quarrée ou re&angulaire, voûtée en berceau. Cependant
comme l’eau tend à détruire plus facilement
les angles, on a coutume de les renforcer
par des arrondiflemens. Mais fi l’on fait attention
que les citernes font pratiquées fous terre, & que
plus elles font profondes, mieux elles confervent
l ’ea u , on avouera que la forme la plus convenable
eft la circulaire, comme la plus propre à réfifter
à la prefEon des terres environnantes, & la moins
fujette aux dégradations intérieures. Quant à leur
fituation, il fau t , autant qu’il eft pofîible, la choiûr
fous des endroits couverts , pour que les voûtes
foient moins expofées à être dégradées par les eaux
pluviales qui filtrent au travers des pavés & des
mafîifs qu’on pratique au-defîiis, lorfqu’on n’a pas
apporté à ces ouvrages la plus grande attention. S’il
îi’eft pas pofîible de les placer fous des lieux couverts
,- il faut éviter les exportions au foleil & le
voifinage des cloaques & d’autres lieux qui exhalent
une mauvaife odeur, fans quoi l’eau n’en fe- ~
roit jamais bonne. V o ic i à ce fu je t , une expérience
de M. de la H ir e , extraite d’un mémoire lu à
l’académie en 1703.
« Mais il y a d’autres eaux de pluie qu’il faut
foigneufement rejetter des dûmes. Depuis plufieurs
années je tiens un regiftre exact de la quantité d’eau
de pluie qui tombe a l’obfervatoire de Paris, au
fujet de l’origine des fontaines. T ai fait faire pour
cet effet une efpèce de cuvette plate de fer-blanc
bien étamée & carrée, de 4 pieds de fuperficie, avec
des rebords de 6 pouces , enforte que l’eau de
pluie qui tombe dans cette cuvette qui eft expofee
à l’air & qui eft un peu en pente vers l’un de fes
angles , coule aufîi-tôt par un petit tuyau qui eft
en cet endroit , dans un vaifteau placé au-deffous ;
& toutes les,fois qu’il p leu t, je mefure l’eau qui
eft tombée , dans un vafe de liqueur cubique, q u i,
étant plein j vaut une demi-ligne de hauteur d’eau
fur la fuperficie de la cuvette. J’ai fouvent ramaffé
de cette eau pour en boire & pour reconnoître
quel goût elle a par rapport à celle d’Arcueil ou
de Rungis, qui en la principale de celles qui viennent
à Paris ; & je n’y avois jamais remarqué qu’une
petite faveur de terre ou de limon ; ce qui eft commun
à toutes les eaux de pluie. Un jour je fus
fiirpris que cette eau eût un goût très-fort de fumée ;
je recherchai aufîi-tôt quelle pouvoit avoir été
Toccafion de cette odeur ; je ne pouvois foup-
çonner la fumée 'des cheminées du lieu où je fu is }
car elles font fort éloignées de l’endroit où eft la
cuvette, & de plus elle eft placée bien plus bas,
enforte qu’il n’y a point de fumée qui unifie en
approcher : mais comme je marque aufti les vents
qu’il fait pendant toute l’année, je connus qu’elle
étoit la véritable caufe de cette odeur : car la pluie
qui me donna cette eau enfumée étoit venue avec
un vent d e .n o rd , ce qui eft aflez extraordinaire,
attendu qu’ il pleut rarement de ce v e n t , & c’eft
aufti pourquoi je n’a vois encore rien remarqué de
femblable : & comme Paris eft au nord de Pobfervatoire,
je ne fis aucun douté les furtiêès
de la ville en s’é lev an t, s’étant mêlées avec de
l’eau de la p lu ie , avoient été enfuite portées par
le vent au lieu où j’ étois ».
A Paris, où les filtrations des fofles d’aifance
emp^oifonnent prefque tous les terreins environn
a it , il vaut mieux placer les citernes au rez -d e-
chauffée , à 5 ou 6 pieds d’élévation au-defîus du
f o l , afin d’en tirer plus facilement l’eau.
Cette citerne, ou plutôt ce réfervoir, pourroit être
conftruit en charpente, revêtu en plomb à l’intérieur
, avec un toit au-defiùs ; il recevroit' l’eau
des toits , purifiée par le moyen d’un tuyau de
defcente en poterie, rempli de g ra v ie r, au travers
duquel l’eau fe filtreroit ; on pratiqueroit à la
hauteur des toits, à l’endroit où toutes les eaux
viendroient fie rendre, un premier réfervoir couvert
d’un grillage de fer très-ferré, où s'arrêteraient
les plus grades ordures. C e grillage pourroit ■ fe
lever pour nettoyer le réfervoir dont le fond feroit
garni de gros fable , qu’on pourroit renouvelier de
temps en temps*
Des differentes maniérés de cojiflruire les citernes.
Les ouvrages de ce genre conftruits par les
Romains, ont une perfection qui devroit engager
à les prendre pour modèle. La plupart de leurs
citernes, conferves d’eau & réfervoirs qui exiftent
depuis 15 à 20 fiècles, font encore en état de
fervir aux mêmes ufages. Les enduits dont ils font
revêtus, ont acquis une ténacité & une confiftance
plus forte que les pierres les plus dures. Les eaux
qui ont féjourné dans la plupart de ces réfervoirs ,
ont dépofé fur leurs enduits une efpèce de croûte
pierreufe plus dure que le ciment qui eft deflbus.
Plufieurs perfonnes ont cru que c’étoit une légère
couche d’un ciment particulier aux Romains, dont
on ne connoifloit plus la compofition. Mais depuis
on a reconnu, par la texture & f analyfe de
cette matière, que ce n’étoit qu’un dépôt pierreux
formé par les e a u x , comme Celui qui fe trouve
dans les tuyaux de fontaine. C e dépôt, bien loin
de nuire aux enduits bien fa its , les durcit & les
pétrifie , pour ainfi dire.
V it r a v e , Lîv. v i n , dit que dans les endroits
où il n’eft pas pofîible de creufer des puits ? ou
lorfqu’après les avoir creufés il ne fe trouve point
d’e a u , il faut recueillir celle qui tombe des toits
ou des lieux élevés, pour la conferver dans des réfervoirs
fouterreins, conftruits à la manière Jîgnienne ;
ce qui fe pratiquoit ainfi :
O n fie procurait le fable le plus pùr & le plus
rude, de la chaux trè s -vive, c’eft-à-dire, . fortant
du fourneau; on prenoit cinq parties de ce fable
& deux de chaux ; après que ce mélangé étoit bien
b r o y é , on y àjoutoit une quantité fuffifarite de
petits cailloux ou de pierres dures brifées, de façon
que les plus gros morceaux ne pefoient pas plus
d’une livre romaine , c’e f t - à - d i r e , douze onces.
Pour former les murs de la citerne, ôn creufoit
fies tranchées parallèles & d’à-plomb de la largeuf &
profondeur que dévoient avoir ces murs ; on les
reinpUflbit de ce mélange de chaux , de fable & de
cailloux bien b ro y é s , avec une fuffifante quantité
d’eau ; ce qui formoit une efpèce de béton que
l’on battoit avec des pilons ferrés.
Ces murs étant a ch ev és, on vuidoit la terre du
milieu; & fur le fond bien éga lifé, onfàifoit avec les
mêmes matières un maflïf d’une épaifleur convenable
, que l’on avoit foin de bien battre.
Pline le naturalifte, qui a copié Vitruve dans
tout ce qui a rapport à l’art de b âtir, répète a-
peu-près la même ehofe au 23e chap. du 36® liv.
Toutes les citernes & réfervoirs antiques bâtis par
les Romains, paroiflent avoir été conftruits comme
le dit Vitruve. Les murs font en maçonnerie de
blocage revêtus à l’intérieur d’un fort enduit, fait
avec un mortier compofé de chaux , fa b le , pouzzolane
ou ciment broyés enfemble , appliqué fur le
mur & bien maffivé.
Les modernes conftruifent les citernes de plufieurs
manières différentes ; i° . en pierres de taille ;
s.0, en moellons ou en briques, avec un enduit de
cimen t; 30. en béton ; 40. en terre glaife, avec
des revêtemens en moellons ou en briques, & quelquefois
fans revêtemens.
Lorfqu’il s’agit de conftruire une citerne, foit en
pierre de ta ille, foit en moellons ou en briques,
il fau t , après avoir fait l’excavation nécefiaire,
examiner fi le fond eft aflez folide pour foutenir
par-tout également , le poids de la conftruétion
que l’on veut faire ; car cet ouvrage ne doit former
qu’un tout parfaitement lié , pom etre impénétrable
à l’eau. Il eft évident que le moindre taflement
inégal du fond capferoit, dans l’ouvrage-le mieux
fa it , des défunions par lefqudles l’eau pourroit fe
perdre. Ces défunions font d’autant plus dange-
reufes, qu’il eft prefque impoflible d’y remédier ,
quelques précautions que l’on prenne, ro u r que des
citernes ou des réfervoirs foient bons & durables,
il faut qu’ils foient faits d’un feul je t , c’eft-a-cîire,
fans interruption ; que tous les joints foient bien ,
garnis de mortier ou de ciment qui adhère pa r- ;
faitement aux pierres, moellons ou briques dont
l’ouvrage eft formé, & fur-tout que le fol foit in-
compreflible. JPour leur procurer cet avantage , on
d o it , dans tous les c a s , établir le maftif du fond
fur un grillage de charpente.
ConftruÜion des citernes en pierre de taille.
Les citernes confinâtes de cette manière ne font
pas quelquefois les meilleures, quoique les plus
difpendieufes , parce que l’eau s’infinue facilement
au travers des joints-, & qu’une fois dégradés
, les meilleurs maftics ne font pas fouvent
capables de retenir l’eau. Nous allons cependant
indiquer toutes les précautions qu’il faut prendre
pour éviter ces inconvéniens. L ’excavation faite
& le terrein du fond reconnu bon , après l’ayoir
êgalifé & battu , on formera fur toute l’étendue »
un maftif en libages pofés à bain de mortier. O n
érigera fur ce maflïf les murs du pourtour. La première
a flïfe, qui fera de 8 à 10 pouces plus large
que l’épaifleur du m u r , portera un élargiffemcnt
en creux pour fe raccorder avec les dalles qui doivent
former le fond & pour effacer l’angle. Toutes
les pierres qui doivent former les affiles doivent
avoir leurs lits & joints bien dreflès & dégauchis, pofés
fur un lit de mortier en ciment pafle au tamis oC
b royé avec de la chaux vive nouvellement éteinte. Il
faut que ces pierres foient pofées fans cales &
battues jufqu’à ce que le mortier reflue par les
joints, & qu’elles aient été mouillées préalablement,
afin que le mortier y adhère plus fortement, & qu il
ne fe trouve pas un feul endroit par où l’eau puifle
filtrer. • r
Comme c’eft par les angles que les citernes fe
détruifent le plus facilement, il fau t, lorfqu’elles
font quarrées ou reélangulaires, effacer les angles
verticaux intérieurs par des arrondiflemens , ÔC
éviter d’y former aucuns joints monîans.
La conftru&ion des voûtes des citernes exige tous
les foins que nous venons de preferire pour celle
des murs, fur-tout lorfqu’elles doivent être placées
fous des endroits découverts; dans ce cas il fau t,
outre ces précautions, former le deffus à doubles
pentes & le revêtir d’une forte chappe de mortier
en ciment bien liftée, afin que l’eau qui pourroit
pafler au travers des terres où du p a v é , ne vienne
pas gâter celle qui eft déjà épurée dans la citerne
& dégrader les joints de la voûte.
Lorfque les murs & la voûte de la citerne font
achevés, pour former le fond on pofe fur le maflïf
en libages de fortes dalles de 6 pouces au moins
d’épaifleur en raccordement, avec l’évidement circulaire
de la première alîïfe des murs du pourtour.
Ce s dalles doivent être pofées à bain de mortier
en ciment, & battues comme les pierres des
murs , & leurs joints maftiqués.
Les citernes en pierres de taille, dure & de bonne
qualité , bien exécutées , n’ont pas befoin d’enduits
à l’intérieur ; il fuffit que les joints des pierres foient
bien maftiqués ; elles ont de p lu s , la propriété de
conferver l’eau dans un état de fraîcheur fort
agréable. - -
Pour plus grande folidité, il feroit à propos de
cramponner les pierres de la première aflïfe des
mûrs, & celles de l’aflïfe qui eft à hauteur desnaif-
fances de la voûte.
Des citernes en moellons.
Lorfqu’on veut conftruire les citernes en moellons
, il faut avoir le foin particulier qu’ils foient
tous pofés à. bain de meftier ; que le milieu foit
bien garni. Le mortier s’attachera plus fortement
aux moellons, fi l’on a la précaution de les tremper
dans l’eau avant de les pofer & de les battre
pour faire refluer le mortier tout autour : les murs
doivent avoir au moins deux pieds d’épailieur 4