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■ D e -la décoration des. coiffons,
La peinture ,& la fculpture concourent également
à la décoration des coiffons , & y prodinïent
des effets auflî agréables que riches. Tantôt ces
deux genres d’ornemens s’y trouvent réunis, tantô
t ils y figurent fèparément.
O n emploie les plus belles couleurs dans le
champ des coiffons, & foiivent on admet dans
la décoration, de chacun d’eux des nuances différen
tes; c e qui produit une variété de couleurs
agréable à l ’oe i l , mais plus Convenable aux plafonds
arabefques qu’aux compartimens réguliers
de l’architefture.
Les anciens & lès modernes y ont auflî fréquemment
admis la dorure. L ’on trouve encore
des. coiffons dorés dans plusieurs reftes d’édifices
romains. A u x bains de Lîv.ie, à la vifle des empereurs,..
4 e laps des fîècjes & l ’humidité n’ont
pu obfcurcir l’or dont ces. compartimens de plafonds
briliojent avec le plus grand éclat. C e genre
de décoration exige la riçheffe des marbres & tout
le lux;e dps matériaux dont l’architeéiure eft fuf-
çeptible. Il eft trè's-commun en Italie. Le plus
grand cc le- plus bel exemple qu’on puiffe en citer*
eft- la voûte, de. l’églifq de S. Pierre.
La peinture figure .encore dans les coiffons ,
comme imitation.de la fculpture qu’elle remplace,
& dont, elle, donne à peu de frais l’équjvalent.
Souvent même elle, y arrive à un degré d’ilîu-
fton qui ne permet pas de s’appercevoir de la
fupercherie, ou qui laiffe peu de regrets à l’ceil
de'ceux qui.en font inftruits, Rien ne prête plus à
la téduftionde la peinture d’ornemens, que la forme
des coiffons, op les renfoncemens effeéifs de l’ar-
chiteAüre préparent l’oeil du fpeftateur à croire réel
ce qui n’eft que fiéiif. D ’ailleurs, ces ornemens
peints ffétant pas fi fujets à la variation des points de
vue.,, l’effet des clairs & des/ombres. étant fîx:é
par l’ouverture , des croifée^ & .d e s jours , cegenre
d’imitation réuflît ordinairement b ien , & s’em-
ploieroir plus fou v e n t , -fi la peinture pouvoit avoir
la durée de la fculpture.
Mais dans les monumens publics , dont la foli-
dité doit faire un des principaux m érites, on exige
que toutes les parties & tous les détails d’orne-
îuens y aient une réalité de folidité'que la fcul-
ptpre feule peut donner. À in f i, les ornemens. des
coiffons feront entaillés dans la pierre même &
le marbre, ou ençaftrés ,& .moulés en ftuc dans
les édifices. J e brique & de maçonnerie , ou.rapportés
en bronze comme l’étoientceux du Panthéon.
( Voyti Br o n z e ).
Les ornemens que la fculpture fait entrer dans
la décoration des cajffo/is, font très-variés : le goût
de l’architefte décide.ffeul de leur choix ; ce
ch o ix.d o it dépendre d u c ^ f t è r e des, plafonds
de celui de l’édi^cç .auxquels ils fervent, de cou-,
vértqrp, L^ partie-djes?chiffons fufceptibJé ; -d’orner
Rçifiéhs eft d’abord le fond qui fe remplit ordi-'
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■ fiairement d’une ro fa c e , efpèce de fleuron affefté
particuliérement à cet o b je t , & auquel la fculpture
donne des formes très-différentes. ( Voyo
R ose & R o s a c e ). O n obfervera que la roface
doit être proportionnée à la largeur du c ai (Ton &
ne jamais excéder en faillie la hauteur du renfoncement.
Dans les coiffons antiques elle eft toujours
inférieure en hauteur au niveau des folives.
C e milieu des coiffons reçoit encore d’autres ornemens.
Il n’eft pas rare, fur-tout dans l’arabefque,
de le voir occupé par de petites figures ; & dans
plufieurs monumens antiques, fur-tout à Palmyre,
ce milieu eft rempli par des huiles. O n voit un
caiffon de cette fo r te , en marbre, parmi les débris
de la falle des. antiques cfii Louvre. Il eft circulaire
& femble avoir fervi de milieu aux compartimens
d ’un,pla fond.Au refte , le fond des caifform
peut r e c e v o ir , fans aucune difconvenance, des
attributs de toute e fp è c e , des figures allégoriques,
des mafearons, des: patères, enfin tous les objets
dont fe compofe l’ârt de l ’ornement, & dont le
choix fait avec intelligence, pourra fervir à ca-
raâérifer les édifices.
L ’on admet des ornemens..en fculpture, foit aux
angles des plates-bandes!ou fo liv e s , foit aux angles
des degrés qui forment le renfoncement des coiffons.
Ces ornemens, doivent- être légers ; ils détachent
les degrés les uns des autres, & ne doivent produire
que de la variété , fans introduire de la
confufion. D es o v e s , des rais de coeur , des feuilles
d’eau fuffiront à cet effet.
Les plates-bandes ou les folives qui fervent
d’encadrement-aux coiffons-, font auflî fufbeptibles
d’être ornées par la fculpture. I l devient inutile d’avertir
que cette partie des plafonds, eft celle qui
demande le -p lu s de réferve & de fobriété. Le
propre de l’ornement, en fculpture fur-tout, eft
d’affoiblir, d’atténuer les parties fur lesquelles il
fe tro u v e , comme auflî de déguifer les membres
effentiels de la conftruéfion & d ’en faire difpa-
roî.tre les types çarà&ériftiques;. O r , on conçoit
fans peine que le vui.de formé par la rencontre
des folives , offre, à l’ornement un champ où il
peut s^exercer en toute liberté fans bleffer aucune
convenance , & déployer fes reffources
fans altérer aucune des formes conftitntives de la
foîidité dans,les plafonds. Il n’en eft pas d,e même
des fo liv e s , _dpnt l’ornement doit refpe&er l’intégrité
; autrement, le plafond ne paroîtra plus un
çompofé de folives , mais une compofition de
découpures. C ’eft bipn ce que nous repréfentent
quelqiiesruns des plafonds de Pa lm y re , où l’archi-
teélure femble avoir r é u n i, fous l’apparence des
formes les plus ingénieufes, tous les exemples
du mauvais goût & des puérilités qu’on fuppor-
teroit à peine dans l’arabefque.
Bien: des, arç’qjteéles, je, le fais , ont pris le
change çe,f objet. Iis n’ont confidéré les folives
qui environnent le. caiffon, que comme l’encadrement
d’un tableau ; & d’après ce point de vue
faux
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faux & ca ptieu x, ils ont cru pouvoir fe permettre
toutes les licences de décoration qu’on admet
dans l’ornement d’une bordure.
Je ne penfe pas qu’il foit néceffaire de réfuter
line opinion que la .nature des chofes réfute d ’elle-
piême; mais, à ne confidèrer encore l’enc.dre-
tnent du. caiffon que comme la bordure d’un tableau
,,le goût fei 1 indiqueroit dans la décoration ,
la fageffe & la ftmplicuédonr on a vu que l’efpritde
la conftruéhon faifoit line loi. On ne disconviendra
pas fans doute que le ca d re , qui n’eft que
l’acceffoire, doit le céder en riçheffe à l’objet
encadré, fur-tout ft le tableau eft lui-même de
k même matière que fa bordure ; autrement ils
s’entre-détruiront l’un & l’autre. T o u t nous dit
donc que les pleins des plafonds doivent être tenus
liffes pour repréfenter les folives ; que ces pleins
doivent être tenus liffes pour faire valoir & laiffer
briller les richeffes des coiffons; que ces pleins
doivent être tenus liffes pour donner du repos
à l’oeil & de la grandeur aux plafonds, qu’une
trop grande divifion de parties & de détails rape-
tiffe néceffairement.
Cependant les plus beaux monumens nous offrent
des exemples d’ornemens introduits fur ces pleins:
& peut-être eft-il des cas où l’on ne fauroit les
rejetrer. L’harmonie d’une ordonnance généralement
r ich e , peut en exeufer l’admiflion. Mais
alors on obfervera de les tenir légers & fubor-
donnés par le d e flîn , la faillie & la riçheffe aux
ornemens voifins. Sur-tout on fe gardera d’y pratiquer
des renfoncemens qui détruiroient la forme
& lidée d’intégrité & de foîidité que requièrent
les folives ou leurs repréfentations. Les efpaces
que 4a forme des coiffons exagones ou o&ogones
laiffenr dans les pleins, fe rempliffent quelquefois ,
comme on l’a v u au temple de la P a ix , par une
efpèce de petit caiffon qu’on a remarqué avoir
été très-prudemment tenu peu renfoncé. Je penfe
que fi cet efpace e x ig e , pour l’accord de la décoration,
un ornement qui en rempliffe le m ilieu ,
il vaudra mieux le tenir en fa illie , que de le
renfoncer, fi légèrement que ce fo it, & cela pour
éviter l’équivoque & les conféquences dangereufes
qui peuvent en réfulter.
Dans la difpenfation des ornemens applicables
aux coiffons, l’on doit fuivre encore la progref-
fion de riçheffe & de caraâère que comportent
les ordres. Le d orique, qui tire fa beauté de fa
force, indique la plus grande fimplicité d’orne-
mens ou le choix des plus mâles, lorfqu’on en
admet dans fes coiffons. L’ ionique plus recherché
que riche dans fa parure , demande , en ce genre ,
de l’élégance & un certain milieu entre le luxe
& la fimplicité. C ’eft dans les plafonds corinthiens
que toute la magnificence de la décoration peut
le déployer.
La mefure de richeffes convenables à ce genre
116 »auroit être fixée que par le goût & l’imitation
des monumens antiques. Il n’en çft pas ainfi de
'4rchitettucee Tçme J,
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la nature des ornemens qu’il comporte. Il eft pour
cet objet une règle qu’on ne doit jamais perdre
de v u e , & qui eft elle-même la conféquence de-
toute cette théorie ; c’eft de ne jamais admettre
dans la décoration des coiffons que des objets dont
on peut fuppofer la réalité poflible dans la charpente
même. Je m’explique.
Si l’on confîdère les coiffons antiques , on n’y
vo it d’autres ornemens que ceux qui peuvent fe
fuppofer fculptés dans les folives elles-mêmes,
ou appliqués & attachés de la manière la plus naturelle
au fond du caiffon 8t rien en cela n’outre-
paffe les mefures de la vraifemblance. Les mo*
d e rn es, au contraire, ont porté l’excès de la fan-
taifie jufqu’à y introduire des figures grouppées
dont on ne peut fuppofer d’aucune manière l’exif-
tence ni l’application poflible. C ’eft fur-tout dans
les coiffons en ftuc qu’on s’eft permis le plus de
ces fortes de caprices : la compofition de ce tte
matière & les reffources induftrieufes que rem ploi
des tenons de fer permet d’employer en ce
g en re , juftifieroient mal les écarts en queftion. Si
dans l’architeéhire on n’admet point les illufions de
légère té, & ft cet art exige que l’apparence de
la foîidité fe joigne encore à la réalité , ■ c’eft bien,
fans doute dans les ornemens dont je parle qu’on
doit faire valoir ce principe. T o u s ces acceffoires
fufpendus en l’air joignent à la réalité du danger
l ’apparence la plus menaçante ; & tout par con-
féquent fe réunit pour les proferire, fi le goût
feul ne fuffifoit pas pour en faire comprendre l’ab-
furdité.
A in f i , comme on l’a v u , la forme des coiffons
eft inipérieufement preferite par l’efprit de la charpente
, que l’archite£ture s’ eft approprié ; & toute
configuration qui fort des formes lira pies étant
contraire à l ’efprit de la charpente, l’eft auflî aux
lo ix de l’archite&ure. D e m êm e, toute décoration
dont le motif s’éloignera d ’une compofition
régu lière, contredira les bienféances qu’exige cette
partie des plafonds, & offrira le démenti le plus
choquant entre les convenances de la néceflité
& celles du plaifir.
C aisson a renfoncemens. C ’eft celui qui eft;
formé de deux ou de trois deg rés, qui v o n t ordinairement
en diminuant d’èpaiffeur & de largeur
à mefure qu’ils approchent du fond.
C aisson a rosace. Caiffon dont le fond eft
occupé ou rempli par une roface ou fleuron.
C aissons en compartimens. C e font ceux
dont les lignes s’entre-mêlent & forment une efpèce
d’ entrelas : ce genre ne convient & ne fe tolère
que dans les décorations arabefques.
C aisson polygone. O n appelle ainfi les caif-
Jonsfo rmés d’une réunion de plufieurs lignes droites.
O n en fait d’exagones & d’oftogones. Tels lont
ceux du temple de la Paix à Rome.
C aisson simple. C ’eft celui qui eft q u a rré,
qui n’eft formé que d'un feul renfoncement & où
l’on n’a point taillé d’ornemens.
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