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des inortaîles & des tenons , dans lefquels on enfonce
les chevilles à coups de maillet ou de marteau.
Quelquefois ces chevilles font faites de manière à
pouvoir s’ôter, lorfqu’on veut (démonter les pièces
qu’elles unifient, alors elles font plus longues que
les pièces qu’elles doivent traverfer , afin qu’on
puifle les faire fortir, en les frappant par le petit
bout. Les charpentiers ont pour cet ufage des
chevilles de fer qu’ils appellent chevilles d’aflem-
blage. Elles ont par le bout un talon percé d’un
ceil. Leur grofleur eft d’environ un pouce , 8c leur
longueur de dix à douze. Ils font ufage aufil de chevilles
barbues, qui font hériflees de dents, dont la
pointe eft du côté de la tête de la cheville, afin qu’étant
chafl'ées & enfoncées à force dans le bois, elles ne
puiflent plus fe retirer. Il y a encore des chevilles
qui fervent d’échelons, comme celles que l’on met
autour des roues de treuil aux angins qui fervent
à élever les fardeaux ou à battre les pieux. On donne
à ces chevilles le nom de ranches , 8c on appelle
ranckers les pièces de bois garnies de chevilles.
Cheville, défigne encore une mefure dont on
fait ufage dans plufieurs pays, fur-tout à Rouen,
pour éyaluer les bois de charpente. La cheville eft
un morceau de bois d’un pied de long fur un pouce
de gros. ( Voye* Charpente. )
CHEVILLETTES, f. f. pl. ( confruttion). Ce
font des efpèces de grands clous à têtes & de petites
chevilles de fe r , dont on fait ufage dans la charpente
pour arrêter des madriers & des plates-formes.
CH E V R E , f. f. (conflruSlion). Machine à élever
les fardeaux dont fe fervent les charpentiers & les
snaçons. La chèvre eft compofée de deux bras for-
. mant enfemble un angle aigu de vingt à vingt-cinq
degrés. Ces bras font unis par plufieurs entretoifes ;
dans le bas, à environ trois pieds de hauteur, eft
placé un treuil horizontal, qu’on fait mouvoir avec
des barres ou leviers. On entortille fur le treuil
un cable dont un bout pafle fur une poulie ajuftée
au haut de la chèvre.
Lorfqu’on veut faire ufage de cette machine r on
la tient un peu inclinée par le moyen de trois cordages
attachés à fon fommet ; deux de ces cordages ,
qu’on appelle aubans , qui font du côté oppofe au
fardeau que l’on veut lever \ & le troifieme, du
même côté , fe nomme guide. Aux petites chèvres ,
en place d’aubans & de guide, on ajoute aux deux
bras une troifième pièce de bois qu’on appelle bïcoq
eu pied-de-chèvre, par le moyen duquel elle fe
foutient. Dans plufieurs provinces de France on
donne le nom dyéchelle d'engin aux grandes chèvres.
CHEVRON , f . m. ( conjlrufiion). Pièce de bois
de charpente, de trois à quatre pouces de gros, qui
fervent à porter les lattes fur lefqnelies on pofe
les tuiles ou l’ardoife qui doivent couvrir un toit.
Dans un comble à deux égouts, les chevrons unis par
le haut forment un angle. Cèft cette figure qui a
fait appellçr chevron prefque tout ’ ce qui a une
forme angulaire. On foutient les chevrons d’un
toit par d’autres pièces de bois pofées en travers,
qu’on appelle pannes, fur lefquelles on les arrêttf
avec des chevillettes. En terme de charpente, on
dit que les chevrons font brandis fur les pannes,
pour dire qu’ils y font arrêtés.
Chevrons ceintrés. Ce font des chevrons qui
font courbés 8c aflemblés dans les liernes d’un
dôme.
Chevrons de croupe ou Empanons. Chevrons
qui font inégaux, & attachés fur les arêtiers de la
croupe du comble.
Chevrons de ferme. Ce fçnt les deux chevrons
encaftrés par le bas fur l’entrait ( voye^ ce
mot), & joints en haut par le bQut au poinçon.
Chevrons de long pan. On appelle ainfi
ceux qui font fur le courant du feite 8c des pannes
de long pan du comble.
Chevrons de remplage. Ce font les plus
petits chevrons d’un dôme, qui ne fuivent pas dans
les liernes, parce que leur nombre diminue à mefure
qu’ils approchent de la fermeture au pied de
la lanterne.
CHIFFRE, C m. Terme de décoration* C ’eft
un entrelacement de lettres fleuronnées en bas-
relief ou à jour, qui font ordinairement les lettres
initiales du nom d’une perfbnne, 8c qui fert d’ornement
dans Farchite&ure , la ferrmrerie , la menui*
ferie 8c les parterres de buis.
CHIMÈRE, f. {. terme de décoration» C’eft un
monftre febuleux qui a la tête 8c l’eftomac d’un
lion , le ventre d’une chèvre, 8c la queue d’un
dragon.
Un voit très-fréquemment cette forte de figure ^
dans les monumens gothiques, fervir dë gargouilles
8c de corbeaux. L’airchiteéhire moderne femble
avoir tout-à-feit rejetté cet ornement, qui n’eft plus
en ufage.
Le mot de chimère vient du latin chimcera, qut
fignifie la même chofe , 8c qui a été feit du grec
chimaira , chèvre d’hiver;.
CHIMÉRIQUE , adj. Se dît de tout ouvrage
auquel fe. fentaifîe feule a donné naifiânee ; c’eft fur-
tout dans l’ornement 8c le s décorations àrabefques
qu’on a fréquemment l’occafion d’employer ce mot.
CHINOIS JARDINS. D*après les Mémoires
authentiques des Mifßonnaites de Pékin ,fur l'hifioire des
fciences , des arts , des moeurs & des ufages des’ Chinois ,
les jardins de ce peuple remontent à l’antiquité la
plus reculée. Nous fiiivrons leur rapport dans l’hif-
toire abrégée que nous allons en tracer.
Les premiers empereurs n’avoient autour de leur
palais que des jardins, moitié vergers, moitié enclos
; 1a grandeur feule les diftinguoit de ceux des
particuliers. Tcheou, le Néron de la Chine, qui
mourut l’an 12.22, avant J. C. fut le premier qui ofa y
introduire un fàfte infenfé, un luxe ruineux 8c une
magnificence infultante. Il arracha de leurs terres
des milliers de colons, pour étendre à fon gré les
jardins antiques de fes prédécefleurs, y changer
les plaines en chaînes de collines 8c de montagnes,
y creufer des baffrns immenfes, y conduire des
taux par des digues 8c des levées énormes, y
étonner la terre par des plantes 8c des arbres qui y
paroifîoient tout-à-coup dans «toute leur grandeur,
comme dans les régions éloignées dont ils avoient
été tirés, 8c y réunir enfin tous les agremens de fe
campagne dans chaque feifon.
Son fuccefleur rendit fes jardins a,l’agriculture.
Pendant plufieurs fiècles le luxe n’entreprit rien fur
la fimplicité des jardins ; l’hiftoire ne fait mention
que des jardins placés au nord 8c à l’occident du
palais, où l’impératrice. 8c toute fe cour alloient
cueillir des feuilles de mûrier pour les vers à foie ,
dont ce grand exemple accréditoit 8c illuftroit les
fiiccès.
Dans le huitième fiècle avant l’ere chrétienne
, les empereurs attirèrent dans leur nouvelle
capitale les artiftes les plus célébrés, 8c les occupèrent
à leur bâtir des palais magnifiques, 8c à les
orner de jardins dignes de foutenir la haute prééminence
qu’ils tâchoient de conferver fur les princes
de l’empire. Les princes à leur tour voulurent
lutter de grandeur avec les empereurs, l’emporter
en magnificence fur eux, 8c avoir dés jardins qui
fuflent plus admirés que ceux de 1a capitale. Leurs
vaflaux, leurs grands officiers, les riches leur firent
leur cour en les imitant ; 8c tous les environs des
villes, qui avoient été des champs jufqu’alors, devinrent
des maifons de plaifance 8c des lieux de
délices.
Mais les guerres étant devenues prefque continuelles
entre les princes, qui fe liguoient, tantôt
avec l’empereur, tantôt contre lu i, la dynaftie
régnante ayant été détruite, 8c toutes les principautés
particulières anéanties, ces jardins de délices
8c de volupté furent inondés de feng, livres aux
flammes, 8c changés en des lieux d’horreur 8c de
défolation.
Le conquérant, vers la fin du troifieme fiecle
avant J. C . , voulut jouir de fes fucces par la
beauté de fes jardins, ainfi que par fe magnificence
de fes palais 8c la pompe de fe cour , ce
qu’en raconte l’hiftoire , montre aflez que ne pouvant
furpafler l’élégance , la propreté 8c 1 éclat des
jardins de plaifence de fes prédeceffeurs, il ne vifa
qu’à les furpaffer en grandeur. Celui qu’il fit faire
avoit plus de trente lieues de circuit. U le remplit
d’animaux, de poiffons, doifeaux, d arbres, de
plantes 8c de fleurs de tous les pays. L hiftoire dit
en termes formels, qu’il y reunit plus de trois mille
efpèces d'arbres. Pour fe donner le plaifir d y jouir
de toutes fes viâoires à fe fois 8c en detail, il y
bâtit autant de palais qu’il avoit détruit de principautés,
8c ces palais étoient bâtis fur le modèle du
plus beau de chacune. Tous les jours il ajoutok de
nouveaux ornemens aux palais, aux parterres , aux
bois, aux baftîns, aux canaux & aux grottes.
J Ces excès allèrent croiffent dans fe fuite. La
Chine a furpaffé 8c effacé tout ce qu’il y a jamais
eu de plus magnifique 8c de plus étonnant dans ; le
refte de Vunivers en jardins de plaifence 8c de volupté*
Les plus grands qii’on connoiffe en Occident, ne
font q u é des parterres, f i oa les compare à celui de
l’empereur Ou-Ty des Han, qui avoit plus de cinquante
lieues de tour , 8c étoit tellement femé de
palais, de maifons, de cabinets, de grottes, que
chaque vallée y offroit des fcènes 8c des décora^
tions dont 1a magnificence épuifoit l’admiration.
Trente mille efclaves étoient occupés à les cultiver
, 8c tout l’empire à y envoyer, pour chaque
feifon, ce qu’il y avoit de plus beau dans toutes les
provinces, en plantes 8c en fleurs, en arbriffeaux Sc
en arbres.
Ses fucceffeurs, jufqu’au feptième fiècle de notre
ère, allèrent encore plus loin. Ils renoncèrent, à la
vérité, au fol orgueil dé convertir des contrées
entières en jardins : les plus immenfes ne furent que
de dix-huit à vingt lieues de circuit. Les uns voulurent
créer eux-mêmes leurs jardins, 8c affectèrent
de çhoifir les lieux les plus arides 8c les plus
v difgraciés de la^ nature,' pour y lutter avec elle, par
les efforts du travail, la vaincre par les reffources
de l’induftrie, 8c la furpaffer par les foins d’une
culture encore plus difpendieufe que pénible 8c
raffinée. Les autres changèrent tout dans îés empla-
cemens qu’ils avoient choifis : les montagnes 8c les
collines furent applanies, ou même creufées en
étangs 8c en vaftes baffins, les vallées 8c les plaines ,
à leur tour, furent couvertes de collines. Ceux-là
eurent la manie des eaux. Après les avoir conduites
dans leurs jardins à grands frais, de plus de vingt-
cinq ou trente lieues, ils les répartiffoient dans des
baffins, des étangs 8c des ruiffeaux qui entretenaient
la fraîcheur 8c la verdure, portoient par-tout une
impreffion de vie 8c de mouvement, 8c varioient à
chaque pas fe perfpeétive charmante des- divers
points de vue qu’ils embelliffoient. Ceux-ci entreprirent
de réunir dans leurs jardins tout ce qui eft
epars, difperfé 8c femé çà 8c là dans les plus im-
menfes régions. Gorges 8c défilés, plaines 8c vallons
, chaînes de rochers. 8c forêts, champs 8c prairies
, lacs 8c étangs, rivières 8c ruiffeaux, villes,
villages 8c hameaux, chemins, fentiers, ponts 8c
paflages ; l’enceinte de.leur jardin réuniffoit tout, 8c
étoit comme le raccourci de l’univers.
Enfin , les empereurs ne pouvant plus difputer de
gloire avec leurs prédéceffeurs, dans tout ce qui
; etoit une imitation de fe nature, appelèrent tous
les arts à la fois dans leurs, jardins, 8c en obtinrent
des chefs-d’oeuvre, des merveilles 8t des prodiges
en tout genre. L’architeéhite ,.fe fculpture, la peinture,
cherchèrent à fe furpaffer de génie 8c d’invention
dans les palais, les galeries, les tours,. les;
felons ., les cabinets, les bâtknens de toutes les-
formes 8c de toutes les grandeurs, qui, quoique
bâtis fouvent de bois odorant, ou de marbre p ré-
; deux , étoient encore ornés-de porcelaines , 8c. tout
; brillans d’or 8c d’argent.. Les uns sfelevoient à perte
; de vue , au milieu des eaux , les autres étoient bâtis
fur des montagnes ou fur des rochers, 8c fufpendus
fur des prétipices» On en voyoit qui étoient rap—