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rante pieds de long. Si l’on en, croit Ray» dans
fan hiftoire générale des plantes» on voyait de
fon temps, en Weftphalie’,plufieurs chênes monf-
trueux, dont un, qui fervoit de citadelle, avoit
trente pieds de, diamètre for cent trente de hauteur.
Charles ' 1er, roi d’Angleterre,. fit abattre un
.chêne prodigieux» dont le tronc fournît quatre
poutres ...chacune de quarante-quatre pieds de long,
fur quatre pieds neuf pouces en quarré. Dans la
mefuré ordinaire, les plus grandes poutres ne
paflènt pas trente-fix à quarante pieds fur deux
pieds ou deux pieds un quart d’équarrifiage. Les
pièces de. cette grandeur panent pourbois de qualité,
& fe vendent fort cher.
Quant à la dureté de fon bois, le chêne a l’avantage
fur tous les arbres qui peuvent fournir d’aufli
grandes pièces. Il eft aufli le plus pefant de tous
ceux de fa taille, celui qui fe conferv.e le mieux à
toutes les intempéries de l’air ; plongé dans l’eau, enfoncé
dans la terre, il eft capable de la plus longue
durée. On dit ordinairement que le chêne eft cent
ans à croître, qu’il fe maintient cent ans, 8c qu’il
eft cent ans à dépérir.
L’expérience a prouvé que lorfque ce bois a
été-coupé dans une faifon favorable, 8c employé
fec & à couvert des injures de l'air, il dure juf-
qu’à fix cens ans,; employé fous terre ou dans l’eau,
il fub'fi'ftë jufqu’à quinze cens ans.
Quant à fa force» il n’a pas moins d’avantage
fur tous les grands bois de conflru&ion. .Sa. texture
uniforme eft également propre à la charpente,
à la menuiferie, à la conftru&ion de toutes les
machines. ‘
Lorfqu’on eft obligé d’employer le bois de chêne
encore verd, on doit avoir la, précaution de le
îaifler. quelque temps dans l’eau, qui diftbut &
enlève, toute la fève ; c’eft le moyen le pJus propre
pour empêcher le bois de fe pourrir & d’être rongé
par les vers. Il faut aufli avoir le foin d’ènlever
toute la partie extérieure» ou l’âubier.
C’eft le nom qu’on donne aux dernières couches
de bois qui .fe font formées dans un chêne , &• qui
n’ont pas encore acquis toute, la folidité dont elles
font fufceptibles. L’àubier.comprend douze à quinze
cercles ou couches Ugneufes, 8c quelquefois vingt-
cinq. Ce bois, qui eft tendre, eft fujet à fe corrompre
aifément ; il craint également la piquure des
vers. Aufli eft-il. défendu aux ouvriers d’employer
aucun bois où il y ait ‘dé l’aubier.
Cependant M. de Buffon a trouvé le moyen
de rendre l’aubier aufli ferme & aufli durable que
Je refte du bois. Ce moyen conflfte à écorcer l’arbre
fur pied. Les Allemands , chez qui les Hollandôis
vont chercher leurs bois dé menuiferie , n’ont pas
d’autre fecret pour leur procurer la qualité qu’ëxige
ce genre d’ouvrage. Les expériences de M. de
Buffon à ce fujet ont donné les réfultats les plus
fètisfaifans. L’aubier des arbres êcorcés & laiffés
&r pied eft devenu aufli dur que le coeur. Le bois
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de chêne étant celui qui produit le plus cfcuibîer'
fe.trouve dans le cas de ne plus éprouver de fi
grands déchets, 8c l’on peut, par cet expédient
profiter de toute la grofleur de l’arbre. 5
Le bois*.de chêne, ainfi que celui de. tous W
autres arbres, varie de pefanteur , de dureté &
de denfité., félon la., nature du climat Sc du ter-
rein où il a crû. La denfité du bois eft toujours
en rapport avec la durée de fon accroiffement. Les
arbres qui croiffent le plus lentement ont toujours
le bois le plus dur, le plus pefant & le plus compare
, par confêquent le plus fort. On ne diftingue
pas d’aubier dans les arbres mous, tels que le tilleul
Le bouleaul’aulne, le ceiba, le baobad ; ou plutôt
le bfiis de ces arbres n’eft qu’un aubier qui n’acquiert
jamais la dureté du bois, parce que. la fubftance-
ligneufe refte. toujours dans, fon premier état fans
jamais fe durcir. C’eft pour, cela qu’ils font fujets
à être rongés des chenilles, des fearabées 8c autres
infeftes qui s’y logent 8 c s’en nourriffent.
Des expériences ' faites fur la force du bois de
chêne, .il r.éfulte qu’elle eft proportionnelle à fa
peianteur ; c’eft - à - dire, que de deux folives de
même bois 8c .de mêmes dimenfions, la plus pe-
fante fera la plus forte.. Cette obfervationiburnit
un moyen facile de connoître, avec la plus grande
facilité, quel eft le fois, qui convient le-mleux pour
la charpente.
La pefanteur du. bois varie dans un même.arbre.
Celui qui eft tiré de.la partie inférieure de-l’arbre^
eft plus pefant que celui du milieu, 8c.celui-ci
pèfe plus que celui du haut de l’arbre 8c -des
branches. Ainfi , lorfqu’il s’agit de choifir une pièce
forte, il faut la tirer de. la .partie inferieure de
l’arbre.
Dans les arbres qui n’ont pas-.aequïs toute leur
croiflance, le bois, pris vers le coeur du tronc, eft
plus dur. que celui qu’on prendroit à. la circonférence.
Selon, les expériences de M. dé. .Buffon,
cette dureté croît en proportion arithmétique. Dans
les .arbres parfaits » ou qui font parvenus à toute
leur croiflance, la .dureté du centre à la circonférence
eft prefque égale,. 8c dans ceux qui commencent
à dépérir, le coeur eft moins dur. que la
circonférence. Cette fécondé obfervation fait voir
combien il feroit avantageux de .ne couper les
arbres que dans le .temps où.ilsx>nt pris„toute leur
croiflance.
La pefanteur moyenne du .bois de chêne dans les
arbres nouvellement abattus eft depuis 70 jufqu’à
74 par pied cube. Pour que ce bois foit propre à
être employé en charpente, il faut qu’il ne pèfe
que 60 à 05 livres. Le plus grand degré de.def-
féchement que ce bois puifle acquérir eft du tiers
dé fon. poids ;, de forte que la. moindre pefanteur
d’un pied'cube de bois de chêne, parfaitement def-
féché , reft de 50. à 53 livres. Le boisAe chêne trop
fec eft oaffant 8c beaucoup moins fort que le bok
des arbres nouvellement coupés. Celui-ci a plus
de force, mais il pliera fous une moindre charge)
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employé dans la charpente, il fera de peu de durée,
& fe corrompra facilement. Celui qui eft moyennement
fec, c’eft- à-dire, qui n’a perdu que le
.fixième de fon poids, eft celui qu’il faut préférer;
il doit pefer de 60 à 63 livres.
Les fibres du bois nouvellement coupé étant
encore remplies de fève, font plus liantes, plus
fortement unies que dans le bois tout-à-fait fec.
Dans ce dernier, elles ont plus de roideur 8c moins
d’adhérence; ce qui fait qu’i l fe fend plus- facilement
8c qu’il rompt tout-à-coup fous une charge
beaucoup moindre que celle que peut porter le bois
verd.
Les fibres du bois moyennement fe«s$, font plus
roides que celles du bois verd, & plus adhérentes
que celles du bois fec. Aufli ce degré moyen de def-
féchement eft celui qui donne le plus de force 8c
dé confiftance, 8c qui convient le mieux à la charpente.'
Dans lès ouvrages dè charpente, les bois agiflent,
tantôt par leur force abfolue, tantôt par leur force
relative. On entend par force abfolue, l’effort qu’il
faut pour rompre un morceau dè bois en lë tirant
par les deux bouts félon là longueur de fes fibres.
La force relative, du b’ois dépend de fâ pofition.
Ainfi, une.pièce de boispofée horifontalement fiir
deux appuis,.fe rompra plus facilement 8c fous un
moindre effort que fi elle étoit inclinée ou debout.
L’effort fera d’autant moins grand, que ces pièces
feront plus longues. L’effort décroît aufli’prefque
en railon inverfe de leur longueur. Ainfi, une
.pièce de 6 pouces d’épaiffeur 8c de 8 pieds de
long,, porte un peu plus du double d’une autre
de 16 pieds.de long de même grofleur. 8c. pofée
dè même.
La force abfolue du bois ne dépend" que dê fa
grofleur. Il faudroit un effort égal pour rompre
deux morceaux de bois de même grofleur en les
tirant par les deux bouts , félon la longueur de
leurs fibres » quoiqu’ils fuflent d’une- longueur
inégale.
Voici le réfûltat dé quelques expériences fur la
force abfolue du boisAe chêne fec pefant 61 livres
le pied cube.
Une petite tringle d’une ligne en- quarré fur deux
pouces de long étant tirée par les deux-bouts, a
porté avant de fe rompre 107 livres.
Une- autre de même -lôngueur. 8c groflêur • s’éft
rompue fous un* poids de 98 livres.
Une autre idem a porré 102 livres ce qui
donne pour-force moyenne entre-ces trois expériences
102 y. m
Une tringle de même -lois' dé'deux* lignes en
quarré fur deux pouces de-long y a porté 407 livres
avant de fe rompre ; une autre- s’eft rompue fous
un poids de 387 livres ; une autre a porté 418 livres :
qui donne pour poids moyen 404 livres, cleft-
a.-dire, ion livres par ligne quarrée.
Une tringle.de même grofleur que la précédente
iùr 8.,pouces de long, s’eft. rompue. fous un poids
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de 405 livres; une autre a porté 421 ; une troifième
400 : ce qui donne pour poids moyen 408 f 8c
10.2 £ pour une ligne quarrée. Ainfi l’on voit que
la longueur du bois tiré par les deux bouts ne diminue
pas fa force. Une autre tringle de même
grofleur fur un pied de long, a porté, avant de
le rompre, 417 ; une autre 395 ; une troifième 408 :
ce qui donne-pour moyen terme 403, 8c 101 ^
pour une ligne-
Une. tringle de même bois de trois 'lignes en
quarré, c’eft-à-dire, de 9 lignes de fuperficie de
bafe fur 8 pouces de long,, a porté , avant de fe
rompre, 9.34 livres;*une autre a porté 908; une
troifième 915 : ce qui donne 919 livres pour poids
moyen, 8c 103 livres - pour celui qu’auroit pu
fupporter une tringle de- même longueur fur une
ligne de fuperficie..
Une autre tringle de même grofleur fur un pied
de long, a porté, avant cle-fe rompre, 917 livres*
Une autre. . . . . • . . 923.
Une autre. . . . . . . . 9 1 1 .
Poids moyen 9 1 7 7 , ^c, à très-peu de chofa
près , 102. livres par ligne fuperficielle.
Une autre tringle de 18 pouces de long fur même
grofleur, a porté, avant de fe rompre-, 917 livres*
Une autre...............................- . 927.
Une autre. . . . . . . . . . . 913»
Poids moyen 919 8c 102 ^-pour chaque
ligne fuperficielle.
Il réftilte de ces expériences, que la force abfc-
lue du bois dê chêne eft d’environ 102 livres par
ligne fuperficielle de fa grofleur.
L'a force des bois pofés debout'qtirfupportent un.
fardeau n’eft pas feulement proportionnelle à leur
groffeûrmais encore à leur hauteur ; enforte qu’une'
pièce de 6 pieds de haut fur 6 pouces en quarré ,
fnpportera beaucoup plus qu’une autre de même
grofleur qui auroit 12 pieds de haut. La raifon
félon laquelle cette force décroît, eft prefque la
même que celle des bols pofés horifontalement fur
deux appuis.
Une tringle dê bois de chêne d’un pied dé haur
for 6 lignes en quarré de grofleur, c’eft-à-djre,,
36' lignes de fuperficie de bafe , pbfée cfà-plomb
lelôn la dire&ion de fes fibres, a porté, avant de
fe rompre.- . ’ . ......................... ..... 230.livres*,.
Une autre idem. . • . : ' ► . . 223',
Une autre idem. ..........................232:
Ce qui donne pour poids moyen. . 228 j-i-
Une autre tringle de même grofleur 8c pofée de -
même qui avoit 2 pieds de haut, s’eft rompue fous"
un? poids de. . . . . . . . . . 115 livrés*.
Une fécondé fous un* poids, de. .118;»
Une. troifième fous un poids de. . 121. -
Trois autres tringles de même grofleur-8c dé?"
3';p.ieds.de-haut pofées de même, fe font rompues ;;
(avoir, la première-fous un poids de 70-riivres.s-
La fécondé de. . . . . „- . . 74..
La troifième de. .............................. fyi*- '
Ce. qui donne - pour poids moyen. -. - 724^ •