
E X P
I Ie. M é m o i r e .
4 - o
De F exploitation par éclaircie & des coupes
alternatives.
Ch a p . Ier. — Obfervations & principes fur lefquels
eji fo n d é le fyjleme des éclaircies , par M. Hartig,
grand-maître des forêts de la Prujfe.
Les inftrudtions données par M. Hartig fur cet
objet important de l’économie foreftière font à
la fois fi méthodiques , fi bien détaillées & fi
généralement adoptées en Allemagne, que je
craindrois , en les analyfant, d'en affoiblir le
mérite & de faire perdre au leéteur une feule
penfée de cet habile foreftier, le premier de
l’Allemagne. Je vais donc traduire ces inftruc-
tions, & les rendre le plus littéralement qu’ il me
fera poflible. Je viferai moins, à la correction du
fi y le qu’à la fidélité de la traduction. On remarquera
quelques répétitions, mais elles font né-
ceffaires pour bien faire fentir l’importance des
lègles fur lefquelles l’auteur a cru devoir infifter.
Si on obferve , dit M. Hartig , la marche de
la nature dans le repeuplement des forêts, ~on
remarque que les femences, après leur parfaite
maturité , tombent des aibre-s^ & qu’elles
donnent naiffance à de jeunes plants, fi les.
feuilles mortes, déjà ex i liantes fur le fo l, ou
celles qui doivent tomber par la fuite, viennent
leur fervir de couvenure, ou fi la lurface de
la terre eft tellement difpofée, que cesfemences
puiffent s’infinuer à travers la moufle ou les
herbes & gagner la terre. On remarque aufli
que les jeunes plants provenus de ces femences
ne profpèrent que dans Ls endroits ou 1 air, le
foleil & la pluie peuvent exercer leur aétion fur
eux dans un degré convenable , & que ces
plants meurent peu de temps après leur naiffance,
fi la confiftance ferrée du bois eft telle que ni
les rayons du foleil ni les eaux pluviales ne peuvent
les atteindre, ou fi, au contraire, l’état de
la forêt eft tellement clair & dégarni, qu’ il livre
les jeunes plants à toute l’aétion du foleil & de
la gelée, ou qu’il permette aux mauvaifes herbes
de s’accroître au point de recouvrir le fol &
d’étouffer les plants; enfin l’expérience-apprend
que les jeunes forêts, lorfqü’elles font dans un
état trop ferré & furmontées par des arbres qui
les recouvrent, croiffent bien moins que lorf-
qu’ on les débarrafle de temps en temps des bois
fuperfius & étouffés.,
C ’eft de ces ôbfervations toutes fimples que
découlent les règles générales ci-après pour \‘exploitation
des forêts & leur repeuplement naturel.
Première régie générale.
Les forêts ou les arbres, pour fe reproduire
naturellement par les femences, doivent être
E X P
arrivés à l’âge de produire des femences fer.
tiles.
Deuxieme régie générale.
Tout canton d’ une forêt , deftiné à fe repeupler
complètement par des femis naturels
doit être difpofé de telle manière, que le fol
puilfe recevoir fur toute fa furface des femences
en fuffifante quantité.
Troifiéme régie générale.
Chaque coupe doit être conduite de manière j
qu’après l’enfemencement elle ne fe couvre pas i
d’ une trop grande quantité d’herbes & d e plantes i
nuifibles.
Quatrième règle générale.
Dans les forêts compofées d’effences (efpèces
de bois ) dont les femences peuvent être endommagées
par les gelées , comme celles du I
chêne & du hêtre , les coupes doivent être
faites de manière que les feuilles mortes qui
recouvrent & abritent ces femences ne puif- I
fent pas être emportées par les vents.
Cinquième règle générale.
' Les coupes doivent être conduites de manière
que les jeunes plants qui viennent d’ y naître,
confervent, pendant leur enfance, l’abri tutélaire
des arbres porte-graines contre la rigueur
des chaleurs & des gelées.
Sixième règle générale.
Auflhôt que les jeunes ferais provenus des
enfemencemens naturels n’ont plus befoin de
l’abri maternel, on doit procéder petit à petit,
& avec précaution, à l’enlèvement des arbres
qui leur ont donné naiffance, les habituer ainfi
à la température* enfuite les mettre tout-à-fait
à découvert.
Septième règle générale.
Les jeunes forêts, foit qu’elles proviennent
de femis naturels, foit quelles aient été femées
par la main des hommes, doivent être débarraf-
fées des efpèces de bois les moins utiles qui ont
crû avec elles, & des plantes nuifibles, lorfque
celles-ci, malgré toutes les précautions qu'on
auroit prifes, menacent d’étouffer les effences
précieufes.
Huitième règle générale.
Il faut extraire d’une jeune forêt, de temps:
en temps, & jufqu’à fon entier accroiffement*
e x P
. I g étouffé, afin que les brins l?s plus beaux, j
oui dominent les autres, pu.flent croître
iLuant mieux ; cependant on doit conferver
! ferré de la forêt, jufqu’au moment où il
’ eira j e ia renouveler par l’éducation dune
nouvelle-forêt.
Toutes ces règles, appliquées à Y exploitation
X c fnraies, & bien exécutées, font propres a les
d îlnnir par un repeuplement d’effences convenables
& Pà les entretenir dans l’état le plus fatif-
ftifant fans aucunes dépenfes. Quant aux
OÙ roA voudroit fuppléer aux fouches dépérif-
fintes par l’enfemencement naturel, il n eft pas
noffible d’y appliquer la plupart des règles ci-
deffus, ou du moins que dune manière tiès-
incomplète & fans pouvoir compter fur le fucces.
Nous allons donner divers exemples de la
manière de procéder au repeuplement naturel des
Laies, fuivant l’état où elles peuvent fe trouver.
On verra qu’ il eft effentiel de s'affûter*, avant
toutechofe, de l’état de la fo rê t, de l'amenagement
qui y a été obfervé, des effences qui la peuplent
?de leur âge & quantité, de la nature du
fol de fa fituation , du climat, & d’une infinité
de circonftances locales. Il n’y a point de réglés
fixes à preferire, foit pour les époques auxquelles
les éclaircies doivent avoir lieu, foit pour le nombre
de brins à réfervër ; & ce font ces déterminations,
toujours variables, qu’on laifle a faire
par le foreftier, & qui exigent, de la part de cet
officier, des connoilfances & de la prudence.
C h ap I I . —■ De l'exploitation d'une futaie de
hêtre, en bon état & convenablement garnie , quon
veut repeupler dune manière complète par le reen-
femencement naturel en même effence pendant la
durée de Vexploitation} & des procédés a employer
enfuite pour le traitement de la jeune forêt &
fon éducation jufqit à la révolution dune nouvelle
exploitation.
Lorfqu’il s’agit d’ exploiter , en plufieurs années
, une futaie de hêtre d’une étendue conii-
dérable , & d’ en procurer le repeuplement, Pen"
dant la durée de l‘exploitation , au moyen de 1 en-
femencement naturel , on doit procéder à 1 exploitation
de manière à ce que la coupe foit abritée
du côté de l’oueft par une partie de bois non
exploitée, afin que les vents qui foùfflent avec
violence de ce coté fie puiffent refiverfer les arbres
deftinés à opérer l’enfemencement. Indépendamment
de cette précaution , il y a d autres
règles générales à obferver, favoir, de commencer
la coupe par la partie de la foret ou 1 açcroifle-
raent eft le plus ralenti, de l’ affeoir de manière
à ce que le tranfport des bois ne fe faffe point
à travers le jeune recru , mais bien par la partie
non exploitée de la forêt, & de manière aufli a ne
E X P 4ai
pas fermer le chemin aux beftiaux qui devroienc
pacager dans la partie non mife en coupe.
Si U forêt eft fuuée fur une montagne tellement
efearpée, ou fut une pente tellement rapide
que l'enlèvement du bois ne puiffe fe faire q en
le faifant gliffer ou traîner dans la vallée, pour £
être converti en charbon, ou etre tianfporte
ailleurs, il faut, dans ce cas , commencer 1 exploitation
par la partie Supérieure de la montagne, &
laifler intaéte la partie inférieure , jufqu a ce que
la première foit exploitée & repeuplee ; autrement
& fi on mettoit .en exploitation.xoute la
montagne à la fois , depuis le haut jufqu en bas
le paffage des b o is , en détend ant, détruirait
le recru de la partie inférieure. I ■ B .
Après avoir ainfi arrêté le point où \ exploitation
doit commencer, & obferve les règ es generales,
qui, au furplus, ne font pas toujours les
mêmes , on procède , en automne , a la marque
'des arbres-qui doivent être abattus , pour mettre
la foiêt dans l'état qui puiffe remplir les conditions
indiquées dans le chapitre piecedent.
Mais, afin de pouvoir d’autant mieux juger
de l’état réel du canton qu’on veut mettre en
exploitation, on doit faire couper d abord & très-
près de terre les brouffailles & les menus brins
étouffés qui pourroient fe trouver fous les ai res,
enfuite on marque à la racine avec le marteau, & a
la tige de trois Haches, fut autant de c o te s ,
les arbres qui doivent être abattus, en ayant le
plus grand foin'de ne défrgnet ainfi pour etre
abattu, qu’un nombre d’arbres tel, que ceux qui
relieront , & qu on a dû choifir parmi f s plus.beaux
6’ les plus forts , puiffent , après 1 exploitation ,
prefque fe toucher par Vextrémité Se leurs branches.
Mais lorfque le climat eft très-ngoureux , ou
que la coupe eft tvès-expofée à l’ardeur du foleil ,
ou enfin qu'on a l’expérience que dans ce canton
les h’erbts & les plantes nuifibles , notamment les
framboifiers , les .genêts, les ronces , la bruyère „
lia fougère , les myrtilles , Sic. , &c. , pouffent
avec abondance dans les coupes un peu claires ,
il faut alors que les extrémités des branches des
arbres refians fe touchentJes unes les autres. Cette
première coupe fe nomme C oupe sombre ou
C oupe d’ensemencement , C oupe serree „
en allemand Dunkel ou Befiamungs-fchlag.
Ces dénominations expriment très-bien ! état
de la coupe après ce premier abattis & l’ objet de
cette opération. En effet, la coupe prefente un
ombrage épais qu’on peut a p p e l e r le but
. d’ une telle exploitation eft le réenfemencement delà
partie mife en exploitation.
1 On n’admet d’exceptiqn à la règle qui vient
d’être pofée relativement au rapprochement des
arbres reftans, que dans le cas ou il exilteroïc
déjà beaucoup de femences fur le fol, ou fine-
grande, quantité de jeunes plants de hêtre bien
venans ; alors la coupe doit être plus- claire , &: it
fuffit due les extrémités des branches foient r-appeor