
& de garde. L’année i S i2,fi favorable d’abord, &
qu’on croyoit devoir être fortunée pour les propriétaires
de v i g n e s , ayant été trop chaude & tropfèche
à la fin d’août & au commencement de feptembre,
n’a donné à ceux q u i, féduits par l’excès de maturité
du raifin, excellent à marger, ont vendangé
trop tôt, c’eft-à-dire, avant la pluie (le plus grand
nombre s’eft mis dans ce cas) que des vins fans
force & fans durée, dans lefquels il a fallu bientôt
mettre de l’eau-de-vie pour ne les pas perdre entièrement
j tandis que ceux qui ont attendu à
vendanger après la pluie, en ont obtenu de très-
bons, qui fe confervtront long-temps. Ces circonftances
fe font montrées dans les vignobles du
nord , du centre & du midi.
■ Je dois cependant remarquer que , dans les vins
du Nord, l’acide tartareux & le principe aftrin-
gent de là grappe compenfent jufqu’ à un certain
point le manque d’alcool, & concourent à les
faire durer plus long temps.
L’ influence de la culture fur la qualité du vin
ne peut être niée. J.? viens d’en citer-un exemple.
Les'variétés qui rrür.lient fort bien en Sicile ,
relient en verjus dans nos jardins (le raifin cornichon)}
celles qui donnent du vin paffable lorf-
qu'on les fait monter fur des arbres en Italie , fur
des perches en Dauphiné, qu’on tient à trois ou
quatre pieds de haut dans le bas Languedoc, en
donneroient, aux environs de P<ris, de plus dé-
teftable que celui qui s’y récolte j mais dans tous
ces pays, les v ig n e s tenues les plus baffes, raillées
avec le plus de févérité, font celles qui donnent
le meilleur.
Une terre abondamment pourvue de principes
nutritifs, peut nourrir des ceps plus élevés, des
ceps plus rapprochés. Les v ig n e s qui y font plantées
doivent donc recevoir une culture différente
de ce J le dune terre aride, où les ceps font très-
bas & très-récartés.
Les coteaux très-inclinés, comme je le ferai
voir plus bas, ne-peuvent pas être labourés comme
les plaines.
Toutes'les variétés demandent une culture qui
foit appropriée à leur nature.
Que penfer, d’après cela , de ces écrivains qui
ont voulu affujettir Jes v ig n e s de tous les climats,
de tous les fols, de toutes les variétés, à la culture
ufitée dans leurs pays?.
Mais il faut palier à là defeription de la v ig n e ,
defeription indifpenfable pour me faire entendre
par la fuite.
Un pied de v i g n e s’appelle un C ep , un Plant,
Les Racines de la v ig n e font tantôt, pivotantes,
tantôt traçantes, fuivant la terre où elles fe trouvent.,
On en a , dit-on, vu qui pénétraient à
foixmte p:eds. Toujours elles font fortement garnies
de chevelu.
Les T ige s de la v i g n e font trop foibles pour fe
foutenir par elles mêmes ; aufii, ou rampent-elles,«
ou s’appuient-elles fur les arbres yoifiss , d’abord
au moyen des V rilles ou Mains qui fortent de
l’extrémité de leurs Bourgeons , enfuice par leur
prapre poids.
Le bois de la v ig n e n’a pas d’aubier. Son écorce,
lorfqu’elle eft vieille, eft brune, s’élève en lanières
& fe renouvelle chaque année. Celle des
Bourgeons, à l’époque de la maturité des fruits,
eft ou fauve foncé , ou fauve clair, ou rougeâtre,
ou' tachée de brun. Ces bourgeons s’appellent
Sarment après la vendange. Ils offrent des nodo-
fités plus ou moins diffames, defquelles fortent,
dans le bas, les grappes, toujours oppofées à une
feuille, & dans l e ‘haut, des vrilles, également
toujours oppofées à une feuille. V o y e \ les mots
précités.
Les farmens ont plus ou moins de moelle , qui
diminue l’ann e fuivante par la cmtraétion de l'aubier.
Ceux qui en ont le moins, & dont le noeuds
font les plus rapprochés, paffent pour donner le
meilleur vin. Les pineaux ont en effet ces caractères.
Les feuilles de la v ig n e font cordiformes, plus
ou moins lobées, ou au moins dentées ; tantôt
elles font planes, tantôt elles font tourmentées
& bullées ; tantôt leur furface inférieure eft lui-
fante , ta*'.tô*elle eft garnie de poils ou de filamens
blancs. L’automne, elles fe colorent diverfement
en rouge ou en jaune.
Les vrilles de la v ig n e fe divifent ordinairement
en deux parties., dont l’une, eft plus courte que
l’ autre. Elles font évidemment des grappes avortées,
car on peut très-facilement leur faire porter
du fruit, en fupprimmt les véritables grappes
avant la floraifon, &: arrêtant, en en caffant l’extrémité
du bourgeon qui les porte, ce qui but
r fluer la Sève en eux. V o y e z ce mot & Pincement.
Les grappes fortent toujours du bourgeon (pouffe
de l’année), & dans lé bas de cette pouffe. Elles
font plus ou moins nombreufes félon les variétés,
l’âge du cep , le terrain , les circonffances atmof-
phériques, & c . Quatre eft le terme moyen le plus
commun.
Non-feulement il faut un bourgeon pour avoir
du raifin, mais encore un bourgeon qui forte d’un
farment, réfultat, comme je viens de le dire:, de
la pouffe de l’ année' précédente. Tous ceux qui
fortent du vieux bois font ftériles. On doit faire
une grande attention à ce fait dans la culture de
la v ig n e .
Les boutons gros & obtus indiquent un bourgeon
porte-grappes , & les aigus un bourgeon
ftérile. .
Les grappes font dites fimples, lorfque tous les
pédicules fortent de leur axe. Quand ceux de ces
pédicules qui font à= la bafe ,.s’alongent & en portent
d’autres ( les g r a v i l l o n s , les é p a u lo n s ) , on les
appelle compofçes. 11 eft de ces grappes qui pèfent
fept à huit livres.
Les fleurs de la v i g n e offrent un calice à cinq
1 dents,
dents, cinq pétales caducs, un ovaire flirmonté
d’un ftyle fimple & obtus.
Son fruit eft une baie ou ronde ou ov ale, ou
rouge ou blanche, ou grife de beaucoup de nuances
, qui doit renfermer cinq femences ou P é p in s ,
mais qui n’en contient le plus fouvent que trois,
les autres avortant. Il en eft même qui n’en contiennent
pas du tout ( \ e s p a jfe r jlle s ) . Ces pépins
font noyés dans un lue tantôt pulpeux, tantôt
vifqueux, tantôt aqueux, qui, avant fa fermentation,
conftitue le Mo û t , & après le V in { v o y e z
ces mots). Une peau plus ou moins coriace, dans,
les interftices de laquelle fe trouve une réfine,
rouge dans les raifins de cette coule ur, &r jaunâtre
dans les autres, ainfi qu’ uné huile effentielle
âcre, entoure le tout. V o y e [ B a i e .
Les bourgeons* les feuilles, les grappes de la vi-
g n e contiennent un Acide très-développé, & qu’ on
reconnoît en les mâchant. Cet acide, introduit dans
le vin, diminue fa bonté , mais concourt à fa con-
ferVati n j aufli n’égi appe-t-on jamais dans les vignobles
du Nord. V o y e ^ Egrappage.
Il n’a pas encore été poifible de fixer la durée
de la vie de la y i g n e , parce que cette durée s’étend
au-delà de plufit.urs générations, à plus de
mille ans peut-être. Strabon cite des pieds^que
deux hommes pouvoient à peine embraffer. En
1793 , il eft mort à Befançon un pied qui avoit
près de deux mènes de tour. J’ai déjà cité des
vignobles qui ont plus de cinq cents ans de plantation.
Les Anciens regardoient le bois de la v i g n e
comme indeftrudtiule, & le préféraient, en con-
féquence, pour faire les ftatués des dieux, pour,
confectionner les portes des temples. Iis lui actri-
buoient aufii des propriétés furnaturel’es. Actuellement
on ne l’emploie plus guère qu’ à brûler.
Dans les pays chauds , la vigne ne demande pref-
qu’aucun foin & donne conftammsnt des produits
abondans. Il n’en eft pas de même dans les pays
froids ; ce n’eft quJà force d’artifices qu’on en
obtient de médiocres, encore font-ils fubor-
donnés à un grand nombre de circonftances indépendantes
de la -volonté de l'homme.^
De cette feule obfervation on peut cOTclure,
confine je l’ai déjà remarqué, que chaque climat
doit adopter un mode particulier de cuiture, &
c’e ffee qui a lieu.
En Italie, on plante les v ig n e s au pied des arbres,
ordinairement les érables, & on les laiffe
monter comme elles veulent. Ce font des V ignes
arbustives , des Hautins ou Hutins. Celles
que j’ai vues, depuis Turin jufqu’ à Venife, écoient
chargées de grappes, mais ces grappes étoient petites,
peu garnies de grains, & ces grains étoient
fans faveur : aufli quel vin boit-on fur cette route !
Celui de Brie, fi redoute aux environs de Paris,
lui étoit peut être préférable. Si on vouloic cultiver
de même les v ig n e s du Nord , leur vin ferait
encore plus mauvais, parce que la maturité des
D i â , d e s A r b r e s 6’ A r b u f i e s .
raifins feroit toujours incomplète, & quelquefois
mè ne ne pourrait s’ tffcCtuer, faute de chaleur. Je
crois qu’en tous lieux elle doit être repouffée,
quoique ce foit celle indiquée par la nature, pour
toute autre chofè que dans le, but d’avoir du fou -
rage pour les beftiaux j encore, dans ce cas, fuis-je
d’avis qu’il vaut mieux faire courir les ceps fur des
h lies peu élevées, que grimper'fur des arbres.
V o y e \ Haie & Ramée.
La culture de la v ig n e en berceaux, qui a lieu
dans quelques localités de la France méridionale ,
même autour de Weiffembourg, fa partie là plus
feptentrionale, doit être rangée dans une catégorie
encore plus dans le cas d’être repouffée que
celle des v ig n e s arbuftives, fi j’en juge par ce qu’on
voit généralement dans nos jardins, ou les grappes
des chaffela^, ainfi tenus, (ont fans beauté &fans
faveur.
J’adjoins à ce mode, celui que j ’ai remarqué
dans quelques parties des départemens du Doubs
& du Jura, où on étend les bourgeons dans l’intervalle
des lignes des ceps.
Cependant les raifins, '(ans les pays très-chauds,
feroient grillés par la réverbération de la terre ,
s’ils étoienc tenus auffi bas que dans les pays
froids.
Mais il eft des modifications à la culture des
v ig n e s arbuftives, qui font connues & ufitées dans
les pays chauds avec moins d’ inconvénïens , &
qu’on pratique dans plufieurs parties de la France,
principalement au pied des Alpes & au pied des
Pyrénées.
La première confifte à planter à 12 à 1 ƒ pieds
de diffance en tout fens, des arbres étëtés à la
moitié de cette mefure, des érables, des mérifiers
& des ormes de préférence ; de faire monter la v i g
n e furies fourches de leur tête & d ’en diriger les
rameaux, en guirlandes , d’ un arbre à l’autre, ce
qui permet à ces guirlandes, qu’on ne lailfe pas
trop fe garnir de branches, de jouir des bénéfices
de la lumière & de la chaleur folaire, & par con-
féquent ce qui favorife la maturité des raifins.
Quand on yeut parfaitement bien opérer, on
plante les ceps dans le milieu de l’intervalle des
arbres, & deux ou trois ans après on les couche
pour les faire for tir de terre à leur pied.
Moins les arbres font élevés, & meilleurs font
les raifins, parce qu’alors ils profitent des émanations
chaudes de la terre, émanations dont j’ai
déjà parlé.
De vieilles fouches, ou des pieds fourchus font
fubftitués aux arbres vivans dans beaucoup de
lieux j & , quoique trèi-coûteux, je les crois préférables,
parce qu’ils ne nuifent à la v ig n e fous
. aucun rapport.
\ Si ce mode de culture, dont Fafpedt eft très-
agréable , étoit fuivi avec foin & intelligence , il
donneroit des produits d’affez bonne qualité &
en abondance ; mais partout je l’ ai vu abandonné
à l ’ignorance & à la pareffe, Sc, par conféqùent,
E e e e e
Ji-iii-lli