
l'époque de l'exploitation de chaque claffe de ces
taillis.
On doit conclure qu'il eft d’autant plus avantageux
de retarder l’exploitation que le terrain fera
plus fubftantiel & profond, & que l’on doit élever
des futaies dans les fonds de première qualité,
à moins de circonftances qui s’ y oppofent. Cependant
il eft a obfiervcr que f i les aménagemens prolonges
donnent le maximum des produits en matières , &
des bois de plus belles dimenfions 6* de meilleure qualité
que les aménagemens bornés à un certain âge , ils
ne procurent pas toujours le maximum des produits en
argent, comme on pourroit le croire d’apiès les
calculs de M. de Perthuis. En effet, cet auteur
n'a point fait entrer dans fes calculs tous les élé-
mens qui dévoient les compofer. 11 a bien parlé des
frais de confervation qu’il a fixés à z francs par
heétare annuellement, ou bénéfice du marchand,
& du tort que les arbres-futaies peuvent faire au
taillis, &. il a déduit tous ces frais ou dommages
des produits bruts pour déterminer le revenu net
du propriétaires mais il n'a point fait entrer en
compte, au profit des taillis exploités à des époques
rapprochées, l’intérêt réfultant de rentrées
de fonds plus fréquentes. On ne doit pas fans
doute lui en faire un reproche, car dans un traité
d’aménagement des forêts du Gouvernement, l’objet
principal n'eft point d’en obtenir le maximum
des produits en argent, mais bien le maximum des
produits en matières. O r , il eft inconteftable que,
dans les bons terrains, les aménagemens prolongés
donnent ce maximum deproduits en matières. Nous
allons cependant faire connoïtre, d’après les expériences
& les calculs de M. Hartig, les véritables
rapports qui exiftent entre les taillis & les futaies,
tant pour les produics en bois que pour ceux
en argent,
M. Hartig a pris pour exemple un arpent, me-
fure du Rhin (40 ares 34 centiares ) , effence de
hêtre, aménagé à 120 ans, fitué en bon fonds &
traité d’après fa méthode. Il a calculé le prix du
bois a raifon de 3 8c 4 florins la corde de 144
pieds cubes du Rhin ( 7 francs 92 cent, à 10 francs
56 centimes pour y ftères 46 centiftères ) , & l’intérêt
de l’argent à 3 pour ico . V o ic i, réduits d’après
notre fyftème décimal, les réfultats fom-
maires des calculs qu’il préfente dans un nouvel
ouvrage qu’ il a publié en 1808.
Un heftare de futaie de hêtre, fitué & traité
comme il vient d’être d it, donne, en 120 ans,
490 mètres cubes de majfe réelle ou folidité de bois,
faifant, en mefure ordinaire avec les interftices,
846 Aères, à quoi il faut ajouter y3 voitures de
branchages. Ces b o is , eftimés fuivant les prix
ci.-deffus établis, donnent en argent 1,956 francs
77 centimes de principal, & 1,583 francs 74 cent,
pour les intérêts & intérêts des intérêts; ce :
qui forme un revenu total de 3,440 francs y 1 cent. !
Ces réfultats divifés par 120 donnent pour chaque !
année, favoir: en bois, 4 mètres 83 décimètres)!
cubes ou folidité, faifant en mefure ordinaire y
ftères y.centiftères, & à peu près une demi-charretée
de branchages; 8c en argent, 27 francs pour
le prix de la feuille.
D’après les calculs du même auteur, un hectare
de taillis de même effence, coupé tous les 30
ans, produit en 1 16 ans 266 mètres cubes ou folidité
de b o L , repréfentant en mefure ordinaire
avec les interftices 487 ftères & 56 charretées de
branchages, en argent, 1,020 francs 93 centimes
pour le prix du bois, & 4,404 francs 36 centimes
pour les intérêts & intétêcs des intérêts : revenu
total, y,925 francs 29 centimes. Ces fommes, di-
vifées par 120 ans, donnent pour chaque année
2 mètres 216 décimètres cubes ou folidité, faifant
en mefure ordinaire 4 ftères 6 centiftères, 8c environ
une demi charretée de branchages ; & pour le
prix de la feuille, 45 francs 21 centimes.
§ 11 réfulte de ces calcu's, fondés fur des expériences
nombreufes, que les futaies pleines éclaircies
donnent des produics en matièces beaucoup
plus confidérables que les taillis ; mais qu’ à raifon
de l’intérêt de l’argent, qui doit entrer en compte
au profit de-ces derniers, les produits en argent
font beaucoup plus forts pour Jesstaillis que pour
les futaies. En effet, quoique les produits en bois
des futaies fuient à ceux des taillis comme 846
font à 487, les produits en argent de ces mêmes
furaies ne font.avec ceux des tiiilis que dans la proportion
de 3,y40 à 5,425. Ainfi les futaies produi-
fent prefqu’une fois plus de bois, & cependant
près de deux cinquièmes de moins en argent.
Si l’ on compare maintenant, 8c toujours d’après
M. Hartig, les produits d’un taillis compofé de
bouleau & de charmé, également fitué en bon
fonds & exploité tous les 30 ans, à ceux des futaies,
on trouvera que les produits en argent font
encore bien plus confidérables du côté des taillis.
Un heétare de taillis de cette efpèce donne en
120 ans 334 mètres cubes ou folidité de bois, repréfentant
en mefure ordinaire y97 ftères & 90
charretées de branches; en argent, 1,2.04 francs
16 centimes pour le prix principal, & 4,608 francs
43 centimes pour les intérêts : total, 6,812 francs
69 centimes. C e qui, divifé par 120, donne annuellement
2 mètres 783 décimètres cubes ou de
maffe réelle de bois, faifant environ y Aères en
mefure ordinaire ; & pour le prix de la feuille,
46 francs 77 centimes.
On voit par les tableaux de comparaifon dreffés
par M. de Hartig, 8c dont je n’ai fait qu'indiquer
les réfultats,
i° . Que les futaies exploitées par éclaircies
donnent en 120 ans, y compris la coupe définitive,
une maffe de bois double de ce que donnent dans j
le même efpace de temps les taillis aménagés à 30
ans ;
2°. Que Y aménagement en futaies procure une
bien plus grande quantité de bois de corde que
l'aménagement en taillis ; car, d’après les calculs du i
Énême auteur, un hettare de futaie de hèrre donne
en u o ans 574 ftères de fortes bûches & 271 fiâmes
de rondins, tandis qu’ un h-télare de taillis de
ji ê ne effence ne donne que 66 Aères 4 déciftères
Ue groffes bûches, &r 420 Aères 4 déciAères de
rondins. Quant au taillis de bouleau & de charme,
il donne une fois plus de groffes bûches que le
faillis de hêtre. Ainfi, le rapport d’ une futaie de
fiêtre à un taillis de même efience eA pour le gros
bois : : y2 : 6, & celui d’une même futaie de
hêtre à un taillis' de bouleau 8c de charme : : y 2
i 12;
B. 3°* Ql,e cependant, à l’âge de 60 ans, un hectare
de futaie de hêtre n’ a procuré par les éclaircies
que 28 à 29 mètres cubes ou folidité de bois,
i|andis qu’un heétare de taillis de même effence
jpn a procuré 119 ;
W 40. Que le produit en argent d’un he&are de
futaie à 120 ans, époque de la coupe définitive ,
Si’eft que de 3,440 francs yi centimes, tandis que
Jcelui a’un heéfore de taillis de même effence fe
itrouveêtre de 5,925 francs 29 centimes, à caufe
Jde l’intérêt de l’argent, qui eft de 4,404 francs
%6 centimes pour le taillis feulement de
1,583 francs 74 centimes pour la futaie ; d’où il
fuit qu’en 1 20 ans un heélare de taillis rapporte en
Argent 2*384 francs 78 centimes de plus que la
futaie, c’eft-à-dire, prefque deux cinquièmes de
.plus. I
■ Mais il eft à obferver que M. Hartig a établi
tous fes calculs fur les bois réduits en cordes; qu’il
les a confidérés que comme bois de chauffage,
& que par conféquent il n’ a point fait entrer en
ÿompte la différence très-grande du prix des bois
«l’oeuvre & de conftruélion à celui des bois de
chauffage; que , d un autre côté, il n’a point évalu
é la glandée & le pacage, qui font des objets
id’une haute importance dans les futaies éclaircies.
Ces objets, comme il l’obferve lui-même, doivent
élever de beaucoup les revenus des futaies.
a 11 demeure donc confiant que fi l’ intérêt du
particulier eft de préférer Y aménagement en taillis,
il n’en eft pas de même à l’égard du Gouvernement*
qui doit avoir en vue le maximum des produits
en matières, les befoins des générations futures,
& ceux de l’agriculture & des arts. D’un
autr/e côté, le Gouvernement ne peut être affi-
pulé à un particulier fous le rapport de l’intérêt
«es capitaux ; il poffède des futaies, & cesf.itaies,
^enduites d’après les bons principes, doivent donner
en principal des produits même plus confidé-
fables que les taillis. 11 n’y a donc en faveur des
taillis que. Yintérét réfultant de rentrées de fonds
plus fréquentes ; & cet avantage peut-il contrebalancer
celui de donner aux arts & à la confom-
ination en général des produits plus abondans &
ne meilleure qualité? Une dernièreconfidérationen
laveur des futaies, c’eft que le Gouvernement eft
le plus grand confommateur en bois de conftruc-
fionj & qu’en fe ménageant des reffources à cet
égard dans fes propres bois , il s’évite des dépen-
fes confidérables qu'il feroit obligé de faire pour
s’en procurer ailleurs.
Mais il eft également confiant que, pour tirer le
meilleur parti poffible des fucaies pleines, il eft
néceffiire de les traiter d'après la méthode de
M. Hartig.
Deux fortes de coupes font à diftinguer dans
cette méthode : les premières font les éclairciffe-
mens que l’on commence fur une jeune futaie de
25 à 30 ans , & que l’on continue tous les 20 ou 30
ans jufqu’à 90, 120 ou 140 ans, fui\anc lrsefLnces
& Iss circonftances locales. E les on t, comme
nous l’avons déjà d it, pour objet principal, de
donner de l’air à la futaie & de la débarraffer des
bois blancs 8c autres bois dépétiffans, qui difpu-
teroient la nourriture aux tiges bien venantes des
bannes efiVnces. Leur produit n’ eft pas confidéra-
ble ; car, d’api ès les calculs de M. Hartig, les trois
éclaircits qui précèdent la coupe du réenfemencernent
dans les futaies de hêtre ne produifent par
heélare* en 90 ans, que 1 ro mètres cub; s ou folidité
de bois, tandis qu’un heétare de taillis produit,
par les trois coupes qui s’y font dans le même efpace
de temps , 192 mètres cubes de b o is , c’eft-
a-dire, - de plus. Le produit en argent pour cet
efpace de temps eft dans une proportion même
beaucoup plus foible, n’étant que dans le rapport
de 1,286 à 4,764 , ou des ~ du produit des taillis.
Maintenant,fi l’on fait entrer en compte la moindre
valeur qui doit réfulter de la difficulté d’opérer
les éclaircies, le produit de ces éclaircies diminuera
encore. Mais, fous Je rapport des produits à venir,
les éclaircies doivent être confidérées commî
infiniment utiles, & d’ ailleurs le peu qu’elle? rapportent
eft toujours un produit de plus, puifque
les futaies abandonnées à h nature, ne donnent
rien jufqu'à l’époque de leur exploitation.
Nous n’avons parlé des éclaircies que d’une manière
générale, & par comparaifon de ce mode
d’exploitation avec celui des coupes à tire & aire.
Nous expoferons, en traitant de l’exploitation
des forêts, les principes de ce fyftème, & le
moyen dé le meitre à exécution dans les différentes
positions où peuvent fe trouver les forêts.
T R O I S I È M E P A R T I E .
D e T aménagement des taillis.
C H A P. Iep. Observations prélimi naires.
Nous examinerons dans cette partie les quef-
tions principales qui intéreflent Y amenagement
des taillis, fous le rapport des produits & de la
reproduâion, Il nous fera peut-être difficile d’é viter
des détails allez longs, parce que nous voulons
motiver convenablement les proportions que
nous aurons à faire. Nous nous fommes d'ailleurs