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exécutés fuivatjt le plan tracé par cet archîreâe, &
flont le recueil fut à cet effet mis en dépôt dans
l’hôtel-de-ville pour y avoir recours.
La porte faint Antoine fut un des premiers objets
de décoration qui l’occupèrent en 167a. Plufieurs
ratfons s’oppofâient à fa deftruâion ; elle avoit fervi
d’arc de triomphe à une entrée de Henri II, &
depuis à celle de la reine. Le trait de fa voûte du
côté de la ville étoit très-beau. Blondel ne trouva
point de meilleur expédient pour accorder l’ouvrage
ancien avec le neuf, que d’ajouter deux
nouvelles portes à l’ancienne, de la même grandeur,
& dont l’archite&ure, quoique correâe,
s’alliât aux ornemens de l’autre, qui étoient d’un
goût voifin du gothique. Il éleva fur l’ancienne
ordonnance un attique coupé en forme de pié-
deftal, fur toute la largeur de la vieille porte, &
deux autres plus petits aux extrémités portant des
pyramides. Du côté de la ville, les baies des portes
ajoutées étoient furmontées, comme celle de l’ancienne
, d’un arc d’arrière-vouffure (voyeç ce mot),
couvert d’un fronton élevé jufqu’à l’entablement
que couronnoit un attique, dont des trophées fai-
foient l’ornement.
On peut dire de la porte faint Bernard, dont
"Blondel s’occupa deux ans après, que cet ouvrage,
ainfi que le précédent, n’eft qu’un rètabliffement
fouvent plus difficile à faire qu’un deffin entièrement
neuf. Auffi la principale gloire en réjaillit-elle
fur le reftaurateur, fuivant ce vers d’Ovide :
Emendare juvat labor hic quam feribere major,
Blondel, gêné par les gros murs & par un ancien
tavillon qu’on voulut cônferver, en partagea la
argeur en deux grandes ouvertures. (Voye{ au
mot A rc de triomphe la defeription de ce monument).
On,peut voir, au même article, la defeription
de l’arc de triomphe de la porte S. Denis, &. les
j ugemens qu’on en a portés. Nous n’en reparlerons
ici que pour dire que ce monument, le plus beau
que poffède la France en ce genre, le chef-d’oeuvre
de Blondel, & qu’on regarde , avec raifon, comme
le fécond de l’architeâure frànçoife , en même
temps qu’il attire notre admiration , éveille nos
inquiétudes fur la deftruâion dont il eft menacé
faute d’entretien.
Le roi récompenfa les travaux de notre artifte
■ par la place de direâeur & profeffeur de l’académie
d’architeâure établie en 1671. Le cours que
1
nous connoiffons de lui renferme les leçons qu’il
diâoit aux élèves de ce lycée. Les ordres y font
traités fuivant les principes des anciens & des modernes.
On n’y trouve point ceux de la conftruc-
tion, de la diftribution & de la décoration intérieure.
Il paroît, par, cet excellent ouvrage, que
Blondel avoir fait de l’architeâûre une étude fé-
rieufe & approfondie. De plus, les emplois qui
&ii furent confiés pour le fervice du roi dans dif-
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férentes parties de l’univers, lui avoient procuré
la facilité de voir prefque tous les édifices fameux
tant anciens que modernes.
La corderie de Rochefort eft encore un de fe$
ouvrages. Elle fut conftruke fur fes deffins ; elle
comprend deux étages. Sa largeur eft de quatre
toifes, &. fa longueur de deux cens feize, f;lns
compter les pavillons. Dans fon architeâure moderne
( L. 1 ) , Blondel expofe le procédé qU’ii
a fuivi pour les fondations de ce bâtiment, dans
un terrein glaifeux fitué entre un canal & la ri-
vière de Charente.
Aux forges de l’arfenal de la même ville, &
en quelques lieux de fa corderie, Blondel a employé
une porte tofeane ruftique, qui y fait un
fort bel effet. Cette porte fe trouve dans Serlio,
& fe voyoit du temps^de cet arcliîteâe à Rome,
au lieu appellé le camp de la milice de Trajan.
Outre le cours d*architecture dont on vient de
parler, qui forme un volume in-folio , Blondel a
publié une comparaifon de Pindare 6* d’Horace,
des notes fur l’architeâure de Savot, un cours de
mathématiques, V bifilaire du calendrier romain, l’art de
jetter les bombes, & une nouvelle manière de fortifier
les places. Ces ouvrages lui méritèrent le grade
de maréchal de camp. Louis X IV , à qui il les
préfenta en 1675 , n’en voulut pas permettre ia
publication, que les fortifications qu’il faifoit faire
en plufieurs places ne fuffent achevées.
Blondel mourut en 1686. Il avoit été marié deux
/ois. Des enfans de fa première femme, l’un fut
chartreux , & l’autre abbé commendataire de The-
nailles.
BLOQUER, v. aâ. ( ConfilruCtion. ) c’eft lever
les murs de moilon d’une grande épaiffeur, le
long des tranchées, fans les aligner au cordeau,
comme on le fait aux murs de pierre fèche.
Bloquer, fignifie encore remplir des vuides de
moilon & de mortier, fans ordre, comme on le
pratique aux ouvrages fondés dans l’eau. (Poyq
Blo cag e , & l’article Maçonnerie , où ces procédés
font détaillés.)
BOCAGE , f. m. ( Jardinage.) Ce mot dérive
de bois. En le faifant venir de l’italien Bofcaglia,
il paroît lignifier un bois affez étendu. On peut
définir le bocage une agrégation d’arbres plantés
à deffein d’y faire trouver l’ombre & le frais,
joints aux agrémens de la nature embellie par les
foins de l’homme. Le bocage tient le milieu entre
le bois & le bofquet ( voye[ ces mots. ) : moins
étendu & moins champêtre que l’un, il n’a pas
les beautés de formes & d’ornemens que l’art &
le goût favent donner à l’autre.
Nous parlons du bocage qn traitant des jardins,
parce qu’il en eft dont le genre comporte toute
forte de plantations. C’eft dans la partie du payiage
qu’il trouve principalement fa place. Il ne faut
pas le reléguer dans les lieux bas & renfoncés.
Le bçcage eft fait pour les emplacemens découverts
, & même un peu élevés ; il eft deffine a
r fervtf
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-fervir de retraite pendant les ardeurs du foleil ;
fes ombrages pourtant ne doivent être épais ni
fombres ; il eft bon que la lumière s’y joue à
travers les rameaux : fon caraâère propre enfin
eft. d’être riant..
Pour ne pas manquer cet effet, n’admettez, dans
fa plantation , que des arbres d’un feuillage gai ;
écartez-en ceux qui s’élèvent & fe ramifient le
plus ; multipliez-y les arbriffeaux, pour en former
des buiffons, des touffes, les plantes farmenteufes
& grimpantes, pour en entourer les plus fortes
tiges ; que la terre y difparoiffe prefque entièrement
fous le gazon. La beauté du bocage eft d’être
d’un grand verd ; les ornemens qu’il comporte
d’ailleurs font fimples comme la nature, des eaux
courantes, beaucoup de fleurs, & de fleurs odorantes
, & toutes en pleine terre : les fauvagéons,
qui s’en couvrent avant de fe charger de fruits, y
doivent être nombreux.
La forme du bocage doit ftiivre celle du fite qui
lui fert d’affiette, avec les irrégularités.qu’on aime
dans les plants de ce genre. Son étendue ne peut
guère excéder la mefure du bofquet le plus grand.
Comme il eft moins fleftiné pour la promenade
que pour le délaffement & le repos, il y .faut plus
de feniiers, de cabinets & de repofoirs de verdure
, que de grandes allées.
-BOCAGÈRES. (Scènes) (Jardinage.) Ce font,
dans les parcs d’une grande étendue, & où les
bois peuvent être compris, les afpeâs différens qui
peuvent réfulter de leur compofition, les partis
heureux que le bon goût, ami de la nature , peut
en tirer, en,y mêlant des embellifTemens modeftes.
Si le fentiment du vrai préfide à cet art, il ne
défigurera, ne bouleverfera rien ; il ne fera que
choifir les fcènes deftinées par la nature à diffé-,
rentes efpèces d’amufemens & de plaifirs ; il façonnera
les difpofitions qu’elle lui préfente, & en
renforcera feulement les effets.
On a dit que la main de l'art devoit, pour ainfi
dire, fe cacher dans la difpofition des fcènes boca-
g'eres : elles permettent cependant l’emploi de l’ar-
chiteâure ; mais elles veulent que l’édifice foit,
&. par fon ufage,-& par fa forme, approprié au
caraâère de la fcène où il s’introduit. Ic i, fur le
fbmmet arrondi d’une colline ombragée, s’élève
«n élégant cabinet de plaifance ; les Grâces même
y ont mis la' main ; à l’entour les plus aimables
flçurs exhalent leur parfum ; elles brillent au milieu
de la moufle fraîchequi tapiffe toutes les pentes
de la hauteur. Entre les fleurs autour du cabinet,
oc jufqii'aux grouppes d’arbre qui décorent le pied
de la colline , font répandus de petitsyarbriflèanx
fleuris., dont les nuances s’entremêlent avec les
fleurs de la plus grande efpèce.
Une autre fcène eft principalement vouée au
repos & à la réflexion. Nul objet important ou
animé qui attire l’attention de l’ame , nul lointain
qui puiffe la diftraire. Une petite , place entourée
Architecture, Tome I,
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d’un épais tiflii d’arbres, une eau paifible, un cabinet
confacré à la leâure, & pourvu d’autant
d’ouverture & de lumière qu’il en faut pour cet
objet, fuffifent ici.
Les lieux où l’on veut jouir des plaifirs de la mu-
fique ou de la danfe ne demandent point de lointains.
Un fite tranquille & folitaire leur convient
mieux : mais, outre l’édifice, il faut une place libre
& commode, où l’on puiffe fe promener, & un
ombrage agréable.
Les délices de la table redoublent d’attraits dans
un bois. On peut choifir des lieux exprès pour cet
ufage. La fituation en fera dégagée & ornée d’af-
peâs rians. La fortie d’un bois, fur une hauteur
d’où l’oeil peut errer dans un vafte payfage, y
paroît fur-tout propre. Le bâtiment peut avoir la
forme d’un temple , pour former une belle perf-
peâive : une promenade découverte au-devant fert
à prendre du mouvement après le repas.
Il eft beaucoup d’autres fcènes, de plus nobles
& de plus intèreffantes encore, que l’artifte habile
faura faifir, fur-tout s’il eft doué de ce fentiment
fin qui fait appercevoir les différentes ana-'
logies de tous les fîtes avec les affeâions de notre
ame. On fait jufqu’à quel point tel ou tel canton ‘
naturel a par lui-même l’énergie néceffaire pour
mettre l’ame dans telle ou telle fituation. Si de
plus on l’ordonne d’une manière qui s’accorde avee-
fon caraâère , qui réveille davantage la réflexion ,
qui tende plus à produire une émotion déterminée
de l’ame, il n’eft pas douteux que ce canton n'acquière
une impreffion irréfiftible.
On peut confulter fur cet art Hirfchfeld, d’où,
nous avons extrait le peu d’exemples que nous '
venons de citer ; on y lira avec intérêt les def-
criptions poétiques de différentes fcènes bocagères ;
ce grand maître en a prodigué les tableaux ; &
fes couleurs font rivales de celles de la peinture.
(jVoyes^ Hirfchfeld, tome 2 , p. 65 & fuivantes. )
BOCCANERA, (Marin) architeâe né à Gênés,
vivôit dans le quatorzième fiècle. Nous ignorons
fi fa famille étoit alors illuftrée : mais depuis elle
a donné des doges à la république, & plufieurs
hommes diftingués par leurs emplois. C’eft à lui que
la ville de Gênes eft redevable du commencement
du grand môle : il en fit jetter les fondations, formées
de blocs énormes de pierres arrachées des
montagnes voifmes. 11 acheva l’arfenal des galères*
qu’un autre architeâe avoit commencé, & fit cette
partie du bafiin dans laquelle les vaiflèaux fe mettent
à couvert. En 1300, il augmenta confidera-
blement le port : enfin , il fit conftruire plufieurs
aqueducs pour porter l’eau à la ville.
BOIS, f. m. matière tirée du corps des arbres
'& qui fert à plufieurs ulages dans la conftruâion
des bâtimens. (Fbyeç l’article fuivant.)
Le bois, qui eft d’une fi grande reffource dans
les édifices, qui,dans bien des pays , eft la principale
matière que les hommes emploient à la
fabrication de leurs demeures, & qui, à tant de
Oo