ils font encore faits fur d’autres dimenfions St toujours
plus grands.
Il î'ercit à fouhaiter que ces millionnaires ne
fe fufient pas bornés à exciter notre curiofité fur
l’architeftiire de ces temples, St eufient mieux fervi
la gloire de leur pays , en nous envoyant quelque
description accompagnée du plan de ces monumens.
A leur défaut, Chambers va nous donner des détails
allez fatisfaifans des temples de Canton.
On voit, dit cet écrivain, dans cette ville, un grand
nombre de temples que les Européens appellent
communément des pagodes. Plufieurs font extrêmement
petits, & né confident qu’en une feule
chambre. Quelques autres ont une cour environnée
de galeries, au bout defquelles fe trouve un
ting où les idoles tfont placées. Il y en a enfin un
nombre qui font compofés de plufieurs cours environnées
de galeries. Les bonzes y ont des cellules
; St les idoles diverfes fales. Ce font proprement
des couvens.
La plus confidérable de ces pagodes ed celle
de Ho-nang, dans le fauxbourg méridional ( voyt\~
en le plan ,figJ 366 ) ; elle occupe une grande étendue
de terrein : aufii renferme-t-elle., outre les temples
pour les idoles , des appartemenst pour deux cens
bonzes, des hôpitaux pourv plufieurs animaux, un
potager fpacieux & un cimetière. Les prêtres 8c
les animaux y font enterrés pêle-mêle 8t honorés
également par des monumens & par des épitaphes.
Le premier objet qui fe préfente, ed une cour
très-étendue. Il s’y trouve trois rangées d’arbres qui
mènent à un vedibule ouvert A , où l’on monte
par un degré B.' De ce premier vedibule vous
paflez à un fécond G , où il y a quatre figures co-
lofîàles de duc. Elles font aflifes & tiennent dans
leurs mains divers emblèmes. Ce vedibule s’ouvre
dans une autre grande cour.D, environnée de
colonnades E, & de loges pour les bonzes F. Quatre \
pavillons G y font placés fur des focles. Cës pavillons
font les temples. Les deux étages dont ils
font compofés font remplis d’idoles, et les bonzes
y font leur fervice religieux. Aux quatre coins de
la cour fe trouvent quatre autres pavillons H , où
les bonzes fupérieurs ont leurs appartemens ; &
fous les colonnes, entre les loges, il y a quatre falles
Io c cu p é e s par des idoles.
Des deux côtés de la grande cour ori en voit
deux petites K , environnées de bâtimens.- L’une
ed pour les cuifines L & pour les refeâoires M.
L’autre fert aux hôpitaux N , dont on vient de parler
.L
es pavillons font de diverfes formes ; mais aucun
ne diffère beaucoup de celui qu’on voit fig. 367 ;
les proportions entre les colonnades & les pavillons
font aufli à-peu-près les mêmes. Les loges
des bonzes- font de maçonnerie ; elles font fort petites
& ne reçoivent de jour que par la porte. Les
corps des pavillons font faits des, mêmes matériaux
, & les colonnes qui les environnent, aufli bien
que celles des colonnades -, font de bois Si. ont des
baies de marbre. Tous les bâtimens font convertis»
de tuiles, qui font une efpèce de porcelaine; groflière,
peinte en verd & verniffée.
La même difpofition s’obferve dans tous les
temples de ce genre, & f i l’on en détache les trois
pavillons qui occupent le milieu de la grande cour,
on pourra fe former une idée de la diflriburion qui
a lieu dans tous les édifices chinois d’une grande
étendue. Le palais impérial, ceiix des princes du fang,
les palais des mandarins 8t les kong-quaen ou
collèges des lettrés, font tous difpofés à-peu-près
de la même manière. La principale différence con-
fifle dans le nombre & dans l’étendue des cours.
Les édifices dont les Chinois fe fervent pour leur
culte facré, n’ont point > comme ceux des Grecs ,'des
formes qui leur.foient bien particulières. L’efpèce
de confiruâion qu’ils nomment ting ou Kong, entre
indifféremment dans toutes fortes d’édifices. On
en voit dans prefque tous les temples , dans tous
les palais, fur les portes des villes , & enfin dans
prefque tous les bâtimens où l’on a voulu montrer
de la magnificence.
Tings de dhverfe forme. On voit dans divers quartiers
de Canton quatre différentes efpéces de tings.
Les trois premières fe trouvent dans des temples,
St la quatrième dans plufieurs jardins. La forme
la plus commune dans les temples fe voit à la
fig- 367. C’eft une copie à-peu - près exaéle du
ring de la pagode de Cochinchiné, dans le faux*
bourg oriental.
Dans-le deflin qu’on voit {fig. cl-dejjus ) , l'édifice
eft, comme ils le font tous, élevé fur un fou-
baffement : on y monte par trois efcaliers. C’efl
un quarté environné d’une colonnade de vingt colonnes
, lefquelles foutiennent un toit furmonté
d’une baluftrade de bois, qui renferme une galerie
ou paffage régnant tout autour de fécond étage.
Le fécond etage a la même figure & les mêmes
dimenfions que le premier. Il eft couvert d’un toit
dont la conftruâion eft, comme on l’a- v u , particulière
aux Chinois. La longueur de l’édifice e ft, à
le mefurer de la furface extérieure des colonnes,
égale à la hauteur , & le diamètre du corps de
bâtiment prend les deux tiers de la largeur. La
hauteur de l’ordre - fait les deux tiers du diamètre
du corps, & la hauteur du fécond étage a les deux
tiers de la hauteur du premier. Les,colonnes ont
en hauteur neuf de leurs diamètres. Les bafes en
ont deux , & les bafes ou confoles qui tiennent
lieu de, chapiteau, feulement un.
La fécondé efpèce de ring diffère fi peu de celle
qu’on vient de décrire , qu’il paroît peu néceflaire
d’en donner le deffeinXe premier étage eft le même,
& toute la différence du fécond, c’eft qu’il n’eft
environné ni de galeries, ni de baluftrades, & que
le toit qui couvre la- colonnade vient aboutir à la
muraille.
La troifième ’efpèce fe voit à la fig. 368 ; ca
deflin a été tiré de divers édifices de ce genre, &
fur ~ tout de l’un des pavillons de la pagode dej
Ho-nang. Il ÿ a peu de différence entre les proportions
de ce deflin 8t celles du précédent. Les
colonnes du premier étage ont en hauteur huit
de leurs diamètres 8t les bafes un. Toutes cès co-
I onnes, à la réferve de celles des angles, ont ,en haut
de leur fût huit confoles. Cet ornement, dont on
a rendu raifon en expliquant le fyftême de la
charpente chinoife, n’a rien d’agréable aux yeux.
Les colonnes du fécond ordre ont environ de diamètre
les quatre cinquièmes de celui du premier.
Leur hauteur eft de fix diamètres & demi,& elles
font fans bafe. Sous le fécond toit, circule un en-»
trelas régnant, tout autour St compofé de cerchs
& de quarrés. Les angles des deux toits font enrichis
d’ornemens qui repréfentent -des monftres ôt
des feuillages : le haut eft ,orné dans fes extrémités
de deux dauphins ; au milieu s’élève un grand
fleuron qui reffemble à une tulipe. f
Ces trois formes. fe rencontrent plus fréquemment
quaucune autre dans les temples de la Chine ,
fur-tout dans ceux qui ont beaucoup d étendue.
On fe fert fouvent, pour les petits, du deflin qu on
voit (fig. 369). Quelquefois l’édifice eft fermé, fur
le devant, de portes mobiles, avec quatre colonnes
qui s’avancent à la manière des temples proftiles
grecs ; d’autres fois le bâtiment eft tout ouvert de
front, & a Amplement quatre colonnes qui foutiennent
le toit.
Il y a à Canton quelques autres figures de temples,
mais qui ne méritent ni de fixer l’attention, ni d in-
térefler la curiofité. Il" faut excepter cependant deux
petits bâtimens de bois, élevés dans les cours d une
des pagodes du fauxbourg occidental.- Les ƒ g. 370
St 37\ en offrent les deflins. Ce font deux pavillons
qui couvrent deux vafes de fer dont les Chinois
fe fervent pour les facrifices de papier doré, qu ils !
font à leurs idoles, dans les jours de fête. L un &
l’autre font o&ogones & compofés de huit colonnes ,
qui foutiennent un petit toit furmonté d une lanterne
St d’autres ornemens, dont on peut voir le goût
St la forme aux figures ci-defliis. La fig. 370 eft un
peu relevée & environnée de degres ; les colonnes
ont des bafes peu différentes de celle que nous
nommons attique. Une forte de frife, chargée d’inf-
çriptions en grands caractères chinois, fait lè tour
des entre-colonnes fous le toit. La lanterne eft. a
huit faces ; elle eft couverte d’un toit recourbé; la
fig. 371 eft élevée fur un focle St entouree d’un_
en trelas de maçonnerie. Il n’y a point de bafe aux
colonnes, St fous le premier toit on voit un ornement
compofé de lofanges entrelacées. La lanterne
a huit petites colonnes, fans bafe ni chapiteau,
qui foutiennent un t-oit conique', orné de huit dau-
: phins, dont-chacun répond à une-des colônnes.
Les tours. Les Chinojs, comme on le dira plus -
bas, donnent plus d’un nom différent à leurs tours ,•
St. les Européens les appellent aufli des pagodes ;
elles font très - communes à la Chine. Le P. du
Halde dit que dans certaines provinces/toutes les !
yilles en ont, ôc^jufqu’aux bourgades un peu confidéfables.
La plus fàmeufe eft cellede la ville de Nan-kin,
dans la province de Kiang-nan. On l’appelle communément
la grande tour, ou-la tour de porcelaine.
Voici la defeription qu’en a donnée le P. Lecomte.
. « Cette tour eft de figure oftogone, large d’en-
viron quarante pieds, de forte que chaque face en
a quinze; Elle eft environnée d’un mur de même
figuré, éloigné de deux toifes & demie, & portant,
à une médiocre hauteur, un toit couvert de tuiles
verni Afées, qui paroît naître du corps de la tour, &
qui’ forme au-deffous une galerie affez propre. La
tour a neuf étages , dont chacun eft orné d’une
corniche de trois pieds à la naiflance des fenêtres,
& diftingué par des toits femblables à celui de la
galerie, à cela près qu’ils ont beaucoup moins dé
faillie, parce qu’ils ne font pasfoutenus d’un fécond
mur ; ils deviennent même beaucoup plus petits a
mefure que la tour s’élève & fe rétrécit
» Le mur, au rez-de-chaulfée, a douze pieds d’é-
paiffeur, & plus de huit & demi par le haut II eft
tnerufté de porcelaines pofées de champ. La pluie
& la pouflière en ont diminué la beauté ; Cependant
il en refte encore affez pour faire juger que c’eft
de la porcelaine, quoique allez groflïère ; car il y
a apparence que la brique, depuis trois cens ans
que cet ouvrage dure , n’aüroit pas confervé le
même éclat.
„ L’efcalier qu’on'a pratiqué en dedans eft petit
& incommode , parce que les degrés en font extrêmement
hauts. ' Chaque étage eft formé par de
groffes poutres mifes en travers, qui portent un
plancher , & qui forment une chambre dont le
lambris eft enrichi de diverfes peintures. Les murailles
des étages fupérieurs font percées d’une infinité
de petites niches, qu’on a remplies d’idoles
en bas-relief ; ce qui fait une efpèce de marque-
tage très-propre. Tout l’ouvrage eft doré & paroît
de marbre pu de pierre -cifelée ; mais je crois que
ce n’eft en effet qu’une brique moulée ou pofée de
champ ; car les Chinois ont une adreffe merveilleufe
pour imprimer toute forte d’ornemens dans leurs
briques, dont la terre, extrêmement fine & bien
faffée, eft plus propre que la nôtre à, prendre les
figures du moule.
»Le.premier étage eft le plus élevé, mais les
autres font entre eux d’une égale-diftance. J’y ai
compté cent quatre-vingt-dix marches, prefque
toutes de dix bons pouces, ce qui fait cent cinquante
huit pieds. Si l’on y joint la hauteur du
maflif, celle du neuvième étage, qui n’a peint de
degrés, & le couronnement, on trouvera que la
tour eft élevée, fur le rez-de-chauffée , de plus de
deux cents pieds.
„ Le comble n’eft pas une des moindres beautés
de cette 'tour. C’eft un gros mât qui prend au
plancher du huitième étage, & qui s ’élève de plus
' de trente pieds, en dehors. Il paroît engagé dans
une large bande de fer de la même hauteur, toufnée
en volute, & éloignée de plufieurs pieds de l’arbre ,
I de forte qu’elle forme en l’air une efpèce de cône