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connu dans - àiicnn homme uneTnteîlîgeffcé auffi
profonde & une auffi. grande élévation d’ame.
C e t artifte eut le' défagrément-de voir plufieurs
de fes ouvrages reftès imparfaits-; ils n’ont même
pas eu depuis leur entière exécution. L e temple
des Ang es eft de ce nombre ; il avoit été commencé
lur un plan fort in g én ieu x, & l ’on ne
peut que regretter, par ee qui s’en vo it ’encore
aujourd’hui , que l’ouvrage n’ait pu fe terminer
& en foit raflé à l’entablement. Côme de Mé-
dicis v oulut le faire finir par l’académie du deffin ;
il devoit lui appartenir, &• auroit é té ' le lieu de
fes féances. C e fécond projet n’eut point encore
d’exécution. L ’édifice eft aujourd’hui dans l’état
où le biffa Brunelefchi, aux dégradations^)rès qu’a
caufées l’intempérie de l’air. Les plantes & les
vignes en offusquent les murs & en mafquent la
conftruétiôn, & l’on ne peut retrouver i’enfemble
de cet édifice'&:s*en former l’id é e , que dans lé
deflin qu’en ont confervé les Camaldules de
Florence. ’ û -'.\i
Brunelefchi fe montroit dans le même tems aufli
ingénieux mécanicien que profond architefte. F lo rence
alors prenoit plaifir à des repréfentations
piéufes v qui (foïififtoient à imiter le paradis. C ’étoit
u n e 1 gloire* immerife , au milieu de laquelle on
Vo ÿo it1 ides perfonnages mobiles qui figuroient
les bienheurèux. Le preftige fe produifoit par
Pëffet combiné d’une foulede lumières, q u i, alternativement
couvertes & découvertes avec la plus
grande promptitude, imitoient le jeu des éclairs.
I l faut lire dans Vafari la defcription de ces ingé-
nieufeS' décorations, -dont il attribue l’invention
à notre architeéle.
L e théâtre de' cette pieufe comédie ( l’églife
du Saint-Efprit ) , par un çontrafte affez fingulie r,
devint* la proie d’un furieux incendie. A van t
ee t événement qui la 'détruifit en en tie r , elle
menaçoit ru in e , & Brunelefchi avoit été chargé
de faire les projets d’un nouveau temple. C e fut
donc fur fes deflins que fut rebâtie Péglife de ce
n om , qui eft encore aujourd’hui une des plus magnifiques
de Florence. Malheureufemeiît l’inventeur
étoit déjà mort ; auffi l’on ne doit attribuer
les erreurs de ce grand édifice qu’à Tignorance
de ceux qui en eurent la conduite. 11 devoit a v o ir ,
fuivant les deffins qui font parvenus jufqu’à nous ,
cinquante toifes un pied huit pouces de long , fur
feize toifes un pied huit pouces de large.
L e nom de Brunelefchi étoit fi généralement
c o n n u , que des pays les plus éloignés y on lui
demandoit des deflins & des modèles. Le marquis
de Mantoue l’appella pour préfider à quelques
o u v ra g e s , & conftruire des^ digues deftinées à
contenir le Pô dans fon lit. C e prince difoit de
ce t arehitéâe que Florence & Brunelefchi étoient
dignes réciproquement, l ’une d'un f i grand homme ,
l'autre d'une auffi belle patrie..
'Le pape Eugène IV demanda à Côme de Mép
r is un arçhiteéle, pour le charger de la conf- !
B RU
tru&ion d’un édifice dont on ignore aujourd'hui
la place & le nom. Ce prince lui envoya Brunelefchi
avec une lettre conçue en ces termes :
J envoie à votre fainteté un homme dont les talens
font fi grands, qu’il feroit capable de retourner le monde.
L extérieur de Brunelefchi avoir tout ce qu’il falloir
pour démentir cette opinion. Le pape étonné de
la foiblefîe apparente de l’artifte : vous-êtes donc,
lui dit-il , cet homme- capable de mouvoir l'univers ?
Que votre fainteté, lui répondit Brunelefchi, me donne
un point d'appui , elle verra fi je n'en viendrai pas
à bout.
Les grandes occafions font-elles les grands hommes
, ou les grands hommes fufcitent-ils les grandes
entreprifes ? Il femble qu’il y ait une réaélion
des uns aux autres. Le plus-grand monument de
Florence & un des plus étonnans de l’Europe,
la coupole de Sainte-Marie-des-Fleurs ,' attendoit
Brunelefchi» On a vu comment lès circonftances
créèrent ce grand homme. Mais cette impulfion
qu’il a reçue, il va la communiquer à tout ce qui
I environne, & il deviendra en quelque forte le
reffort univerfel qui développera le génie des
arriftes & la noble ambition des grands. Ainfi
Brunelefchi ne devra qu’à lui l’honneur d’avoir
élevé le plus grand édifice de Florence après
Sainte-Marie-des-Fleurs. Je parle du palais Pitti,
un des plus vaftes(de l’Univers, qui, augmenté depuis
par les foins de l’Ammanati., eft devenu le
fejour des grands-ducs de Tofcane.
\ Ee goût de bâtir dés anciens Etrufques s’étoit perpétué
dans la moderne Etrurie.Les ruines de Fiefoles
en avoient donné les premières leçons aux plus an-
c^ ns architeftes tofcans. Plufieurs palais de Florence
s’étoient formés des débris de cette ville antique.
Ainfi, l’on peut affirmer que le goût de boffages qui
domine dans tous les édifices de la Tofcane moderne,
n eft qu’une reproduétion d’un goût plus ancien.
( Voÿe^ A rchitecture étrusque). Il étoit établi
avant que Brunelefchi parût. Celui-ci en avoit encore
vu* d’autres modèles à Rome même, de plus
grands peut-être 8i de plus entiers que ceux qui
fubfiftent aujourd’hui. Ce ftyle conveno-it fort
aux moeurs du temps ( voye^ Bossage ) & aux
matériaux du pays ; il s’âccordoit aufli avec cet
amour, peut-être exagéré, de grandeur & de force
qui caraéférife ordinairement les premiers pas des
inventeurs.
Quoi qu’il en fo it, Brunelefchi employa fans
meiure la décoration des boffages à l’extérieur du
palais. Pitti. Sa façade en eft entièrement chargée.
II falloir fans doute toute la grandeur des proportions
qu’on y admire , toute ;la fierté, toute l’énergie du
caraâèré coloffal & gigantefque qui y d om in e ,pour
corriger la lourdeur & la monotonie qui doivent
réfulter de l’emploi immodéré de ce ftyle.
Ce palais eft fi tué' dans une grande place qui
le laiffe tout-à-fait à découvert. Sa façade a quatre-
vingt-dix toifes de longueur du côté de la place.
Elle, eft percée de vingt-trois croifées. L’archheéts
B u A
n*y a employé aucun ordre d’architeéiure ; mais
elle a trois rangs de grandes arcades les unes fur
les autres , formant les croifées. La porte eft-pratiquée
dans Vune de ces arcades dont elle n’interrompt
pas la fuite; mais, quoiqu’elle ne foit
pas plus grande que les au tre s, elle n’en eft pas
moins commode,elle donne partage à deux carrelles
à la fois. Les ailes de l’édifice ont été ajoutées'
par Côme I. Elles n’ont q u e ‘ deux rangs de croi-
fèes l’une fur l’autre ; mais tout eft fur une ligne .
droite & fans aucun reffaut. T ou te cette décoration
, quoique fimple & même ruftique , a quelque
chofe de majeftueux; les croifées . d’en bas
font belles & d’un très-bon goût. O n defireroit
feulement que Cette grande malle de bâtiment fût
couronnée d’un entablement qui répondît au goût
dans lequel tout le refte a été compofé ( Voye[ la
pi. 2 19 ) .
Mais Brunelefchi ne conduifit cet édifice que
jufqu’au fécond étage ; ce fut Ammanati qui l’acheva
& qui donna les deffins de la co u r , dont
Brunelefchi paffe cependant pour être le premier
inventeur (voy<?{ A m m a n a t i ). O n prétend que
fes deflins fe perdirent.
Parmi le grand nombre de fes é lè v e s , on cite
Dominique du lac de L u g an a , Jérétnie de C ré mone,
Luc Fancelli qui conftruifit fous fes ordres
le palais Pitti ; Antoine & Nicolas de F lo ren c e ,
Antoine Manetti, le Michèlozzo & le Bugiano.
Ce dernier avoit fait le bufte de fon maître; c ’eft
le même que l’on vo it aujourd’hui placé au deffus
de fon tombeau, près de la porte à main droite
en entrant dans l’églife de Sainte-Marie-des F leurs.
On lit .fur fa tombe les épitaphes fuivantes 3
D . S.
Quantum P h ilippus arte D a d a lea va lit en t, cum
hujus celeberrimi templi mira teftudo, tumplures a lla
divino ingenio ab eo adinvcnta machina documento
# poffunt, quapropter ob exhnias f u i animi dotes ,
fingularefque vïrtutes X V kal. majas anno MCCCCXLiv I
(jus B . M . corpus in hac humo Juppofita grata patria
fp e lir i ju ffit,
Philippe Brune lefeo an tiqua architeStura injlauratari
S . P . Q . F . c iv i fu o bene merenti.
Jean-Baptifte Strozzi fit le quatrain fuivant.
T al fopra , fa jfo _
dJi g'.ro in giro etemamente io J lru tff.
Che ccrfi pajfo paffo
Alto girafido a l ciel mi riconduffi.
B R U T , adj. Nom: général qu’on donne à toute 1
matière qui n’eft point dégroffiè, comme à la
pierre & au marbre, quand ils fortént de la carrière.
.
B U A N D E R IE , f, f. C ’eft une efpèce de falle (
o U 3 4 }
au rez-de-chauffée dans une maifon de commit?
nauté ou de campagne, avec un fourneau ou des
cuviers pour: faire la leffive. C ’eft auffi un bâtiment
conftruit à cet effet, & qui réunit en plus
grand nombre .toutes les commodités né ce flaires
pour laver le linge ( Voyeç L a v o ir ).
R U CH E R , 1. m. Lieu obfcur d’un étage foute
r rein ou d’un rez-de-cbauflée, qu’on deftjne à
renfermer les provifions de bois. O n donne auffi
ce nom aux hangars qui fervent au même ufage.
Les bûchers dans les palais des princes s’appellent
Fourières.
BUvH.r. C ’étoit ch ez les anciens un efpace
entouré de murs, qui fervoit à^brûler les corps
des perfonnes qui mouroient trop pauvres , pour
qu’on pût. leur faire la dépenfe d’un bûcher particulier.
On en a découvert un dans les fou ille s
de Pompéii. C e lieu s’appelloit Ufirinum, du v erb e
urere, brûler. ( Voye{ ÜSTRINUM ) .
B U C R A N E . B u c r a n iu m . BaKpetvov.Procîus fe
fert de ce mot dans le traité'de la fphère. 11 dé-
fignoit quelquefois chez les Grecs un cafque c reufé
dans une tète de boeuf,, ou fait en forme de tête
de boeuf.
L ’auteur du diâionnaire d’antiquités (M . Mon-
gez ) propofe aux archite&es d’employer ce mot
nou ve au, pour défigner ces têtes de boeuf écorchées
& décharnées qu’on place dans les frifes.
mot, qui éviteroir u n e circonlocution , ne pourroit
qu’être utile aux écrivains & aux profeffeurs.
Les bucranes, & fous ce nom nous comprenons
aufli les têtes des autres animaux qu’on appliquoit
à la même décoration, fe retrouvent fur une fou le
de monumens antiques. O n les vo it dans les frifes
des temples , comme à celui de la Fortune v ir ile à
Rome ; dans celle des tombeaux, comme au menu-:
ment de Cecilia Metella , qui a pris de cette.décoration
Le nom vulgaire de Capo di Bove ; autour des
autels , comme a celui de Çora & à une multitude
d’autres qu’il eft inutile de citer.
Le bucrane reçoit de la diverfité des frifes ei*
il fe trouve introduit, la variété des ornemens,
qui l ’accompagnent. Dans la frife dorique ,.c ù ifc
occupe l’étroit efpace du métope , Tes feuls ace#f-
foires font les bandelettes ou infula dont on onroit'
les têtes des v*élimés qu’on menoit au facrifice.
Elles y font ajuftées de la même manière , comme
on peut s’en convaincre en comparant ces représentations
fymboliqties a v e c le bas-relief de la v ille
M éd ic is , rapporté par Pietro Santi B artholi, où
deux viélimaires conduifent un taureau au faeri-
fice ; c ’eft-à-dire que l'infula forme fur le crâne
une efpèce de guirlande, dont les deux bouts
pallant par - derrière les cornes , retombent de
chaque côté de la tête qu’ ils, accompagnent»
Dans les frifes continues , telles que celles d e
Perdre ionique , de l’ordre corinthien T les bucranes
font accompagnés de guirlandes de fleurs ou de
fruits , attachées par des rubans, on bandeîerres aux
cornes de la tête. A u temple de la Fortune virile *