
des f o r ê t s ; l’impulfion des améliorations eft donn
é e , & l'on voit les débris du domaine foreftier
fe ranimer & promettre encore des reffources à la
France.
Mais les défaftres de 1812 à 1815 ramènent la
dévaftation au fein de s f o r ê t s ; les coupes extraordinaires
qu’exige la défenfe des places de guerre 5
les gardes éloignés de leur pofte pour faire un fer-
vice militaire j les invafions de l’étranger j les délits
commis par les habitans, & c . , 8c c . ; tout concourt
à confommer la ruine de ce malheureux domaine
, toujours en butte à la cupidité, toujours
attaqué & toujours affoibli. 1
Terminons cet e(fai de l’hiftoire des f o r ê t s par
l ’expofé de celles qui nous relient pour faire face
à tous nos befoins.
Les f o r ê t s appartenant à l'État , en 1808 ,
pour tout le territoire dont la France étoit alors
compofée,préfentoient une étendue de 2,321,802
heéhres, & un produit de près de 50 millions.
La réduction du territoire, les reftitutions & les
aliénations ont réduit la contenance des f o r ê t s du
domaine à 1,200,900 heétares, & celle d e s f o r ê t s
communales d 2,000,000. Ainfi le total des bois fournis
à l’action du Gouvernement eft de 3,200,000
he&ares. Un cinquième environ de cette maffe eft
aménagé en futaie, demi-futaie 8c haut-taillis, le
refte ne forme que de petits taillis.
Suivant l’expofé de la fituation de la France en
1813, préfenté au Corps légiilatif, les bois appar-~
tenant aux particuliers n’auroient pas formé le
quart du fol foreftier; car on eftimoit que la
France, polTédant alors 8 millions d’ heétares de
bois, il n’y avoit dans cette maffe qu’un mil ion
Soo heétares de bois de particuliers. Mais les reftitutions
qui ont été faites, & qui fe montent à-
é00,000 h étares, les bois de la lifte civile & les
aliénations ont augmenté la proportion exiftante
entre les bois des particuliers & ceux fournis au
régime fortifier, de telle forte qu’ aujourd’hui
on compte que les bois poffédés par les particuliers
forment une confiftance de 2,900,000 hectares
j mais dans cette contenance, il y a beaucoup
de landes, de bruyères & de terrains vagues, car
le département des Landes feul eft annoncé contenir
130,000 heétares de bois de particuliers,
& il s’en faut de beaucoup que ces terrains foienc
réellement en nature de bois. Nous ferons la même
obfervation fur pluiîeurs départemens du Midi,
tels que ceux de 1* Allier, de l’Aveyron, des Bouches
du-Rhône, de la Dordogne, de la Gironde, de
l ’Hérault & de l’ Ifère, du Var, de la Vienne, & c .,
qui font annoncés contenir enfemble environ
500,000heétares de bois de particuliers, & dont
plus de la moitié eft confacrée au pâturage des
bcftiaux.
Obfervons encore que les f o r ê t s deftinées à paf-
fer du domaine de l’État dans la propriété des particuliers
, par fuite des aliénations., éprouveront
dans leurs aménagemens des altérations qui en af.
foibliront de plus en plus les produits en matières.
Mais en ne confidérant que les contenances*
telles qu’elles exiftent aujourd’hui, il y auroitj*
Bois de l’E ta t ......................... 1,200,000 heét.
Bois des communes 8c établiffemens
publics..................... 2,000,000
Bois des particuliers................ 2,çoo,coo
Totaux........................... 6jioo,ooo h:-.ft,
•Si on déduit de cette maffe les landes, bruyères,
vides , clairières, chemins & carrefours, on aura
une diminution qu’on peut, fans exagération, porter
au dixième. 11 ne refteroit de plein bois qu’en-
viron 5,590,000 heétares.
Appliquons maintenant, à cette maffe de bois,
les calculs qui ont été faits pour connoître la quantité
de cordes que produit un heétare par an,
Les bois de la France, de toutes les catégories,
font aménagés à 9 , 10, 1 y , 20, 25 & 30 ans pour
les taillis 5 à 40, 50, 60, 70, 80, 100, 150&
200 ans pour les futaies & demi-futaies.
Le terme moyen de l’aménagement, pour les
taillis, eft de 18 à 20 ans, & le terme moyen peur
les futaies , eft de 70 ans.
Le cinquième des bois de l’Etat & des communes
eft en futaies ; ce cinquième eft, déduétion
faite des vides , de......................... 576,000 hec.
Le furplus forme une maffe de
taillis d e . ...................................... . 2,304,000
Prefque tous les bois des parti-
cu'iers font en taillis ; ils forment,
déduétion faite des vides, une
étendue d e ....................................... 2,6io,cco
Total des taillis . . . . . . . . 4,9x4,000 heft.
D ’après les évaluations de divers auteurs fur les
produits des bois, que nous avons rapportées à
l’article Amenagement , & dont.nous ayons pris
le terme moyen, on peut eftimer que ce produit
moyen, pour un heétare fi tué en fonds de qualité
ordinaire & aménagé à 20 ans, eft de 20 cordes de
bois pour cette révolution, 8c par confequerit
d’une corde de bois par an.
il en réfultero.it que la quantité ci-deffus de
taillis dont l’ aménagement commun eft fuppofe al
20 ans, produiroitannuellement 4,914,000 cordes
de bois de toutes groffeurs 8c qualités.
Quant aux futaies dont l’aménagement réduit,
eft de 70 ans , leur produit feroit, d’après les calculs
de M. de Perthuis, de 83 cordes (1) par hec-
( i ) L a corde donc il eft ici queftion eft celle dite
vente , de cinq pieds de hauteur fur huit de couche , 1 *
bûche ayant trois pieds fîx pouces de longueur..
oour cettî révolution de 70 ans, s’il 5’ avoit
Prince autant de bois placés lur les bons que
rlrie's mauvais terrains ; mais comme il y a peu de
! i et ne dalle lur les terrains les plus mauvais,
M de Perl huis confeille o’ajouter un dixième aux
ri duits moyens qu’il a trouvés} nous y ajouterons
P * ‘ô un cinquième, parce qu’ il s’agit ici de ter-
Sins allez, généralement bons. D’après ces données,
1 nroiui'. d’un heétare à 70 ans, fera porté à 99 cordes
& par conféquent a une corde trois feptièmes ;
P3r an, ce qui donne roi t annuellement, pour les
L^ooo heétares de bois de cepte catégorie,
' 82/858 cordes.
Ainli, le total des cordes produite? par an,
dans toutes les f o r ê t s de la France, feroit d’environ
5,736,858 cordes. ,
Mais nous avons tout réduit en cordes, oc 11
convient de faire la part des bois d’oeuvre, de
co-iftrüétion & autres. Nous né nous écarterons
pas d? U proportion réelle, en admettant que ces bois forment au moins le trentième de toute la
maffe de bois,produite. Il faut donc fouftraire
de 5 , 7 3 cordes, la quantité de 191,228 cordes/&
par conféquent réduire la quantité de bois
de feu à 5,545,630 cordes. - ,
Or, nous avons vu q u e , d’apres le compte
rendu à la Convention, les befoins de la con-
fommation des foyers & des ufines étoient
1 . . . . . . . - . . . . . 08 ,3. 3, 3r ,35 2m0m car ri ldAesï ,
Le produit n’étant que d e . . 5j54 L^3P
Le déficit eft d é . ......... ........ 2,787^69000^5.
Cépendant, obfervera-t-on, le bois ne manque
pas dans les chantiers} il y a même en ce moment
furabondance. A cette objeélion, nous répondrons
que le déficit eft comblé, pour une partie, par
les bois que produifent les émondes des arbres &
des haies, par les combuftibles minéraux, & ,
pour la plus grande partie, par les coupes extraordinaires
qui fe font, depuis quelques années, dans
les bois reftitués aux émigrés, dans ceux des communes
& dans les bois aliénés. Mais la différence
entre le produit & la reproduction eft toujours
énorme. Ses effets, pour être retardés, n’en feront
pas moins réels. Que l’on fe rappelle d'ailleurs le
prix exceffif “des bois avant 1815 , c’ëft-à-dire,
avant les époques qui ont fait anticiper les.coupes;
que l’on fe rappelle auffi les difettes de combufti-
ble qu’on a éprouvées dans la capitale à plufieurs
reprifes, foit avant, foie pendant la révolution,
& l’on ne doutera plus qu’il n’y ait une grande disproportion
entre le produit 8c la reproduction,
ou, ce qui eft la même chofe, entre lesquantités
de bois que l’on coupe ©É celles qui fe repro-
duifent.
Ajoutons une feule obfervation que nous avons
faite fouvent dans le cours de cet ouvrage : c’eft
que plus il y aura de f o r ê t s en taillis, qui eft le
feul aménagement qui convienne à des particuliers,
fous le rapport pécuniaire, moins les produits
en matière feront confidérables, puifq.u un
heétare de bois aménagé à 150 ans, produit, dans
çet efpacede temps, deux cinquièmes de bois de-
plus qu’un lf: étire aménagé à 30, ans, dans le
même efpace de temps. Donc, c’ eft à celui qui
peut aménager les bois a longs termes, qu il appartient
d’en pofféder le plus} donc, fi 1-S paiticu-
liers étoient feuis propriétaires de bois, les produits
iroient toujours en diminuant ; donc, le déficit
feroit toujours croiffant} donc r-enfin, ‘il fau-
droit, pour obtenir des produits égaux a ceux
que donnent les bois de l’Etat 8c des Communes,
généralement aménagés à 25 & 30 ans, compenfer,
par l’étendue des bois, le déficit réfultant des ame-
nagemens fixés à 10 & 15 ans/qu adoptent les particuliers,
& prendre fur la terre culte cette augmentation
de fuperficie. De-la, moins de récoltés, 8c
peu ôu point de bois de conftruétion. V o y e [ les
articles Aménagement & Exploitation.
C o u p d ’oe i l f u r l e s f o r ê t s d u n o r d d e L’E u r o p e .
Après avoir jeté nos regards fur l’état d e s f o r é . s
de la France, voyons ce que furent autrefois 8c
ce que font aujourd’hui les forets du Nord.
Forêt hercynienne. Pline nous dit que de fon
temps les fo rê ts çouvroient la Germanie, a i exception
des pays qu'il appelle les grands & petits
Cauques, pays que nos hiftoriens plaçoient dans la
Nort-Hollande. ** La fo r ê t hercynienne, dit-il,
fituêe vers cette même partie du nord, eft un
amas de grands chênes qui n’ont jamais été coupés.
Auffi anciens que le Monde, ils jouifient encore,
par une merveille ineffable, d’unè forte
d’ immortalité. » L’ auteur romain raconte enfuite
des chofes qui lui paroiffent à lui-même incroyables
, 8c qui le font en effet; telles que la groffeur
des racines de ces arbres, qui foulevoient la terre
&formoier,t des éminences confidérables, & l’élévation
de ces racines quiTortoient de terre 8c rejoi-
gnoient les branches, de façon à former des arcades
affez fpacieufes pour donner paffage à des efea-
drons de cavalerie. Ces arbres de la fo rê t hercynienne
, dit-il , font pxefque tous glandiferes,
c’ eft-à-dire, de l'efpèce pour laquelle les Romains
ont e u , de tout temps, le plus de vénération (1).
Il paroît, d’après ce peu de mots, que Pline
n’avoit que des notions très-incomplètes fur la f o r
ê t d’Hercynie ; & il eft probable que celles qui
lui avoient été tranfmifes furies efpèces d’arbres,
ne s’appliquoient qu’ à quelques portions de cette
immenfe f o r ê t , car les arbres glandifères n en formaient
furement pas la majeure partie. On fait que
la f o r ê t du Hartz & la f o r ê t Noire, qui font de
(1) Glandiferi maxime generis, quibus honbs apud R o manos
perpetuus. P lin ., liv. X V I , ch
Rrr 2