
«leur & la folîdité de la conftru&ion. En effet,
dans les fourneaux des bains, on employoit le
bois & la flamme qui , parcourant toute la l'uper*
ficie du plafond, devoit avoir une toute autre
activité que le charbon dont il paroît qu’on fe
fervoit dans les maifons. On dit qu’il paroît, parce
qu’à une des maifons de Pompéii, on a trouvé
encore dans une chambre fouterreine un amas de
charbons. Je renvoie donc pour la connoiffance
plus précife de cette conftruction à l’article Bains ,
& à la fig. 204, ainfi qu’au motHYPOCAUSTE , où
l’on trouvera de nouveaux détails fur cet objet.
L’ufage d’échauffer les habitations par le moyen
des poêles fouterreins , fut général dans tous les
pays où les Romains étendirent leur domination.
On trouve par-tout' de ces hypocauftes qu’on
a peut-être trop légèrement atttibués à des bains.
M. Schoephlin a trouvé en Alface des étuves &
des chambres à tuyaux , difpofées comme celle
qu’on vient de décrire. A l fat. t. 1 ,p . if. A Hoppes,
qui eft à fix milles de Chefter, on a découvert
un hypocaufte dont on a parlé à l’article Bain.
On en a trouvé à Tufculum ; & fi l’on confidère
que de toutes les manières de fe chauffer, celle
dont on a indiqué le procédé eft la plus fimple ,
la plus a&ive , & peut-être la plus économique,
ün ne demandera plus pourquoi l’on' ne trouve
pas de cheminées dans les chambres des anciens , :
mais pourquoi ils en auraient. eu.
En réfumant tout ce qui vient d’être dit, il
doit paffér pour confiant que les anciens connurent
& employèrent la forme de nos cheminées,
compofées d’un âtre ou foyer, où l’on brûleHu
bois, M. d’un tuyau pour en dégager la fumée;
mais il eft vraisemblable aufli [qu’elles étoiont
affeâéesà certains befoins, comme à ceux de la
cuifine, feule pièce des habitations où Vitruve en
faffe mention. Il eft bien prouvé en outre que
la méthode d’échauffer une maifon en général par
le moyen des poêles fouterreins , & des tuyaux
de chaleur qui circuloient dans tous les murs , dévoient
difpenfer chaque pièce de la maifon d’avoir
un foyer particulier. C’eft pour cela qu’on
trouve, dans tant de maifons, des veftiges d’hy-
pocauftes, fans qu’on voie dans aucunes de leurs
chambres des indications de cheminées.
Des cheminées che^ les modernes,
Deux raifons ont contribué à multiplier, dans
le nord de l’Europe, les foyers particuliers qu’on
appelle cheminées ; la rigueur des hivers, & le
nombre eonfidérable d’étages qui forment autant
de maifons que celles-ci ont de locataires, ce
qui rendroit difficile le procédé général dont on
a parlé chez les anciens ; procédé qui ne corive-
xioit qu’à une feule habitation & à un feul propriétaire.
Au refte , les poêles qu’on pratique
4 ans les appartepiïns, en Ruflie, ont un rappott
avec les hypocauftes des anciens, comme on le
verra au mot Poele. Mais le midi de l’Europe
n’a rien confervé de cet ufage. Soit, comme l’ont
prétendu quelques écrivains, que les hivers foient
plus tempérés qu’ils ne i’étoient autrefois, foie,
que la modicité des fortunes particulières n’ait
jamais permis à ces procédés difpendieux de fe
renouveller & de s’étendre, on ne voit.que très-
peu de cheminées dans les maifons de l’ Italie 6c
de l’Elpagne. La feule manière de corriger, dans
l’intérieur des appartenons, l’influence des frimas,
c’eft d’entretenir au milieu des pièces, un foyer
portatif, qu’on appelle brafier ( voyeç ce mot) ,
où l’on me brûle que du charbon.
Cet ufage eft aulfi général dans les palais des
grands 6c des riches, que dans les maifons des
moindres particuliers; cependant on trouve aufli
l’ufage des cheminées morçleines dans les plus
anciens palais : je ne parle point de celles qu’on
pratique dans Us cuifine s, & qui font communes
à toutes Tes maifons ; je parle de ces cheminées
de décoration 6c de parade que l’on a imitées en
France, & dont on trouve des copies plus ou
moins riches dans nos anciens châteaux.
Ce qu’on a à dire fur les chemb.ées chez les
modernes, p:ut fe divifer en deux parties ; l’une
qui concerne les cheminées dans , l’intérieur des
appartenons', 6c l’autre qui a rapport à l’extérieur
des cheminées, c*eft-à-dire, à leurs tuyaux au-
deflùs des combles des maifons.
Ce qui regarde les cheminées dans les intérieurs
des maifons , nous préfente quelques obfervarions
à faire-fur leur forme, fur leur décoration 6c
fur leur fituation.
La plus ancienne forme des cheminées on la
retrouve, je l’ai déjà dit, dans les anciens palais.
La grandeur des pièces où elles figurent exigeoit
la hauteur 6c la grandeur des dimenfions qu’on
y voit. Long-tems aufli, même dans les maifons
' particulières , les cheminées furent tenues très-
hautes 6c très-larges; alors un feul féu raffembloit
6c échauffoît toute'- la famille. Depuis que la
commodité intérieure a exigé la diminution &
le rapetiffement. des pièces, les cheminées ont
diminué en même proportion, & ont augmenté
en nombre. Le genre de décoration afft&é aux
cheminées, n’a pas influé pour peu fur leurs formes;
autrefois on y appliquoit toute la richefle des
formés de l’architeélure, de celles du moins qu’on
employoit aux portes & aux fenêtres. Quelques
cheminées d’Italie font embellies de colonnes d’en-
tabie/nens,& d’autres le font deflatues; telle eft
celle de la grande falle du palais Farnèfe, dont
le couronnement eft formé par les deux ftatues
allégoriques que Guillaume de la Porte avoit
deftinées au tombeau d’Alexandre VII , mais
qu’il jugea lui-même trop médiocres pour figurer
dans l’églife de faint Pierre.
Les cheminées de l’hôtel-de-ville de Paris, bâti
par Dominique de Verone, au bon gQÛt près,
C H E
ie la fculptvire qui les décore, font des imitations
de celles du palais Farnèfe. Les marbres & les
niétaux brilient encore dans, les cheminées du
palais de Verfailles, conftruites prefque toutes
dans le même goût & dans les mêmes dimenfions.
Des tableaux ornent ordinairement leur
manteau , où des bulles &. des bas - reliefs le
trouvent adoffés.
Ces cheminées, il faut l’avouer, font un bel
effet dans l’ènferoble de la décoration des anciens
palais., elles ont. quelque cho.fe de noble & d’im-
pofant ; & quels que foient les vices d’enroule-
mens, de cartouches & autres mefquineries fem-
blables qu’on y retrouve quelquefois, il faut
avouer que la décoration des intérieurs a perdu
au nouveau fyftême de la dtfpofition des cheminées.
( Vt,ye{ les fig 93 & 94> , .' .
C ’eft particuliérement à la mode des glaces
qu’on doit ce changement. Decotte, premier archi-
teéle du ro i, eft le premier, dit-on, qui ait introduit
l’ufage des glaces fur les cheminées. Mais
d’abord cette invention n’avoit point banni toutes
les autres efpèces d’ornemens. Les glaces atteinrent
infenfiblement à un point de grandeur qui n’a
plus permis d’y affocier d’autres objets- Les chambranles
des cheminées fe rapetiffèrent à proportion
que les , glaces augmentèrent de volume & d’e-
tendue, & ce goût eft devenu fi général, qu’on
ne voit plus en France une feule cheminee ians glace*
( Voye^ Glace ).
La grandeur ordinaire, des cheminées, depuis
long-temps, n’eft fixée que par celle des pièces.
Leur chambranle ne fnrpaffe point ordinairement
trois pieds un quart de hauteur , dans les appartenons
de fociété- Mais dans les grandes fales ,
les antichambres, les fales des gardes , les galeries
, &c. elles peuvent être de fix pieds de hauteur
, ainfi que celles du palais royal, de l’hôtel de
Tôuloufe, qui font les plus remarquables de Paris.
On fait les chambranles des cheminées les plus
ordinaires , de pierre de liais, que ion peint en
couleur de marbre. Mais il eft rare qu aujourd’hui
l ’on n’emploie point le marbre à ces revêtif-
femens. Le marbre blanc, quoiqu’il foit fort en
.ufage dans ce genre,eft celui.pourtant qui fem-
bley convenir ie moins; la fumee en altéré hien-
tôtl’éciat.L’on travaillé à Rome de ces chambranles
avec les matières les plus précieufes. Le porphyre
& le granit , la mofaïque & .les ornemens de
bronze qu’on y applique , en font des objets de
curiofué , qu’on deftine ordinairement aux étrangers
, les feui$r qui y mettent le prix qu’ils valent.
Car , pomme on l’a dit, l’ufage des cheminées
n’eft pas allez commun dans ce pays , pour que
l’on puiffe en attendre le débit. L’on peut citer
plufieurs de ces ouvrages comme des modèles-clu
goût, & de la décoration qui peuvent encore
convenir à ce, genre.
C ’eft-là fur-tout que le goût arabefque peut trouver
place d’une façon convenable; car la petitefle de nos
C H E 639
1 cheminées aéluelles ne permet plus d’y employer,
avec vraifemblance , les membres de 1 architecture.
Les jambages, la traverfe peuvent recevoir des
rinceaux, des enrôlemens, des cannelures , & tous
les objets de détail donr les compartimens égaient
la vue. < .
La fituation des cheminées n’eft pas indifférente
dans les pièces d’un appartement. On doit fe
donnêr de garde de les adofler contre le mur
de face, entre les fenêtres , parce qu’elles chargent
le mur, & que leur fouche paroît trop hors du
comble. Elles doivent, autant qu’il eft poffible , fe
préfenter en entrant, mais rarement devant une
porte. Il faut non-feulement affe£er qu’elles fe
trouvent à droite dans la principale porte d en^
trée, mais qu’elles foient placées dans le milieu
de la.pièce, afin que vis-à-vis on puiffe, fi ou
le veut, leur oppofer un trumeau de glace de la
même largeur que celle de la. cheminée, & enrichi
des mêmes - ornemens, a l’exception de&
chambranles , à la place defquels on met une table
ou tout autre meuble principal. C eft par le fecours-
mutuel de ces deux glaces placées vis-à-vis l’une
de l’autre, & dans uffe direction bien parallèle,
que la réflexion des lumières le perpétue, & donne
aux pièces un air de grandeur qui forme 1 effet qu on-
y recherche ,lorfqu’elles font placées avec cette précaution,
& qu’elles font réitérées dans le pourtour
d’une pièce.
Ce qui refte à dire fur les cheminées concerne
leur partie extérieure , c’eft-à-dire, les tuyaux quï
s'élèvent au-deffus des combles des maifons.
Je ne dirai rien de leur conftruétion , qui e(ï
le plus fou vent en plâtre , quelquefois en briques,
pofées de plat, & rarement en pierre de taille.
Les tuyaux conftruits de cette dernière façon
ne fë voient guère qu’aux châteaux anciens & aux
maifons royales. Les bâtimens du Louvre & des
Tuileries nous en offrent de fompteux exemples..
On a de tout temps admiré leur hauteur , lai
foliditéde leur conftruâion, St la richeffe de leur
décoration. Il ne refte , fuivant moi, qu’une feule-
chofe qu'on n’y a jamais aflez remarquée, c’eft;
l ’inutilité de tbut ce luxe, & l’abus d’ornèmens prodigués
à des objets qui, n’étant que d’une utilité
groflière, & d’un ufage pen noble , n’auroient jamais
dû fe concilier une attention fi particulière,
ni jouer dans les bâtimens un-rôle fi important-
Je fais que la hauteur démefurée des combles
qui écrafent les édifices en queftion , néceflitala
hauteur défordonnée de ces cheminées, & que
celles-ci acquérant par-là une maffe extraordinaire,
fuggérèrent l’idée de corriger, par la décoration ,
ïinfipidité de leur afpeû. Mais je fais aufli qu’on-
n’exeufe point un vice par un autre vice. On
doit touj: Amplement conclure de ceci que les
comblesjélevés- font u n ridiculed’autant plus grand
dans les bâtimens , qu’Us_entraînent avec eux la
conféquence plus ridicule encore des cheminées
dont en a parlé.