
C ’étoit la pièce où l’on confervoit les huiles & les
parfums dont on fe fervoit au fortir du bain, comme
avant d’y entrer. L ’oinftuaire étroit conftruit de manière
à recevoir un dégré conftdérable de chaleur de l’hy-
pocaufte.
L ’hypocaufte étoit un fourneau fouterrain s dont
le fond formoit un plan incliné qui alloit en pente
jufqu’à l’ouverture par laquelle on mettoit le bois.
Vitruve l’appelle fufpenfura. Il doit être formé , dit-
il , d’un pavé fait avec de grands carreaux d’un pied
& demi qui aillent en penchant, en forte que fi l’on
jette une balle , elle n’ y ouille demeurer , mais qu’elle
revienne à l’entrée du fourneau. Par ce moyen, la
flamme s’élevoit plus facilement, & parcourait tout
le plancher fufpendu. Celui-ci étoit formé de grands
carreaux pofés fur de petites piles, hautes de deux
pieds, & faites de terre gralfe , préparée pour ré-
flfter à faction du feu. L ’hypocaufte s’étendoit fous
la plupart des falles dont on a parlé. (V o y e z
îA r tic le fuivant.)
Outre cès falles deftinées fpécialement à l ’ufage
du ba in , il y en avoit plülieurs autres relatives
aux exercices qu’on prennoit avant ou après le bain,
relies que le Sphériftère, le Coniftère, Je C o ry c é e ,
le Stade , l’Ephébée, & c . , toutes pièces qui fa i-
foient partie des gymnafes, (K oye£ Gÿmnafe.) mais
qui n’exiftoient pas toujours dans les bains, fur-tout
dans ceux des particuliers.
Ils s’en falloit beaucoup aulfl que la difpofition
des bains particuliers fût toujours conforme à ce
qui a été décrit jufqu’ici. Chacun fuivoit fon goût
dans leur conftruâion, foit en changeant les parties
dont ils étoient compofés , foit en faifant fervir une
même chambre à différens ufages. L a defcription que
Pline le jeune nous a laiflee de fon bain de Lauren-
tin , eft la preuve de ce qu’on avance ici. Il n’y avoit
ni Apodytère ni Tépidaire ; & l’arrangement des autres
parties étoit très-différent de celui des bains publics,
«c -On entre d’abord dans un fpacieux Frigidaire-, où
e» l’on voit contre les murs, & oppofésl’un à l’autre deux
» baflms aflez grands pour pouvoir y nager. L ’Onc-
» maire eft contigu à cette chambre. On trouve enfuite
m l’Hypocaufte, le Propnigée, & deux autres falles
ai plus propres que magnifiques. On entre après dans
un bain chaud d’où l ’on découvre la mer. A quel-
» que diftance de celui-ci eft le Sphériftère expofé
as au foleil de PaprèsTmidi. 33 Dans fa m aifon de T o f-
cane, en entrant dans le bain , on trouvoit d’abord
un grand Apodytère , pièce fpacieufe & agréable où
l ’on fe déshabilloit. Elle conduifoit au Frigidaire
qui étoit ohfcur, & qui contenoit une baignoire d’une
grandeur convenable. Quand on ne la trouvoit point
aflez fpacieufe pour y nager, ou qu’on aimeit mieux
un bain plus chaud , il y avoit au milieu de l’aire
un vafte baflin où l’on pouvoit fe baigner. Auprès
du Frigidaire on voyoit une chambre expofée au
foleil , qui étoit paflablement chaude , .mais moins
que l’étuve. ( C ’étoit le Tépidarium.) Cette dernière
/aile étoit cjivifée en trois parties, qui avoient cjracune
un différent dégré de chaleur. Les deux premières
étoient entièrement expofées au foleil j & quoique
l’autrë n’ en pût recevoir autant de chaleur , elle en
é to it , pourtant aufiî. bien éclairée qu elles. Au-deflus
de l’Apodytère étoit le Sphériftère dans lequel on
s’exerçoit à différens jeux. Quoique Pline ne nous
ait pas appris ce que .faifoient les baigneurs, après
s’être déshabillés & huilés, il eft aflez probable qu’ils
montoient au Sphériftère , qu’ils s’y exerçoient, qu’ils
defcendoient enfuite par un autre efcalier dans l'étuve,
& puis qu’ils s’en retournoient à l’Apodytère , en
paflant par le Tépidaire & le Frigidaire. _
L a defcription fuivante tirée de l’Hippias de Lucien,
peut encore donner une idée des bains anciens,
& des variétés qui s’y rencontroient. V o ic i quel étoit
l’ordre & la difpofition des appartenons:
ce Après avoir paffé le grand veftibule auquel on parvient
par un efcalier 'facile , on entre dans une falle
fpacieufe, à l’ufage des domeftiques qui attendent
leurs maîtres. Sur la gauche font les chambres où
l’on fe retire- avant de quitter le bain : ce font les plus
belles & les,plus agréables de toutes. En avançant,
on entre dans une falle à l’ufage du bain, mais defti-
née aux perfonnes les plus opulentes. Après cette
chambre, on v o i t , des deux côtés , les endroits où
fe mettent les habits. L e milieu de l’efpace eft très-
élevé , très-éclairé, & contient trois bains d’eau froide
ornés de marbre Lacédémonien. Il y a dans le même
efpace deux ftatues antiques de marbre, dont l’une
repréfente la déefle de la Santé, _& l’autre Efculape.
En forçant de ce lieu par un paflage oblong & voûté,
le bâtiment devient fenfiblement plus chaud , quoique
la chaleur foit bien éloignéè d’en être défagréable.
C e paflage conduit à une. falle fort claire , où l’on
trouve de l’huile & des effences : cette fa lle , qui eft
à main droite , a communication avec la paleftre ;
& les deux jambages de la porte font incruftés de
marbre Phrygien. L ’appartement contigu eft plus beau
qu’aucun de ceux dont j ’ai déjà fait mention , ( c’eft
Lucien qui parle. ) puifqu’on y voit briller , même
au plafond , le marbre de Phrygie. Il eft aflez grand
pour qu’on puiffe s’y promener & y prendre de l’exercice
; il réunit aufli plufieurs endroits commodes pour
s’affeoir. A u fortir de là, on entre dans le paflage
chaud qui eft aflez long pour y faire une courfe. Il
eft incrufté de marbré de Numidie, & conduit à la
falle qui eft fort belle , très-éclairée , & peinte en
pourpre. On y trouve trois bcùns chauds. Pour en
fo r t ir , il n’en: pas néceffaire de reprendre le chemin
•par où l’on eft venù. On peut aller , à pas lents, par
un chemin plus court qui mène au bain froid , à travers
la chambre chaude dont la chaleur diminue par
dégrés, Toutes ces chambres font bien éclairées par
le haut. Hîppias a montré beaucoup de jugement en
conftruifant la falle qui contient le bain f ro id , de
manière qu’elle ait le Nord en face. Quant aux autres
"pièces qui demandent un plus grand dégré de chaleur
, il les a expofées au S u d , au Sud-eft, & à
Il paroi t , par cette defcription, qu’il n’y avoit point
d’Apodytère dans le bain d’Hippias. On trouvoit feulement
, à chaque bout du Frigidaire , qui contenoit
trois bains d’eau f ro id e , des tablettes où fe mettoient
les habits. Les baigneurs entroient enfuite dans un
paflage chaud qui les conduifoit à l’Onétuairé , d’où,
après s’être oints , ils gagnoient le Sphériftère, qui
étoit la plus belle & la plus grande pièce. Quand les
exercices étoient finis, on alloit au bain chaud par un
paflage où il y avoit autant de chaleur qu’il en falloit,'
pour entretenir la tranfpiration excitée dans le Sphériftère.
Ainfi, lorfque les baigneurs arrivoient au bain chaud,
& qu’ils fe mettoient dans l’eau , la différence qu’ils y
trouvoient étoit à peine fenfible , puifque la chaleur
de l’eau fe trouvoit, à-peu-près , au même dégré que
celle de leurs corps. Après avoir pris le bain, on s’en
fetoumoit par un chemin plus cou rt, en traverfant
une falle dont la chaleur diminuoit à proportion qu’on
s’approchoit du Frigidaire , où l’on avoit laiflé fes
habits.
Voici la defcription que Vitruve nous domie des
bains des Grecs :
Après avoir décrit les différentes pièces du Gym-
nafe : ce A la droite de l’Ephébéê -,-dit-il, on bâtit le
» Coricée, ou la falle à fe ra fe r , à s’habiller, &c.
» Près de cette falle, on doit placer -le Coniftère où
» fe garde le fable à l’ufage des lutteurs : dans le '
» coin du Périftyle eft le Loutron ou le bain froid.
93 A gauche de l’Ephébée , on place l’Eléothefium ,
93 ou la falle dans laquelle font le« effences & l’huile.
95 Près de ce dernier, on conftruit le Frigidaire, au
93 fortir duquel il doit y avoir un paflage qui conduit
93 ati Propnigée , près du fourneau dans le coindu
93 portique. Plus loin , mais à côté du Frigidaire , on
93 bâtit la chambre voûtée, à fuer.On la fait deux fois
93 aufli longue que large , & l’on met le laconicum à
93 un de fes angles , à celui op.pofé au bùn chaud. >3
Les difpolirions de chacune des pièces mention-
neesci-deffus varioient encore plus dans les thermes des
Romains , (. V~oye^ T hermes . ) quoique leurs plans
annoncent une certaine uniformité. Comme il y avoit
deux Périftyles, dans ces thermes , on fe croit eu
droit d’en conclure qu’il y avoit aufli un double
ordre de bains. Varron prouve , fans contredit , que
les femmes fe baignoient dans des appartemens différens
de ceux des hommes. En parlant de l’établiffe-
naent des bains publics à Rome , il afsûre qu’il y
avoit deux fortes d’appartemens où l’on fe baignoit 3
que l’un étoit à l’ufage des femmes , & l’autre à
celui des hommes, « Item primum balneum nomen
»> & Græcum introiit in urbem , ubi bina effent con-
93 junfta ædificia lavandi caufà , unum u b i viri ,
93 alterum ubi mulieres lavarentur. 35 C e que Martial
& S. Cyprien difent dés bains où les .hommes & les
rerames fe baignoient pêle-mêle , n’eft point con-
traire a ce paflage, puifque ces Ecrivains n’attribuent
ces indécences qu’à des femmes débauchées, -
'drdüteÛure* Tome I ,
Cutn te lucernâ balneator exiinflâ
Aimittatinterbujluariasmcechas. Mart. 1. 3. ép. y i .'
On remarque cette féparation de bains aux thermes
de Caracalla j du moins on y voit une grande
partie précédée d’ un veftibule , qui fervoit d’enceinte
au corps principal des thermes. Cette partie eft divi-
fée > en cinquante falles voûtées , féparées les unes
des autres , & parfaitement femblables entr’elles.
( f^oyc^ Fig. zoo.) Il refte encore quelques-uns de
ces bains , dont un, qui s’eft confervé prefqu’entier,
peut fervir a indiquer .la manière dont ils étoient
difpofés. Il eft précédé d’un petit veftibule : l’endroit
du bain a 31 pieds de lo n g , fur 15 pieds 3 pouces
de large. Le baflin qui recevoit l’eau eft en maçonnerie
, avec un rebord de pierres de taille qui l’ifolè
de 18 pouces du mur du fond , & des deux murs ea
retour. Le vuide du bain, entre les b o rd s, a i z pieds
de larg e, fur 15 pieds de long. O11 y defeendoit
fur le devant, par.fept à huit marches , dans toute
la largeur du bain, dont quatre pour arriver fur le
bord du baflin , & trois ou quatre pour defeendre
jufqu’au fond du bain 5 en forte que ceux qui fe
lavoient, pouvoient fe tenir aflïs fur le rébord. Le
bain étoit éclairé par un jour pratiqué au haut du
mur du fond. Mille perfonnes pouvoient fe baigner &
la fois, dans cette partie des tliennes. L ’eau n’y àrri-
■voit probablement que tiède , parce qu’elle prove-
noit des bains chauds des grands thermes > dont ceuxr
ci , comme on l’a d it , faifoient l’enceinte. Les eaux
fortoient de ces bains, & fe rendoient par des tuyaux
dans une grande Pifcine deftinée pour ceux qui vou-
loient s’exercer à la natation.
Dans les. faces , en retour a droite & à gauche ,
étoient d’autres bains pour des particuliers plus riches,
ou d’un ordre fupérieur. A u lieu de baflms , on y
voyoit des cuves ou baignoires , dont quelques-unés-
étoient de cuivre, d’autres en marbre, en porphyre,
en g ran it, en bafalte. ( Voyeç Baignoire. ) C ’étoit
.aufli là qu’étoient ,pes fiéges de marbre ou de porphyre,
dont on voit un très-grand nombre a Rome.
Olympiodore afsûre qu’aux thermes de Caracalla , on
comptoir 1600 fiéges de cette efpèce.
L a grande falle A . ( Foyê^ Fig, z o o . ) étoit, une
Rotonde de cent onze pieds, de diamètre, qu’on croit
avoit été la Ce liafol’caris, ou la falle fandalaire, dont
Spartièn. parle, en ces termes. «« Les architeétes & les
mécaniciens s’accordent à dire que la Cella fotearïs
eft une cho.fè inimitable. >3 .Cellam folearem architedi
négant poffé ulla imitatione qùâ; facta- eft fîeri. » Il y
a apparence qu’on avoit donné à xe tté falle le nom
de folcaris , parce que les barres de cuivre"Sè d’airain
q u i, félon ies uns', formoient fon pavé , félon d’autres
fon plafond , avoient quelque reffemblance au
treillis qui fe trouvoit à plufieurs chauflures des anciens
Romains. Il y avoit aufli des plaques d’airain ou de
cuivre qui couvroient & ornoient les trumeaux des
fe/iêtresis & quelqu’autres parties,:d.e la rotonde. Cette
fa lle , à. ce qu’il p a roîî, contenoit un grand nombre