affez parfaite pour qu’on recônnoiffe les diverfes plantes
qui auront fervi de modèles à l’art. Quoique
celui-ci puiffe y prendre les licences que comporte
ce genre , il nous priveroit cependant d’un des plus
grands plaifîrs qu’on ait droit d’en attendre, fi tous ces
détails n’y étoient pas fournis à la vérité fcrupuleufe
de l’imitation.
Les détails de Y Arabefque font fi nombreux , les
combinaifons qui les modifient font fi variées , que
les préceptes de goût s’y multiplieroient à l’infini. La
plupart étant communs à l ’ornement & à la décoration
, nous renvoyons le îeéteur à ces inots. ( V o y e z
Ornement 6* Décoration. ) Mais l’harmonie, ce grand
principe des a rts, eft celui qu’on doit le plus obfer-
\er dans la compofition , l’éxécution 8c l’agencement
de Y Arabefque. On y diftingue trois fortes
d ’harmonie.
U harmonie des idées : elle corfiftë dans l’imité
de m o t if , dans Tintelligence des détails , le rapport
intelle&uel des parties entr’elles , & le concert de
tous les attributs, de tous les accelfoires qui, diriges
par un feul efprit vers un même b u t , font de Y A ra befque
une efpëce de langage & d’écriture fymboli-
ques»
L ’harmonie des couleurs t elle réfulte d’un accord
Bien entendu entre toutes les parties faillantes , &
les fonds peints de diverfes couleurs de l'amitié
des tons , de l’heureux mélange des ftucs , des bas-
reliefs , des rinceaux & des figures, de la manière
de peindre fuivant le lieu , l’efFet des jours & l ’éloignement
des objets.
L ’harmonie des majfes eft celle qui préfide le plus
'à l’agencement de Y Arabefque : elle confifte à dif-
pofer les formes & l’emploi des parties , de manière
à ne point laiffer appercevoir trop de fon d s , ou à
ne point le cacher trop inégalement- C ’eft de cette
îteureufe entente des lignes que provient l’impreffion
agréable de Y Arabefque fur l’oeil qui ne trouve rien
à déplacer, rien à ajouter. Cette partie dont les rinceaux
antiques nous offrentles plus beaux modèles,
eft la plus difficile,. & la plus rare dans les Arabefques
modernes.
A R Æ O S T Y L E , f, m. C e mot dérive de deux
autres mots grecs vv\oç rare & apcuoç colonne. C ’eft
une des cinq manières d’entrecolonnemens chez les
anciens, & celle qui leur donnoit la plus grande
ouverture. On ne pouvoir point, félon Vitruve ,
h fer dans les aroeoflyles , d’architraves de pierre ou
de marbre, comme on en mettoit autre part 5 & l’on
étoit contraint d’y employer des poutres qu’on éten-
doit fur les colonnes. Cette manière , d i t - il, rend
îfes faces des édifices écartées , pefantes , baffes &;
larges. On a coutume d’orner leurs faîtes de ftatues
de terre cuite ou de cuivre doré , félon l’ufage
T o fc an comme on le voit aux temples de Ceres
& d’Hercule , qui font proches du grand cirque, &
3& capitole qui eft dans la yille de Pojaapeii,.
On voit des exemples de ces architraves en b o is j
aux colonnes du quartier des foldats à Pompeii.
Vitruve ne déterfhine pas précifement la mefure
que doit avoir l’entrecolonnement de l’amojlyle. Eu
fuivant la progreffion des autres fortes d’intercolon-
nations où leur largeur croît toujours dans la proportion
d’un module, Y amojlyle devroit avoir fon
entrecolonnement de trois diamètres 8c demi feulement,
Perrault lui en a donné quatre 5 Rufcovi lui eu
donne plus de cinq , par la raifon que ce grand
écartement dont parle Vitruve , 8c qu’il n’exprimé
que d’une manière vague , femble demander entre
le diaftyle & l’amojlyle une différence plus confide-
rable que celle d’un demi-diamétre. A in fi, en le fixant
à quatre diamètres, il paroît qu’on tient le plus
jufte milieu.
On fait principalement ufage de Yamojlyle dans
l’ordre T ofcan aux portes des grandes villes & des
for ter elfes» (V o y e z Tofcan 8c architeélure Etrufque.
À R Æ O S Y S T Y L E , f. m. manière moderne &
vicieufe d’efpacer les colonnes fuivant le fiftyle 8c
Y amojlyle. Cette méthode nouvelle, inventée par
Perrault confifte à accoupler les colonnes, &' à les
joindre deux à deux , en mettant I’efpace de deux
entrecolonnemensen un. Cette innovation défeéiueufe
a été fortement combattue par le grand Blondel, dans
les chapitres 1 0 , i i & i z de les leçons d’archi—
teélure. ( Voye^ ce qui en a. été dit à l’article Accouplement.
)
A R A S E M E N T , C. m. Çconjïruêlion. ) C ’eft la
furface fupérieure d’une affife de maçonnerie ou de
pierres de taille, difpofée pour en pofer une autre, ou
pour ériger une retraite , une plinthe ou une corniche.
En bonne conftrmftion, il faut que chaque affife
foit arafé'e à niveau dans toute l’étendue de l’édifice,
ainfi qu’on l’a pratiqué à la nouvelle églife dé Ste
Géneviève. Dans les conftruftions de blocage en
petites pierres revêtues de briques ou de t u f , les a n ciens
Romains formoient de quatre pieds en quatre'
pieds un arafement général pour battre leur maçonnerie,
& pour relier les paremens avec le milieu du
mur : ils pofoient fur cet arafemer.t un rang de grandes
briques quarrées de xx pouces. ( Voye{ Maçonnerie.)
A R A S E R , v. aét. ( conjlruélion. ) C e f t conduire de
même hauteur une affife de maçonnerie. On arafe de
niveau, lorfqu’on conduit horizontalement les affifes.
G n dit auffi qu’un lambris de pierre ou de marbre
eft arafé , lorfqu’il n’y a point de faillie, 8c qu’il eft'
comme du parquet.
AR A SE S , f. m. pl. (conjlruélion.) C e font dès pierres
minces qu’on ajoute au-deffus d’autres trop baffes,
pour égalifer le lit fupérieur d’une affife , à l’effet de
parvenir à une certaine hauteur, comme celles d’un
cours de plinthe 8c de cymaife d’un entablement.
A R B R E , f. m. Les arbres ont fourni à l’archi-
ehiteéture üaiffante les foutiens les plus naturels ,,les
plus commodes, & les moins difpendiettx ; & , dans
l ’imitation que les colonnes en ont faite, ils ont prêté a
l’architefture perfectionnée, les moyens de décoration
les plus magnifiques & les pl,us fomptueux. Ainfi de nos
befoins naiffent nos plaifîrs. Les inventions les plus
groffières des hommes encore fauvages, font devenues
lafource des merveilles dont s’enorgueilliffent les fiècles
les plus induftrieux. C e n’eft qu’en reportant encore
l’oeil fur ces types informes, que l’art peut toujours
s’enrichir de nouvelles beautés , ou fe garantir des
abus & des écarts qui déshonorent fes ouvrages ,
lorfqu’il perd de vue fon origine :
I lia vêtus dominis quondam cafa parva duobus
Vertitur in templum , furcas fubiere columim.
Ces deux vers d’Ovide qui expriment la métamor-
phofe de la maifon de Philémon& de Baucis , s’appliquent
fi bien dans un autre fens à l’architeéture qu’ils
lembleut en être devenus la devife 5 ils devroient
toujours être préfens à l’efprit des architectes.
Les colonnes ne fo n t , en e f fe t , dans l’architeCture
Grecque, autre chofe que la repréfentation des arbres.
Telles que foient les raifons dont on ait cherché
à combattre ce fyftême, il paroît , comme on le
verra ailleurs , que la diverfité d’opinion fur ce fu je t ,
• provient de la manie trop générale de vouloir tout
rapporter à une feule caufe j de prétendre ouvrir
avec une feule c le f une infinité de portes , 8c lier a
un principe unique les diverfes inventions des hommes
^ quoique féparés par la diftance des tems ,
8c difperfés fut des régions fans rapport entr’elles.
( Voye1 A rchitecture. ) Ainfi , quoi que les colonnes
puiffent avoir eu des origines très-différentes chez
d’autres peuples , on ne fauroit , fans fe refufer à
l ’évidence , nier que celles des Grecs furent le réful-
tat de l’imitation des premiers arbres qu’on employa
pour fupporter les combles des maifons.
I l eft vrai que l’art changea tellement fes premiers
modèles , . qu’on feroit ten té, à voir fes imitations
libres 8c idéales , d’en méconnoître quelquefois
le type premier. On perd infenfiblement le fil
de cette généalogie qui remonte jufqu’à la Nature.
L a forme primitive que le goût varie fucceffive-
ment , parvient à fe déguifer fous cette foule d’objets
capricieux ou allégoriques qui la font infenfî-
blement’ difparoître. C ’eft ce qui eft arrivé à l’égard
des arbres transformés en colonnes dans l’architecture
Grecque. Les bafés , les tores , les aftragales,
les liftels, les chapiteaux , les volutes , les cannelures
, &c. ont tellement mafqué l’idée originale qui
conftitue la nature du modèle, qu’on a de la peine à
le reconnoître au milieu de tous ces acceffoires. E t ,
- lorfqu’il arrive enfin que, d’imitation en imitation, l’art
lui-mêmç fe dénature ; que les types fe perdent &
.fe décompofent ; il n’eft pas étonnant que , dans la
•confufion de tous les principes, on foit tenté de
les renier tous , & de mettre le hazard à la place de
l ’imitation raifonnée & réfléchie qu’on n’y reconnoît
ylus.
Une autre caufe de difcrédit pour ce fyftême
d’imitation , eft l’abus de raifonnement & l’excès
contraire où ont donné ceux qui le foutiennent le
plus. O11 a voulu voir dans les colonnes l'arbre tel
que la Nature le produit dans les forêts : les chapiteaux
ornés de feuilles ont paru être une imitation
des branches de Marbre. (Voyeç C hapiteau C orinthien.
) On s’eft efforcé de trouver l’origine des
cannelures dans l’écorce des arbres , 8c ainfi de fuite,
par une infinité de rapports forcés 8c d’analogies
fauffes, on en eft venu àdifcréditer &affoiblir la théorie
même qu’on vouloit prouver.
Ou i fans doute , Y arbre eft le type primitif de la
colonne , non pas Y arbre tel qu’il exifte dans les bois,
mais bien Marbre déjà taillé & façonné par la charpente.
Les bafes , les chapiteaux , les cannelures font
également le réfultat des premières inventions & opérations
de la charpente ( Voyeç ces mots ). Qu oi
qu’on trouve dàns les monumens des anciens des colonnes
en forme de palmier , ou décorées de lières,
de pampres , de feuillages & autres objets de ce
genre / i l ne faut confidérer ces ouvrages que comme
des imitations poftérieures de l’a r t , qui a toujours
cherché dans la Nature là fource de tous fes embel-
liffemens , 8c les a appliqués aux colonnes auffi bien
qu’aux vafes , aux candélabres, &c, mais Marbre qui
fervit de modèle aux premiers effais de l’architeétur®
avoit déjà reçu de la charpente la forme de poutre ;
ç’eftdonc dans les premières demeures fabriquées par
la charpente , & non dans les forêts qu’il faut envi-
fager Marbre qui fut le type de l’architedure.
Les arbres , comme le prétend A lg a ro tt i, dûrent
indiquer à l’art, foit par leurs différentes efpèces,
1 foit par la variété de leurs dimenfions en hauteur
& en groffeur, les modes divers de la colonne. Cette
première origine, dont on ne fauroit contefter la vrai-
femblance, n’exclut p o in t, comme le prétend cet
écrivain célèbre , l’application des proportions du
corps humain aux modes de la colonne. Cette application
n’aura pu être , fi on le v e u t , que le fruit
tardif du progrès des autres arts. Rien ne s’oppofe
à cette double origine 5 8c , dans de telles matières
, il ne fa u t , ni vouloir expliquer tout par une
feule raifon , ni vouloir qu’une choie n’exifte que par
mie caufe unique 5 plufîeurs caufes ayant pu enfem-
b le , ou fucceflivement, concourir à une çiême fin.
L a diminution des colonnes paroît vifiblement
avoir pris fa fource dans celle des arbes employés
aux premières conftruétions, 8c Vitruve nous l’apprend
:
Non minus quod etiam nafcentium oportet imitarï
Naturam , ut in arboribus , abiete cuprejfopinu, è qui-
bus tiulla non crajjior ejl ab radicïbus, deinde crescendo
progreditur in altitudinem naturali contraSlum
pemquata nafcens ad cacumen.Vitruve L s* ch. 1.
E t autre part :
Contraélura columnarüm dalla ejl à najcentibus eis
arboribus quce ad radices craffat fenjim fe contrahentex
fajligantur• Philand. L ij