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La décompofition. du bois peut arriver à deux
époques : lorfque le bois eft vivant, & lorfqu'il eft
mort.
Dans le premier cas, elle eft communément le
ré fui tac de l’ infiltracion de l'eau dans l'intérieur
de l’arbre i cetce eau attaque peu à peu le bois, y i
diffout le fuc nourricier, fermente, fe décompofe, :
détruit les compofés néceffaires à l’exiftence du
bois3 le charbonne & l’amène graduellement à
l’état de terreau. La corruption s’étend , détruit
le coeur de l ’arbre, & il ne refte fouvent que
l’aubier 8c l’é corce, entre lefqueis les fucs nourriciers
font portés dans les branches pour les vivifier
8c continuer la végétation.
« Lorfque le bais eft m ort, c’ eft par le calorique
ou par l’eau.que cette corruptionou décomposition
fe fait ordinairement. Par le calorique , toutes les ;
fubflanc es vaporifables con tenues dans le bois , fe
gazéfient, fe dégagent, & il ne refte plus que
du charbon ; mais cette vtpotifatio.n exige pour
chaque fiibftancedes températures différentes. D ’abord
c’ eft l’eau furabondante qui fe vaporife, puis
de l'eau néceffaire à la conftr.u.tion du MU , pais
de l’hydrogène carboné , de ï’oxide de carbone ,
de - l’acide pyroligneux, de l’huile & du goudron.
» La température de l'atmofphère fuffic pour
faire dégager l’eau furabondante au bojsj mais il
faut pour les autres fubftinces une température
beaucoup plus élevé e, & qui ne peut être produite
que par l’art.
» Quant à la corruption par l’eau , elle dépend
de fa proportion dans.le bois , de fa tendance à la
fermentation, lorsqu’elle, tient en diifolution des
fubftances végétales.
»3 Du bois fraîchement coupé j recouvert de
manière que les liquides de la végétation -ne
peuvent fe vaporifer, fe corrompt promptement
par la. décompofition., la fermentation 8c l’action
de ces. .liquides fur le bois. -
.».Les liquides de la végétation font ceux que
l’on■ connoït fous le nom de févej c’ell de l’ eau qui
tient en.diifolution des fubftances végétales dans,
un état tel que le tout fermente avec une extrême
facilité , lorsqu'il eft expofé à une certaine température.
« Si 1 elbois a.été expofé à l’aélion combinée,
de l’air. 8c du foleil, les liquides très fermentef-
cibles de la végétation s’ev.aporifent, le bois fe-
fèche, 8c perd peu à.peu fa tendance à la corruption.
» Du bois feç préfervé de toute humidité, fe;
eonferve un grand nombre d’années.
» Du bois imbibé d’ eau, 8c qui,eonferve fon;
humidité, a.uneaendance à la corruption?} mais,
cette tendance eft: moins grande que fi le bçisi ;
avoir confervéles liquides de la végétation, parce?
que cette eau contient moins de fubftances, végétales
en diifolution.
» L’eau qui a pénétré, le bois, s’en évapore facilement
j les liquidessde. la végétation feféparent»
du bois avec difficulté} c’ eft pourquoi ou parvient 1
b o i
à fécher plus promptement des bois qui ont féjourné
quelque temps dans l’eau, que ceux qui n’y ont
point été : l’eau lave, délaie, entraîne les liquides
de la végétation 8c les remplace.
» li eft difficile que les bois employés dans les
pans de bois, les planchers & les comblés, foient
p réfer vés d humidité : partout où l’eau s’introduit
& peut féjourner, elle dilfouc les matières végétales
, fermente 8c corrompt les bois. Pendant la
corruption , le bois s’échauffe, ce qui prouve qu’il
exifte une véritable combutbon déterminée par
l’aélion de l’eau 8c par fa décompofition.
» La corruption occafionnée par les fuçs végétatifs
oblige le conftruéteurà ne faire ufage que de
bois très-fecs, 8c, autant qu’ il eft poffible, qui aient
féjourné un temps très-court dans l’eau j c’ell ce
qui adonné lieu au procédé employé par quelques
çonftruéteurs, de refendre les greffes pièces de
bois , 8c de mettre l’intérieur en dehors, afin
qu’ elles puiffeat fe’dr{lécher 8c que le coeur foit
préfervé de la corruption. L’aftion de l’eau lur les
bois, la décompofition qui réfu]te de cette action,
doit déterminer à écarrer, à détourner ce liquide
du conraél desÆo/j, à S’empêcher d agir fur les
charpentes , & à les maintenir dans le plus- grand
état de fechereffè poffible.. ’
» L’atlion de l’eau n?eft pas toujour-s d’ un danger
évident ; l’expérience a- appris que-beaucoup de
bois fe confervoient parfaitement dans l’eau : on
trouve fouvent dans des démolitions de ponts, des
pilotis conftamrnent mouilles par les eaux, qui ont
confervé toute leur force 8c joute leur pupcé.
- » Ce n’ eft donc point de l’inibibition abfolue de
l’eau qu’ il faut préferver les bois , mais de l’aétion
d ’une quantité afléz corifiierable pour ddfnudre
les. fubltances végétales, conferver ces lubftances
& fermenter avec elles.
» Lorfque 1.’eau eft en petite quantité dans la.foi
8c qu’elle peut y féjourner, ehe s’ unit, fe combine
avec la fubftance du bois, exerce fon aélion fur
elle ; le jeu des affinités commence, le. bois s’échauffe
, l’aélion augmente 8c la décompofition fe
fait. ; m m
» Quand le* bois eft plongé dans-une grande
maff; ci’eau, 8c iurt.out dans l ’eau courante, l’eau,
en coulant, eft'fans ceffe renouvelée j i’aébon Je
fa combinaifon eft fans e ffet, 8c réchauffement n-î
point lieu.
» Ce que l’ on doit craindre le plus dans les
boiSy 'c’kVt la; fucceffion d’aèlion de - l’air & de.
l’eau. Ceux qui font expofés à cette double: action
fe-rdécoimpofent en très-peu de temps} mais ceitf
qui font expofés à une .humidité to >tiriuel!e> »
dans lefqusis.la même eau féjourné long-temps, 1®
décompo-fent encore plus vite.
» Parmi les b o is, il.en eft. dont la déçompofuion
à l’air fe fait plps rapidement que d’autres, fj5
b o is réfineux font ceux qui fe décqmpofent ô
moins, à caufe de là réfine dont ils font pénétrés»
y rZ, t _>>-■ ' , -,U çnUUts
b o i B.OI 185
[ enfuite viennent les bois durs. Les bois tendres,
Icomme le faille, le peuplier, le bouleau , 1 aune,
font ceux dont la décompofition à l’ait eft la plus
prompte. On a vu des portes de cèdre & même
des boiferies , conferver, après un ufage -long-
[temps continué, la fraîcheur du moment ou elles
[ avoient été pofées.
i » Il eft des bois qui fe confervent plus facilement
r imbibés d’eau j tel eft, par' exemple, l’aune : ceft
[pourquoi on le préfère pour la conftru&ion des
I tuyaux deftinés à la conduite des eaux. A défaut
j d’aune on emploie l’orme, qui fe eonferve affez
long-temps. . ,
f » La pofition des tuyaux de conduite n eft pas
: celle des bois plongés dans l’eau > ils font au con-
t traire dans un état d’humidité qui accélère leur
l'deftru&ion. C ’eft pourquoi on doit faire choix de
propres à réfifter fortement à cette tendance.
| » Les bois ont deux propriétés qui influent fur
rieur corruption} ils font hygrométriques 8c ther-
Imométriques.
I » On appelle propriété hygrométrique , la faculté
[ qu’ont certains corps d'arracher à l'air humide
lune portion de l’eau qu’ il contient, pour s'en pé-
I nétrer, 8c rendre enfuite à l’air fec l’humidité
I qui les pénètre.
B » Lorfque le bois, par fa propriété hygromé- I trique, s’empare d’une portion de l’eau diffoute I ou fufpendue dans l’a ir, 8c qu'il s'en pénètre , il
[augmente de volume} îorfquil rend à l'air l’eau
| qu'il lui avoir enlevée / il diminue de volume.
k » On appelle propriété ihermométrique , la faculté
| qu'ont les corps d’augmenter de volume par la
chaleur, 8c de diminuer de volume par le froid}
: ce qui fait q ue , toutes chofes égales d ’ailleurs,
lies bois font plus longs ( i ) les jours d’été fecs,
K que les jours dffiiver fecs. 1 » Ainfi, lorfque ces deux propriétés agiffent
dans le même Cens, les bois augmentent ou diminuent
de volume avec une grande viteffe} mais
l'iorfqu’ellês agiffent en fens contraire, i’augmen-
f tation 8c la diminution font plus lentes j quelquefois
elles font nulles.
| » Lorfqu’ il fait fe c , par exemple , l’air arrache
au bois l’humidité qu'il contient, en même temps
[que la chaleur augmente fon volume ; mais comme,
par la fortie de l’eau du 'bois , celui-ci diminue de
| volume dans un plus grand rapport que celui de
fon augmentation par la chaleur, la différence des
| deux effets diminue fes dimenfions.
I » Ces deux propriétés hygrométrique 8c thermo- I métrique , qui augmentent 8c diminuent les bois >
' occafionnent dans les affemblages des variations
I tonfidérables, qui tantôt font déjoindre les bois ,
; 8c d’autres fois compriment les joints avec force.
|- (i) C’eft beaucoup moins fur la longueur que fur la
gtoffeur que le retrait ou l’augmentation de volume fe fait
weacir.
Di«?. des Arbres & Arbufies.
Ce travail, produit par l’augmentation 8c la diminution
dans le volume, eft une des caufesqui contribue
le plus à brifer les charpentes.
» Il eft facile, d’apres les développemens que
l’on vient de lire fur les caufes qui contribuent a
faire corrompre le bois, de prendre dans chaque
conftru&ion les moyens les plus propres à diminuer
leur aétion. »
M. Haffenfratz rappelle enfuite plufieurs obfer-
vations de Duhamel, fur la corruption des bois.
Voye^ les expériences de Duhamel dans fon Traité
du tranfport des bois.
Puis il obferve que dans les conftruélions, les bois
font dans trois pofitions différentes : par la première
, comme dans les barrières, les ponts, ils
font expofés a toutes les variations de l’atmof-
phère} par la fécondé , comme dans les combles ,
les planchers, l’intérieur des édifices, ils font-pré-
fervés de l’aétion des eaux pluviales, 8c ont un
conta61 continuel avec l’air qui y pénètre } par la
troifième , comme dans les planchers plafonnés,
les pans de bois, lés cloifons recouvertes, les bois
font entourés de mortier.
Dans la première, les bois fe pourriffetst promptement
lorfqu’on n’a pas l ’attention de .les peindre
ou de les goudronner. Quelquefois on applique à
la furface goudronnée un ciment gras 8c réfineux
que l’on faupoudre de fable fin , de manière à
former une couche pierreufe qui empêche l’eau de
pénétrer. Ce_s enduits fe mettent particulièrement
fur les pièces des ponts que l’on recouvre de fable,
de terre, &que l’on pave, conféquemmenrqui font
expoféés'à l’aélion de l’eau qui les pénètre.
Mais, s’il eft avantageux pour la confervation
des bois de peindre ou goudronner ceux qui font
fecs , il eft imprudent de le faire fur des bois humides,
parce que ces enduits empêchent l’humidité
de s’évaporer.
La fécondé expofîtion eft la plus favorable pour
la confervation des bois , lorfqu’on a foin de les
garantir des eaux pluviales j cependant dans les lieux
humides 8c chauds, tels que les écuries, les bois
font fujets à fe corrompre à caufe de l'évaporation
continuelle que la chaleur produit, de l’ humidité
dont les bois font conftamrnent pénétrés, 8c de la
température qui favorife la fermentation. En aérant
les écuries on diminue cette tendance à la
corruption du bois , 8c on procure aux animaux
une atmofphère plus faine.
Dans la troifième expofition, les bois fe corrompent
plus ou moins vïte en raifon du degré de fé-
chereffe qu’ils avoient lorfqu’ ils ont été employés,
de l’humidité 8c de l’hygrométricité plus ou moins
grande des matières qui les enveloppent. Pour
empêcher l’effet de cette humidité 8c- favori fer le
defféchement des poutres, on perce dans le mur
différentes ouvertures qui permettent à l’air de
j circuler librement entre chaque morceau de bois.