des chapelles*:
B elles ont toutes la divinité pour objet j & cette
■ deftination eft une preuve de leur commune origine.
La patience & la perfévérancé dans les entreprifes-
Ü les plus longues & lès plus difficiles ; font un cara-
B dère propre aux peuples du midi , & fur-tout à
ceux de l’Afîe. On en donnera pour preuve la grande
| muraille de la C h in e , & plufîeurs autres du même
[. genre dans ces pays j- q u i, fuivant l'opinion de bien
s des perfonnes, font plus d’honneur à fintelligence
■ j de ces peuples| dans l’art de. bâtir, qu’à leur politique,
H & à là fcience de fe défendre. « Il faut efpérer,
B » dit le C . de Caylus , que des gens éclairés dans les
■ » arts feront, quelque jour , le voyage d e c e grand
■ » pays , & qu’ils auront la toife & le crayon à la
■ » main. Par ce moyen, il nous mettront à portée de
■ » juger plus particulièrement des prodiges de la bâtiffe
R » & de la méchanique des anciensfîabitans de l’Inde,
K s| dont nous ne fournies inftmits que très-généralement.
■ » Ces prodiges feront capables d’étonner l’Eu rope,
R » & principalement quand on lui donnera le détail
R » de pierres vuidées & creufées , pour former des
■ » temples de la plus vafte étendue & d e là plus grande
B » clarté. I f eft vrai que ces prodiges de patience &
R » d art, malgré la grandeur du projet , & la-fîneffe
R » de l’exécution , font toujours avilis par le détail,
R » & le nombre exceffif des petites parties, sa
B C ’eft cette manie pour les détails & les minuties
B d’ornemens 5 c’eft cette recherche de broderies, de
(^couleurs & de puérilités-de tout genre , dont l’art
furcharge en Afîe fes ouvrages, plus pour le plaifîr
1 des yeux que pour celui de l’eïprit, qui nous paroiffent
| faire la grande ligne de féparation entre le ftyle Ajïa-
■ lk ue & celui de-l’Egypte. C ’eft cette grande difparité
B de goût qui nous empêche, malgré les probabilités
B de tous les fyftêmes, de reconnoître aucune véritable
B liaifon d’art entre les deux peuples.
K p répugne, fans doute , aux notions de l ’Hiftoire
B & a la vraifemblance , de faire peupler la plus im-
B “ eî j r^gion 4e la terre par une contrée auffi peu
Rétendue qu’étoit l'Egypte , & de regarder l’Afîe
H 5°mme une colonie Egyptienne. Mais il répugneroit
B.^avantage encore aux yeux d’un artifte , de voir dans
la ^Ifftueufe fîmplicité des monumens Eo-yptiens
B u n e imitation des puérilités de l’Afîe. Si l’on nerecon-
I S l l P-01-nC i B E gyPte l’empreinte de l’invention
B e 1 originalité, il faudroit avouer qu’on en d'écoui
” oinsla trace ■ 'Afie. S'il falloir
Jf . e 4es deux architectures fût une copie dé
■ trôner’ •Ceine feroic sûremenr pas en Egypte qu’on M a li ■ ÎE le Plas grand, nombre de caraâères du
K q t le matr r- W m C - C a y l»V
I ‘ les font d'abord fortis de la carrière, &
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que taillés Amplement, pofés les uns fur les autr-s
placés félon la diredtion des quatre points cardinain- ’
ils ont formé les pyramides. Les autres nations font
venues enfuite, le cifeau à la main, pont fuppléer par
les details d’ensbelliffement, à ce qui leur manquoit du
coté de la vafte étendue des idées , & de la grandeur
des errorts. 0
Quoiqu.il en foit, les deux: architeflures portent
chacune un caraftère particulier, qui ne permet, ni
) ?e !es confondre ènfembie, ni de trouver dans l’une
1 origine de l’autre.
Les pyramides qu’on voit dans l’Inde , quand elles
indiqueraient une filiation d'idées & un rapport de
croyances, fuperftitieufes , .n’emporteroient pour cela
avec elles aucune analogie de goût ni de ftyle fem-
blabled architecture. Ellesn'ont avec celles de l’E<xypte
rien de commun que la mate La forme, l’emploi
les details & les omemens en diffèrent entièrement!"
> “ff.â les Fl°; 1+8 & MSe ) Rien n’indique mieux
le geme particulier des deux peuples , que la com-
paraifcn.de ces monumens où l’on n’apperçoit de
reflemblance que dans l’idée primitive , & telle que
la Nature peut la fuggérer à tous les hommes Les'
pyramides de l'Egypte font tomes tilles , à l’exception’ .
de celles du lac Mæris , qui, fuivant le récit d’Hérodote,
étoient couvertes d'hiéroglyphes. Celles de l'Inde
font recouvertes eu entier, jufqu'à leur fommet de
bandes de enivre doré ; elles font ornées de bas-reliefs
& défigurés de toute efpèce. Les,’pyramides de l'Égypte
brillent de 1 eefat feul des marbres'," & de la beluté
de leurs formes : immobiles’ comme des montagnes '
elles fembleqt appartenir a la terre; & n’avoir befoin’
comme les ouvrîmes; de la Nature, d’aucun autre
ornement que de leur orgueüleufe & étemelle con-
ftruétion. Les pyramides de Chalembrom ferrent à
peine de terre , que déjà l'urcKargées de détails 1 &
d omemens minutieux , la grandeur de la maffe dif-
parait fous la peateffe des-parties qui la’divifent &
1 a t té n u e n t . A v o i r le s m o n um e n s E g y p t i e n s il e f t
p e rm is d e d o u t e r u n i n f t a n t , s ’i ls font l ’o u v r a g e de
I h om m e o u d une m t e l lig e n c e fu p é r ie u r e : A - v o i f c e u x .
de 1 Afîe , ;on ftroit tenté de mettre l ’inftinâ à la
place du genre Dans les uns , on contemple avec
etonnement 1 homme dans toute fa force,4 tome
fa grandeur ; dans les autres , on admire le phS
mduftneux des; animaux.
A S IN E L L I, ' Frères , ArchiteSes célèbres • ils
. etoient de Bologne , ou du moins vivoient dans cette
ville, vers fan iio o . Ce fut à-peu-près dans ce tems-
la , qn ils batitent la grande tour de Bologne à laquelle
font fîmes. On . dit qu’un bâtiment eft dans un bel
1 T deCT Pre ane belte vae . An lieu où
f t place alors à/peS eft fynonyme d’èxpofîtion.
( V o y e z ix p o f iu o n . ïM a i s - , le plus fo u v e n t ,