
ont paru propres à remplir l'objet qu'on s*étoit
propofé > & la plupart des auteurs qui ont écrit
après Duharhel les ont recommandés. Cependant
Pannelier d’Annel, qui ne vouloir ni grands ni
petits maflifs de futaies, s’eft élevé contre le
nouveau fyftème de balivage qu’on propofoit de
fubftituer à celui prefcrit par l’ordonnance. « Les
» bouquets de futaie , a-t-il dit, les lifières, les
*> bordures ( n’importe la forme & le nom ) ,
*> font de moindres maflifs, mais font toujours
» des maflifs : ils en ont tous les inconvéniens,
» & ne participent à aucun des avantages des arbres
» ifolés. Si l'on y rencontre quelquefois, ainlï
» que dans les grands maflifs de futaie, des arbres
k de valeur, ils proviennent des réferves an-
*> ciennes. »
De fon côté Tellès d’Acofta a penfé qu’on ne
pouvoir admettre la méthode de Duhamel que'
pour une petite partie de bois ; que d’ailleurs
rien n’annonçoit qu’elle fût préférable à la pratique
ordinaire. Il s’eft également prononcé contre
une propofition de Duhamel, qui tendoit aulïi
a fupprimer les baliveaux, en réferyant une li-
fïère dans tout le contour des forêts, & des cordons
de taillis de fix pieds de large, au pourtour
de chaque coupe. Ce projet a paru à Tellès d’A -
cofta devoir nuire à la recrue des b ois , parce que
les coupes annuelles feroient privées d’air & de
foleil fi elles étoient compofées d’un petit nombre
d’arpens.Il propofe lui-même de biffer des lifières,
mais d’une cepée feulement, fur les chemins &
les routes pratiquées dans les bois. 11 dit que ces
lifières fourniront dés courbes & des bois très-
durs pour le fervice de la marine ; mais que p<3ur
empêcher qu’elles faffent du tort aux taillis, il
fuffit de laiffer tous les bois qui fe trouvent dans
les alignemens. On doit entendre par la propofition
de Tellès d’Acofta qu’on ne doit laiffer de
bordures que fur les routes & chemins , & non
hors de ces alignemens autour des coupes > que
de plus ces bordures ne doivent être compofées
que d’une feule cepée fur chaque alignement.
Je partage affez l’opinion de Tellès fur les in-
conveniens qu’ il y auroit de laiffer un cordon de
taillis de fix pieds de large autour de chaque coupe
dans l’intérieur des bois. Ces cordons multipliés
pourroient en effet intercepter le partage de l’air
& nuire au taillis. Mais je ne puis être de fon avis
lorfqu’il dit que les bordures à laiffer fur les routes
& chemins ne doivent renfermer qu’ une cepée
dans leur largeur. 11 me paroît bien plus avantageux
de fixer la largeur de ces bordures fuivant
l’expofition & la largeur même des chemins, des
routes & autres endroits où elles feront confer-
vées. Ainfi , elles devront être plus larges au midi
& à l’ eft qu’aux autres expofîtions ; fur les bords
des grandes routes, fur les reins des forêts &
vis-à-vis des clairières que fur les chemins ordinaires
, les routes de chaffe , les allées & autres
communications de peu de largeur. Par exemple,
elles pourroient être de dix mètres de large fur les
grandes routes, aux reins des forêts & vis-à-vis
des terrains vides; de huit mètres fur les chemins
ordinaires, & de cinq fur les routes de chaffe,
en les augmentant d’ un cinquième au midi & au
levant. Mais il fera alors important de dégager ces
bordures de toutes les brindilles & cepées qui ne
pourroient vivre jufqu’ à la fécondé révolution ,
ou qui empêcheroient de profpérer les brins d’ef-
pérance marqués en réferve, & q u i , d’ailleurs,
intercepteroient le partage de l’air. Il feroic même
utile d’élaguer un peu les brins confervés. Au
furplus, ces indications pourront être modifiées
fuivant les terrains & la quantité de brins d’efpé-
rance qui s’y trouveront : jé penfe encore qu’on
ne peut pas preferire de lairter des bordures partout
, car il y a beaucoup d'endroits où elles ne
profpéreroient point. Dans ce cas , il faut interrompre
la bordure, en coupant fur fon alignement
tout le bois qui fe trôuveroit placé en mauvais
fonds. J’ai reconnu le mauvais effet d’une pratique
contraire dans la forêt de Senart, où l’on avoir
laiffé des bordures fur toute la longueur d’ une
route, fans diftin&ion d’effence ni de terrain.
Au moyen des précautions que je viens d’indiquer,
on ouvrira des partages multipliés à l’air &
à la lumière ; on favorifera la croiffance des réferves
, & on évitera des pertes de produits affe2
confidérables.
Mais il me paroît indifpenfable qu’ en adoptant
le fyftème des bordures, tel qu'il vient d’être' modifié
, on conferve encore les baliveaux ordinaires
fur l’étendue de la coupe , toutes les fois que le
fol pourra nourrir de la futaie.
CHAP. VIII. Observations, de pkyfiologie végétale
en faveur des bordures, ou examen des circonfiances
naturelles qui influent fur, la direHion des arbres »
& qui peuvent leur faire contra&er des formes utiles
aux confiruclions navales►
On remarque que tous les végétaux, arbres &
plantes, recherchent eonlïamment l’air & la lumière,^
qu’ ils fe dirigent toujours vers les endroits
où ces fluides font le plus abondans. Duhamel ob-
ferve , dans fon l'raitê de la phyfique des arbres,,
q u e , quand on met des plantes ou des arbufles,
qui pouffent vigoureufement, en différens endroits
d’ une chambre ou d’ une croifée, toutes
les pouffes tendres perdent leur perpendicularité
pour fe diriger vers cette croifée.. On fait aufli que
.des planteé , mifes éontre un mur ou à l’extérieur
d’une croifée fermée, fe courbent du côté de l’air
libre , & que , fi on les retourne du côté du mur
ou de la croifée, peu d’heures fuffifent, quand ce
font des plantes herbacées, pour que la tige fe
replie fur elle-même & fe dirige de nouveau vers
la lumière. Cette force d’attraélion eft te lle q u e
des arbres, formant paliflàde, & retenus par de
forts crochets de f e r , brifent fouvent ces crochets
& déplacent les pierres dans lefquelles ils font
fcellés. Ce font des faits que tout le monde a pu
obferver. Enfin , on fait que les branches des arbres
, dans les forêts, font plus fortes & s’étendent
davantage du côté des vides & des clairières
que du côté du plein bois.
Ces phénomènes ont occupé un grand nombre
de phyficiens. Bonnet, Duhamel , Sennebier,
Teflier & autres ont fait des expériences curieufes
relativement à l'influence de la lumière fur les
végétaux. Mais il nous fufïïra de parler de celles
qui fe rapportent à l’inclinaifon des arbres & de
leurs branches.
Ûne courte analyfe des obfervations faites par
Bonnet & Duhamel fur la direction des tiges & fur
la mutation des différentes parties des plantes, me
paroît néeeffaije pour faire connoîtrè le parti
qu’on peut tirer de ces obfervations , à l’effer de
favorifer la formation des bois propres aux conf-
truélions navales.
Bonnet, ayant femé des haricots dans une cave,
obferva que, dans le jour, les tiges s’inclinoient
vers le foupirail, & que, dans la nuit, elles fe re-
dreffoient un peu. « La même chofe arrive en
plein air, dit Duhamel ; car on peut remarquer
que fouvent les arbres ifolés pouffent plus vigoureufement
du côté du midi que du côté du nord :
néanmoins cet effet elt fouvent dérangé par la
vigueur des racines, parce que les arbres pouffent
avec plus de force du côté où les racines font
plus vigoureufes.
•o La direction des tiges du côté de l’air, ajoute
l’auteur de la Phyfique des arbres, eft bien autrement
fenfible dans les maflifs d’un bois : un jeune
arbre, qui fe trouve entouré de tous côtés par de-
grands arbres qui ne lui laiffent d’ air qu’au-defl’us*
de lu i, pouffe tout droit, toujours en s'élevant,
mais prenanrpgu de corps ; de forte que cet arbre,
fort mince, gagne en peu de temps la hauteur de
ceux qui l’environnent.
» J'ai particulièrement fait cette obfervation
fur un chêne-vert qui étoit planté entre des cyprès
beaucoup plus grands que lui ; il s’éleva en
un an de près de quatre pieds, & en peu d’années
il gagna la hauteur des principales branches de
ces cyprès : quand fa tête fe trouva affez élevée
pour profiter de l’a ir , il ceffa de croître en hauteur
& prit de la groffeur.
» Si un jeune arbre, planté dans le mafli f d’un
bois, n’a pas la^liberté de l’ air au-deffus de fa
tête, mais, qu’à une certaine diflance il fe trouve
une clairière, toutes fes productions tendront à
gagner l’air que leur fournit cette ebire-voie }
de forte qu’elles s’inclineront de ce côté r là ,
comme les arbufles placés dans une chambre s’inclinent
vers la croifée.
M On fait que toutes les branches des arbres
plantes en efpafier , le long d’un mur , s’en écartent
pour gagner l’a ir , & il m’ a paru que les
branches des arbres frappées par le foleil du çnidi
s*en écartoient plus que celles des arbres plantés
à l’expofition du nord. »
Tout ce qui vient d’ être extrait de Duhamel
eft incontefiable , & je n’ai jamais remarqué un
fait qui fût contraire aux expériences qu’ il rap-,
porte. Je me fuis même affuré que ce qu'il dit de
la plus grande inclinaifon des arbres à l ’expofi-
tion du midi étoit fort exaCl. J'ai vu des rangées
d'arbres plantées au midi devant des maifons élevées
qui ne leur permettoient pas de recevoir d’ air
ni de lumière du côté du nord ; ces arbres, pour
chercher l’air au midi, s’étoier.t inclinés au point
que plufieurs d’entr’ eux fotmoient, avec le terrain,
des angles aigus.
Duhamel fait enfuite une obfervation qui ne
me paroît pas de la même exactitude que celles
qui précèdent. Il dit qu’en examinant avec attention
la direction des branches des arbres touffus,
on remarque affez ordinairement que lès branches
du haut font un angle plus aigu avec la tige que
les branches du bas. Cela eft vrai ; mais la caufe
à laquelle il rapporte cette différence n’ eft peut-
être pas la feule qui la produife : il attribue cet
écartement des branches du bas à ce qu’ elles s’ inclinent
pour chercher l'aie. Je ne penfe pas que ce
foit là la caufe principale de cet écartement, car il a
lieu dans toutes les pofitions où puiffent fe trouver
les arbres , même dans celles où leur tête eft plus
expofée à l’air & à la lumière que ne le font leurs
branches inférieures. On peut s’en convaincre
dans les hauts taillis où les futaies réfervées n’ont
que le tiers ou le quart de leur hauteur au-deffus
du plein bois ; nonobftant cette circonftance,
qui, d’après l'opinion de Duhamel, devroit cau-
fer l’écartement des branches fupérieures , puif-
qu’tlies reçoivent beaucoup plus d’air & plus de
lumière que celles d’en bas , & à l’extérieur de
l’arbre qu’à l’intérieur , on remarque toujours que
le contraire arrive , &; que les angles formés
par les branches inférieures font infiniment plus
ouverts que ceux décrits par les branches de la
cime. Mais quelles feront alors les caufes de l’in-
clinaifon qui a lieu fucceflivement dans les branches
des arbres en commenç.int toujours par celles
d’en bas? Elles réfident principalement dans l’a-
longement que ces branches reçoivent chaque
année ; dans leur propre poids, qui augmente à
raifon de cet alongement & de leur grofliffement;
dans le poids de l’air qui pèfe fur elles, & qui
eft d’autant plus confidérable que leur furfaceeft
plus grande, comme dans le hêtre, dans le cèdre
du Liban, les pins & fapim; elles réfident encore
dans la pefanteur des feuilles & leur perfiftance
pendant l’hiver ; dans la furchage des eaux pluviales
, des neiges & du givre; dans l’oblitération
des vaiffeaux de la partie inférieure des branches
& la diftenfîon des fibres de ta partie fupé-
rieure, où la fève abonde en raifon du rétréciffe-
ment des vaiffeaux de deffous. Ces caufes réunies
me paroiffent plus efficaces que la caufe unique