
aux circonftances, furmonter bien des difficultés
& atteindre affez complètement le but.
Le premier examen à faire eft de s affurer
s’ il y a affez d’arbres pour pouvoir fournir à
l’enfemencement d'au moins la moitié du terrain.
Dans le cas de la négative > je confeille d’abandonner
le projet d’élever une jeune forêt de
hêtre : il faut y cultiver , par le moyen du femis
artificiel ou de la plantation , une autre efpèce de
bois qui pourra convenir au fol 3 à la fituation du
terrain & au befoin de la confommation , & dont
la réuffite en plein air fera certaine. Mais fi le
nombre & la diftribution des hêtres exifians dans
la forêt peuvent affurer l’enfemencement naturel
de la moitié au moins de la furface du terrain 3
il faut alors attendre une année fertile^ en fente
» tité de jeunes plants. On voit donc que le moyen
très-fimple & très-économique que je viens d'indiquer
n ces., & faire parcourir, jufqu’à cette époque,
le can.ton de forêt par des bêtes à cornes, &»
autant que poffible, par un troupeau de cochons ,
fi on s’aperçoit que ces animaux s’amufent à fouiller
la terre.
Lorfqu’on a une année affez abondante en
graines , il faut, dès que les faînes font tombées,
faire émonder jufqu’à la hauteur de 10 à 12 pieds
les arbres exiftans, qui ont fouvent des branches
pendantes jufqu'à terre, & alors mettre le canton
en défends. Enfuite, fi Le fo l eft couvert de bruyère
& de myrtille, on fait fenier des faînes, des graines
de charme ou de bouleau fur les places vagues »
& herfer, à plufieurs reprifes, toute la furface
de la coupe avec une lourde bourrée de branches
aiguës & convenablement écartées, qu’on fait
traîner par un cheval. Par ce moyen on gratte &
détache la mouffe qui fe trouve entre la bruyère
& la myrtille, & on met la plupart des femences en
pofition de pouvoir germer. Lorfque ce moyen
n’eft pas fuffifant pour opérer l’effet qu’ on fe pro-
pofe, ou que la furface du fol eft garnie de gazon,
il faut, dans toutes les places où les faînes tombées
des arbres & celles qu’on a femées ne peu- 1
vent être recouvertes par les feuilles mortes, faire
houer le terrain, avant les gelées, femer fur ce la- •
bour des graines de charme & de bouleau, &
alors opérer le herfage avec une bourrée d’épines.
Sans ce travail, qui n’eft pas coûteux ,
on attendroit pendant de longues années après un
repeuplement fuffifant, & on perdroit bien au-
delà des frais de culture.
Ainfi, lorfqu’on ne peut s’en difpenfer, on
fait les frais d’un labour à la houe ; mais toutes
les fois qu’on pourra atteindre le même but par
l’emploi , beaucoup plus économique , des bourrées
de branches ou d’épines, on doit le pré-
férer.
Le foreftier qui a déjà exploité un canton de la
nature de celui dont nous parlons, fe rappellera
avoir remarqué que c’eft fur les filions tracés par les
branches & autres bois que les bûcherons trament,
après la chute des femences, par-deffus la bruyère
& la myrtille, que fe trouve la plus grande quan-
, celui de faire paffer plufieurs fois'de pe-
fantes bourréés de branches fur les bruyères 8s
autres plantes nuifibles, eft très-propre à atteindre
le but qu’on fe propofe.
Je ferai conncître dans le chapitre fuivant comment
on doit , lorfque cette coupe eft repeuplée .
dans toutes fes parties, procéder, petit à petit, à
Y exploitation des arbres, & conduire la jeune
forêt.
J’obferve feulement ici :
i° . Que , dans une femblable coupe, lorfqu’on
reconnoît la néceffité de procurer de l’air aux
jeunes plants, il faut y procéder en coupant plufieurs
branches aux arbres a femences , parce que l’enlèvement
de l’arbre lui-même laifferoit des vides trop
confidérables ( 1 ) ;
2°. Que, lorfque les arbres à femences font très-
forts & très-branchus, la coupe définitive ne doit
pas en être trop long-temps retardée , attendu que
la chute & Y exploitation d’un grand nombre de
grands arbres endommageroient confidérablement
le jeune bois s’ il avoir plus de 18 pouces à j. pieds
de haut.
C h ap. IV. — Principes et après lefquels on doit'
traiter les futaies de, hêtres qui font compofées de
bois exploitables (bons à être coupés) (1) &
de jeunes bois'.
Quand on veut traiter, d'après les principes
que nous avons établis, une futaie de hêtres com-
pofée à la fois de bois exploitables & de jeunes
bôisj il fau t, avant tout, examiner les circonf*
j tances fuivantes :
i° . Si le jeune bois ou fous-bois ïft en quantité
fuffifante, & encore ajfeç mince & flexible pour pouvoir,
lors de la coupe des vieux arbres, plier, Jt
redrejfer enfuite & continuer a croître y
2°. S i , lorfque le fous-bois eft compdfé de perches
ou de tiges, les percher ne font pas encore étouffées
ou malades, 6* f i elles font en quantité fuffifante pout
'-qu après la coupe des vieux arbres , elles puijfent former
un état ferré & braver la température j
• (1) Cet émondage tient' lieu de coupe claire qu’on pratique
dans les forêts, telles que celles ,do>m il s’agit au chapitre II.
. (2) M. Hartig explique ce qu’on doit entendre par forêt
exploitable.
Phyfiquement parlant, ç’eft une forêt où les arbres ne
peuvent plus prendre beaucoup cfaccroiflement,foitàcaufe
de leur âge, foit par rapport à la qualité du.terrain.
Economiquement parlant, e’ eft une forêt qu i,' eu égard a la
qualité du fol 8c à fa fituation , eft arrivée au maximum de
fon accroifleraent, & peut en même temps procurer du bois
ayant la dimenfipn 8c la qualité néceflaires pour fatisfaire en
général aux befoins dte la fociété., . ^
Mercantilementparlant, c’eft une forêt où le bois eft alltt
fort pour que, d’après les circonftances locales, le proprietaire
puiffe retirer-de fa forêt le plus haut produit en argent,
calculé d’après le prix du bois 8c l’intérêt de Fargent, dans
un efpace de temps donné.
q §1 les gros arbres exifians font en quantitéfuffi- j
faite pour que, dans le cas bit le fous-bois ne feroit !
s a (fer ferré & ne pourrait former un repeuplement
Convenable, on puiffe compter fur eux , après Cenlève-
ent de ce fous-bois , pour fournir un enfemencement
Complet fur l'étendue de la coupe. .
lorfque le fous-bois ou recru n elt point malvenant,
qu’ il fe trouve en quantité fuffifante, &
e n c o re 'affez mince pour n’ avoir pas beaucoup
à fouffrir de la chute & de Y exploitation des vieux
arbres, il faut alors faire procéder à l’abattage de
cesvieutf arbres, en prenant toutes les précautions
que j’ ai indiquées (chapitre I I ) , en parlant
de la coupe claire ou fecondaire. Mais fi le fous-bois
ou recru étoit rabougri, mal-venant & étouffé depuis
long-temps, ce feroit le cas de faire couper
ce fous-bois très-près de terre, dans une année de
faînes, 6* a l'époque de la maturité de ces fruits , &
de conferver les vieux arbres que l’on émonderoit
alors jufqu’à la hauteur de dix ou douze pieds, fi
leurs branches fé rapprochoient trop de la terre. On
met le diftrift (canton de forêt ) en - défends,
& on le traite comme nous l’ avons dit dans le chapitre
II du préfent Mémoire , en parlant de la
coupe d'enfemencement ou coupe fombre. Si les vieux
arbres n’ëtoient pas en nombre fuffifant pour pouvoir
former l’état ferré preferit pour une coupe
fombre ou coupe d ’enfemencement, il faudroit re-
i peupler les places vides, en y femant, à la main,
des faînes, afin d’obtenir la même effence de
I bois," . .. ; . \ ... ,t/
Si enfin le recru ou fous-bois étoit compofé
| de perches ou de tiges de belle venue, bien faines
& en quantité fuffifante , on feroit enlever, avec
K précaution, les vieux arbres, q ui, dans ce cas,
[ font répandus ifolément fur la coupe. Mais alors
l il/aut avoir l’attention , avant quon ne les abatte,
I de les faire ébrancher jufqu’à la couronne, puis
I on procède à l’abattage & à Y exploitation, & on
en Fait tranfporter le bois auffitôt fur les chemins
[ ou dans les vides de la forêt, car autrement le
I tranfport feroit plus de tort que l’abattage lui-
I même. J’ai, de cettemanière, fait enlever des vieux
[ hêtres, d’un recru compofé de perches & de brins
I de 20 à 40 ans, fans leur occafionner beaucoup
I de dommages. Mais il faut avertir les bûcherons,
vieux arbres, d’endommager ou de couper aucunes
i°. Qu’ils doivent, lors de l’émondage des
vieux arbres , ranger de côté les branches à me-
I fure qu’elles font coupées, afin que les brins fur
j lefquels elles feroient tombées puiffent fe relever
j à l’inftant;
2°. Que les arbres élagués jufqu’à la cime doi
vent être abattus de manière à tomber dàns 1
din&ion où il y ait le moins de dommages à
| craindre;
3°. Que lesbûcherons doivent relever les tiges qui
auroient été courbées par la chute de quelques arbres,
attendu que les tiges ne fe redrefferoient jamais
& perdroient leur accroiffèment en hauteur ;
' 4°* Qu’ils doivent éviter, en exploitant les
perches ;
50. Q u ’ils doivent enfin tranfporter les cordes
des bûches & les ramilles, foit fur les chemins, foit
dans tout autre lieu où le tranfport ne puiffe caur
fer de dommages.
Si le foreftier veille exaftement à ce que toutes
ces inftru&ions foient ponctuellement exécutées,
on fera étonné du: peu de tort que l ’enlèvement des
vieux arbres aura occafionné j & l’ on aura procuré
un avantage inappréciable à la jeune fo rê t, en la
débarraffant de ces arbres qui offufquoient le recru.
Les petits vides qu’occafionnera néceffaire-
ment la chute des gros arbres fe repeupleront bientô
t, de manière qu’ au bout de peu d’années on ne
les remarquera prefque plus ; & quand même les
traces de cette coupe, trop long-temps retardée,
devroient s’apercevoir pendant plufieurs années,
toujours eft-il certain qu’il feroit encore plus avantageux
d’y procéder & de débarraffer le jeune
taillis des vieux arbres., que de les y laiffer plus
long-temps, & d’attendre ainfi qu’ils étendent davantage
chaque année leur ombrage fur la jeune
forêt. Je ne confeille pas de faire l’expérience de
faire couper les vieux arbres fans les ébrancher, & de
former des cordes de bois fur le parterre de la cçupe3
pour de-la les tranfporter ailleurs ,1e tout fous prétexte
d’économifer les fixais de l’ébranchage & de
l’extra&ion des bois hors de la coupe; on regret-
teroit trop tard de ne pas avoir fuivi les règles que
je viens d’établir & d’avoir fait une économie
mal entendue. J’ai fait en petit beaucoup d’expériences
de ce genre, & je fuis toujours effrayé
quand j’en vois les fuites, tandis que je n’ai jamais
eu à me repentir d’avoir ordonné l’extraCHon des
vieux hêtres hors des recrus, lorfque cette coupe
s’ eft faite avec les précautions indiquées & fous
les yeux d'un foreftier \élé. Cependant, fi la coupe
& l'enlèvement des vieux arbres hors d’un gaulis
n’étoient pas praticables, il faudroit au moins les
ébrancher un peu & fe décider à les laiffer futfifter
jufqu’à ce que le gaulis fût affez fort pour qu’on
p û t, à l-’aide des brins de ce gaulis & des vieux
hêtres , établir une coupe d’enfemencement &
repeupler ainfi tout le canton parle femis naturel.
Il peut arriver auffi que les vieux hêtres foient
tellement rapprochés dans un gaulis ,^u e fi on les
enlève , même avec toutes les précautions re-
quifes, il en rélulte des vides fi multipliés, que le
bois reftant ne puiffe réfifter à la charge des neiges
&des frimats ; ou bien il peut fe trouver dans une
jeune forêt des vieux arbres en telle quantité,
qu’elle doive bientôt en être étouffée, quand .
même on les élagueroit. Dans ces circonftances je
me fuis très-bien trouvé de faire couper, au printemps
& à blanc étoc , tout le canton, tant le
vieux que le jeune bois. Les fouches des jeunes tiges,
Ji on a eu foin de les faire couper près de terre &
avec un infirmaient bien tranchant, repouffent
parfaitement & fourniffent un recru que l ’on peur,