
deftination, & fur la fituatiori de ces édifices.
O n y cherche la jouiflance libre Si tranquille des
avantages de la v ie champêtre, 8c des attraits de
la natu re, 8c ceux-ci leur fouriant tout alentour ;
l’idée qu’on a de la convenance, & le plaifir que
caufe ùn accord harmonieuse de toutes les parties,
exigent que des demeures en rapport avec des
objets flatteurs 8c agréables, ne s’écartent pas trop
du. caraâère dominant de ces derniers. Une méchante
cabane au mi ieu d’une lande inculte n’étonne
pa^s : mais une maifon de campagne mal bâtie
au milieu d’un riant payfage en détruit l’effet.
Comme les bâtimens font d’ordinaire la première
impreflion , qui s’étend enluite fur toute la contrée
environnante, on •devroit être attentif à ce que
cette impreflion ne fut ni contradictoire , ni trop
foib'e . C e n’eft que par un aeçord fenfible du ca-
ra&ère de la maifon a v ec celui du p a y fa g e, qu’on
peut obtenir une impreflion entière : car on fe roit
entraîné à d’ étranges égaremens, fi l’on s’avifoit
de vouloir faire contrafter l’édifice a v ec le canton.
En projettant une maijon de campagne, l’archi-
tefte doit fur-tout faire attention non-feulement
au caraétère général 8c propre à ces fortes de bâtimens
, mais encore au caraétère particulier qu’il
doit donner à fon ouvrage , d’après les différences
énoncées ci-deffus , 8c l’ image confiante 8c fidelle
de ce caraétère doit le guider dans le c h o ix , la
defiination , la fa ço n , la hàifon , 8c même la décoration
de toutes les parties internes 8c externes.
Le s remarques fuivantes pourront, aider à porter
un jugement fur les principales de ces parties même,
& à les diftribuer convenablement.
En préfuppofant tout ce qui eft néceflaire à
une habitation , 8c tout ce qui appartient à la commodité
de fa diftribution, choies qui varient infiniment
, fuivant les vues 8c les befoins du propriétaire
, il faut d’abord, quant à l’ordonnance
même du bâtiment, 8c en tant qu’elle eft foumife
aux règles du g o û t , faire attention à la forme.
Plus elle eft fimple, 8c moins par conféquent
elle divife l’attention , plus elle eft avanrageufe.
T ou te figure compofée fait moins d’effet qu’une
autre dont la fimpîicité produit une impreflion
non diviféé. Aucune propriété n’appartient plus
à la beauté de Varchiteéture que celle-ci ; cet art
perd plus qu’on ne peut dire dès qu’il pafle à
des formes embarraffées. La maffe totale d’un édifice
doit donc préfenter une figure unique non
divifée 8c com p lète, qui faffe un effet agréable
a l’oeil.
O n doit préférer en général dans les édifices,
la forme rectangulaire 8c la circulaire. Cette dernière
fait fans contredit une impreflion très - fa-
tisfaifante : mais le reétangle eft plus commode
pour la diftribution intérieure ; il a encore , ainfi
qu’on l’a remarqué., une fimpîicité prééminente,
moyennant laquelle l’oeil p e u t a v e c facilité , ob-
ferver l’accord des côtés extérieurs, 8c les proportions
des lignes. U n quarré lo n g , qui rend le
bâtiment trois fo is , 8c davantage en co re, plus
•large que profon d, n’a ni la régularité, ni l’uniformité
du quarré ; on le prend pour un quarré
manqué , 8c les parties de dehors font trop écartées
l’une de l’autre. Une longueur trop étendue détruit
encore l’air de grandeur de l’édifice.
Un feul quarré fuffira pour une maifon de campagne
élégante ou jolie. Quant à celles qui demandent
plus de place 8c de grandeur, on peut
en compofer l’enfemble de plufieurs quarrés , foit
q u e , fuivant le goût italien, on faffe quatre ailes
de bâtiment égales, foit q u e , fuivant l’ufage fran-
ç o i s , on ne compofe la cour que de trois ailes.
La première méthode a beaucoup de majeftè, fur-
tout lorfque le bâtiment eft à plufieurs étages
mais elle offre en même temps un afpeét un peu
fombre , qui femble mieux convenir à la refpec-
table gravité d’un co u v e n t, qu’ à la riante liberté
d’un château de plaifance, d’ autant plus que la
vu e fe trouve bornée dans l’intérieur de la cour.
La fécondé manière s’accorde mieux avec le caraétère
d’un château de plaifance ou d’une maijon ■
de campagne, dans le ftyle majeftueux 8c noble.
A l’entrée , elle fe préfente à l’oeil avec une certaine
pompe , 8c offre de tous les trois côtés,
principalement du corps-de-logis 8c des bouts des
deux ailes , la vu e de l’avant-place : mais il ne
faut pas que l’entrée foit offufquée par un mur
'élevé ; elle peut refter entièrement ouverte ; ou
fi l’on veut la fermer, il faut la garnir d’un treillage
léger 8c de bon goût.
Cependant aucune diftribution ne paroît mieux
s’accorder avec l’aifance I la beauté 8c l’agrément
d’un château de plaifance 8c d’une maijon de campagne
, que celle où l’on donne au corps-de-logis
deux ailes de chaque côté en ligne droite : alors
l’éd ifice , a vec toute fa fa çade, fe préfente dès
l’avenue tout entier à l’oeil ; il montre tout-à-la-
fois la proportion de fes parties, la perfeétion de
la fym métrie, 8c la beauté de fes dehors ; il attire
8c occupe les regards de loin , 8c annonce
la liberté 8c la gaieté : enfin , il offre au propriétaire
une vu e également libre , tant du corps-de-
logis que des ailés : celles-ci peuvent être un peu
plus baffes que ce lu i- là , pourvu qu’elles lui foient
bien proportionnées, 8c foient d’une longueur convenable.
Plufieurs étages ne font pas néceffaires à la magnificence
d’un bâtiment, comme on le croyoït
j autrefois. Un édifice peut avoir trois étages &
p lus , fans gagner de ce côté , tandis qu’un fimple
plain-pied peut être d ’une grande 8c noble apparence.
Lorfque le bâtiment eft fur une hauteur,
les appaftemens inférieurs même peuvent faire
jouir, d’une vue agréable ; le plaifir de la vue fol-
liéite dans les maijon s-de campagne fituées en plaine,
la multiplicité des étages.
La façade doit principalement être analogue ao
caraétère du bâiiment, parce qu’elle tombe da-
bord fous les y e u x , 8c parce qu’elle doit'annoncer
la deftîtiation de l'édifice. Elle doit être de cette
fimpîicité noble à laquelle on peut toujours allier
la magnificence, 8c ne pas diftraire, par une variété
8c par une déchiqueture de parties îlo le e s ,
ne point étaler d’ornemens fuperflus, qui cachent
les parties principales, ni des accefloires qui détournent
rceil.de la beauté de l’enfemble ; ne point
préfenter une multitude d’angles ou de pointes
iaillantes qui détruifent l’unité de l’impreflion.
Une égalité trop parfaite de parties , dont aucune
ne fe diftingue , offre un afped maigre. Les parties
principales fe diftingueront donc par une beaute
particulière. L ’entrée principale , par exemple ,
fera élégante 8c magnifique : elle occupera le milieu
8c pourra fixer une partie de l’attention.
Outre leur néceffité , les fenêtres font encore
des moyens d’embellir les façades, qui fans cela
feroient n u e s , fur-tout lorfqu’elles ne font décorées
ni de eolqnnes ni de pilaftres. La quantité
des fenêtres dépend également de la commodité
intérieure de l'édifice 8c de la décoration des
dehors. Sont - elles en trop petit nombre , les
intérieurs deviennent triftes 8c fombres ; d un autre
côté, la multitude des fenêtres partage les dehors
en trop de petites parties, diminue par-là meme
l’idée de folidité indifpenfable pour que le batiment
faffe un bon e f fe t , 8c atténue 1 impreflion
de grandeur 8c de fimpîicité qui caufe à lam e
une émotion fi agréable. La grandeur des fenetres
doit avoir avec l’enfemblei de l’etage où elles fe
trouvent, un rapport qui réjouiffe l’oeil. Les fenêtres
font le meilleur e f fe t , lorfque leur largeur eft la
moitié de leur hauteur. La figr.ra qüawranguiâire
a ic i l’avantage fur tout autre ; les frontons, quoique
très-ufités , peuvent être ici regardés comme
un ornement fuperflu 8c peu convenable a la fim-
plicité d’une façade. f
Un des moyens les plus confiderables d embellir
les dehors d’un bâtiment font les ordres de
colonnes 8c les portiques q u i, de 1 architecture
des anciens, ont paffé dans celle des modernes,
fur-tout des Italiens. .
Les colonnes d’abord introduites par la né-
ceflité , 8c enfuite façonnées infenfiblement par
le g o û t , donnent en général aux bâtimens de la
v ie , de l’élégance 8c de la dignité. E lles offrent de
plus dans leurs formes, leurs proportions 8c leurs
ornemens, un caractère diftinét 8c déterminé.
Selon les différens degrés de richeffe 8c de ma-
je fté , de nobleffe 8c d’élégance , de fimpîicité 8c
de modeftie que comportent les maifons de campagne
, en proportion du rang de leurs pofleffeurs,
on comprend comment on pourra leur appliquer
les proportions 8c la décoration des ordres corinthien
, ionique ou dorique.
Les portiques que les Grecs 8c les Romains
pratiquoient fi v o lon tier s, tant pour la commodité
que pour l’agrément, autour de leurs édifices,
& fur-tout dans leurs maifons de campagne , peuvent
être confidérés & comme parties ajoutées
aux corps de logis 8c comme bâtimens détachés
8c formant eux-mêmes un enfemble. Nous les
confidérons ici fous le premier point de vue. Les
portiques ne fourniffent pas feulement une promenade
à l’abri de la pluie ou du f o le i l , 8c des
lieux de repos agréables , ils donnent encore aux
bâtimens un afpeét riant 8c magnifique ; ils permettent
encore au*>defîùs d’eux des galeries découvertes
, qui préfentent de nouvelles promenades,
8c une vu e lointaine plus étendue. Us conviennent
fur-tout aux châteaux de plaifance 8c aux maifons
de campagne du fty le magnifique 8c noble ; mais
ils font trop faftueux pour les maifons d’une ef-
pèce inférieure. On peut animer les entre-colonnes
L1 v U V . UV, «VOUA ------
fons de campagne italiennes , particuliérement parmi
celles qu’a bâties Palladio. Ce t ufage ne s’eft
guère introduit dans les autres pays ; il eft vrai
qu’il convient principalement aux climats chauds
où il a pris naiffance : cependant, puifque 1er
portiques contribuent fi fort à la magnificence des
bâtimens, 8c qu’ils offrent par-tout en été un ufage
commode 8c agréable, il feroit à fouhaiter qu’on
en trouvât un plus grand nombre, fur-tout auprès
des châteaux de plaifance 8c des maifons- de ’campagne
du ftyle n o b le, édifices auxquels ils font fi
bien affortis.
Le toit ne contribue fouvent en rien à la beaute
de l’édifice ; mais lorfqu’il eft néceflaire , il faut
tâcher que fa forme ne nuife pas à ia nonne ap*
parence du bâtiment.
Pius un toit eft plat 8c peu é le v é , plus il
eft agréable. Un toit fimple eft plus conforme aux
maifons de campagne. Si les toits brifês ou à man-
fardes femblent procurer des commodités , cet
avantage eft bien racheté par le v ic e de la forme
8c la lourdeur de l’afpeét.
Les plus beaux toits font les coupoles qui
appartiennent aux bâtimens -circulaires ; de loin
elles offrent un coup-d’oeil fuperbe ; 8c l’on feroit
prefqae tenté de les recommander par cette feule
ra ifon , fi les bâtimens ronds ne tiroient pas d’ailleurs
tant de beautés de leur figure. Les coupoles
paroiffent convenir principalement aux maifons de
campagne élégantes , qui confident en un feul corps-
de-logis fans ailes ou bâtimens adjacens, 8c qui
doivent fe diftinguer par la délicatefîe 8c l’agrément,
Elles procurent le moyen d’éclairer les dedans
par le haut, 8c font intérieurement le plus
bel Æffet.
Quelquefois auffi on peut pratiquer fur les
maifons de campagne un comble à terra fle, ou
tronqué avec une galerie découverte aû-defiùs
des poutres, qui terminent, à proprement pa rler,
l’éd ifice, 8c rendent inutile un toit rehatiffé. O n
entourera la galerie d’une baluftrade également
folide 8c élégante. D ’ici l’on découvre en liberté les
lointains, 8c le fo i r o n y refpire une fraîcheur agréable.
G’eft pourquoi cette manière de bâtir con-
O g g z