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qiier de principes à ce fujet. L e refte dépend i
uniquement du gofit de 1’architeéle , du plaifir des j
y e u x & des -convenances de 1’optique.
Ce s degréjs, dont on vient de parler dans Ie
renfoncement des coiffons , s’appliquent a toutes
les différentes formes dont ceux-ci font fufcep-
tibles ; cependant ils ne, font un bon effet que
dans lès formes fimpies que nous avons prouve ;
être les feules qui convinffent à l’archite&ure.
Dans toutes les autres configurations que nous
avons renvoyées, à l’arabefque , ce genre qui
fùppofe une profondeur, rèfultat véritable de la
charpente, auroit trop de lourdeur 8t y pro-
duiroit trop de confufion. Le plus ou le moins
de profondeur n’eft pas une chofe indifférente
pour le caraâère propre des coiffons, relativement
au x édifices où ils figurent & aux ordres avec
lëfquels- ils fe ,t ro u v en t .f. • ; '■
I l doit fuffire d’ indiquer à Tarchite&e intellig
e n t ie s nuances de: ea ta âèfe q u e 'le goût feul
peut faifir* j - .• ; -•
Je penfe donc que les d e g rés, dans le renfonr
cernent des coiffons3 leur ôtant l’apparence de la
profon deur, & adoucifiant à l’oeil la crudité qui
réfulte de leur enfoncement perpendiculaire, il
convient fde ménager cette modification & d’en
.proportionner la variété aux. caraftères différens
des édifices & des ordres. Ainfi L’ordonnance
dorique-exigera des coiffons renfoncés quarrément
& fans degrés. L ’ionique admettra un ou deux
degrés. Le corinthien, plus riche & plus v a r ié ,
en demandera trois. Ces règles qui ne /ont que
de goût ,, pourront encore être fubordonnées à la
nature l’étendue du local.
Par le même principe d’harmonie de forme
relative à chaque ordre & au çaràétére qui lui
convient dans ‘ chaque partie , je penfe que la
forme dés coiffons quadrarigulaires étant la forme
primitive & qui appartient le plus à l’ effenee de
la charpente, doit être aufîi celle qui fera propre
au dorique, cet ordre le plus grave de tou s , &
qui porte le plus d’empreintes des types de la
charpente.
La forme de coiffons circulaires fuppofe déjà
une recherche d’agrémens qui ne convient pas
mal à l’ordre ion iqu e, dont la grace & la déli-
cateffe forment le cara&ère particulier.
La forme des coiffons exagones ou oâogones
offre une variété de lignés , une richeffe de détails
qui s’accorde particuliérement avec la magnificence
de l’ordre corinthien ou des ordres
compofés qui n’en font que des modifications
plus ou moins fomptueufes. On fient bien que
ii le corinthien peut admettre dans fes coiffons un
moindre degré de richeffes, la condition ne feroit
pas réciproque pour le dorique , où la gravité &
la fimphcité font impêrieufeinent requifes.
D e la difpofition des coiffons.
Ce quç l’on peut dire de la difpofition des
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coiffons fe divife en obfcrvations générâtes, rela»
tives à la nature & l’étendue des voûtes 8t plafonds
où ils fe trouvent diftribués ;
Et en remarques particulières aux coiffons en
eux-mêmes.
La première obfervation générale dans la difpofition
des coiffons, & lapins importante à faire
a rapport au nombre & à la proportion qui- leur
conviennent. En général dans les plafonds, les
coiffons doivent être moins multipliés que dans
les v o û te s , parce que la fuperficie des premiers
prèfente 'moins d’étendue que celle des féconds.
Mais c’eft aufli la grandeur de l’édifice qui décide
de cette proportion. Un grand tout doit avoir
de grandes parties. A ne confidérer les comparti
mens d’une voûte que comme la repréfentation
d’un affemblage de charpente, il eft certain que
la couverture d’une grande n e f ou d’une grande
rotonde ne eomporteroit que de grandes pièces
de bois , & que de grandes folives ne donneroient
que de grands & de larges renfoncemens. Mais
le goût feul indique la néceffitè d’une diftribution
grande & peu multipliée. Un grand efpace trop
fubdivifé fe rapetiffe ; un petit gagne de la grandeur
par- la divifion.
Les anciens rions ont laifle des exemples eh ce
genre qui peuvent devenir des règles. Dans les
grandes voûtes du Panthéon & du temple de
la P a ix , on ne compte que cinq rangées de coiffons,
quoiqu’on pût les y multiplier au double. La
crainte d’y produire de la confufion & d’atténuer
i l’effet de la voûte par une trop grande divifion
, engagea encore l’archite&e du Panthéon,
àfupprimer dans le fommet deux rangées décoiffons
qui pouvoient y trouver place : ce grand repos
fait briller davantage les richeffes.
Une autre raifon de ce grand liffe laiffé au fommet
de la v o û t e , fut peut-être aufli d’éviter la
petiteffe & la mefquinerie des coiffons fupérieurs
q u i, dans une cou p o le, v o n t , comme on le fait,
toujours en diminuant de grandeur par le retré-
ciffement même de la voûte. Ce tte confidération
n’a pas été apperçue par les architeâes modernes,
q u i, en pareil cas , n’ont point fuivi la même méthode
: au refte , on ne fauroit faire une règle de
cette pratique ; mais il doit réfulter de la diminution
néceffaire des coiffons dans une coupole,
que pour éviter l’exceflive pstiteffe de ceux du
fommet, il ne faudra pas les trop multiplier ,/ur-
tout fi on y introduit des profils , des ornemens
& des rofaces ; autrement l’oeil fe fatigue à les
regarder; & ce cliqueiis~d’objets que l’effet de la
perfpeélive rapproche encore entre e u x , fait éprouver
à la vu e un effet qui reffemble à l’éblouiffe-,
ment.
Dans les voûtes d’ une moindre étendue, les
anciens fe font permis de multiplier bien davantage
les coiffons. On peut en voir la preuve à
toutes les voûtes des arcs .de triomphe, d’où fois
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peut inférer que le module du caiffon, tout arbitraire
qu’ il fo i t , peut fe fixer à peu près par l’échelle
générale de l’éd ifice , par, la.diftance des
points de vu e & le rapport naturel des parties
avec le tout. S i l’on fent combien de petits coiffons
feroient un mauvais effet dans une grande
voûte, on comprend de même que de grands
compartimens rendroient l’effet d’une petite » lâche
& diffus. Ce s obfervations font de nature à etre
plus aifément fenries que démontrées. Les règles
dp goût doivent perfuader plutôt que convaincre.
Il eft dans la difpofition des coiffons des rapports
néceflaires avec la conftruéiion & l’efprit
de la charpente, qui en eft le type premier,
fur lefquels on ne fauroit élever ni doute ni con-
teftation. ; . . *
„ Le premier eft que les caiffons doivent et-re
toujours en nombte impair, tant dans les voûtes
que dans lès plafonds , de manière que le-milieu
de la voûte foit occupé par un vuide & non par
un plein. Cette rè g le , confiante dans tous les édifices,
pofe fur l’ufage, qui n’admet jamais dé pleins
dans aucun milieu de furfaces , quelles qu’elles
l’oient : mais cet ufage dans la répartition des
caiffons, eft fondé lui-même , fur la nature des
chofes. Dans le fyftême primitif de la cab ane , j
que j’ai fait voir être le modèle réel ou analogique
de Tarchite&ure fvoye^ ARCHITECTURE) ,
les folives-du plancher repofent à plomb de chaque
colonne. Par une çonféq uencé'du même fy ftêm e ,
le milieu de tout édifice étant un entre-colonne-
ment, le milieu de tout plafond doit être un
entre-folive ou un renfoncement : ce feroit un contre-
fens que d’admettre un plein qui ne pourroit etre
cenfé porté que fur un vuide.
De ce premier rapport , il s’enfuit un autre ;
c’eft que dans les intérieurs où l’on admet des
ordonnances de colonnes, il faut que les montans
des caiffons ou les pleins répondent-à-l’à-plomb
de l’axe de chaque colonne y ou que fi les coiffons
(ont trop multipliés, & les entre-côlonnemens
trop larges pour qu’on puiffe s’aftreindre à cette
difpofition, au moins toutes les folives^ ou les
montans figurés des folives dans lès v o û te s , répondent
au milieu des colonnes & des entre-eo-
lonnemens. Ce tte obfervance de fymmétrie 8c cette
régularité font indifpenfables. A u Panthéon ou 1 ordonnance
de colonnes a été introduite après coup ,
on a obfervé ce rapport de difpofition des coiffons
avec les colonnes , quoiqu’enrre celles-ci 8c
la voûte il règne un attiqué fort élev é , qui poùr-
roit rendre moins néceffaire 8c faire perdre de
vue cette corrélation de folives avec les colonnes.
Les remarques particulières à la difpofition des
odiffbns en eux-mêmes ne font pas nombreufes 5
elles rentréroient la plupart dans celles qu’on a
déjà faites fur leurs formes , 8c celles qui reftent
à faire fur leur décoration.
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Mais il en eft une qui a rapport à la perfpec-
t iv e , 8c dont on ne fauroit fe difpenfer de faire
mention ici. O n obferve aux' coiffons de la coupole
du Panthéon, une difpofition particulière dans
la configuration des degrés qui forment leurs
renfoncemens. Les quarrés qui font le compartiment
de la voûte ÿ font enfoncés comme par
degrés. L’épàiffeur de ces degrés eft .coupée fui-
vant des lignes , lefquelles étant parallèles à celles
qui partent du centre de la rotond e, -à cinq pieds
de h auteur, vont au milieu du quarré : cela eft
ainfi pratiqué pour faire que tous ces degrés foient
vus d’une même manière dans chacun des quarrés „
8c que les degrés qui font au bas des quarrés, ne
foient pas caçhés par la faillie qu’ils, ont les uns
fur les autres,
Ce tte pratique, confacrée dans tin des plus
beaux monumens 8c des plus refpeâes de l'antiq
u ité , a partagé jufqü’à préfênt les opinions des
archite&es. Il (g trouve Ven effe t, dans les ouvrages
des Grecs mêm e, quelques exemples de ces chan-
geinens de proportion, don t l’effet eft de corriger l’altération
apparente que la perfpeéiivè introduit dans
lés formes des édifices ; comme, par exemple, des
mutuies oblongs pour paroître quarrés. V itru v e ap prouve
aufli cette méhode, èn reftreignant toutefois
les circonftances où l’on doit l’admettre. A l’égard de
la propofition générale du changement des proportions
, il paroît que le jugement de la v u e , qui ne fe
trompe prefque jamais , doit rendre ces précautions
inutiles. D e plus j le changement des alpeéls
qui eft prelque toujours libre j, doit rendre ces
corre&ions vicieufes ; car fi une certaine incli-
naifon fait paroître une furface affez large à une
certaine di fian ce, elle paroîtra trop la rg e , fi l’on
fort du point .de diftanc'e pour lequel elle a été
ainfi changée. Il eft fans doute quelques occafions
où l’on peut fie difpenfer des règles ordinaires ; ce
font celles où l’on eft contraint à n’avoir qu’un
feul àfpeél, comme il arrive à ces figures d’optique
, dont les parties , quoique fans- proportion
paroiffent bien proportionnées y parce qu’on ne les
regarde que par un trou. M a is, ' dans l’exemple
du Panthéon , rien ne paroît devoir àutorifer cette
inégalité dé largeur aux degrés qui forment les
renfoncemens des caiffons : car la variété de tous
les afpe&s que le fpeéhteur eft libre de choifir
dans ce v aftein té rieu r, doit produire, comme elle
produit réellement, un grand nombre de. points,
de vue' où l’ illnfion :manque Ton b u t , 8t où là
maU.adleflé dé l’artifice fe fait feulement remarquer.
E n :g éné ral, il eft permis de croire , malgré
cette a u to r i té q u ’il faut laiffer aux effets de l ’optique
toutes les illufions que la nature y produit ;
qu’il faut s’en rapporter au jugement de l’oeil pour
les reftifier ; & que l’ art- ne devroic chercher ni
à les prévenir'; ni à les d im im ie r n i à les exagérer.
^{Voyc^cette queftion ^lüs amplement traitée
I l’article C h a n 6 e m e n ï d e p r o p o r t i o n s )»