
& le poids de leurs corps , dans une ode a l’Efpè-
rance, où il compare , d’une manière très-poétique.,
ces ouvriers avec des courtifans ambitieux«
kV o ic i la ftrophe :
P o u r t ir e r d u f é in d e la te r r e
L e s m a ffifs , le s ma rbre s p om p e u x ,
D a n s u n e é c h e lle c ir c u la i re ,
V o y e z g r a v i r l e m a lh e u r eu x
C o n t r e -p o id s d’u n e ma ffe im m e n fe ,
S o n co rp s en fu fp en d la b a lan c e
E n é q u i lib r e a v e c la m o r t ,
L e .cable c a f f e , & dans l’abîme
Tout s’engloutit,maffe & viôime:-
Courtifans, voilà votre fort.
Les carrures des environs de Paris s'étendent
, fort loin fous terre. O n ÿ vo it des ru e s , des carrefours,
des folles très-vaftes, évuidèes dans la mafle,
& foutenues de diftance en diftance par des piliers.
Ce tte manière d’exploiter les carrières eft en même
tems la plus coûteufe & la plus dangereuie.
Frefqne toute 1a plaine qui s’étend depuis lv r y
jufqu’à Meu don , eft fouillée de cette maniéré. Les
excavations qu’on y a fait pour en tirer la pierre ,
offrent par-tout un a fp e â effrayant. L e banc de
pierres qui forme le c iel de ces carrières eft brifé
de toute part. La plupart des piliers qu’on y a pra- .
tiques ayant été mal conftruits, s ecrafent fous le
fardeau énorme d’ une maffe^ de terre & de pierre
qui a , dans plus d’un endroit , quatre- vingt - dix
pieds de hauteur & au-delà. Pre'fque tout le faux-
bourg S. Jacques & les environs du Luxembourg
font creufés de cette façon. On a déjà depenfé
jdes fommes immenfes pour confolider les endroits
qui menaçoient de s’effondrer ; les dépenfes qui
relient à-faire font incroyables.. .
Ce s confidérations devroient engager a exploit
e r , autant qu’ il eft poftible , les carrures a découvert.
11 en réfulteroit beaucoup d’avantages.
" i° . On ne fe verroit pas contraint d’abandonner
ou de mal exploiter les.plus beaux bancs de pierre à
eaufe des- foutieos qu’on eft obligé de laiffer.
a ° . On pourroit pratiquer des chemins pour
charger la pierre à pied d’oeuvre.
3°. On éviteroit les frais de treuils, de cordages
& de tranfport jufqu’à l’ouverture inférieure du
puits , 8c enfin , ce qui eft le plus important, on
expoferoit moins la vie des ouvriers.
O n appelle carrures à bouche celles ouïes voitures
peuvent entrer , quoiqu'elles ne foient pas tôur-a*
fait découvertes ,telles que le s carrières à plâtre des
environs de Paris , & celles de pierre tendre de S.
L e u , T r o c y , Maillet, & c .
Lorfque les carrières font tout-à-fait decouvertes ,
comme nous l’avons ci-devant propofé, & comme
elles devroient être toutes ,. on dit qu’elles font à
ciel, découvert; ,
A van t de fe déterminer à exploiter une nouvelle
carrière 9 il. faut s’affurer par quelque effai des qua»
lités de l'a p ie r re , fi elle peut s’exploiter facilemen
t, fi l’ endroit n’eft pas trop éloigné , file s chemins
font praticables , quelle eft la grandeur des
blocus qu’on peut en t ire r , & fur-tout fi la pierre
n’eft pasfnjette à geler, ou à- fe decompofer a 1 air.
Pour cela il faut en expofer quelques quartier*
avant l ’hiver fur un terrern humide; fi elleréfifte
pendant toute l’ année aux intempéries de l’ air ,
c’eft une des meilleures preuves de fa bonne qualité.
. . * j •/•
Chaque pays a fes carrières qui produifent de*
qualités de pierre différentes, & qui exigent une
exploitation particulière. Les unes fe trouvent rangées
par affilies naturelles , auxquelles on donne-
le nom de banc , & les autres par grandes m affes,
dans lcfquelles on peut trancher des blocs de la
grandeur que l’on veut. .
Le nom de carrière vien t, félon Ménagé , du latin
quadraria ou quadrataria , fait de quadratus lapis, qui
lignifie pierre de taille* Dans plulieurs Provinces
de F ran c e , on leur donne le nom de pierrières &
celui de marbrières à celles dont on tire le marbre,
• C A R R IÈR E . On nomme a in fi, dans les cirques
anciens , le chemin que dévoient faire les biges
ou les quadriges , c’eft-à-dire , descharriots attelés
de deux ou de quatre chevaux , & qu’ils dévoient
parcourir une ou plufieurs fois pour remporter le
prix. ,
Carrière dê Manège. Efpèce d’allee longue
& étroite, bordée de lices ou barrières, &fablé'e,
qui fort pour les courfes de bague. C e mot peut
venir appliqué au fens du latin currere, courir.
C A R T E IA , ville antique d’Efpagne. L ’itinéraire
d’Amônin nomme cette ville Çalpe-Carteiam. Il eft
vraifembiable que ces mots f i g n i f i e n t Carteia ad
Çalpeu, pour la diftinguer d’un autre Carteia qui
étoit dans la C e l t i b é r i e , &. dont Tite -L iv e a fait
mention dans fonhiftoire.
On croit voir les relies de Carteia dans demandes
ruines qui font encore aujourd’hui à Üextrémité de
la baie de Gibraltar & environ a quatre m i lle s
d’Angleterre , an nord-oueft de cette ville. C e lieu
s’appelle Rocadillo : l’on n’y trouve que quelques
chaumières , & une tour quarrée & moderne cjnî
paroît avoir été élevée fur le s . fondemens d’un
édifice beaucoup plus grand. Il n’eft pas difficile
de - découvrir les traces des murailles dé 1 ancienne
•ville, & il femble qu’elles avoient environ deux
milles d’Angleterre de circonférence. L ’efpace intérieur
eft rempli de mafures, parmi le fq u e lle s on
voit un grand nombre de morceaux de marbre
très-beau 8c très-bien tra vaillé, & u n e infinité de
fragmens de vaiffeaux. de terre rouge. Ambroife
Morales dit que ces vaiffeaux de terre font une
marque certaine d’une ville romaine , & il croit
qu’ ils étoient faits de l’argille de Sagunte , dont.les
Romains ont fouvent parlé.
F i& a S a g u n t in o p e c t d a m à lo l u t o \ .
S u m e S a g u n t in o p o c u la fie b a lu to * .
O n volt suffi à Rocadillo les reftes d’ un édifice
fait en demi-cerçle , & élevé fur des arcades. Il a
une penteinfenfiple ,& femble avoir été une efpèce
de théâtre.
On a déterré près de la tour quarrée dont on
vient de parler; le piédeftal de marbre d’une .ancienne
ftatue dont les pieds font reftés encore fur
la plinthe , ainfi que l’extrémité des draperies. A
l’exception des lettres v a r i a m a r c e t rè s - - bien
gravées en core, les autres infcriptions fontprefque
entièrement effacées.
Rocadillo eft arrofé par la rivière dé Guadaran-
que, le long de laquelle on voit quantité de maçonnerie,
8c les reftes d’un ancien quai.On trouve
aufli vers l’orient, fur une hauteur peu éloignée ,
des ruines confidérables d’un château qui paroît
avoir été un ancien édifice très-fort.
Tous les Efpagnols qui habitent aux environs
des ruines de Rocadillo , difent que ce font les
reftes d’ une ville des payens qu’on appelloit Car-
thago. La tradition a changé le nom de Carteia en
celui de Carthago, qui étoit beaucoup plus connu.
C A R T O N , f. m. Vitruve & les anciens écrivains
ne nous ont tranfmis qu’en bien petit nombre , &
encore en abrégé * les procédés & les diverfes
inventions de l ’art de bâtir. La raifon eft que V i truve
écrivoit fur - tout pour fes contemporains ,
fans prétendre à l’inftruâion particulière des fiècles
à naître , & comptant plus fur l’ immortalité des
monumens que fur celle de fes écrits ; & à cet
égard il faut dire que la durée des édifices antiques
a p lus . fait pour l’inftruéHon des modernes,
que la confervation .de quelques ouvrages relatifs
à l’architeôure.
Il en eft autrement de nous. Sans doute nos
écrits furvivront à nos monumens. De-là le foin
que nous prenons de confier au papier toutes- nos
inventions , & jufqu’aux procédés de tout g en re ,
qu’un luxe alifii puéril que périfîable fubftitue tous
les genres aux grandes reffources que nous fommes
hors d’état d’employer.
'Èft-ce bien la peine cependant de tranfmettre à
ceux qui nous fuivront ces reffources éphémères
8c économiques, qui trompent pour quelquesinf-
tans la crédule vanité d’un luxe ignorant , & ne
fervirions-nouspas mieux l ’honneur de notre fiècle,
en épargnant aux âges futurs la connoiffance de
tous ces petits moyens qui -appauvriffent de plus
en plus l’art de l’architefture ?
Pour n’ avoir à nous reprocher aucune ©million
qui pût trahir l ’obligation que nous nous fommes
impofée d’embraffer dans cet ouvrage tout ce qui
concerne l’art de b âtir, depuis fes plus grands rapports
jiifqu’à fes plus petits détails , ainfi que tout
ce qui peut cara&érifer le génie d’un fiè c le ,n ou s
dirons qu’on eft parvenu , depuis quelques années ,
s'employer le canon à plus d’un ufage dans les
édifices de Paris.
I l n’eft pas de notre reffort de nous étendre fur
les procédés de la fabrication du canon ; on en
trouve la description dans le diéHontmaire des arts.
& métiers. T o u t le monde fait que réduite par
plufieurs manipulations en état de pâte molle , oc
même liquide , la matière qui fait le carton eft
fufceptible de prendre , dans des moules de plomb
préparés à cet e f fe t , les diverfes empreintes & à-
peu-près les mêmes que le plâtre faifit fi bien lorsqu’il
eft en état de fluidité. O n fait de cette.manière
des corniches, des profils & des moulures
qui acquièrent un degré de fineffe & de purete
affez remarquable. Tou s ces profils fe compofent
de morceaux qui fe rapportent & fe collent ^les
uns à côté des autres ; le foin 8c la précifion qu on
apporte à leur affemblage empêchent d’en apper-
ce voir les joints , & la couleur qu’ils peuvent
recevoir 8c qu’on leur donne le plus fouvent en
fait difparoître jufqu’au foupçon. 11 eft inutile de
dire que le canon ne s’emploie pour de tels objets
que dans l’intérieur des édifices 6t dans les pièces
dont la médiocre étendue ne demande qu une lé-,
gère faillie de profils* Le carton renflât affez bien
dans les moulures qui s’appliquent fur des furfaces
liftes, & c’eft le moyen le plus économique d introduire
après coup des ornemens fur les parties
qui en exigent.
On ne s’eft pas borné , dans l’emploi du carton ,
aux objets d’ornement dont on v ient de parler. Les
plus grands partis de décoration ont été tentés
8c exécutés de cette manière. O n en a la preuve
dans la voûte de la falle de la comédie françoife à
Paris, dont le fond , les figures arabe fqu es & les
rinceaux peints de diverfes couleurs , ne font que
de carton. Le plus grand , & il faut le dire , le feul
avantagé que préfente l’ufage de cette matière-appliquée
à la décoration des voûtes & des plafonds ,
eft fans contredit la légèreté. Mais on vo it en
même tems qu’un revêiiffement de canon fuppofe
néceffairement line conftru&ion de charpente ou
même de menuiferie , c’eft-à-dire , trop foible
pour fupporter des revêtiffemens de ftuc ou de
plâtre ; 6c dans tous les cas , fans parler des incon-
véniens particuliers à cette matière , 8c
vine aifément, il eft fenfible que fa fragilité, fou
économie & le fentiment de mépris que l’opinion
y attache , la rendent tout-a-fait indigne de figurer
dans les monumens publics.
Le carton s’ eft employé de tout tems à faire
<jes figures & des ftatues dans les décorations pc>f-
tiches 8c éphémères des catafalques, des feux d ’artifice
& des fêtes qui ne demandent qu’une apparence
de repréfentation , & qui exigent de la célérité
, de la légèreté 8c de l'économie. Ces'figures
de carton font pouffées dans des moules faits 8c
deftinés à cet ufage. I l fau t , pour qu’elles faffent
un bon e f fe t , quelles foient vues d’une certaine
diftance, & de manière à ce qu’on ne piiiffe juger
que de leurs maffes. Elles fe peignent de diverfes
couleurs , foit de bronze , foit de marbre.
O n en nxet auflâ quelquefois, 8c uniquement peur