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Au printemps fuivant, les pieds de c y p r è s font
plantés feul à feul dans des petits pots qu’ on place
contre un mur, d’abord àLexpofition du midi, &
pendant les chaleurs, à l’expofition du nord > là ,
on les arrofe au befoin. Chaque année on les
change de pot, dont le diamètre s’augmente en
proportion de leur accroiffement, & on les traite
comme il vient d’être dit.
Dans ma jeuneffe j’ ai vu des c y p r è s d’une grande
élévation dans les jardins de Paris, principalement
dans celui du Muféum d’hiftoire naturelle > mais
ils ont péri dans les hivers de 1776,178 9 & 1794,
& depuis lors il n’a pas été poflible de les remplacer,
même avec le foin de les empailler pendant
l’ hiver. Ils ne peuvent donc plus être l’objet que
d’ une culture de fort peu d’importance.
On multiplie aufli le c y p r è s de boutures faites
au printemps, en Provence, dans un lieu frais &
ombragéj à Paris, dans des terrines placées fur
couche à châflis. Elles réuffiffent affez bien, mais
les arbres qui en réfultent n’ont jamais la vigueur
de ceux provenant de femences, & fur tout de ceux
qui n’ont pas été tranfplantés.
On trouve fréquemment dans les femis, des
piedsdont les branches ne font pas rapprochées du
tronc, ce qui diminue beaucoup la beauté de ces
pieds & détermine le plus fouvent à les arracher,
appelle cette variété, qu’ il ne faut pas con-
1U.I1-5 avec l’efpëce fui van te, c y p r è s h o r i z o n t a l ou
c y p r è s m â l e , par comparaifon avec fon efpèce, qui
fe nomme vulgairementcyp/'èjp y r a m i d a l ou c y p r è s
f a n e I U y
Le Cyprès a rameaux pendAns, ou Cyprès
glauque , ou C yprès de Portugal, fe voit
dans toutes les écoles de botanique & dans les
jardins de quelques amateurs. 11 reffemble un peu
à la variété du précédent, mais fes branches font
plus pendantes & fes feuilles moins vertes. Il ne
s’élève guère qu’à quinze pieds : on le dit natura-
Iifé en Portugal, d'où il nous eft envoyé. L’orangerie
lui eft indifpenfabie pendant l’hiver. Sa multiplication
a lieu par graines, dont il donne fouvent
de bonnes dans le climat de Paris, & de boutures.
La manière de le cultiver De diffère pas. de celle
qui vient d’être indiquée.
- Le C yprès austral fe cultive dans nos ferres
tempérées, mais il y eft encore fort rare. On
ne le multiplie que de boutures, attendu qu’il n’ y
fructifie pas. La terre de bruyère & des arrofe-
mens abondans en été lui font avantageux.
- Deux ou trois autres efpèces encore inconnues.
Venant aufli delà Nouvelle-Hollande ou du Japon,
fe voient dans les ferres de Noifette. Leur culture
ne diffère pas de celle que je viens d’indiquer. ■
. Le C yprès thyoïde ou a eeuilles de
T h u y a , ou C èdre blanc, ou Arbre de vie,
eft un des plus grands & des plus utiles arbres de
l ’Amérique feptenriionale. Il croît dans les mar
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rais, où il a , pendant l'hiver, plufieurs pieds de
hauteur d’eau fur. fes racines. En France, il ne
s’élève jamais à plus de huit à dix pieds, & vit ya.
rement plus de huit à dix ans.
Le bois du c y p r è s t h y o ï d e , au rapport de Michaux
fils, eft aujourd’ hui, que les vieux pieds
propres à.la charpente, font devenus rares, principalement
employé à faire des efle.ites pour
couvrir îes maifons, des baquets & autres articles
de petite tonnellerie, ce à quoi il eft très-
propre par fon incorruptibilité & fa légèreté. Le
commerce intérieur & extérieur auquel il donne
lieu à Philadelphie eft encore très-confidérable,
mais il doit s’affoiblir y puifqu’ on détruit toutes
les forêts où on le puife & qu’on n’en replante
point.
Je doute que jamais cet arbre devienne utile à
nos cultures. En effet, fes graines feméesdans une
terre de bruyère expofée au nord, lèvent fort
bien , & les pieds qui en proviennent femblent
profpérer pendant deux ou trois ans, lorfqu’on les
arrofe abondamment j mais enfuite, foit qu’on les
laiffe en place, foit qu’on les ttanfplante dans les
lieux les plus humides, ils ceffent de croître,
donnent des graines en abondance & meurent.
Des milliers de pieds que j’ ai élevés , il y a dis
ans ( j ’ écrisen 182.0)-, dans les pépinières de Ver-
failles, il n’en fubfifte peut-être pas'cent au mo-
; ment aétuel, quoique beaucoup aient été plantés
! dans des marais,, erm’auires dans ceux de la vallée
: de Rambouillet, qui paroi lient être complètement
analogues à ceux des environs de Philadelphie.
On doit donc fe borner à en avoir quelques
pieds dans les écoles de botanique & dans les jardins
des amateurs , pieds qui fe feront remarquer
par l’éléganee de leur port, & qu’on multipliera,
foit par lés graines qu’ils fourniront, à défaut de
celles venant d'Amérique, foit de boutures qui
réufliffent a (fez bien , mais dont les produits durent
encore moins de temps que ceux venus dé
graines.
La ré fine que donne ce c y p r è s exhale, lorfq.u’on
la brûle , une odeur très-fua-ve, On l’appelle v r a ï
e n c e n s e n Amérique.
Le, Cyprès distique, C yprès chauve,
C yprès de la Louisiane , ëft un des plus
grands & des plus beaux arbres du monde. II ne
croît bien que dans les marais & fur le bord des
rivières fujettes aux inondations périodiques. J’en
ai v u , en.Caroline, qui.avoient plus ae quatre
pieds de diamètre & plus de cent pieds de hauteur,
& qui avaient douze pieds d’eau fur leurs racines
pendant fix mois de l’année.. On m’en a cité du
double de cette groffeur. Toute la partie inférieure
de fon tronc qui eft dans l’eau, non-feulement
groflit plus que le refle du tronc,, mais il s’y
forme des faillies très-confidérables,.refiemblant
à des arcs-boutans ; de plus il fort fouvent des ra^-
cines, des cônes irréguliers,plus ou.moins gros,
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tnuiodrs creux, ne prenant jamais de branches,
i,llis ou moins élevés, plus ou moins nombreux,
* • ont excité l’ étonnement des obfervateurs ,
l u i ont été rappelés par M. de Cubiéres dans fon
Mémoire fur cet arbre, cônes dont la Crotflance
s'explique par l’exceffive force de fa végétation
U carie peu de réfiftance qu'apporte fon écorce
amollie par l’eau. V o y e[ Nyssa & Gordone.
Cette exceflive groffeur des c y p r è s d if t iq u e s dans
les bons terrains inondés, ne permet pas de les
couper rez-terre: aufli, ainfi que je l'ai vu en Caroline
, fur la rivière gantée, confiru-t-on des
échafauds pour exécuter cette opération. '
Le bois du c y p r è s d if t iq u ç n’ eft pas dur, mais
il poffède tant d'autres qualités qu’ il peut fe paf-
ferde celle-là. On en fabrique des bateaux d'une
feule pièce, qui peuvent porter trois à quatre
milliers. 11 s'emploie dans la charpente des maifons
& des vaiffeaux. On en tire des planches ; du
merrain, des effentes, 8cc- Il eft incorruptible à fait & dans l'eau. Sa couleur eft rougeâtre, veinée,
de blanc & de brun ; fon grain fin. La réfine
qu'il contient eft peu abondante, 8c ne fert qu'à
la médecine;
Malheuteufement, ainfi que je m’ en fuis per-
fonnellement alluré, 8c ainfi que Michaux fils l'a
conihté depuis, cet arbre fi précieux difparoît
des cantons où il y en avoir le plus ; bientôt j l ne
fera plus poflible d’en trouver d'un fort échantillon.
Alors l’immenfe commerce auquel il donne
lieu, foit dans l'intérieur des E ta ts -U n is , foit
dans le relie d-u Monde,‘car ôn en porte non-feulement
dans les ■ autres parties de l ’Amérique ,
mais en Europe, dans l’Inde, jufqu’à la Chine,
fera complètement perdu.
Que faire pour empêcher ce malheur ? Je dirai :
femer; mais deux caufes s'oppofenc prefque partout
à l'exécution ou au fuccès des femis. D ’abord
l’avidité pour le gain , qui défend aux cultivateurs
de femer pour leurs arrière-petits-enfans ; enfuite
l’énorme diminution dés terres inondées ou inondables
, produite par les défrichemens tant des
plaines que des montagnes, 8c par conféquent des
lieux prbpre's à la végétation dés c y p r è s d if t iq u e s .
Enfin, la loi "des àffolemens, qui né permet pas que
les jeûnes pieds: de cet arbre profpèrent, avant !a
révolution d’ un fiècle peut-être, dans les lieux où
il y en avoir dès vieux.
De ces faits il réfülte qu’ un jour il n’y aura
plus, dans tout le continent.de. l’Amérique , que 4e petits c y p r è s d i jt iq u e s . .
H y a une grande différence d’afpeél entre le
cyprè s d i jl iq u e 8c ceux quevj’ai mentionnés plus
haut. Ses feuilles font longues, difpoféés le long
des côtés oppofés des .petites branches. Elles
tombent tous les ans. Leur verdure efl amie de 1 oeil. Comme il croît toujours en maffe , 8c dans
des lieux .peu praticables, il ne concourt pas à la
beauté des forêts de l’Amérique. Ce n’eft que
par la groffeur du bas de fon tronc qu’ il fe fait
remarquer. f .
Dès 1640, le c y p r è s d if t iq u ç a été introduit dans
les jardins des environs de Londres. Il y a moins
d'un fiècle qu'il fe voit dans ceux des environs
de Paris. Long-temps on a ignoré qu'il croiffoit
dans l’eau. En conftquence , quoique fes graines,
venues de la Caroline, levaffent fort bien, on ne
pouvoit conferver que quelques années les pieds
qui en provenoient. Duhamel ie premier imagina
d’en planter dans les terrains tourbeux de fon
domaine du Monceau , où ils réufiîrent._ C'eft à
Malesherbes qu'on doit l'élan qui, il y a cinquante
ans, fit rechercher cet arbre, 8c c'eft aux Michaux
père 8c fils qu’ on a l'obligation de l'immenfe quantité
de graines qui ont été. femées en France, principalement
dans les pépinières- de Trianon, mais
donc les produits fe font prefque tous perdus pour
n’avoir pas été plantées dans des lieux convenables,.
On voit cependant quelques beaux pieds
à Rambouillet, où il devroit y en avoir des milliers,
fi on les eût mis dans le marais, au lieu
de les mettre fur la berge des folles qui le traver-
fent, 8c chez quelques particuliers. Aucun de
ces pieds n 'a , à ma connoiffance, donné de
bonnes graines -, de-force qu’ il faut toujours ej>
faire venir de Caroline lqrfqu’ on veut le multiplier
: car les boutures 8c tes marcottes, quoique
prenant aflez facilement racines, ne donnent jamais
des pieds de longue durée..
Les graines du c y p r è s d if t iq u ç font anguleufes ,
irrégulières 8c très-grolfes. Leur propriété germinative
fe conferve pendant plufieurs années, fur-
tout fi elles font taillées dans les-cônes où elles ont
pris naiffance. Elles fe trouvent toujours mêlées
avec des globules, ou G a li.es produites par un
diplolèpe qu’on a fouvent pris pour elles, 8c femées
par conféquent fans fuccès. -, _.
C ’e ft, ou dans des terrines remplies de terre
de bruyère, ou.dans des plates-bandes d e là
même ferre, expofées au nord, qu'on leme au
printemps les graines du c y p r è s d i j l iq u e . Les ter-
rinés fe placent fouvent fur couche à châflis pour
accélérer la germination des graines, mais enfuite
on les expofe également au nord. Dans les deux
cas, des arrofemens fréquens font indifpenfabies.
Il eft rare que toutes les graines ne lèvent pas.
Le plant en terrine fe rentre dans l’ orangerie
pendant l’hiver, 8c l’autre fe couvre de feuilles
fèches ou de fougère pour le garantir des fortes
gelées, auxquelles il eft fenfîble. Après l’hiver
on peut le tranfplanter,. avec avantage, en pépinières,
en terre légère 8c humide, à fix a huit
pouces de difta'nce, quoique beaucoup de cultivateurs
^attendent une année de plus pour faire
cette opération. Ce plant, pour peu qu’ il foit
arroféijetubie profpérer d’abord ; mais deux ans
après , qu’on le laiffe dans fa planche ou quôn le
repique autre part à deux pieds de diftanee, i l
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