
d ’Agrippa lefquels Soient revécus en partie de ce (lue,
& en partie de terre émaillée. L ’emploi de ce rev'è-
tiffement dans un édifice où l’on avoit .étalé le plus
grand luxe alors connu pour de tels endroits, prouve
au moins que c’étoit un enduit précieux : il eft à croire
qu’on lui donnoit le poli du marbre blanc.
A L B A T R E , f. m. ( Pierre calcaire ) formée par concrétion
j ce qui empêche d’en avoir de très-grands
morceaux. U Albâtre qu’il faut bien diftinguer de
XAlabastrite , offre prefque toute les couleurs, & lorf-
qu’elles font formées par des couches arrondies ; on
l’appelle Albâtre Onix ou Agatato. L ’Albâtre fleuri Ce
nomme ainfi par la variété des couleurs Sc des deffins
qui s’y forment.
Ondiftingue ordinairemeot deux fortes d’ Albâtres,
l ’oriental, Sc le commun: XAlbâtre oriental eft celui
dont la nature eft la plus fine , la plus nette , & la
plus dure j fes couleurs font auffi plus vives. Il eft
beaucoup plus recherché Sc d’un plus grand prix que
l ’Albâtre ordinaire. De c e lu i- c i, il s’en trouve en
France aux environs de Cluny dans le Mâconois ; il
y en a en Lorraine, en Allemagne, mais fur-tout en
I ta lie ; on vient d’en ouvrir, il y a peu d’années,
des carrières près de Terracina ; on en exploite auffi
près de Civita Vechia.
U Albâtre étant formé par couches feuilletées, &
n’ayant pas comme le marbre une adhérence folide entre
les parties, il eft beaucoup plus difficile à travailler,
pareeque les couches dont il eft compofé fe détachent
facilement. Comme c’eft un réfultat d’infiltrations &
de ftalaétites, il eft fujet à être percé dans quelques
endroits. On le p o lit , mais il ne reçoit pas un poli
auffi v i f & auffi beau que celui dont le marbre eft
fiîfceptible ; d’ailleurs , '-lorfque la furface a été
luftrée, on croiroit que lle auroit été frottée avec de la
graille. C ette apparence obfcurcit fon éclat, & comme
cette matière eft un peu tranfparente, elle reffemble
en quelque façon à la cire.
Les Egyptiens employèrent cette matière Pline
dit que près de Thèbes on trouvoit de X Albâtre-, mais
qu’il n’approchoit pa s, pour la beauté, de ceux de
la Carmanie , & des autres pays orientaux. On peut
obferver la vérité de ce qu’avance cet auteur dans
la ftattse Egyptienne de la ville Albani : la différence
de ces deux qualités d’Albâtre y eft très-fenfible pla
partie inférieure de la ftatue qui eft d’ un travail
vraiment Egyptien , eft d’une qualité bien plus lai—
teufê , & moins tranfparente que la partie fupérieure
qui eft moderne, Sc qui a été refaite, d’un Albâtre
vraiment Oriental.
De ce dernier, l’on voit à Rome un grand nombre
de beaux ouvrages antiques, en ftatues, vafes , urnes
, colonnes, & c . Un des plus précieux , eft la
grande urne cinéraire, haute de plus de trois pieds
qui fût trouvée il y a peu d’années près du tombeau
d’Augufte. On a fuppofé quelle avoit pu renfermer
les cendres de cet empereur : du moins elle en étoit
digne. C e morceau exifte au Mufoeum Vaticanum. Les
deux grandes tafTes de. la villa A lb a n i, qui oht Cix
pieds nuit pouces de diamètre , & qui ont été trouvés
près du T yb re avec les fragmens de plus de dix
autres, paroiffentn’avoir été/employées qu’à la décoration
des édifices ; car on ne leur voit aucune ouverture
par où l’eaii pût s’échapper. Cette même
villa Albani renferme-les plus rares ouvrages de cette
matière , comme buftes, termes ou hermes; une colonne
de feize pieds, la plus grande qu’on connoifTe.
Il p a ro ît, vu la petiteffe dès morceaux, & le prix de
la matière, que les anciens n’en firent des colonnes
que pour la décoration des intérieurs.
En Italie l’on employé aujourd’hui très-heureufe-
ment X Albâtre en plaquage ou revêtiffement ( impel-
liciamento'). Les morceaux veinés qu’on feie , Sc
qu’on rapproche après, font l’effet que produîfenc
les bois veinés dans la marqueterie. Les pilaftres ' de
la galerie de la villa Borghèfe, font faits de cette
forte. L ’on en trouve encore d’autres exemples à
R ome, où l’art de travailler les marbres , de les reproduire
, Sc de les multiplier par le plaquage , eft
poufTé très-loin ; Sc rappelle les plaintes de Pline à
ce fujet.
A L B E R T I - A R IS T O T IL E . Autrement appellé
Ridolfo Fioraventi, architecte Sc méchanicien, né à
Bologne : il vivoit dans le feiziéine fiècle. On-le r.e?
garde comme un des meilleurs méchaniciens de fon
tems. On rapporte qu’il fit en méchanique des chofes
étonnantes7~& qui le firent paffer pour un de ces
prodiges dont la nature eft avare. En effet, cet artifte
tranfporta à Bologne un clocher avec toutes fes cloches
, depuis l’églife fainte Marie , jufqu’à trente cinq
pieds de diftance ; il en redreffa un autre dans la
ville de Cento qui penchoft de cinq pieds. Àppellé en
Hongrie, il contruifit un pont vtrès-ingènieûx, & fit
beaucoup d’autres ouvrages, d on t‘le fouverain fut
finfatisfait qu’il le créa chevalier. Sa réputation s’étendit
jufques dans la Mofcovie , où étant attiré
par le grand d u c , il contruifit plufieurs églifesj
A L B E R T I , ( Léon - Baptijle ) architecte , peintre,
fculpteur, & chanoine de Florence, naquit dans cette
ville ; on ignore l’année de fa nàiflance & celle de fa
mort. Il étoitAe l’illuftre famille des Alberti. Il vécut
fous les pontificats d’Eugène IV & Nicolas V . On
doit le regarder comme un des reftàurareurs de l’ar-
chite&ure : il efi pofledoit également la pratique Sc
la théorie. Il fut le fécond des artiftes qui âyént con-
ftruit fuivant les principes dé V itru v e, & le s maximes
de l’antiquité ; il contribua 'beaucoup à la perfection
de l’architeCture. Succédant aux talens Sc aux entre?
prifés de Brunnelefchi ; il chercha dans l’architecture
plus de grâces & d’ornement que fon prédéceffeur.
Il s’étoit donné des peines infinies pour acquérir les
vraies connoiffances de fon art, en mefurant lui-même
plufieurs anciens édificts , dans les différens voyages
qu’il f î t à Rome & en d’autres parties de l’Italie,
Son ouvrage De re cedificatoria, divifé en dix livres,eft
le fcul que les modernes puiffent mettre en parallèle
$vee celui de Vitrnve. C e traité ne peut être que
très-utile aux jeunes- architectes, en retranchant toutefois
l ’érudition inutile dont il eft furchargé. Les
édifices que ce grand homme a fait conftruire ornent
différentes. villes de l’Italie : à Florence il acheva le
palais P it ti, & bâtit le coeur de l’Annonciade. Il fit
à Mantoue une magnifique églife compofée d’une
• Feule n e f , couronnée d’une grande voûte en berceau
dont les caillons font difpofés & ornés avec toute
la noblefTè & la variété qu’on admire dans les anciens.
Cette eglife un des plus beaux édifices modernes,
ne pafle pas cependant pour être fon chef-d’oeuvre ;
on s’accorde à reconnoîtrè pour t e l , celle de St-
François de Rimini, qu’ i l ' f î t pour Sigifmond M a-
Jatefta, feigneur de cette ville , & qui ne fut pas
achevée. Attiré à Rome , il fît travailler à différens
projets dont il ne refté plus rien ; de retour àJFlo-
rence", il donna le plan dii portail de fanâla Maria
novella, dont lé goût le refient du génie du fiécle.
En général fes édifices ont un ftyle févère , & cet
accord parfait du tout avec les parties qui caraclérife
le vrai beau en architeClure.
.L architecture n’étoit pas le feùl des beaux arts
qu A lberti pôfledât : il exerçoit 'également la peinture
& la fculpture ; il étoit encore verfé dans la
philofophie , les 1 mathématiques , la poefîe , & la
eonnoiffance de l’antiquité. On peut trouver furpre-
nant qu’il ait eu afFez de tems pour embraffer des
genres fi différens; mais exercé de bonne heure à l’étude
des lettres, il avoit contracté l’habitude du travail : les
heures qu’il y donnoit^ étoient tellement diftribuées
qu’il ne lui en reftoit aucune pour l’amufemént Sc
pour le repos. Les qualités de fon ame n étoient pas
moins précieufes que fes talens. =
A lberti , aimable, généreux , . ne faifant aucun
ombrage aux autres artiftes , parce qu’il ne leur
difputoit aucuns profits ,• mourut tranquille en Ta J
pa trie, Sc dans un âge très-avancé. Les uns prétendent
que ce fut à Ta fin du quinziéme fiècle, les ,
autres dans le feiiiéme.
Ange Politien lui attribué un livrç-- de fables ou
apologues, & un dialogue intitulé Mornus. Mais le
livre qui lui acquit la plus grande réputation, fut
celui qui a pour titre l'art de bien bâtir : ouvrage
trop peu connu, & dont nous allons donner un extrait.
A l’imitation de ViÇruVè , il lè divifa” en dix livres.
Le premier livre traite de l’origine de l’architeClure,
de fon utilité , de la manière dont il faut choifir le
fol & l’expofition , préparer lé terrein, le mefurer, I
& le partager conformément à la deftinatio» des '
é d if ic e sd e s colonnes & des pilaftres , des différentes
natures de toits , des portes, des fenêtres , de
leur nombre, & de leur, grandeur , des diverfes e s pèces
d’efcaliers ou montées, des retraites ou palliers,
des iffues pour les eaux & les immondices, & de la
fituation qui leur convient.
Dans le fécond livre-, il eft queftion du choix des
matériaux , des précautions à prendre avant de comj
mencer un bâtiment, dés modèles qu’on doit faire ,
foit en bois fculpté , foit en pierre m o lle , en carton,
en cire, en plâtre ou ta lc , Sec. D u choix des ouvriers
, des arbres propres à la conftruCtion, du tems
ou il faut les couper , des moyens propres à empêcher
la pouriture , & à- les rendre incombuftibles ,
des pierres, des efpèces de briques, de la tuile , de
la ch au x, du fable Sc du ciment.
L e troifiéme livre roule fur les procédés de cort-
f tru d io n , fur les fondations différentes , félon les
efpèces de terrein, fur Ta ftruéhire des empiétemens,
l’afTemblage & la liaifon des pierres , moilons , bloca
g e , Sec. Sur la manière de maçonner , de plaquer
^ & revêtir les murailles, fur les iommiers , folives ,
& la façon de les a ffiner, fur les planchers, les arcs ,
les voûtes , la converture des toits, les pavés, & les
faifons où il faut commencer. & achever certains ouvrages.
Le quatrième livre eft politique & philofophique
autant que didactique & inftn n tif fur la manière de
bâtir. L ’auteur remarque que les hohimes ont toujours
varié dans leurs conftruéUons en raifon de la
diverfîte des climats , du fol & du gouvernement 5
il parle enfuite de la fituation favorable aux villes ,
de la grandeur qu’on peut leur donner, de la forme
des murailles , des ufages & cérémonies des anciens,
relativement à cet. objet, des fortifications, tours,
portes & remparts , des ponts de bois & de pierre 3
des égouts, des p orts, havres , des places nécefTaires
à une ville.
Le cinquième livre donne les règles pour bâtir les
palais des bons princes, les châteaux fortifiés des
tyraps, & les maifons d’une république , les temples
grands & petits , les académies 3 les écoles publiques
, les hôpitaux, les palais de fénateurs. On y
trouve^ des notions fur l’architecture militaire & na^
v a le ', Sc fur celle des fermes,'métayeries , & mai-
fons de campagne.
Dans leA fîxiéme livre , Alberti commencé à parler
■ de l’arcliitecfture d’ornement, des colonnes , Sc de
■ .la manière de les^former. Après quelques réflexions
fur la nature du beau , fur le bon goût , & fur les
moyens de l’acquérir, il fait Une petite hiftoire de
■ Xarçhitecfture. Viennent enfuite plufieurs chapitres
fur la méchanique, les machines, la manière dont il
faut élever &_ tailler les colonnes , feier le marbre ,
le p o lir, l’imiter au moyen du ftu c , ou l’incrufter
par petites trafrehes , ou dalles fur les. murailles de
plâtre ou de moellon.
Dans le feptiéme livre , continuant de traiter des
omemens d’archïtecfturë, & principalement des colonn
e s, il s’occupe des édifices à la décoration des
quels on les employé, & de même que Vitruve
avoit fait un livre fur les, temples , il en fait un
fur les églifes. Il montre quelle efpèce . de colonnes
Sc de pilaftres conviennent le mieux à ces édifices
, quel emploi on doit y faire des ftatues Sc de
quelle matière celles-ci doivent fe faire.