
fuffifante«. Mais ces opérations exigent de la part ;
des agens foreftiers une grande attention, beaucoup
de difcernement, de l’expérience, de la patience
& du zèle; car autrement le mal feroit plus
grand que le bien qu’on auroit voulu produire.
Par la même rai fan qu'on ne peut aflîgner une
époque fixe & générale pour opérer les nettoie-
mens , on ne peut déterminer le nombre exaâ des
perches ou jeunes arbres qu’ il convient de réfer-
ver dans chacune de ces opérations. Si on fe per-
mettoit à cet égard des indications précifes, on
retombe roit dans l ’inconvénient des méthodes gé^-
nérales. Il s’agit ici de procurer le bien-être de la
fo rê t, & c’eft fon état feu! qu’il faut confulter.
«« Une fois, dit M. Lintz, les bois dépérîffans
extraits , ou, fi on aime mieux, les coupes pré-
as paratoires terminées, 8c la futaie ayant prefque
» acquis la hauteur à laquelle elle doit s’élever,
*» elle s’étendra vigour.eufemenc par.la cime, ac-
» querrade la force & de la folidîté, & les cou-
» ches concentriques augmenteront vifiblement >3 en grofl'eur. Alors les arbres approcheront de
3» cette vigueur qui fignale dans tous.les être.s l’âge
»s de la virilité & de la reproduction.
33 Ce terme, qui tient à Y individualité d’une fo-
33 rêr, a été porté par la commiifron à’ aménagement'
»3 à l’âge de i io à n o ans, pour plufieurs maffes
33 de futaies de hêtre dans la confervation de
33 Coblentz. » -------
Lorfque ces futaies font pavenues à cet âge, on
y établit l’afliette des coupes dites de réjnfemen-
cement. *
La deftînation des arbres qu’on réferve dans ces
coupes eft d’une grande importance j car c’eft
d’eux qu’on attend le repeuplement de la futaie.
Le nom de coupe de rêenfemencement, qu’on
donne à cette exploitation, en indique le but; 8c
celui de coupe [ombre ou ferrée, fous lequel on la !
défigne encore, nous peint l’état où doit être la I
coupe après i’exploitation. On a dû biffer affez
d’arbres, dans ce premier abattis, pour que leurs
branches puffent fe toucher & fournir un ombrage
épais qu’on peut appeler [ombre.
Sans vouloir fixer précifement le nombre d’arbres
à réferver dans une coupe de réenfe-merce-
roent, M. Lintz a {Lire que’, d’après le comptage
.qu’ il en a fait plufieurs fois, il a, trouvé que le
terme moyen de ces réferves, dans une. futaie de
hêtre mê’ée de chênes 8c âgée de i io à 120 ans, !
étoit de 1 jo à 160 par heâa; e.
Ce mode d’exploitation" en coupé ferrée pré- I
fente de grands avantages ; il procure, à la coupe ,
un enfemencement abondant de graines de bonne j
qualité provenant d’arbres fains; il s’oppofe à la |
crue du gazon 3c des mauvaises herbes qui empê- 1
cheroient les graines de germer, fi une bonne année
de femences tardoit à arriver; il fournir bn
ombrage 8c un abri néceffaire aux jeunes plants de
hêtre, qui font fi délicats dans leur jeuneffe & fu-
jets à périr par la gelée Sc la féchereflè ; 8c par cet
état ferré des arbres de réferve , il empêche que
la terre légère qui -recouvre les petits plants à
peine enracinés, ne fe deffèche à fa furface. D ’ailleurs
le. fends ne r çoit dans cet état qu’autant de
lumière, d’ air 8c de pluie qu’ il lui en faut au moment
de fa nai {Tance. Enfin , le mode des coupes
ferrées procure l’avantage bien effentiel d’empêcher
que les vents ne difperfi nt le lit de feuilles
qui favorifent la germination de la femence, qui
protège les racines des jeunes plants contre la gelée
8c la féchereffe, 8c leur fournit par h fuite
les fucs nourriciers qui leur font néceffaires.
On laiff# J a coupe dans cet état jufqu’â ce
qu’elle foie couverte en grande partie de plants de
huit à douze pouces, ce qui exige au moins trois
bu quatres ans ; 8c comme à cet âge ils ont be-
foin d’air, on enlève alors une partie des arbres
réferves lors delà coupe d’enfemencement. Cette
fécondé exploitation, qui porte fur tous les arbres
entourés d ’un recru complet, s’appelle coupe claire
ou fe conduire. Enfin, trois ou quatre ans après,
lorfque la coupe eft entièrement repeuplée, on y
fait ia troifième exploitation, dite coupe définitive.
Elle enlève tous les arbres reftans, à l’exception
de ceux qui font deftinés à parcourir une fécondé
révolution , & qui par conféquent ne feront abattus
qu’aprës 110 où 120 ans.
Cette dernière réferve j^qui doit être d’un
grand fecours pour les conftruéfions civiles &
navales , ne peut nuire à la jeune futaie fi le
choix en eft fait avec difcernement, & fi elle
n’cft compofée que de douze à feize arbres par
heéfare.
Lorfque ces exploitations font terminées, on
ab andonne la coupe à elle même, jufquà ce qu’elle
ait befoin d’être nettoyée par les éclaircies donc
nous avons parlé en premier lieu.
Cette manière de traiter les funies exige ,
comme on l’a v u , d§ fix à fept opérations pour
une feule que nous faifons d’après le mode ordinaire.
Ces opérations font bien payées par la quantité
des produits, par la meilleure qualité des bois,
par la promptitude 8c l’abondance des repeuple-
mens naturels , 8c l’avantage-de recourir rarement
aux f mis artificiels. Puiffenc ces avantages,
qui contre-balancent fi puiffamment les inconvé1-
niens attachés à ce fyllème, engager les particuliers
à l'introduire dans leurs forêts, 8c le Gouvernement
à ne point le proferire entièrement des
fiennes, mais bien à en permettre l’application
aux futaies ou Tadminiftration le croira avantageux
1
11 eft évident qu’on n’attend pas que toutes >
les exploitations qu’on, vient de décrire aient eu 3
lieu fur une coupé'pour palier à la féconde; il :
faut au contraire entamer cette fécondé divifion =
de la futaie l’année qui fuit la coupe d’enfemence- s
ment fur la première, ,8c ainfi dé fuite, de manière =
qu’il y a quelquefois fix à fept coupes fu r lef-
quell.es on revient fucceffivement.
J’indiquerai plus loin les principales opérations I
de Y aménagement des futaies qu’on deftihe à être
exploitées d’après ce mode.
je reviens à l’examen des futaies pleines exploitées
d’après l’ordonnance.
Ch AP. V . Dm futaies pleines en général, confidérées
par rapport aux bois de marine.
Quelle que fait la manière d’exploiter les futaies
pleines, on-n’y trouvera jamais en bois courbes
les reffources que nous offrent les futaies fur
taillis. D’un autre cô té , les arbres crus en maffif
• font ordinairement d’un bois plus tendre 8c plus
léger que celui des arbres qui ont joui, pendant
la duree de leur croiflance , des avantages de l’air
8c de la lumière. Mais ils fourniffent en revanche
un grand nombre de belles pièces qu’on ne potir-
roit trouver ailleurs , telles que des quille s , des
baux, des üoires ou des précintes, 8c autres pièces
droites ou d’une légère courbure. On y trouve
bien aufii des bois courbans , courbes 8c fourchus,
mais beaucoup moins que dans les futaies fur
taillis, que fur les libères des forêts, 8c que dans
tous les endroits où les aibres croiffent ifolés
8c expofés plus particulièrement^ aux influences
atmofphériqüès. '
cc Dans les bois bien touffus, dit Duhamel,
3» les arbres qui.cherchent l’air s’élèvent pour en
33 jouir ; 8c les plus foibles d’entr’eux ne femblent
» croîcre’que pour empêcher par leur ombre les
33 plus vigoureux de produire des branches, puif-
33 qu’ils périffent ordinairement après que ceux-ci
33 ont pris le dejTus au point de les étouffer, en
39 interceptant aux autres la tra.ftfp-i ration qui eft
3» une des principales caufes de Tafcenfion de la
33 fève. Les arbres d’un bois touffu ne peuvent ja-
33 mais jouir de l’air ni du foleil. que par leur
si cime; i's s’élèvent, pour ainfi dire ,~à l’envi les
»» uns des autres pour profiter de l’a ir , 8c par-
»3 ticulièrement de l’aétion du foleil qui eft abfo-
»3 lument néceffaire à la végétation des plantes.
33 Au contraire, fur les bords des bois touffus,
33 environnés de vagues, de landes ou de terres
33 labourables , les -arbres s’inclinent 8c étendent
»3 léms branches du côté de ces terrains : on voit
33 bien qu’ ils font forcés de prendre cette direc-
3? tion par les atbres qui font derrière eux ; mais
» la -principale rai ton eft , comme nous venons de
w le dire, qu’ils cherchent l ’air, & que par con- ;
féquent ils s’inclinent & pouffent leurs branches
vers le côté où ils en trouvent davantage.
C ’ eft cette tendance ver l’endroit où ils peuvent
jouir de l’air, qui fait que les arbres plantés dans
les lifières, ou ceux' qui font ifolés, pouffent
plus de branches que ceux qui font raffemblés
>3 en maflif. Dans le dernier cas , les branches les
.plus baffes périffent faute de tranfpiration , &
celles de la cime en deviennent plus vigou-
>3 reufes5 au lieu que les branches des arbres ifo-
»3 lé s , pouvant jouir pleinement du bénéfice de
>3 l’ air 8c du foleil, s’ étendent avec force 8c four-
»3 niffent beaucoup de bois courbes.
33 Indépendamment de cette raifon phyfique,
>3 les arbres qui font produits par de vieilles fou-
33 ches ; 3c la plupart de ceiîx qu’on élève de mar-
33 cottes 8c de boutures, ont rarement une difpo-
>3 fition aufli naturelle à croître bien dioits que
33 ceux qui font fonds immédiatement des lésa
mences; néanmoins on aperçoit encore qu’entre
33 ceux-ci, les uns ont une ditpofition naturelle à
3.3 s’élever, pendant que d’autres s’étendent t>eau-
>3 coup en branches. »»
Duhamel parle, enfuite de la fupëriorité dis
bois courbes naturels fur ceux que l’on courbé
après les avoir abattus, 8c il finit par dire qu’on
peut avoir de bons-bois courbes lorfqu’on exploitera
des^ arbres qui auront pris cette forme dans
les lifières, ou lorfque les arbres font ifolés , 8c
qu’ il eft perfuadé que la marine en auroit en abondance
8c dé très-bons, f i, par une exaéfce police,
on pouvoit parvenir à ménager les arbres des
haies ou les palis, qui font li communs dans les
pays de bocages ( i j .
On voit par ce qui précède , 8c la raifon 8c
l’expérience le prouvent, que ce n’eft point dans
l’ intérieur des'futaies pleines que Ton peut trouver
le plus de reffources pour la marine, mais que
c’eft dans les bordures 8c les lifières des forêts
8c dans les arbres ifolés. Tous les jours on a des
preuves de cette vérité dans les vieilles bordures
que Ton fait exploiter, 8c ces preuves feroienc
encore bien plus mu h pliées, fans l ’ ufage où Ton
eft dans plufieurs forêts d’élaguer les bois qui bordent
les routes 8c les chemins. O s élagages , qui
ont pour objet de conferver à ces foutes toute
leur largeur 8c de les affainir, privent la marine
de fa plus belle reffource en bois courbes. On de-
vroit donc les reftreindre beaucoup, malgré les
avantages qu’ i’s préfentent pour la propreté des
chemins, & c’eft furtout dans les forêts de chênes
(1) Dans la ci-devant Bretagne 6c en Normandie les
propriétés font entourées de haies, 6c fouvent les forêts
elles - mêmes font défendues par ees fortes de clôtures.
Combien de refloiirces-on ménageroic à la marine, lî les
chênes 6c les ormes qui croiffent fur ces haies, n’écoient pas
mutilés par des élagages continuels ! Ce feroient les meilleures
courbes que l ’on pourrok fe procurer.