
ciment ordinaire. Ce s enduits de ciment fe faifoient
de plufieurs couches auxquelles on donnôit environ
un pouce d’épaifleur. Ils étoient rairs a vec tant de
foin qu’ils ont acquis par le temps une dureté fu-
périeure à celle même de la p ierre. En appliquant
ces enduits, les anciens avoient la précaution d’ef-
fecer tous les angles par des arrondiffemensa fin de
fortifier les bajjins aux endroits où ils font le plus
foibles & où l’eau agit avec le plus de force pour
les détruire. Ils formoient le fond de tous leurs baf-
(îns, réfervoirs ou pièces d’eau d’une manière un
peu c o n c a v e , enfotte que la plus grande profondeur
étoit au milieu. C e fond fe raccordoit avec
les murs du circuit par des arrondiffemens, afin
d’effacer l’angle du bas , & de le fortifier contre Faction
de l’eau. Le temps a juftifié l’excellence de ces
procédés : car on trouve encore actuellement dans
les ruines des édifices antiques, des bajjins-, des
réfervoirs parfaitement con ferv és, & qui tiennent
l’eau comme s’ils euffent été creufés dans un
foui bloc de marbre ou de porphyre. L’Italie moderne
a confervé les procédés des anciens dans ce
genre ; tous les bajjins ou pièces d’eau fe font également
en maçonnerie de blocage * & réufliffent de
même. .
A L y on 8c dans plufieurs autres provinces de
F ran c e, on emploie aux enduits des bajjins un
mortier qu’on appelle béton ( Voyeç ce mot) , qui fe
fait avec de la chaux nouvellement é tein te,bro yé e
a v e c du g ra v ie r, 8c qu’on met en oeuvre fur le
champ.
Pour conftruire un bajjin de cette m anière, il faut
que l’épaiffeur du béton qui forme le mur du circuit
, foit environ la douzième partie du diamètre
intérieur, 8c que le maflif qui forme le fond ait les
deux tiers de l’épaiffeur du mur. Ainffpour un baf-
Jin de trente pieds de diamètre fur deux pieds de
profondeur , il faut faire une fouille de trente-cinq
pieds, fur trois pieds huit pouces de profondeur.
Un e des principales attentions qu’il faut a v o ir ,
'c’eft d’affeoir les bajjins fur un fol qui foit ferme
8c folide. C ’eft en vain qu’on prend les plus grands
foins pour les conftruire, 8c qu’on choifit les meilleurs
matériaux, fi le fol vient à fléchir inégalement
fous le poids de la conftrtiâion encore fraîche.
I l fe fait alors des défunions par où l’eau fe perd, 8ç
auxquelles il n’eft plus poflible de remédier.
Lorfqu’on fe fera affuré que le fol eft bon 8c qu’il
a la fermeté convenable, la fouille faite, on dref-
fera le fon d , on le fera bien battre ; enfuite on
étendra deffus une couche de béton de dix-huit à
v in g t pouces d’épaiffeur. Il faut, autant qu’ il eft
poflible , qu’ellefoit m ifed’un feul je t , pour qu’elle
ne faffe qu’un feul corps. Au-deffus de cette couche
bien égalifée 8c un peu battue , on érige une efpèce
de cloifon circulaire en planches de fapin , qui fert
en quelque forte démoulé pour former le vuide
du bajfin. Cette cloifon doit être éloignée par-tout
des bords de la fouille de deux pieds 8c demi. On
remplit cet intervalle a v ec du b é to n , qu’on tâche
de couler àiifli d’un feul j e t , tandis que celui du
fond eft encore frais, afin qu’ ils ne faffent enfemble
qu’un feul 8c même corps , 8c qu’il ne refte ni joint
ni défunion par où l’eau puiffe filtrer.
Lorfque le beton du tour a pris une certaine con-
fiftance, on .ôte la cloiftm 8c on le laifle fécher pendant
quelque temps, avant de faire l’enduit intérieur.
Si c’eft en été , il faut a voir foin de le couvrir
, pour le garantir de l’ardeur du foleil. Le beton
étant bien f e c ,. on fera l’enduit en ciment d’un
demi-pouce d’épaiffeur, .en ayant le plus grand
foin d’effacer tous les angles par des adouciffemens,
8c’de donner un peu de concavité au fond , comme
nous avons dit plus haut que faifoient les anciens
conftrufteurs romains. Lorsqu’un bajjin a été exécuté
de cette manière, avec les foins convenables
8c des matériaux choifis , fa durée n’a point de
bornes.
. Si l’endroit où l’on v eu t conftruire le bajjin eft en
terres rap p o rtée s ,‘ il. faudra faire la fouille pins
profonde d’ un pied; 8c, après avoir fait égaiifer
8c battre le fo n d , on établira deffus une plateforme
en charpente , dans tout l’efpace que doit occuper
le bajji/f, comprife même l’épaifleur des murs.
Ce tte charpente fera compofée d’un grillage de
poutrelles de huit à neu f pouces d’ épaifleur, efpa-
cées de trois pieds de milieu en milieu , 8c entaillées
à demi-bois , enforte qu’elles forment des quarrés
parfaits. C e grillage fera emmanché dans un bâtis
qui aura la forme du bajjin. On remplira tous les
intervalles de ce grillage en moilons durs, bien dif-
pofés 8c maçonnés à fleur des poutrelles , avec de
la glaife ou de la terre franche. Sur cet arrafement
on poferaun rang de madriers bien chevillés , pour
que le tout ne faffe qu’une feule pièce. On couvrira
cette efpèce de plancher par une autre aflire
de moilons maçonnés de même en terre franche ou
en glaife, afin de préfervér les bois des effets cauf-
tiques de la chaux. C’eft fur cette dernière aflife
bien d reffée, qu'on jettera en une feule fois , ou du
moins fans interruption, la couche de beton qui
doit former le fond , 8c on achèvera le bajfm
comme il a été dit ci-devant.
Qu elque mauvais que foit le fol fur lequel on
veut conftruire un bajjin, il vaut beaucoup mieux
faire une plate-forme fous toute l’étendue qu’il doit
.occuper, que de battre des p ilotis, qui fouvent
ébranlentde terrain , fans le rendre plus folide.
CVoye^ Fondement.)
A Paris 8c en plufieurs autres endroits, on confinât
les bajjins en maçonnerie de moilons, revêtue à
l ’intérieur d’un fort enduit de ciment de huit à neuf
pouces d’épaiffeur. C e ciment eft préparé à-peu-
près comme le beton. L es ouvriers l’appellent une
chemife de ciment.
L e Blond , Bélidor 8c la plupart des auteurs qui
ont parlé de la manière de faire les bajjins en ciment,
difent qu’il fuffit de donner au maffif 8c au
mur de tour un pied d’épaiflxur jufqu’à fix toifes J dé diamètre ; mais il eft certain que cette épaiffeuï
doit être relative au diamètre des bajjins , & qu’elle
n’eft pas fuffifante pour ceux qui.paflènt dix-huit
pieds, fur-tout dans les murs du tour. Si l’on con-
fulte l’expérience , on trouvera que les bajjins qui
ont le mieux ré.uffiont environ la: quinzième partie
du diamètre de l ’efpace qu’ils renferment. Ainfi
lorfqu’on voudra conftruire un bajjin de cette manière,
il faudra que le diamètre de la fouille foit
de .deux quinzièmes plus grand que celui de l’ef-
pace qu’on deftine à l’e a u , 8c plus profond d’un
quinzième du même diamètre ; de forte que pour
un bajjin de trente pieds de diamètre 8c de deux
pieds de profondeur , il faudra faire l une fouille de
trente-quatre pieds fur quatre -, dont il reftera deux
pieds pour le maffif du fon d , compris l ’en d uit,
& autant pour le mur de tour. O n prendra le tiers
de cette épaiffeur pour l’enduit ou, chemife de c iment;
le refte fera pour les maffifs tant du fond
que des murs.
Après avoir examiné fi le terrain fur lequel on
doit conftruire le bajjin eft folide , ou s’il a befoin
d’être affermi par une plate-forme , on conftruira
lemaflif du fond en moilons durs ou en pierres de
meulière ., maçonnées en mortier fait avec du bon
fable 8c de la chaux nouvellement éteinte. Sur
ce maffif bien arrafé 8c fait à bain de mortier, on
érigera le mur de tour âuffi en bons moilons
durs ou en meulière : afin que le mortier s’attache
mieux aux moilons , ilfauclroit avoir foin de les
tremper dans l’eau avant de les mettre en place ,
comme on le pratique en Italie. Pour cet effet on
a foin d’avoir un ou plufieiirs baquets remplis d’e a u ,
félon la quantité d’ouvriers. Cette précaution eft
excellente r-car une des principales raifons du défaut
de réuffite dans les bajjins,e ft que la plupart des
ouvriers ne s’attachent, en bâtiflant'un mur , qu’à
faire de beaux paremens. Ils pofent leurs moilons
for une. très-légèrë couche de mortier , dont l’humidité
eft tout de fuite àbforbée par la féchereffe
de là pierre : ce moilon eft prefqüe toujours couvert
d’une pouflière fine qui l’empêche de ’faire
corps avec le mortier. Quelquefois àuffiles ouvriers
ont la négligence de ne point mettre de mortier
dans les joints à plomb ; ils ne garniflent le milieu
du mur qü’en pierrailles qu’ils recouvrent d’une
légère couche de mortier. Un pareil mur oppofe
moins de réfiftance à .l’eau qu?un mur en terre qui
auroit été bien maflivé. D ’où il réfulte que lorf-
qa il fe fait la moindre gerfure à l’endroit du ciment,
le bajjin ne peut plus contenir l’eau. .
La maçonnerie en blocage dont les anciens fo
fervoient pour les murs, de bàjjîns, 1 ci ternes. 8c ré-
;IVo*r s» étoit infiniment plus, folide que-celle par
aflife de niveau dont , nous faifons ufage. Outre
les vices dont celle-ci eft fufceptible par -la négligence
des ouvriers-, l’expérience a fait connoître
que l ’eau s’infinue plus a ifémentpariles joints ho-
nzontaux qui font continus , que par ceux qui font
verticaux ou brifés, comme dans la maçonnerie en
blocage fie dans celle que les anciens ap pelaient opus
incertum. Dans ces deux-dernières efpèces de maçonnerie
, le mortier enveloppe le moilon de toute
part : lorfqu’elles font bien faites, elles font impénétrables
à l’eau, indépendamment de l’endui t de ciment
dont on peut les recouvrir. C e t enduit alors n’a
pas befoin d’une aufli grande épaiffeur que pour
les murs ordinaires ; il fuffit qu’il air un demi-pouce.
La difficulté de réuffir à faire des bajjins durables
en, conftruifant les murs' par aflife de niveau ,
quoique revêtus d’une couche de ciment de fept
ou huit pouces, les dépenfes qu’ils occafionnent,
ont fait imaginer les corrois de glaife 8c de terre
franche entre deux murs. Pour faire un bajjin de
cette manière , v o ic i la méthode indiquée par les
auteurs que nous avons, ci-devant cités.- •
S’il s’agit cl’un bajjin de fix toifes, de diamètre fur
deux pieds . de profondeur , il faut faire' la fouille
de fept toifes fur quatre pieds. On lui donnera la
même forme qu’au bajjin qu’on veut-faire. Cette
fouille-étant faite dans un terrain folid e , 8c le fond
bien dreffé, on bâtira autour un mur en moilons
d’un pied d’épaiffeur, maçonné en m o n ie r , o u ,
pour plus d’économie, en terre franche. C e mur
fert à contenir les terres du bord de la fouille. O n
étendra enfuite fur le fond une fuperficie de terre
franche ou de glaife qui ait été déjà préparée 8c netto
y é e de toute forte d’ordure ou_de corps étrangers
qui pourroient y occafionner des gerfures. En étendant
cette terre, on la fait pétrir à pieds nus par
plufieurs hommes, afin que toute l’étendue du
fond ne forme, qu’un feul corps bien lié. L e fond
étant achevé & dreffé de niveau., on établit tout
autour, à dix-huit pouces de diftanco du mur qui
foutient les ter res, une efpèce de plate-forme fur
laquelle on érige le mur qui doit former l ’enceinte
du bajjin ; les ouvriers l’appellent mur de douve.
Ce tte plate-forme eft néceffaire pour que le poids
du mur ne produife pas un taffement inégal qui oc-
cafionneroit des défunions 8c des gerfures par où
l’eau fe perdroit ; ce qui ne manqueroit pas d’arriv
e r fi l’on pofoit les premiers rangs de moilons immédiatement
fur la glaife. Ce tte plate-forme doit
être compofée de petits chevrons ou membrures
qui auront un peu plus de longueur que le mur n ’aura
d’épaiffeur. Ce s ch ev ron s, que les ouvriers ap«
pellent racinaux, épais de deux pouces,, larges de
f ix , feront placés,de trois pieds en trois pieds, perpendiculairement
à la direéfion du mur qui doit
être aù-deflus -, 8c s’enfonceront de toute leur épaiffeur
dans la glaife. Sur ces racinaux on .cloue deux
rangs de planches qui doivent avoir enfemble autant
de,4 argeur que les racinaux ont de longueur
afin que le mur qu’on doit ériger, deffus , forme une
petite, retraite* de chaque côté. Sur la plate-forme
on bâtit le:mur de douve auquel on donne dix-huit
pouces d’épaiffeur..
C e mur doit être conftruit en moilons du rs, maçonnés
à bain de mortier 8c bien garnis-à l’intérieur,
comme nous l’avons ci-d ev an t expliqué, Après
que le mur eft fini* o u , ce qui yaut mieux encore r