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le confidérât dans le. corps. D ’après c e la , & ce
qui a été dit précédemment, ne peut-on pas re-
connoître dans l’architeélure trois efpèces de beau,
un qui s’adreffe au fen s , un qui eft relatif à l’entendement
, un qui a ffe â e le goût ; c’eft-à-dire ,
un beau fenfible , un beau intelle&uel, & un beau
conventionnel ?
Entendant toujours par beau une réunion de
qualités analogues à telle ou telle fa cu lté , pour
favoir s’ il eft dans l’architeôure des qualités positives
& abfolues, ou fi elles ne font que relatives,,
la méthode à Suivre feroit d’examiner fous
un autre a fp e â , les facultés fur lefquelles nous
avons v u que l’architeâure avoit de l’aâ ion.
La nature fans doute peut varier à l’infini les
modifications des fens ; & l’on ne fauroit nier que
l ’habitude, le préjugé , l’éducation n’en étendent
o u n’en refferrent plus ou moins le reffort, félon
les caufes phyfiques ou morales qui ont de l’influence
fur eux. Les fens peuvent donc être émus
de différentes manières par les arts qui peuvent
exciter les pallions. Mais nous avons v u que
l ’a â ion de l’architeâure fur l’organe de la vue
étoit une a&ion plus relative à la vijion, qu’aux
idées ou aux images dépendantes de l’impreflion
du fens. Nous avons v u que c’étoit dans la conformation
d& l ’organe qu’exiftoit la mefure des
rapports principaux que l’art peut avoir a v ec lui.
I l paroît donc confiant que cette mefure doit être
à -p e u -p r è s la même p a r- tou t & chez tous les
peuples dont l’organe fera conftitué de la même
manière. Les fenfations pénibles ou agréables
doivent donc fe rencontrer, les mêmes par - tou t ,
f i pa r-tou t l’oeil eft fo r c é , par une organifation
uniforme, d’être affe&é de la même manière. Sans
doute , s’il eft un peuple dont la vu e foit plus
foible ou plus co n fu fe , les rapports dè grandeur
& de force ne feront plus les mêmes. Une vu e
plus diftinâe & plus forte y opéreroit aufli d’autres
changemens : mais il femble qu’à cet égard la
nature ait fuivi des loix affez uniformes ; du moins
les variétés qu’on peut y ©bferver ne font que
des nuances peu fenfibles.
La perfection de l’organe, car fans doute il eft
fufceptible d’en acquérir , eft celle qui réfulte de
l’expérience, de l’habitude de comparer, de faifir,
de rapprocher ; elle eft , comme on l’a d i t , liée à
l ’entendement jufqu’à un certain point : mais en
fuppofant l’organe de tous les peuples fufceptible
de l’acquérir, tous n’arrivent point à cette fenfi-
bilité qui avertit l’ame des impreflions avant que
celle-ci les ait examinées. D è s - lo r s , quoique le
fens foit le même p a r - to u t , & que les fenfations
doivent être du même genre,.elles ne fe trouvent
point réveillées par-tout au meme degré. V o ilà
pourquoi les qualités de grandeur & de forcé peuv
en t être appréciées parr-tout de la même fa ç o n ,
fans que fes effets fe développent de la même manière.
Cependant en voit que nos fenfations, étant
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le rêfultat d’une conftitution affez uniforme du fens
de la v u e , feront aufli la bafe la plus univerfelle
& la moins variable des principes du beau en ar-
chiteéhire , & que l’application pourroit s’en faire
à farchite&ure de tous les peuples.
Si l’on examine la nature de nos perceptions,'
on verra que l’entendement d’où elles réfultent,
n’arrivant pas chez tous les peuples au même
degré de perfection , il n’eft pas poffible de croire
que tous les effets qui en dépendent puiffent jamais
ê tre,les mêmes par-tout. Cependant, par la nature
de la liaifon qui unit notre entendement à
nos fen s , on a remarqué qu’il devoit y avoir chez
tous les peuplés des perceptions uniformes, &
dont le principe étoit fondé fur la facilité d’apper-
ce voir certains rapports qui doivent frapper les
conceptions les plus groflières , d’accord avec les
fens. D u moins , par les effets que l’on obferve
généralement par-tout, doit-on préfumer que les
perceptions qui les produifent font aufli générales
& communes à tous les hommes. Ce s rapports
font généralement ceux de la folid ité, comme la
perpendicularité des colonnes, le parallélifme des
étages, la fymmétrie des membres qui fe répondent,
tout enfin ce qui peut fe fonder fur les. principes
de la géométrie. O n né fauroit dou te r, par lac«
cord univerfel de tous les peuples, que la nature
n’ait gravé en quelque forte ces principes généraux
chez tous les hommes.
Si ces rapports pouvoient être la bafe de tous
ceux qu’un entendement plus fu b t il, que la con-
noiffance de notre ame , que le concours des autres
arts ont fait appercevoir dans l ’archite&ure , nul
doute que les principes des proportions trouve-
roient aufli dans la nature une bafe invariable. L’on
en concluroit que les rapports de proportion fe
trouveroient être les mêmes chez tous les peuples
a r r ivé s , par la culture de l’e fp r it , au degré de perfection
néceflaire pour en faifir la juftefle , en ref-
fentir les befoins, & fur lefquelles les mêmes caufes
morales auroient influé au même degré.
O n voit que la réponfe à la queftion du beau,
abfolu ou relatif exigeroit une difeuflion métaphy-
fiq u e , qui demanderoit l’étendue d’un traité. Aufli,
comme nous l’avons annoncé, ne prétendons-nous
qu’ indiquer les routes qu’on devroit fuivre dans
une pareille difeuflion. C ’eft d’abord de l ’uniformité
de nos fens quç réfulteroient les donnée*
les plus certaines , & les bafës les moins équiv
o q u e s ; il faudroit appuyer fur nos fenfations les
rapports généraux des conceptions qui fe trouvent
être les mêmes chez tous les hommes, & qui font
ceux de la néceflité. D e- là on déduiroit les rapports
abftraits de convenance d’ordre & d’harmonie
, qui ne font apperçus que par les peuples les
plus perfectionnés, & qui exigent les perceptions
les plus délicates, & ne font pourtant qu’une çoiv
(equence des autres.
Si le peu qu’on a dit laiffe entrevoir les con-
féquences que donner-oit l’examen approfondi des
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facultés de l’ame auxquelles l ’architeCture s’adrefîe,
jl femble qu’on peut prononcer d’avance qu’il y
a dans l’architeCture un beau effenriel & ab fo lu ,
généralement reconnu par tous les hommes, &
dont l’architeCture de tous les peuples porte l’empreinte
; c’eft celui q u i , par les rapports des di-
menfions- •& les qualités de la grandeur & de la
force, s’adreffe au fens : qu’il y en a un autre
non moins ab fo lu , quoiqu’ il le paroiffe m o in s,
parce que l’organe fait pour l’appércevoir ( l ’entendement)
n’arrive pas chez tous les peuples à
la perfection néceflaire pour le comprendre ; c’eft
celui q u i, par les rapports de proportions & les
qualités d’ordre & d’harmonie , s’adrefîe à nos
perceptions.
Nous a v o n s , comme on l’a pu v o i r , exclu la
troifième faculté de l’ame de l’examen qui pourroit
tendre à découvrir le beau ab fo lu , non pas
que les qualités qui y font relatives, ne foient de
naturè à conftituer l’univerfalité du beau, mais parce
qu’il eft impoflible de fixer les affeCtions de l'âme
par des principes conftans & dépendans d’une conftitution
uniforme.
Rien de plus variable que nos affeCtions, rien
de plus indéterminé que les loix du g o û t , rien
de plus mobile que leur application à l’architeCture.
Les fens n’ép rou v en t, fi l’o n , peut d ire , aucune
variété chez tous les peuples ; l’entendement en
éprouveroit peu , fans les obftacles qui s’oppofent
à la perfection dont il eft fufceptible : mais le goût
tient à des nuances fi lég è re s , qu’elles échappent
fouvent à la recherche même qu’on en fait. L e
fentiment les apprécie ; mais ce fentiment eft le
plus variable chez taus. les peuples.
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fait contrefort, fert à divifer l’eau & rompre les
glaces. ( Voye^ Avant & Arrière-Bec.)
Corbin , f. m. c’eft une moulure qui
ne diffère du quart de rond que par fa fituation
naturelle qui eft renversée. C e t ornement prefque
abfolument négligé par les anc iens, eft fort en
ufage chez les modernes.
Bec de Corbin ( Jardinage. ) On entend, par ce
mot. enr'°u'lement formé d’un-triait dé buis , en
marnere de bec d’oifeau , dans un parterre de bre«
derie. ( Voyei Buis, Parterre.)
B E F R O I , f. m. C ’eft dans les villes de g u e r re ,
ou dans les places à portée de l’enn emi, une tour,
un c lo ch er, ou quelque lieu é le v é , dans lequel
eft une cloche qui foniie lorfqu’on apperçoit l’enn
em i, ou qu’on veut affemblér les troupes. Dans
les villes de guerre on fonne le befroi à la pointe
du jour pour l’ouverture des portes.
Befroi, ( Coriflruttion. ) eft un affemblage de
charpente qu’on pofe dans une tour pour fuf-
pendre des cloches. Il faut que cette charpente
foit ifolée de la tour dans toute fa hauteur. On.
la fait pofer fur une retraite formée aux dépens
des murs, ou fur des corbeaux de pierre. La première
méthode eft préférable, parce que le mouvement
des cloches agit av ec moins de force. Il
faut obferver que plus le befroi eft é le v é , plus il
fatigue la^ tour. A in fi , l’on doit avoir attention
de ne lui donner précisément que la hauteur convenable
pour le jeu des cloches.
B E L V E D E R , ou Belvedere , f. m. mot tiré de
l’italien , qui fignifîe belle vue . L ’ufagé l’a confacré,
en Ita lie , à des bâtimens faits exprès pour goûter
le plaifir d’une belle vu e , ou à de petits donjons
qui s’élèvent au-deflus des maifons, qui les couronnent
agréablement, & dans lefquels on monte
pour prendre le frais, & jouir des différens afpeCts
que la nature y préfente avec tant de variété.
Prefque toutes les maifons de Rome en ont de ce
dernier genre. Les belvédères de la première efpèce
fe cônftruifent ordinairement dans les palais des
riches & dans les jardins de plaifance. Le plus fameux
de tou s , le plus beau & 'le plus remarquable
fous tous les rapports, eft le belvedere du Vatican.
C e grand édifice , conftruit par Bramante, étoit
autrefois féparé du palais pontifical ; il y a été
rejoint depuis par deux longues galeries qui s’étendent
v e r s -le nord. O n y jouit de la vu e des
campagnes très - r ic h e s , q u i , de ce côté , en vironnent
la v i l le , la chaîne des Apennins, dont la
neige blanchit les cimes une grande partie de
l’année /forme le fond du plus magnifique tableau
que l ’oeil puiffe embraffer ; le devant eft occupé
par la v ille même de R om e , qui s’y développe
dans toute fon étendue. C ’eft d e - là qu’on peut
dire av ec Martial :
Hinc feptem dominos videre montes
E t totam licet eftimare Romam.
Le fuperbe fpeCtàcle extérieur qui a fait donner