
montagnes, & dont plufieurs des autres fe cultivent
dans nos jardins.
Obfervations.
Linnæus avoit réuni ce genre à celui des Pins &
à celui des Mélèzes. Ici, ces derniers font le
fujet d'articles féparés, auxquels je renvoie le lecteur,
ainfï qu’au mot Ab.auc aire.
O n fubdivife lesf aphis en trois fériés: ceux qui
ont les feuilles planes & diftiques, les véritables
fapins i ceux qui ont les feuilles tétragones &
éparfes, les épicéas; ceux qui ont les feuilles planes
& alternes > les hemelocks.
Efpèces.
Première férié.
1. Le Sapin commun, ou fi implement
P inus picea. Linn.fr Indigène.
2. Le SAPIN baumier, ou baumier de Gilead.
P inus- balfamea. Linn. De l ’Amérique fep-
tentrîonale.
3. Le Sapin.à feuilles d'if.
Abies tàxifolia. Lamb. De l’Amérique fep-
tentrionale.
'4. Le S a p i n de Frafer.
P inus Fraferi. Pursh. T? De l’Amérique fep-
tentrionaîe.
y. Le Sapin nain.
Abies nana. Bofe. f> De l'Amérique fepten-
erionale.6
. Le Sapin à feuilles lancéolées.
Abies lanceolata. Lamb. T> Des Indes.
7. Le Sapin Dammar.
Pinus Dammar a. Lamb, T? Des Indes.
Deuxième férié.
8. Le Sapin peffe, ou épicéa.
Pinus abies. Linn. f? Indigène. *
9. Le Sap.in blanc.
Pinus alba. Ait. fj De l’Amérique feptentrio-
aale.
10. Le Sapin noir.
Pinus nigra. Ait. De l’Amérique feptentrio-
aale.
11. Le S a p i n rouge.
Pinus rubra. Lamb, f? De l'Amérique fepten*
trionale.
12. Le Sapin luifant.
Abies lucida.Bofc. T) De l’île de Terre-Neuve.
13. Le Sapin hériffe.
Pinus cotumbaria. Desf. T? De l’Amérique fep-
tentrionale.
Troisième férié.
14. Le Sapin du Canada.
Pinus canadenfis. Linn. T? De l’Amérique fèp-
tentrionale.
Culture.
Le fapin commun , ou fapin blanc, ou fapin ai-
gerité , ou fapin de Normandie, ou fapin a feuilles
dé i f , eft l'arbre vert le plus multiplié fur les mon-
tagnesde la France. Il couvre prefqu’exclufivement
les Vofges, le Jura, les Alpes, & les parties les
plus élévées du centre de la Fiance. Souvent on le
confond avec le P in s y l v e s t r e , le S a p i n p e s s e ,
qui croiffent dans les mêmes lieux, mais moins
fréquemment. Sa hauteur eft quelquefois au-deffus
de cent pieds, & fon diamètre au-deffus de trois, j
C ’eft un arbre impofant par la majefté de fon port
& la difpofnion de fes branches vertieillées, &
, diminuant graduellement de longueur.Plus qu’au- ;
1 cun autre arbre vert, le bouton terminal de fa
| flèche eft garanti par fon organifation & pouffe
tard, de forte qu’il ne craint pas les plus fortes
gelées i aufii n’eft-ce que par accident qu’il peut
ceffer de croître en hauteur.
Malherbes appeloit 1 efapin un arbre intolérant,
& en effet il ne fouffre aucun autre arbre auprès
de lu i, & à peine voit-on quelques buiffons &
quelques plantes vivaces fous fon ombrage. Sa
végétation eft lente pendant fes premières années,
mais enfuite elle prend de 1 activité pour fe ralentir
encore après .quinze ans. Une terre legere
& un air humide font indifpenfâbles à fa profpé-
rité : voilà pourquoi il s’eft relégué fur les hautes
montagnes où les brouillards font permanens;
voilà pourquoi il fe voit fi rarement dans nos jardins
payfagers, qu’il orne beaucoup, mais, cependant
moins que l’épicea.
Les montagnes fehifteufes, les pentes expofées
au nord, font les lieux où fe plaifent principale- •
ment les fapins , & où leurs forêts fe coiffer*
vent encore avec le plus d’avantages.
Les racines des fapins favent pénétrer dans les
fentes des rochers & aller chercher leur nourri-•
ture au loin. Voilà pourquoi on en voit de fi beaux
pieds dans des Fieux où- il n’ y a prtfque point ée
terre. Ajoutez que leurs abonda-ns débris améliorent
chaque année le fol, & que les pluies n’entraînent
pas l’humus produit par ces débris, parce
qu’ elles font divifées d’abord par les feuilles fans
nombre , & enfuite par les pieds très-rapprochés
de ces arbres..
Comme tous les arbres verts,. Tes fomlies
des fapins coupés ne repouffent plus ; en fi>rte que
tous proviennent defemences, & lorfque lëur fléché
eft caffée .par accident, iis ne pouffent plus en
hauteur, deux’ circonftances importances qu’on ne
doit pas perdre de vue dans la pratique.
Jadis les forêts de fapins étoient plus étendues
qu’elles le font eu ce moment. La loi: des Asso-
lemenS: (yoyei ce mot);, les coupes exagérées , le
J pâturage des beftiaux, concourent à les rétrécir
/ partoutaiufi que je l’ai o b f e r v é & nulle p a r t a
ma tonnoîftance -, on ne s’occupe des moyens de •
retarder leur difparition totale, foit par des r é - 1
glemens de police rurale , foit par des femis. Ces
derniers réuffiffent allez facilement dans les clairières
, où le jeune plant trouve l ’humidité & la
protection nécelfaire à fon développement j mais
ils font très-difficiles à faire arriver à bien fur les
pentes, dont les vieux arbres ont totalement dif-
paru, même fur les bords des forêts exiftantes ,
parce que le jeune plant y eft expofé à l’ardeur du
foleil &au piétinement des beftiaux. Ce n’eft qu’au
riipyen de plantations antérieures de ronces ou
autres arbuftes, de topinambours & autres grandes
plantes vivaces &r de larges foffés, qu’on pourroit
y parvenir: auffi partout leur ai-je vu fubftituerle
pin, qui redoute moins la féchereffe , & j’ ai applaudi
à cette lubftitution, quoique le bois de ce
dernier foit inférieur en qualité au fien ; car combien
de parties des montagnes précitées, qui ont
fix à fept mois d'hiver, feront inhabitables lorf-
qu’elles n’auront plus de bois ! & elles fe trouveront
bientôt dans cette trifte circonftance.
Lorfquelès forêts d t fap in s fe trouvent compo-
fées d’arbres d’égale grandeur, elles font bien
plus expofées aux efforts des vents, toujours fi
violens aux élévations où elles Te trouvent j auffi
en voit-on fouvent de déracinées par eux dans les
lieux où leur exploitation n’eft pas poffible, les
vieux arbres fléchiffant moins que les jeunes, &
ayant, des Racines en partie altérées. V o y e j ce
mot.
Une caufe qui concourt encore à la deftruClion
des forêts d e fa p in s , c’ eft le droit qu’ont tous les
habitans des communes auxquelles elles appartiennent,
de Cafter, pour leur ufage ,Ies branches
latérales des arbres qui les compofeqt ; car comme
il eft naturel de commencer cette opération par les
arbres de bordure, & que le fapin ne veut pas.,
être ébranché, la plupart de ces derniers meurent
avant d’être arrivés à l’âge convenable.
J’ai vu dans les Alpes de vieux pieds de fapins
ifolés, refte d"e la forêt qui couvroit le fol où ils
fe trouvent, lesquels font confervés précieufe-
ment, pour fervir d’abri aux beftiaux & à leurs
gardiens, lefquels étoient chargés de cônes dont
lés graines fe difperfoient chaque année fans
utilité, par la caufe ci-deflus. On les appelle abris
tempête.
J’ai vu dans les Vofges &dans le Jura le bord des
forêts de fapins n'offrir plus que des arbres ifolés,
dépourvus de branches inférieures , en porter
également fans utilité pour la reproduction. On
appelle les terrains où ils fe trouvent, prés- bois, &
en effet ils font tous des pâturages établis aux dépens
des bois , pâturages que les habitans aiment
à étendre. Au contraire, les graines des vieux pieds
confervés au milieu de la forêt font difperfées
chaque année par les vents dans toute l ’étendue de
cette forêt, germent fous un abri protecteur,
ïeproduifent plus d’arbres qu’on n’en enlève. J’ai
toujours été frappé de la vigueur des jeunes pieds
de différens âges qui fe touchoient prefque, &
qui cependant étoiént recouverts de plus par les
branches des gros pieds voifins. C e phénomène eft
prefqu’exclufivement propre au f a p in , du moins
je ne l’ai pas remarqué être au'.ii prononce dans les
forêts de pins & d’épiceas. Il a cependant des
bornes, & une quantité de jeunes arbres doit
périr faute de trouver moyen d’étendre leurs racines
& de jouir du bienfait de la lumière & de fefe . -
Cette manière de végéter du fapin indique le
mode d’exploitation qu’on doit fuivre, & qu’on
fuit en effet à fon égard, mode qu’on appelle en
jardinant. f t
Ainfidonc, tous les ans, à la fin de l’é té , on
parcourt les forêts de fa p in s , pour abattre tous
les arbres qui font arrivés à la grofleur convenable.
La chute de ces arbres en cafte beaucoup
d’autres, plus petits j on eft obligé d’en couper
encore beaucoup pour traîner, jufque dans un
chemin, ceux qu’on a abattus> mais tous ces dé-
fa ftres fe réparent bientôt, & leurs traces difpa-
roififent en deux ou trois ans au plus.
Il eft parlé fort au long de ce mode de couper
les bois en jardinant, à l’article E xploitation,
& j’y renvoie le leCteur.
Un autre mode,, que j’ai vu- employer fur les
montagnes de l’Auvergne , c’ eft de couper la totalité
des fa p in s dans des bandes de peu de largeur
, de dix àv douze toifes , par exemple, dirigées
du levant au couchant, bandes dans lef-
quelles les fapins levoient très-épais , même trop
; épais , foit par fuite de h diflémination antérieure
de leurs graines, foit par fuite de celles pofté-
rieurement fournies par les arbres des bandes voi-
fines. Je n’ai pas fuivi affez long-temps ce mode
d’exploitation, que M. Hartig indique comme
auffi pratiqué en Allemagne, pour avoir pu
prendre une opinion pofitive fur fes avantages &
fes inconvéniens.
On fait une immenfe confommation du bois du
fa p in pour brûler. Son emploi dans la marine,
la charpente, la menuiferie, eft extrêmement
étendu. Il réunit la folidité à la légèreté. Sa tranche
préfente des zones alternativement blanches &
tendres , & des zones fauves & dures j ces dernières
plus petites. Varenne de Fenijle a trouvé
qu’il pefoit environ 32 livres par pied cube, &
que fa retraite étoit de Sa couleur paffe au
rouge, par l’effet de fa vécufté.
. Outre fon bors pour les férvices ci-deffus, &
autres de moindre importance, lé fapin offre encore
fes feuilles pour la nourriture des moutons ,,
fon écorce pour tanner les cuirs, & fa térébenthine.
La térébenthine du fa p in , qu’il ne faut pas con-
■ fondre avec celle du Melèze & du T eré--
bin the, porte dans le commerce le nom de té -
, rébentkine de Strasbourg. Elle fe trouve dan? des-
1 vefiks quelquefois d’un pouce de diamètre, tan"