m c H 1
vuidè & percé à jour, fur la pointe duquel Oli J pofé
on globe doré., d’une groffeur extraordinaire. Vojla
ce que les Chinois appellent la tour de porcelaine, &
ce que les Européens nommeraient peut-être la tour
de brique. Quoi qu’il en foit de fa matière, c eft
affurèment l’ouyrage le mieux entendu, le,plus fobde
6c le plus magnifique qui foit dans 1 Orient ».
Il n’y a guère de pagodes -où l’on ne yoiepne
grande tour ifolée qui le termine en dôme. On y
monte par. ;un bel efcalier qui règne .tout autour.
Au milieu du dôme eft, dlordinaire, une chapelle
de figure quar-rée. La voûte eft fouvent ornée de
piofajq'ue, 6c les murailles font revêtues de figures
de pierre .en relief, qui repréfentent des animaux
fcc des monfires. , . , . . .
La tour de Nankin n’eft pas la feule qui foit
revêtue de porcelaine: ce genre de décoration ou
de luxe paroît 8c doit être fort commun a laChine,
Une autre v ille , Ton-Tchang-Eou, poffede un
ouvrage du même geure. Cette ville , dit le P. du
Halde eft célèbre par les édifices, & lur-toyt par
sine tour,de huit étages., élevée hors de fonenceinte.
Les dehors , qui font de porcelaine, dont
ornés de diverfes figures. Au-dedans elle eft revetue
de-marbres très-polis 6c de différentes couleurs. On
a pratiqué.dans l'épaiffeur du mur un efcalier, par
lequel on monte h tous les étages, 8c de-la a de
belles galeries de marbre, ornées de grilles de .fer
doré qui emkelffffent les faillies dont la tour eft
environnée. Au coin de ces galeries'font fufpendues
de petites cloches qui, lorfqu’elles font agitées par
je vepr, produifeut un catrillon alfez agréable.
La forme de ces..tours Qu tous, eft, comme on
le v oit, affez femblable .partout. Celle qu’a vu
Chambers entre Canton 6c Hoang-Pou, 6c jiont on
peut voir le deffm (fig. 37*) , '-peut donner aRX
curieux une idée bien fuffifante de ce genre de .monumens.
Elle a fept étages, 8c lion y monte par
trois marches. Le premier étage eft percé de quatr.e
portes ceintrées ; il contient line chainbre;octogone,,
au milieu de laquelle eft l’efolier qui V conduit.
Les degrés des autres étages font placés de lpnieme
manière. Il n’y a aucune différence dans les .corniches
qui féparent chaque étage ; elles font com-
pofées d’un filet 8c d’un grand cavet enrichi de re-
préfentations d’écailles de poidons. Les toits font
relevés dans les angles. A la riferve du toit inferieur
tous.font ornés de feuillages & dp çlocjiettes.
La perche du haut eft furmofii.ee d une boule , de
laquelle defçendent des chaînes fixées ayx angles du
/dernier tc)t.9 & autour de | | i perche font neuf
-- cercles de fer, , -
' Le mot de -tour eft un mot .vague, dont .les
Européens fe fervent indifféremment pour déugner
des monumens qui fe diftinguent à la Chine autant
par leurp yfoge? que par leurs formes & leurs noms
divers. On rcççnnoît une véritable différence entre :
i° Les tai ou plates-formes élevées des anciens
Chinois, pourobforverle ciel, pour fuivre les révolutions
de l’atmofphère §ten faire le journal, comme
C H I
suffi pouf prèndre le grand a it, & jouir au fi-aa
de la vue .de la campagne.
2°. Les hou, qui font des édifices à plufieurs étages
& ifolés, ronds, quarrés, exagones, oéiogones, en
pierres, en briques,, en foyance, en bois, & très-
fameux.depuis que Tfin-chi-hoang en eut fait élever
en . trçs-grand nombre,, tous plus magnifiques les uns
que les autres.
30. Les ta , efpèce de tour fépulcrale, qui eft
maffive pour l’orclinaire , comme une pyramide ,
d’une figure bizarre & fimple ; Ifidée en eft due
toute entière aux lamas.
Les houjiont .les .plus magnifiques de ces tours,'
C’eft .de cette efpèce que font celles dont on vient
de .donner la defeription. C’eft d’un monument de
.ce genre qu’un poète chinois difoit : JS émail de fa
briques difpute d’éclat à l’or & à la .pourpre , & réfléchit
en arc-en-ciel jufqu’à la yillp les rayons du foleil qui
tombent fur chaque étage.
Pay-leou ou arcs de triomphe. La paffion de c es
monumens eft très-grande à la Chine. Les moindres
villes en font conftruire en bois. Le travail de
plufieurs eft affez groffier & ne mérite pas d’attention;
d’autres, félon le P. du Halde., font affez
eftimableg.
Ceux qu’on voit à Ning-po , ont ordinairement
trois portes : .une grande au milieu, & deux petites
à côté. Des colonnes à pans ou poteaux de pierr£
d’une pièce, font le jambage de ces portes. L’entablement
eft compofe de trois ou quatre faces, le
plus fouvent fans faille & fans moulure,, excepté
la dernière ou la pénultième, qui tient lieu de friie ,
& fur laquelle on grave quelque infeription. Au
lieu de corniche, il y a un .toit, qui fert de couronnement
à la porte, & qui appuie fu i les jambages.
Chaque porte eft compofée .des mêmes
pièces, mais plus baffes & plus petites à proportion,
Toutes ces pièces , qui font de pierre , /ont
affeumblées fur des. poteaux , à tenons oc à mortaife,
co.mme ii elles étoipnt de charpente. Les arcs de
triomphe ont , la .plupart, pour ornemens, des
figures .d’hommes, d’oifeaux, de fleurs fort reffem-
blantçs .& travaillées à jour p qui fonf comme liées
enfemble par des «cordons'en faillie, vuidés nettement
& engagés les uns dans les autres fans confij-
fion : .ce qui montre l’habileté des anciens ouvriers ,
c’eft qu’on remarque que les ouvrages modernes de
ce genre n’ont rien qui approche de ceux qu’on
vient .de décrire. La fculpture y eft fort épargné® ,
du .pelle qui fl y trouve ne peut, pour la légèreté
des découpure^ fe comparer à l’ancienne.
Le feiil monument ou payrïeou don? nous ayons
un dfijfin exaér ,„cft celui que Chambers â rapporté,
& dont on peut .voir la forme à la fig. 376 ; ce-
-pendant cet architpôe ne le .donne lui-même que
comme un ouvrage médiocre , & d’après lequel
on jugeroit mal de la magnificence chincifie.
Il ’faut convenir aufli que jee qu’on doit le plus
admirer dans ces monumens, c’eft leur extrême
: multiplicité , & /objet de leur ére&ion. Les annales
de
C H 1
«de îa Chine font mention de trois mille fut cents
tente-fix perfonnages célèbres, pour lefquels on a
élevé des arcs de triomphe. Les capitaines, les
généraux d’armée, les princes , les philofophes,
les mandarins qui ont rendu des fervices au public,
ont droit à ces honneurs publics. Les femmes ont
part à cette gloire. On en diftingue plufieurs
ont mérité & obtenu defiemblabies marques d’il-
Juftration. Auprès de la ville de Nau-hiong, dans
la province de Quang - tong, on voit une haute
«montagnej autrefois inaccefuble, & d’où fortent
deux rivières. Un Calao , né -dans la province,
entreprit de couper cette montagne & d’y pratiquer
un paflage libre aux voyageurs. Pour conferver la
mémoire d’un bienfait fi infigne, on éleva un monument
au haut' de la montagne, & on y Nplaça fà
ftatue,,devant laquelle on brûle des parfums.
Il fout avouer que cette multitude de monumens
ainfi difperfés fur les grands chemins & dans les
campagnes, doit en rendre le coup-d’oeil aufli inte—
reliant pour la penfée, que pittorefepe & varie pour
l’oeil. Ce s perfpeéfives d’arcs places aufli dans les
rues des villes de diftance en diftance, ne laiffent
point de plaire au paffant, en lui rappeüant des fou-
venirs agréables oc utiles.
Ponts. L’on diftingue en Chine plufieurs efpèoes
de ponts. Les ponts de befoin, les ponts de commodité,
les ponts de paflage , les ponts de magnificence
, les ponts à demeure, les ponts paffagers,
les ponts de fontaifie, de caprice & de curiofité.
•Les règles pour les conftruire font différentes.
Les ponts des trois premières efpèces font fi
étonnamment multipliés, fur-tout dans les provinces
•du midi, qui font araofées de tant de rivières &
entrecoupées de tant de canaux., qu?il n’y auroit
peut-être pas d’exagération à dire qu’il y a plus de
ponts dans la Chine que dans tout le refte de
funivers. Combien n’en a-t-il pas fallu foire fur
le feul canal impérial ! Les ponts qu’on y voit font
fouvent des ouvrages dignes de la majefté d’un
grand empire, par leur commodité comme par leur
foliditè. Les' uns font en pierre, en marbre ou en
briques, les autres en bois ou en bateaux. L’invention
de ces derniers eft très-ancienne ; ils font
connus dans les annales des premiers temps, fous
•le nom de feou-kiao , ponts flottans. Il y en a plufieurs,
à ce qu’affurent les miftionnaires de Pékin,
fur le fleuve Jaune & fur le Kiang, qui l’emportent
autant fur celui de Rouen, que ces fleuves fur la
Seine. On ne feroit pas cru, ajoutent-ils, fi l’on
décrivoit la hauteur , la largeur, la longueur de
plufieurs ponts qui durent depuis un grand nombre
de fiècles. Celui qu’on trouve en arrivant à trois
lieues de la ville chinoife , a deux cent pas de
long fur une largeur proportionnée. Il étonne &
choque les étrangers, la première fois qu’ils le voient,
par fa prodigieufe hauteur & l’inutilité apparente
de la plus grande parue de Tes arcades. Mais ils
changent bien d’avis, quand ils voient par eux-
mêmes que le JJom-ho. qui n’ eft qu’une affez mC"1
Architecture. Tome /.
t H I 66?
tivièfê, croît fi étonnamment pendant les
pluies de la canicule, que fes eaux rafent prefque
ou même rempliffent les arcades des deux bouts.
U en eft ainfi d’un grand nombre d’autres. Pour les
bien juger, 11 faut les voir dans le temps qua eu
en vue l’architefte qui les a conftruits.
n faut que les Chinois aient imaginé bien des
formes de ponts différentes , puîfqu’indépendam-
ment des noms qu’on vient de rapporter , & qui
expriment les différences de genres entre ces ouvrages
, on trouve encore dans leur langue tant
d’autres mots pour défigner d’autres efpèces. Tels
font les noms de ponts en arc-tn-âtl , en levier,
en balancier, à poulies , ‘en coulijjts, a double bu feule.
en campas , en fagots ancrés, en poutres empaillées ,
en barques ren v e rfe e en cordes tendues. Il feroit fort
à Souhaiter que les miftionnaires de Pékin, au lieu
de fe plaindre de l'incrédulité des Européens 8c de
certains critiques fur tous, ces monumens de lin-
duftrie chinoife, euffent travaillé à la guérir par
des deferiptions authentiques. Il eft fâcheux encore
qu’ils n’aient fait qu’irriter notre curiofité, fans la
fatisfcire fur ces ponts véritablement utiles, quï-
ont été imaginés à la Chine , & qui s’exécutent
d’un jour à l’autre, pour fubvenir à la rupture
fubite d’un pont, remedier a une inondation, faciliter
ia communication d’une armée, lui ouvrir
un paflage, ou abréger le chemin des vivres qu’on
lui porte. , _ . . .
Au refte, quand on confidère que le befoin, pere
de tous les arts, eft en même temps la règle comme
la mefure des Inventions humaines 8c deleur perfection.
il faut avouer qu’en aucun pays les reffources
de l’induflrie ne durent être aufli aéfives 8c aufli fécondes
par rapport à la conftruftion des ponts, que
dans la Chine, pays arrofé de fleuves 8c coupé
de canaux, par ou fe fait tout le commerce. Ce
genre de circulation fi commode 8c û économique
difpenfe de ces lourds charriots qu’on emploie ailleurs
pour le tranfport des marchandifes. Rien ne
fe traîne à la Chine fur des charriots, tout s’y voiture
par eau, tout s’y porte à fctas , & voilà la
principale raifon de la légèreté qui diftingue leurs
ponts; légèreté tellè, que, félon le père du
Halde , ils ne réfifteroient point à la charge de
nos voitures 8c s’écrouleroient fous leur poids. Il
ne faut lias s’étonner non plus, comme le fait
M. de Paw, le plus grand dètrafteur des Chinois, de
ce qu'ils élèvent fi haut leurs” ponts pour laiffer
un libre paflage aux mâts de leurs barques : au
lieu de forcer les barques à baiffer leurs mâts.
C ’eft bien certainement dans ce genre qu’on ne
' peut donner aucune leçon aux peuples qui fentenr
& connoiffent mieux la nature de leurs befoïns
qu’on ne peut le faire à fix mille lieues de diftance.
11 femble bien naturel qu’on ait, dans la
fabrication des ponts, plus corfultè l’avantage des
navigateurs 8c de milliers de barques fans ceffe
circvüantes fur tous les canaux, que celui des pif -
fans qui les traverfent, fur-tout lorfque ces paf-
P p p p