
de Trajan ou d’Adrien. Sur les bafes en forme
d’autel, des candélabres de Sain te-Agnès fortent
d’un fond de feuillages agréablement travaillés,
des amours qui fe ceignent des bandelettes.
Ces candélabres de marbre pouvoient être en
ufage dans les temples, moins, comme dit Lachauffe,
pour éclairer que pour ajouter à la majefté du
culte. Mais on croit aufli que plufieurs de ceux
dont nous venons de parler, ont été trouvés dans
les thermes de Titus. La plupart de ces falles
étoient privées de la lumière du jour, & ne re-
cevoient que celle des lampes ou des candélabres
en queftion. Ceux que je viens de décrire n’etoient
pas encore trop volumineux pour éclairer ces
vaftes intérieurs ; mais il faut avouer qu’ils ne
pouvoient être ni mieux placés ni plus utiles ;
& c’eft fans doute de l’éclat de leur lumière dans
les cryftaux dont les voûtes étoient reyêtijes,
que Stace apparié, lorfqu’il dit :
Non lumin. n cejfant.
Effulgtnt caméra vario faftigio vitro»
Mais les candélabres les plus curieux pour la
forme , î’ufage & le travail, font ceux que pof-
fède le mufæum de Portici, & qui ont été trouvés
dans les fouilles d’Herculanum & de Pompeii. Ils
iont tous de bronze , & tous étoient deftinés aux
ufages domeftiques. Quoique par la forme ils fe
rapprochent d’avantage de nos chandeliers, on
n’en voit cependant aucun porter à fon extrémité
fupérieure de bobèche, ni aucune indication de
bougie ou dé chandelle.
Les plus intéreffans de tous aux yeux de qui
aime à retrouver dans les productions de 1 art
les indices précieux de l’imitation, & à dérober
au luxe orgueilleux le fecret de fon origine obfcure,
bien fouvent, font ceux dont le fût repréfente
des cannes de rofeaux, ou des bâtons d epines
auxquels on aurait taillé les noeuds ou les branches.
On peut les citer comme un exemple de
l’efprit des anciens, dans la manière d’adapter
l’ornement aux chofes ufuelles, pour en augmenter
la commodité, & de leur foin à conferver la re-
préfentation des obfets qiA donnèrent lieu à quel-
qu’invention utile. Les feuilles naiffantes qui fortent
des tiges de ces rofeaux, les noeuds ou les
branches taillées de ces bâtons ornent le corps du
candélabre, qui fans cela eût été trop Me. Mais
ces ornemens ne font pas inutiles , ni imagines
feulement pour fatisfaire la vue ; car en même
tems qu’ils fervent d’appui à la main qui porte
la machine, dont ils rendent M a g e infiniment
plus commode, ils font encore deftinés à en rap-
peller l’hiftoire. En effet, ces inftrumens, dans
leur origine , n’étoient qu’un fimple rofeau que
l’on brûloit par un bout, tandis que l’autre fe
fichoit en terre , ou on les faifoit d’un fimple
bâton, dont les racines confervées à la partie
fupérieure, foutenoient un plateau fur lequel on
mettoit une lampe. Quelquefois placées 'à l’extrémité
inférieure, ces mêmes racines en fe recourbant
, formoient un pied qui fupportoit tout
le candélabre. Ces mêmes circonftances , qui ajou-
toient à l’agrément & à la commodité d’un meuble
fi ufuel, en même temps qu’elles confervoient
la mémoire de l’inftitution première, furent foi-
gneufement tranfmifes à plufieurs monumens de
ce genre, & rendues même avec beaucoup d’attention
, ainfi qu’on peut en juger.
Les candélabres dont on vient de parler, étoient,
comme on peut le croire, très-légers & d’un fut
trés-grêle. Les détails dans lefquels je fuis entré
prouvent qu’ils étoient portatifs & d’un, ufage
habituel. On en trouve un de cette forme fur un
vafe étrufque ; & il fert à éclairer une table do
feftin & les convives qui l’entourent.
Au refie, parmi les loixante ou quatre-vingts
candélabres du mufæum de Portici, on en diftingue
de plus d’une efpèce. Leur plus grande hauteur
eft de cinq pieds. Le fût d’un de ces candélabres
efi quarré, 6c fur le bout d’en haut, au-deffous
de la bobèche fur laquelle on pofoit la lampe,
font repréfentêes deux têtes, l’une de Mercure,
l’autre de Perfée, accollées ( capïta jugata ) ; toutes
deux coëffées de leur chapeau ailé. Perfée tient
l’épée qui lui eft ordinaire, & un crochet pareil
à ceux de quelques lampes antiques qui fervoient
à arranger la mèche. Peut-être ce crochet eft-il
ici la caufe ou le motif de cette figure de Perfee
à un candélabre.
Le plus grand nombre eft en forme de colonnes
qui rappellent & expliquent en même tems
le paffage de V itruve , où cet auteur condamne
dans les décorations capricieufes de l’arabeiquc de
fon tems, ces colonnes que les décorateurs fai-
foient à l’imitation des candélabres. Quelques-unes
font cannelées dans tonte la hauteur du fut ; les
cannelures de quelques autres font torfes ou en
fpirale. Ils pofent en général fur un pied formé
de trois pattes de griffons ou d’autres animaux.
On en voit dont le chapiteau corinthien eft fur-
monté d’une tête qui Apporte une »lampe de
bronze à deux mèches ; car tous ne fe terminent
pas par un plateau. Un des plus beaux, porté fur
trois griffes , fe termine dans le bas par une forme
de baluftre. Le refte du fût eft orné de cannelures
torfes. Au-defîùs du chapiteau fe voit un
oifeau, les ailes étendues , qui fupporte le plateau.
Celui-ci eft orné dans le goût le plus délicat
d’oves & de feuillages. Cette partie des candélabres
eft celle que Pline appelle fuperficiem can-
delabromm, & , félon cet écrivain , les artiftes de
l’île d’Egine l’ornoient d’un travail exquis, de
même que ceux de Tarente ornoient de moulures
les fûts des* candélabres. C’eft ce que nous appellerions
la bobèche. On avoit coutume de la charger
d’ornemens de fçulpture.
Les anciens fe plaifoient à repréfenter dans les
ornemens de leurs édifices, tous les objets qui
•pouvoient ètt rappeller & en apprendre la deftina- |
tion.On retrouve (ouvent les candélabres employés
par ia fçulpture dans les frifes des temples. Tantôt
ils font accompagnés de génies allés , dont la partie
inférieure fe termine en rinceaux, & qui femblent
occupés à les orner de bandelettes ou de guirlandes. 1
Tantôt on voit à leurs côtés des griffons ailés qui
appuient chacun une patte fur fon pied , peut-être
parce que le griffon étant confacré à Apollon ,
dieu de la lumière, on aura trouvé dans cet animal
allégorique une forte d’analogie avec les inftrumens
deftinés à éclairer. On en voit de cette
façon dans la' frife du temple d’Antonin & Fauf-
tine, quoique là le candélabre ait plus particuliérement
la forme d’un vafe. Mais dans la belle frife
antique du palais de la Valle à Rome, le candélabre
accompagné de griffons, y eft reprefente allume
& dans la forme d’un baluftre orné de cannelures
& de rinceaux. Au refte, ces candélabres de frifes
paroiffent être de la nature de ceux dont on z
parlé au commencement de cet article, & qui,
moins par leur forme que par leur proportion &
l’emploi qu’on en découvre dans les bas-reliefs,
femblent rentrer dans la clafîe des autels.
Mais ceux qui ornent la frife des entre-pilaftres
du portique du panthéon , fe rapprochent, fur-tout
par la forme de leurs pieds , de celle de nos chan-
deliers-d’églife. Leur partie fupérieure fe termine
en manière de v afe, furmonté d’une efpèce de
chapiteau, d’où pendent des guirlandes nouées
& ornées de bandelettes.
On trouve aufli des candélabres dans les décorations
arabefques ; mais on chercheroit en vain
dans ce genre purement fantaftique d’ornemens ,
les raifons qui l’y auraient fait introduire. A peine
dans l’ornement que la fçulpture employa , fur-
tout chez les Romains, à l’embelliflement des
édifices, peut-on s’affûter fi c’etoit la raifon ou
le plaiftr feul des yeux que- l’artifte cherchoit à
fatisfaire. Cependant c’eft autour des temples qu’on
trouve le plus fouvent les candélabres employés ,
comme c’efl-là fans doute aufli qu’il étoit naturel
de les placer. Mais on ne voit' pas que les anciens
aient orné de candélabres ifolés , en maniéré
d’amortiffement ou de couronnement, les façades
de leurs portiques & de leurs édifices , comme
l’ont pratiqué les'modernes. -
Chez ceux-d les candélabres ne s’emploient guère
aux ufages domeftiques ; & les guéridons fur- ^
montés de luftres feroient la feule chofe qui pour-’
roit avoir quelque rapport dans les palais , avec
la méthode de s’éclairer en ufage parmi les anciens.
En Italie, la manière 6e difpofer par terre
autour de l’autel, de grands chandeliers , paroît
être une imitation des pratiques de l’antiquité a
cet égard. La grandeur même & la forme de plufieurs
de ces chandeliers peuvent en donner une
allez jufte idée ; mais ce qui fait leur différence
«ffentielle, c’eft la bobèche deftinée à recevoir
& à contenir les cylindres de matière inflammable
dans une dire&ion droite & ferme. Du côté de
l’ar t, le choix des formes & des ornemens ne
permet pas de trouver beaucoup de reffembiance
entre les candélabres des modernes & ceux des
anciens. Les plus beaux, ou du moins les plus
riches & les plus vantés des ouvrages modernes
en ce genre, font les candélabres de Saint-Pierre,
dont le deflin eft attribué à Michel Ange. Malgré
le nom de ce grand artifte , la richeffe de la matière
& la beauté du travail, il faut convenir que
leur forme eft trop divifée, que les ornemens en
font capricieux , & que leur proportion eft très-
infuffifante pour le local qu’ils occupent. Il refte
beaucoup à faire aux modernes à cet égard pour
égaler les anciens. Les candélabres deftinés à Apporter
, dans nos églifes , ce qu’on appelle le cierge
pafcal, offriraient aux artiftes une belle matière
d’émulation avec l’antiquité. Cependant à peine
ofe-t-on citer quelques effais modernes en ce
genre, qui puiffent taire croire cette rivalité pof-
fible.
CANEPHORE. On confond fouvent & mai
à propos, dans la décoration, les canephores avec
les caryatides. Cette erreur vient de la reffem-
blance d’attitude, & de l’application tout à fait
abufive que quelques modernes ont fait de ces
figures au fupport des édifices pour lequel elles
ne furent jamais deftinées.
C ’eft ainfi qu’on voit dans la Villa Albani quatre
canephores antiques fervir de caryatides à deux
efpèces de petites grottes pratiquées vers l’entree
du parterre. Cependant ces belles figures ne furent
point fculptées par les anciens dans cette intention;
& elles ne rempliffent là cette fonction , que
par le caprice de l’archite&e moderne, qui, en
lés ajuftant ainfi, a dénaturé leur caraôère.
Les canephores étoient des jeunes garçons ou
des vierges qui portoient fur leur tête les corbeilles
deftinées à contenir les chofes néceffaires aux fa-
crifices. Cicéron, dans la quatrième de fes oraifons
contre Verrès, nous apprend que Polyclète avoit
fait deux ftatues de bronze qui repréfentoient des
jeunes filles portant cFes panniers. Canephorez ipfez
vocabantur. On v o y o it, au rapport de Pline , dans
les édifices d’Afinius, un canephore de la main de
Scopas. Les canephores de la Villa Albani pourraient
bien être des copies de celles de Polyclète.
Quoi qu’il en fo it , elles ne feroient pas indignes
de la réputation de ce grand ftatuaire.
C AN IV E AU X , f. m. C’eft ainfi qu’on appelle
les plus gros pavés , qui étant affis alternativement
avec les contre-jumelles , & un peu inclinés
, traverfent le milieu du ruiffeau d une rue
ou d?une cour. ^
Une pierre taillée en caniveau eft celle qui eft
creufée dans le milieu en manière de ruiffeau,
pour faire écouler l’eau. On s’en fert pour paver
une cuifine, un lavoir , une laiterie , un privé,
ou lieu commun, &c*