
chapiteau, &C qui Communique avec une cannelure
fie y ou 6 pouces de profondeur, taillée ^le Ions; du
fuft. Ori prétend que cette cannelure fervoit à Faire
defcendre l’eau du baflin ; mais on ne voit point comment
le baflin étoit fourni d’eau: comme cette invention
défigure la colonne , on la croit moderne.
Nous-nous hâtons d’arriver à ce grand édifice, q ui,
par fa muraille & fes riches colonnes, s’annonce pour
un de ces temples que l’antiquité a laiiTé à notre
admiration. On y reconnoit le temple du Soleil.
L ’architede voit encore dans fes ruines une de ces
vaftes entreprifes qui peuvent entrer en parallèle avec
celles de l’Egypte. Il y obferve cette difpofition &
cette immenfité de plan qui cara&érifent ce qu’on ap-
pelloit les grands temples. C e n’étoit pas , comme on
le fa it , un corps ifolé , mais une réunion d’édifices.
(V o y e z Temple.) J ) e ce genre étoient ceux de l’Egypte
( V o y e z Architecture Egyptienne. ) , comme
Strabon nous l ’apprend , & comme leurs vaftes ruines
le-prouvent, encore. Le grand temple de Balbeck
peut rivalifer avec eux du côté de l ’étendue. Sa longueur
eft d’environ 900 pieds, & fa largeur de 450.
Une colonnade compofée de douze colonnes flanquées
de deux ailes de bâtimens ornés de pilaftres du
même ordre , donnoit entrée dans un fuperbe Pro-
nnos ou Porche. On y montoit par un grand efca-
lier dont les marches n’exiftent plus. C e grand fou-
baffe ment: ne forme aujourd’hui qu’une efpèce de
terraffe, fur le bord de laquelle on diftingue , avec
peine , les baies dés douze colonnes mais-; elles
étoient fui pied en . 1688 j du tems de la Roque ,
fi l’on peut ajouter quelquefois a fa relation remplie
d ’admiration & d’obfcurité. Quand on eft fous, le
portique, on trouve , à les deux’bouts , deux chambres
qui n’en font féparées que par deux piliers quar-
rés. L ’intérieur de ce portique eft orné de trois portes,
& de niches , à .deux étages avec des colonnes -, 8c
faites en forme de tabernacles. Cette efpèce de décoration
eft générale dans cet édifice ,? ainfi.que dans
le refte des monuméns de Balbeck. L e plus foüyent
ces niches n ©firent que des frontons fùfperidus, dont
les foutiens tombés font- devenus la proie du tems ou
de l’avidité des Arabes. Ce t intérieur eft obftrué de
pierres entalfées ; mais, fi l’on en furmonte l’obftacle,
on pénètre par les trois portes dont ori a parlé , dans
un terrain vuide qui eft une .cour hexagone de çênt
quatre-vingt pieds de diamètre. Cette cour eft lemée
de fufts de colonnes brifées , de chapiteaux mutilés ,
de débris dé pilaftres , d’entablemens , fié corniches
, &c. ; tout autour règne un cordon d’édifices
ruinés, qui préfentent à l’oeil une fiivifion de cinq
exèdres. Il paroît que les bâtimens de cette cour
auffi bien que de celle qui la fuit •, étoient deftihés
aux écoles & aux logemens des Prêtres du Soleil dont
Strabon dit avoir vu les- habitations à THéliopolis
a-Egypte.
Les exèdres des anciens , foit dans leurs gymnafes ,
foit dans leurs maifons , étoient des endroits où s’af-
fembloient les philofophes pour enfeigner & pour
converfer. (Voyez E xedre. ) L ’intérieur de ceux-ci
eft orné des mêmes niches dont on a parlé. Au rapport
des anciens voyageurs , ils étoient ornés de
ftatues. On n’y en retrouve plus.. Dans quelques angles
de cette cour hexagone » PU voit des chambres
qui peuvent avoir fervi de logement aux Prêtres, 8c.
de grandes niches faites peut-être pour recevoir des
ftatues coloffales.
Au bout de cette cour eft une ifiue qui jadis fut
une porte , par où l’on apperçoit une plus vafte per-
fpe&ive de ruines, dont la magnificence follicite la
curiofité. Pour en jouir, il faut monter une pente qui
fut l’efcalier de cette iffue , & l’on fe trouve à l’entrée
d’une cour quarrée , beaucoup plus fpacieufe que
la première s elle a trois-cents cinquante pieds de
la r g e , fur trois-cents trente-fix de long. ( Voye{ Fig.
12.y. . Le premier coup d’oeil le porte naturellement
au bout de cette cour , où fix énormes colonnes fe
détachent fur l’horizon. Un point de vue non moins
intéreffant eft une: autre file de colonnes qui règne à
gauche, & s’annonce pour le périftyle du corps du
temple. Mais avant d’y paffer, on ne peut refufer des
regards attentifs aux édifices qui enferment cette cour
à droite & à gauche. Ils forment une efpèce de galerie
divifée en fept pièces fur chacune des grandes
ailes. Cinq de ces pièces, ou enfoncemens extérieu-
ment décorés de colonnes, font des exèdres dans le
goût de ceux de Dioclétien , alternativement reftan-
gles-ou circulaires ; les rectangles font ou tétraftyles
©u hexaftyles ; ceux en. demi-cercle n’offrent à . leur
entrée que fieux colonnes : dans -les mafiifs qui réparent.
ces exèdres Tordre y eft continué en pilaftres,
dont Tcntre-colonnement eft décoré de grandes niches.
Le fond de tous, ces exèdres conferve. des frontons
de niches ou de tabernacles dont les foutiens font
détruits. L ’architecture, & la décoration de cette
cour font les mêmes que celles de la précédente.
En travërfant la grande cour dans fa longueur,
ön’tröuve au milieu une petite efplanade quarrée, ou
fut ùn petit édifice dont il ne refte -que les. fondements'.
Enfin : Tön; arrive au temple propremènt dit,
& au pied des fix colonnes dont on a parlé’. C ’eft
alors que Tön cçnnoît toute la hardieffe de leur
élévatioiv & l’énormité de leur diamètre. Leur fuft
a vingt-un pieds huit pouces de : circonférence , fur
cinquante-huit de longueur ; en forte que la hauteur
totale ^ y compris l’entablement, .eft de fbixante*
onze a loixànte-douze pieds; On s’étonné d’abord
i de voir1 cette fuperbe ruine , ainfi fblitaire & fans
I accomp'agriëmens 5 mais , en-, examinant le terrain, on
reconrioît bientôt une fuite de bafes qui décrivent un
plan’ én quarré, long ■ de deux-cents foixante-huit
pieds-, fur cent quarante-fix de large. De cette enceinte
de colonnes qui environnoitia Ce lia ou corps du
temple,, il ne refte plus,qu£ neuf colonnes fut pied avec
leur- entablement : les bafes des autres font prefijue
toutes à leur placejêç quelques-unes.confervent encore
quelques fragmens, de leur, fuft;. .Mais il ne refte ni
bafes du yeftibule , ni la raoindre partie de ItçCcll^
Ce temple compofé de dix colonnes de front & de
dix-neuf en flanc, étoit du nombre de ceux que les
Grecs appelloient Féripteres & Décaflyles : mais fon
entre-colonnement n’eft d ’aucune des cinq efpèces
dont parle Vitruve. Autour du temple règne une ter-
rafle ou foubaffement, fi Ton peut donner le dernier
de ces noms à ce qui ne foutenoit, aucune partie du
temple. Il paroît probable qu’il n'aura jamais été
achevé j car pourquoi eût-on pris la peine de tranf-
pôrtcr, à grands frais , des maffes fi énormes. Ce
qu’on en v o it , au bout occidental, fait juger que ce
foubaffement,, de même que celui du fécond temple
dont nous parlerons, devoit être compofé de trois
rangs ou couches de pierres. L a plus baffe formoit
lès moulures du focle , avec une partie du d e z j la
fécondé compofoit la plus grande partie du dez 5 &
la plus haute en faifoit le refte avec les moulures de
la cymaife. On y remarque trois pierres , q u i , prifes '
enfemble dans leur longueur, ont plus de cent quatre-
vingt-dix pieds. La première a foixante-trois pieds
luùt pouces , la fécondé foixante-quatre, & la troi-
liéine foixante-trois. On a conjeétnré que le nom de
Trilithon donné à ce temple étoit venu de ces trois
grandes pierres. Les. fouterrains de ce monument:
©firent des voûtes très-folides à une grande profondeur
en terre & qui foutenoient toute la conftruétion.
Le grand temple de Balbeck , ainfi que les autres
édifices, ne préfente d’autre ordre que le Corinthien.
Le Compofite, qui n’en eft que l’abus, s’y trouve aufli
employé à quelques pilaftres. Ce la feul fuffiroit pour
prouver que la çonftru&ion de cés monuméns ne
doit fe rapporter qu’au troifiénie âge de T architecture
Romaine. Malgré tout ce que leur grandeur & leur
magnificence peut offrir d’impofant à l’oe i l , le bon
goût ne fauroit y exeufer les incorrections fans
nombre, & les abus dont Tarchiteéture moderne ne
feroit que trop portée à fe prévaloir. Nous allons en
faire remarquer les principaux.
• Quoiqu’on ne yoye point à Balbeck , parmi les
colonnes ifolfies, le vice de l’accouplement, on ne
fauroit fè diflîmuler néanmoins qu’il en eft plufieurs
adoffées à, des murs dans la décoration des niches,
qui font très-voifines de ce dé faut, à en juger par
les deflins des voyageurs Anglois. Prefque toutes les
colonnes portent fur des ftylobates particuliers. Cette
méthode fut inconnue aux beaux fiècles fie l’a rc , 8c
Wipçkelmann obferve qu’on ne connoît en Italie
qu’un feul exemple de cet ufage, à Aflife ville d’Om-
brie. Peut-être, pour l’excufer à Balbeck, pourroit-on
dire que TarchiteCte y auroit été contraint par la
necelîité d’employer les marbres précieux qu’il avoic
a mettre en oeuvre , & de conformer à fes élévations
les colonies toutes faites qu’il auroit trouvées. Mais
comment juftifier l’emploi de ces frontons doubles,
ou inferits l’un dans l'autre, de ces frontons brifés &
arrondis, fié, ces frontons fans baie qui fe rencontrent
dans toutes les niches j ces abus qui*, des thermes de
Dioclétien, & des monuméns des bas fiècles, ont paffé
aansTftrchiteéture moderne, trouvent dans çètte ville les
autoritéslësplus nOmbreufes. A en juger par les coquilles
p la c e s dans les niches, par les modifions mis au-deffus
des denticules , par les efpèces de confoles qui ornent
les frifes , par la profufion des ornemens dans tous
les détails ; on croiroit que les monuméns de 5 a/-
beck , ainfi que ceux de Palmyre , auroient été l’école
de la plupart des architectes modernes.
Les memes abus fe remarquent dans le feconfi
temple que nous allons décrire. Il eft fitué vers la
partie méridionale de la ville , & fur un terrain plus
irrégulier. Ce temple eft pfeudodiptère , c'eft-à-dire
qu’il a deux rangées de colonnes au Pronaos , & un
feul dans.Ies ailes , ainfi qu’au porûcum. On ne voit
point qu’îE a it * jamais été accompagné des mêmes
cours & portiques qui formoienc les avenues de l’autre.
Mais il eft plus entier ; fon extérieur préfente un flanc
de treize colonnes, fur huit de front. Elles (ont également
d’ordre Corinthién. Leur fuft a quinze pieds
huit pouces de circonférence , fur quarante-quatre
de hauteur. On montoit au Périftyle par un elcalier
qui fubfiftoit encore du tems de la Roque. Le nombre
dés degrés eft déterminé par la'hauteur du foubaffement.
De chaque côté de la porte du temple, eft un
efcalier qui conduit au femmet de l’édifice. ;
Son intérieur offre d’abord un cahos dè décombres
entaffées fur la terre , & fouillées de pouffière ou.
d’herbes fauvages : ce font les débris de la voûte qui
couvroit le temple ; fa portée avoir cinquante-lept
pieds de la rg e, fur cent dix de longueur: le mur
qui la foutenoit en a 31 d’élévation fans aucune
fenêtre. De chaque côté de ce'mur régnent des arcades
dans les piédroits defquellës font engagées des
colonnes Corinthiennes, cannelées. Celles-ci fupportent
un entablement qui profile en faillie fur chacune
d’elles. Le dcfilis des arcades eft occupé par des niches
ou tabernacles ornés de colonnes & de frontons. Dans
le fond du temple s’élève, au-deffus de T aire, une
efpèce de retranchement. C ’eft une pièce voûtée ; fans
doute ce fut de: Sacrariuin ou la demeure du Dieu
que Macrobe nous a décrit. Cétte partie répond affez
à celle qu’on appelle Thrônc , & que Lucien défigne
par Thalamus dans le temple de la déeffe Syrienne à
Hiéropoîis.
L ’archice&ure n’a jamais rien produit fie plus riche
que ce monument. On peut s’en former une idée
par les plafonds du Périftyle : les grandes parties qui
en fubfiftent, offrent des encadremens en lofange où
font repré fentes Jupiter aflis fur fon aigle , Léda
careflee par le cygne , Diane portant l’arc & le croif-
fan t , & divers buftes qui paroiffent être des figures
d’empereurs & d’impératrices. Tous les membres dans
T intérieur font chargés d’omemens, & la profufion
y eft extrême. Les bandeaux des arcs, les profils des
niches , les frifes du grand ordre y font enrichis de tout
ce que le luxe de l’art put imaginer de plus fomptueux.
Les colonnes intérieures font cannelées ainfi que la
frife. Si les colonnes de l’extérieur font îiffes , on
appérçoit cependant qu’elles dévoient recevoir le même
ornement, comme l’indiquent celles du yeftibule dont